Les couplages croisés catalysés par le palladium

a marqué ce sujet comme résolu.

Je suis un mega noob en chimie. Pire, je déteste ça (du moins, celle que j'ai faite à l'école, c'est-à-dire celle que j'ai faite tout court).

Est-ce un bienfait?

Une habitude suisse ? :P Chez nous, on fait précéder le point d'interrogation d'une espace.

Voici quelques exemples:

De même.

La morphine1 est un anti-douleur naturel bien connu, l'α-ionone2 est l'un des composants du parfum naturel de violette et la fluorescéine3

Il serait préférable de mettre les liens directement sur les mots concernés.

émet de la lumière sous ultraviolets

Ca signifie qu'elle en émet quand elle est placée sous des rayons UV ou qu'elle émet des UV ? Je dirais la première, mais j'ai un petit doute quand même.

partie des "classiques"

Je mettrais des guillemets français.

Les réactions catalytiques

une espèce ajoutée dans le milieu réactionnel destiné

e

deux grandes familles:

Espace.

La catalyse hétérogène

le catalyseur est un solide et que les réactifs sont des gaz

Une note fournissant un exemple serait appréciée.

catalyseur solide est mis en suspension dans une solution contenant les réactifs

De même.

Quand tu dis "en suspension", c'est vraiment en suspension ou c'est un terme technique pour dire "solide dans liquide" ?

moins nocif que le CO:

Espace.

il ne s'agit pas d'un couplage croisé!

Idem.

Le palladium possède en effet de nombreux types de réactivité.

Je ne comprends pas cette phrase. Mais je n'ai pas de connaissances poussées en chimie non plus.

La catalyse homogène

cours de chimie organique:

Espace.

elle est accélérée:

Idem.

Les couplages croisés

Une réaction de couplage croisé permet de former une liaison entre deux fragments de molécules grâce à la présence d'un catalyseur métallique.

Un exemple simple d'utilisation serait le bienvenu.

sortes de liaisons:

Idem.

à avoir été développées:

Plutôt un point.

Les ingrédients

traditionnel sont:

Espace.

Voici quelques combinaisons possibles:

Idem.

Le cycle catalytique

à quelques détails près:

Espace.

addition oxydante, transmétallation et élimination réductrice

Une liste serait plus claire.

constituent un cycle:

Espace.

la dernière étape régénère

Répétition : la dernière régénère

palladium Pd(PPh3)4:

Espace.

1) La première étape

Si tu mets un point après le chiffre, ça crée une liste. A voir si ça ne rendrait pas mieux.

l'addition oxydante (A):

est la transmétallation (B):

est l'élimination réductrice (C):

Espaces.

Ainsi, pour 1 mole de réactifs, il n'est pas nécessaire de charger 1 mole

une mole

de catalyseur:

Espace.

c'est-à-dire que chaque molécule de catalyseur fait 100'000 cycles

Pas trop compris cela.

au cours de la réaction!

Espace.

ou sur internet, vous

Internet : vous

La course à la performance


Je m'arrête là pour aujourd'hui. Probablement tout court en fait : je crains de ne pas avoir le niveau requis pour comprendre la suite. Je verrai ce qu'il est.

Merci !

+0 -0

Je suis un mega noob en chimie.

Vayel

Pas grave, c'est très bénéfique d'avoir des commentaires de la part d'un lectorat diversifié.

Concernant la typographie, la prochaine fois tu peux juste le rappeler sans tout relever en détail, ça noierait moins le topic. ;)

Merci pour tes remarques, je vais les prendre en considération et encore laisser l'article en bêta publique quelques jours si d'autres personnes ont des choses à dire.

J'ai retouché le tuto (typographie, couleurs des molécules consistantes entre les deux cycles catalytiques de l'article, etc.).

Pour répondre à Vayel:

Ca signifie qu'elle en émet quand elle est placée sous des rayons UV ou qu'elle émet des UV ? Je dirais la première, mais j'ai un petit doute quand même.

Exact, elle émet de la lumière lorsqu'on la met sous UVs.

le catalyseur est un solide et que les réactifs sont des gaz

Une note fournissant un exemple serait appréciée.

C'est justement le pot catalytique. ;)

Quand tu dis "en suspension", c'est vraiment en suspension ou c'est un terme technique pour dire "solide dans liquide" ?

C'est un terme technique qui veut dire "solide non-dissout dans un liquide" (ça flotte ou c'est dispersé dedans lorsqu'on agite). Mais je pense que le terme est en général connu par les débutants (solution vs. suspension).

Le palladium possède en effet de nombreux types de réactivité.

Je ne comprends pas cette phrase. Mais je n'ai pas de connaissances poussées en chimie non plus.

Justement il peut faire de l'hydrogénation, des couplages croisés, etc. Je pense que la phrase devrait passer.

c'est-à-dire que chaque molécule de catalyseur fait 100'000 cycles

Pas trop compris cela.

Oui je vais voir si je peux y remédier, c'est conceptuellement très important donc vaut mieux que ce soit bien compris!

Pour la question de "1" ou "une", je vais laisser les chiffres car ce n'est pas la tradition d'écrire les chiffres en toutes lettres dans les articles scientifiques lorsque l'on parle de quantités, ça rendrait le tout difficilement lisible (en tous cas en chimie).

Je ne vais probablement pas me reconnecter à ZdS avant mercredi prochain. ;) En attendant voici où j'en suis:

La synthèse artificielle de molécules a pris un rôle important dans notre société au cours du XXème siècle. Est-ce un bienfait ? On peut en discuter sur le forum. Quoi qu'il en soit, la plupart de ces médicaments, parfums ou colorants sont des composés organiques, c'est-à-dire des molécules constituées principalement d'atomes de carbone reliés entre eux. Voici quelques exemples :

Morphine | $\alpha$-Ionone | Fluorescéine

La morphine1 est un anti-douleur naturel bien connu, l'$\alpha$-ionone2 est l'un des composants du parfum naturel de violette et la fluorescéine3 est une molécule artificielle qui émet de la lumière sous ultraviolets. Comme nous pouvons le constater, la structure de ces molécules repose bel et bien sur un squelette d'atomes de carbone. Le développement de nouvelles méthodes capables de former ces liaisons C-C est donc au cœur de la recherche en chimie organique. L'objectif de cet article est de donner un premier aperçu des couplages croisés catalysés par le palladium. Ces réactions apparues dans les années 1970 font désormais partie des « classiques » dans la formation de liaisons C-C et ont servi de base à tout un pan de la chimie moderne.

Les réactions catalytiques

Les couplages croisés catalysés au palladium sont des réactions dites catalytiques car elles fonctionnent grâce à un catalyseur. Un catalyseur est une espèce ajoutée dans le milieu réactionnel destiné à accélérer ou rendre possible une réaction chimique sans être consommé ni intégré au(x) produit(s). Parfois, le catalyseur peut même être récupéré à la fin de la réaction et réutilisé. Les réactions catalytiques sont classées en deux grandes familles: la catalyse hétérogène et la catalyse homogène.

La catalyse hétérogène

Dans ce type de catalyse, le catalyseur et le(s) réactif(s) ne sont pas dans la même phase (liquide, gaz, etc.). C'est par exemple le cas lorsque le catalyseur est un solide et que les réactifs sont des gaz, ou lorsqu'un catalyseur solide est mis en suspension dans une solution contenant les réactifs.

Un bon exemple de la vie de tous les jours est le pot catalytique4 qui équipe les voitures modernes. Il s'agit d'un filtre constitué d'un alliage métallique à travers lequel les gaz d'échappement passent. Au contact de l'alliage, plusieurs réactions chimiques sont accélérées, dont la réaction ci-dessous. L'objectif du pot catalytique est de convertir un maximum de CO en CO2 car le CO2 est moins nocif que le CO :

$2CO+O_2\rightarrow 2CO_2$

Pot catalytique

Un autre exemple est l'hydrogénation d'alcènes avec du palladium sur charbon Pd/C. Ce mélange de palladium et de graphite est une poudre noire plus ou moins fine que l'on met en suspension dans une solution contenant l'alcène à hydrogéner. Une pression d'hydrogène gazeux H2 est ensuite appliquée pour effectuer la réaction. Bien que cette méthode utilise du palladium, il ne s'agit pas d'un couplage croisé ! Le palladium possède en effet de nombreux types de réactivité.

Hydrogénation avec Pd/C

La catalyse homogène

L'autre grande famille est la catalyse homogène, où le catalyseur et les réactifs sont dans la même phase. La plupart du temps, ils sont tous les deux dissous en solution.

Les couplages croisés catalysés par le palladium font partie de cette famille, comme nous le verrons dans la suite de cet article. Mais prenons déjà un autre exemple plus simple enseigné dès les premiers cours de chimie organique : l'estérification. Cette réaction bien connue est le mélange d'un acide carboxylique avec un alcool. La réaction peut fonctionner sans catalyseur, mais lorsqu'on ajoute un peu d'acide dans le milieu (H2SO4, HCl, etc.), elle est accélérée :

Estérification en milieu acide

Les couplages croisés

Passons au vif du sujet. Une réaction de couplage croisé permet de former une liaison entre deux fragments de molécules grâce à la présence d'un catalyseur métallique. Ces deux fragments ne réagiraient pas en l'absence du catalyseur. Si ces deux morceaux sont identiques on parle d'homocouplage, et s'ils sont différents de couplage croisé. À l'heure actuelle, il est possible de former toutes sortes de liaisons : C(sp2)-C(sp2), C(sp2)-N, C(sp)-(sp2), C(sp3)-C(sp3), etc. Cet article se focalisera au début sur les liaisons C(sp2)-C(sp2) puisque historiquement ce sont les premières à avoir été développées :

Liaisons C(sp2)-C(sp2)

Avant les années 1970, très peu de méthodes efficaces existaient pour former de telles liaisons directement. Puis sont arrivés les travaux de Kumada et Corriu5. Dès lors, l'intérêt pour les couplages croisés n'a cessé de grandir et des centaines d'articles scientifiques sont publiés chaque année sur le sujet, repoussant toujours les limites de ces réactions passionnantes.

Les ingrédients

Les trois ingrédients de base dans un couplage croisé traditionnel sont :

  1. un réactif halogéné (R-X)
  2. un réactif organométallique (R'-M)
  3. un catalyseur au palladium (LnPd)

L'objectif d'un couplage croisé est de coupler un réactif halogéné avec un réactif organométallique. Voici quelques combinaisons possibles :

Ingrédients pour un couplage croisé

Les couplages croisés ont été développés pour une grande variété de réactifs organométalliques différents. À l'origine, Kumada a exploité les réactifs de Grignard (M = MgX). Ceux-ci sont simples à préparer mais ne tolèrent pas la présence de carbonyles à cause de leur réactivité bien connue avec ces derniers.6 Negishi7 a obtenu de meilleurs rendements pour les produits biaryles avec le zinc (M = ZnX2). Stille8 et Hiyama9 ont quant à eux développé de nouveaux réactifs basés sur l'étain (M = SnR3) et le silicium (M = SiR3). Finalement, l'un des meilleurs couplages est le fameux couplage de Suzuki10 qui utilise des acides boroniques ou des dérivés (M = B(OH)2, M = B(OR)2, etc.).

Le cycle catalytique

Les réactions citées ci-dessus suivent toutes la même séquence d'étapes élémentaires suivantes à quelques détails près: addition oxydante, transmétallation et élimination réductrice. Ces étapes constituent un cycle : la dernière étape régénère le système, lui permettant ainsi de répéter la séquence tant qu'il y a des réactifs à consommer. Voyons tout ceci en détail en étudiant le cycle catalytique général pour tout couplage croisé ainsi qu'un exemple particulier de couplage de Kumada catalysé par le complexe de palladium Pd(PPh3)4 :

Cycle catalytique général | Exemple de couplage de Kumada

  1. La première étape est l'addition oxydante (A) : le composé halogéné s'additionne sur le palladium et fait passer son état d'oxydation de 0 à II. D'un point de vue mécanistique, on peut dire que Pd0 s'insère dans la liaison C-X du composé halogéné. Remarquons que dans notre exemple de couplage de Kumada, deux ligands PPh3 doivent préalablement se dissocier du complexe Pd0(PPh3)4 pour générer le catalyseur actif Pd0(PPh3)2.

  2. La deuxième étape est la transmétallation (B) : le groupe R' du composé organométallique R'M est transféré d'un métal à l'autre (de Mg à Pd dans le cycle de Kumada) et prend la place de l'halogène sur le palladium. L'halogène qui se trouvait sur le palladium est quant à lui éliminé avec le métal du réactif organométallique.

  3. La dernière étape est l'élimination réductrice (C) : les deux groupes R et R' sont éliminés pour former le produit de la réaction tout en régénérant le catalyseur. L'élimination est dite réductrice car le palladium passe de II à 0.

Conformément à la définition d'une réaction catalytique, le catalyseur est régénéré à la fin de la réaction. Ainsi, pour 1 mole de réactifs, il n'est pas nécessaire de charger 1 mole de catalyseur: 0.1 mole ou moins peuvent suffire. Certaines réactions industrielles tournent même avec 0.00001 mole de catalyseur par mole de réactifs, c'est-à-dire que chaque molécule de catalyseur fait 100'000 cycles au cours de la réaction !

Ces trois étapes constituent la base de toutes les réactions de couplages croisés mais de petites variations peuvent exister. La réaction de Suzuki requiert par exemple une base tandis que la réaction de Hiyama nécessite une source de fluorure. Je vous encourage à jeter un coup d'œil à ces autres cycles catalytiques dans un livre ou sur internet, vous verrez que le principe est toujours le même.

La course à la performance

Au cours de ces 40 dernières années, beaucoup de recherches ont été menées pour mieux comprendre chaque étape et ainsi optimiser la réaction. Premièrement, l'efficacité de l'addition oxydante dépend de l'halogène : l'insertion du palladium 0 dans une liaison C-I est beaucoup plus facile que dans une liaison C-Cl, tout simplement car l'énergie de liaison est plus faible. Quant aux liaisons C-F, elles ne peuvent normalement pas subir d'addition oxydante.

Liaison Énergie de liaison
C-I 238 kJ/mol
C-Br 285 kJ/mol
C-Cl 330 kJ/mol
C-F 485 kJ/mol

Comme alternative aux halogènes, il est possible d'utiliser les triflates C-OTf. Ceux-ci sont assez facile à préparer et sont très réactifs (ils se situent entre les C-I et les C-Br). Plusieurs réactions permettent de les faire, en voici juste un exemple :

Préparation d'un triflate

Le choix de l'halogène est important, mais l'axe d'optimisation le plus important est sans aucun doute la modification des ligands du catalyseur. Au-delà de la simple triphénylphosphine PPh3 que nous avons vue, des centaines d'autres phosphines sont désormais dans le commerce : liste de phosphines. Impressionnant n'est-ce pas ?

Plusieurs tendances ont été constatées. Premièrement plus les phosphines sont riches en électrons plus l'addition oxydante se fait facilement (ex : PtBu3). C'est logique : le palladium est mieux armé (plus nucléophile) pour s'insérer dans la liaison C-X. Pour accélérer l'élimination réductrice, les « gros » ligands (encombrés stériquement) sont meilleurs. L'encombrement favorise l'élimination du produit pour que les ligands se sentent à nouveau plus libres autour du palladium. Il existe ensuite les ligands bidentés (plus stables, ex: dppf), les ligands chiraux (pour les réactions énantiosélectives, ex : (S)-iPr-PHOX), etc. etc. Parmi les ligands couramment utilisés on rencontre le XPhos car il cumule plusieurs de propriétés mentionnées ci-dessus.

Ligands courants

Comment s'y retrouver parmi tous ces ligands ? En général, lorsqu'on veut faire un « simple » couplage, on commence par tenter la réaction avec un catalyseur classique tel que le Pd(PPh3)4 ou le Pd(dppf)Cl2. Si ça ne fonctionne pas, on cherche alors quelque chose de plus sophistiqué en fonction de ce qu'on a obtenu comme produits/sous-produits.

De la théorie à la pratique

Avant de continuer, passons à un chapitre un peu plus récréatif : des applications réelles de la réaction de Suzuki. La première provient de mon cursus tandis que la seconde a été publiée par une entreprise pharmaceutique dans le cadre du développement d'un médicament potentiel contre certaines maladies pulmonaires.

Expérience personnelle

Voici un couplage de Suzuki effectué pour préparer le nitrobenzène substitué 3, un composé dont j'avais besoin. Il existe certainement d'autres conditions réactionnelles ou méthodes pour synthétiser cette molécule, mais la réaction employée dans le cas présent s'est avérée efficace et a fourni le produit avec un bon rendement de 91% :

Couplage de Suzuki

Quels sont les points particuliers à prendre en compte pour concevoir le montage ? Il y en a principalement deux :

  • La température à atteindre est de 100°C. Le point d'ébullition du dioxane étant de 101°C, il faut utiliser un réfrigérant et effectuer la réaction à reflux pour éviter que le solvant ne s'évapore.
  • La réaction est sensible à l'oxygène O2 car celui-ci peut potentiellement oxyder le catalyseur actif Pd0 en PdII et le désactiver. Il faut ainsi effectuer la réaction sous atmosphère inerte.

Montage sous atmosphère inerte | catalyseur Pd(dppf)Cl2

Une fois la verrerie assemblée, il ne reste plus qu'à lancer la réaction. Le catalyseur, l'ester boronique, le dioxane, la solution aqueuse de NaOH 3 M puis le triflate sont chargés dans le ballon. Le tout est mis sous atmosphère inerte d'azote et chauffé à 100°C pendant une nuit. Après extraction, concentration et purification par chromatographie sur colonne, le produit final est obtenu avec 91% de rendement.

Comme vous pouvez le constater, il n'y a rien d'insurmontable. Ce couplage a bien fonctionné dès le premier essai, mais ce n'est pas toujours le cas : il faut parfois varier plusieurs paramètres avant de rencontrer le succès. Tout est question d'expérience (et de chance ! ).

Application industrielle

Ces réactions ne sont pas uniquement utiles en milieu académique sur quelques dizaines de milligrammes, elles sont également largement exploitées dans l'industrie de la chimie fine. En 2011, un article qui recense des dizaines d'exemples de couplages croisés utilisés à grande échelle a été publié dans la revue Chemical Reviews.12 Comme promis, en voici un qui a servi pour obtenir un candidat potentiel contre certaines maladies pulmonaires :13

Couplage de Suzuki

La réaction a fourni 60 g de produit avec un très bon rendement de 88%. Il est intéressant de noter que le couplage s'est produit entre B(OH)2 et Cl (couplage croisé) et non entre B(OH)2 et F (homocouplage non souhaité), ce qui démontre en partie que l'addition oxydante se fait préférentiellement avec les halogénures dont l'énergie de liaison C-X est la plus faible !

Quelques réactions dérivées

En parallèle aux réactions que nous avons vues jusqu'ici, qui permettaient essentiellement de former des liaisons C(sp2)-C(sp2), d'autres réactions similaires ont été développées.

Historiquement la réaction de Heck a été l'une des premières réactions de couplage croisé. Elle forme également une liaison C(sp2)-C(sp2), mais en se passant du réactif organométallique. Elle permet le couplage d'un réactif halogéné avec une double liaison. Elle est donc extrêmement utile en synthèse totale puisqu'on peut alors facilement attacher des fragments sur toute molécule possédant une double liaison. Le cycle catalytique est quelque peu différent, je vous laisse le consulter vous-même :14

Couplage de Heck

Passons à un autre type de liaison: C(sp2)-C(sp). Il s'agit du couplage de Sonogashira qui permet d'attacher un alcyne terminal sur un carbone hybridé sp2. Dans cette réaction, un co-catalyseur de cuivre est utilisé pour former du réactif organométallique cuivré in situ à partir de l'alcyne terminal au fur et à mesure de l'avancement de la réaction :15

Couplage de Sonogashira

Finalement, une réaction synthétiquement intéressante est celle de Hartwig-Buchwald puisqu'elle forme une liaison C-N.16 En général les ligands bidentés ou encombrés stériquement sont à privilégier pour éviter la formation de sous-produits non-désirés. Cette méthode surclasse la simple substitution aromatique nucléophile sans catalyseur. Cette dernière ne fonctionne en effet qu'avec des halogénures d'aryles très pauvres en électrons et est très limitée.

Couplage de Hartwig-Buchwald

Les activations C-H

Les activations C-H sont des réactions très récentes et prometteuses. Un réactif possédant une simple liaison C-H peut y être utilisé à la place du réactif halogéné ! On utilise le terme activation car la liaison C-H en question est considérée comme intrinsèquement non-réactive et doit être activée. C'est par exemple le cas des liaisons C-H du benzène ou du pentane. En revanche, une liaison C-H en position $\alpha$ d'une cétone est considérée comme réactive puisqu'on peut facilement la casser par déprotonation et n'entre donc pas en considération dans ce chapitre.

Pour comprendre ce que signifie activation, rappelons ce qu'est une réaction bimoléculaire en solution : ce sont deux réactifs qui nagent dans un solvant et entrent en collision aléatoirement. Toutes ces collisions n'aboutissent pas forcément à une réaction, il faut que la collision soit efficace : avec suffisamment d'énergie et selon la bonne orientation des molécules. Or, entre un catalyseur au palladium et une liaison C-H d'un benzène, il faudra peut-être des milliards de collisions avant que le palladium ne s'insère dans la liaison car celle-ci est trop résistante. En d'autres termes, la réaction ne fonctionnera pas.

Dans une réaction d'activation C-H, puisque les collisions entre le catalyseur et la liaison C-H ne sont pas assez souvent efficaces, la stratégie consiste à diriger le palladium proche de la liaison C-H et le forcer à réagir avec. Pour ce faire, il faut que le réactif portant la liaison C-H porte aussi un groupe directeur à proximité pour « ancrer » le palladium tout près de la liaison à attaquer. Ainsi, il tentera sans relâche de la rompre, jusqu'à réussir.

Il existe une multitude de réactions de ce type: arylations, alkylations, oléfinations, etc. Leurs mécanismes pouvant fortement différer, ne considérez donc pas l'exemple choisi ici comme une généralité ! Intéressons-nous à l'arylation C-H en position ortho. Plusieurs groupes fonctionnels peuvent servir de groupes directeurs. Parmi les plus simples on trouve les amides, les acides carboxyliques ou les 2-pyridyles :

Activations C-H avec groupes directeurs

Voici le cycle catalytique proposé pour cette réaction :17

Cycle catalytique de l'arylation C-H en ortho

L'une des différences avec le cycle étudié auparavant est l'état d'oxydation du palladium, qui varie entre II et IV au lieu de 0 et II. Il y aurait énormément de choses à expliquer concernant les états d'oxydation du palladium dans les couplages croisés, mais laissons de côté ceci car ce n'est pas l'objectif de l'article et concentrons-nous plutôt sur le rôle du groupe directeur. Grâce à celui-ci, le catalyseur PdII(OAc)2 peut activer et rompre l'une des liaisons C-H en position ortho du groupe directeur (A). Ensuite, une addition oxydante (B) suivie d'une élimination réductrice délivre le produit (C). Finalement, pour régénérer le catalyseur, de l'acétate d'argent est utilisé (D): les ions Ag+ ayant une forte affinité avec les halogénures, ils arrachent facilement ces derniers du palladium.

Ces activations C-H sont donc très attractives lorsque le produit que l'on souhaite synthétiser porte déjà un groupe utilisable comme groupe directeur car celui-ci permet l'économie d'une liaison C-X. Et ceci n'est que le début de l'ère des activations C-H ! Pour vous en convaincre, vous pouvez jeter un coup d'œil aux publications du groupe de recherche de Jin-Quan Yu : activations CH en position meta, activations de liaisons C(sp3)-H, réactions énantiosélectives, etc. !

Le Prix Nobel de chimie 2010

Le développement de toute cette chimie méritait bien un petit Prix Nobel. Ce fût chose faite en 2010 lorsque la récompense fût attribuée conjointement à Richard F. Heck, Ei-ichi Negishi et Akira Suzuki, soit trois grands chimistes parmi les pionniers du domaine :18

Copyright © The Nobel Foundation

« pour les couplages croisés catalysés par le palladium en synthèse organique »

Conclusion

Apparus dans les années 1970, les couplages croisés catalysés par le palladium sont devenus des réactions centrales en chimie organique et sont désormais massivement utilisés tant en milieu académique qu'en industrie. À l'heure actuelle, des milliers de groupes de recherche à travers le monde travaillent sur ce sujet.

Vous l'aurez compris, cet article n'est qu'une modeste introduction à tout ce pan de la chimie et avait pour objectif de présenter les concepts de base puis de donner envie d'en apprendre plus. De nombreux thèmes n'ont donc pas pu être abordés. La principale omission est certainement que le palladium n'est plus l'unique métal de transition exploitable : des couplages croisés avec du nickel, du rhodium, du ruthénium ou même du fer ou du cobalt ont été développés entre-temps. Ces deux derniers sont particulièrement intéressants en terme de coût puisque ce sont des métaux bon marché.

Bref, il y aurait encore beaucoup à dire, mais arrêtons-nous là ! N'hésitez pas à commenter et à venir poser toutes vos questions sur le forum Sciences.

J'espère que cet article vous a plu !

Merci pour la lecture. :)

Ce sujet est verrouillé.