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À la découverte des cousines de Rosetta

Les sondes d'exploration spatiales à la conquête des comètes

La mission européenne Rosetta (et sa petite soeur Philae) d’exploration de la comète 67P/Tchourioumov-Guérassimenko n’est que la suite de plusieurs missions d’études de comètes. Mais qu’est-ce qu’une comète ? D’où viennent-elles ? De quoi sont-elles composées ? Dans cet article, nous partons à la découverte des cousines de la mission Rosetta ! :D

Les comètes

Généralités

Les comètes sont des agrégats de glaces et de poussières qui se sont formés à partir de matériaux primordiaux. Elles passent la majeure partie de leur vie à la dérive dans les confins du système solaire. La plupart sont beaucoup trop petites et lointaines pour être vues, ce qui complique la détermination de leur nombre. On estime néanmoins qu’il existe des milliards de comètes dans le système solaire (allant jusqu’à un trillion selon certaines estimations) vivant aux bords de celui-ci et qui formeraient l’énorme nuage d’Oort (aussi appelé le nuage d’Öpik-Oort). Mais elles proviennent aussi d’un autre réservoir, plus proche de nous, la ceinture de Kuiper (également appelée ceinture d’Edgeworth-Kuiper).

Cette image est une vision d'artiste des jets de la comète 81P/Wild (NASA/ JPL)
Cette image est une vision d’artiste des jets de la comète 81P/Wild (NASA/ JPL).

Au fur et à mesure que la comète se rapproche de notre Soleil, la lumière de celui-ci chauffe sa surface, ce qui vaporise les glaces qui emportent les particules de poussière avec elles. La comète devient ainsi « active ». Les gaz et la poussière chassés du noyau de la comète forment un nuage atmosphérique presque sphérique autour du noyau appelé la coma (ou encore la chevelure). Le noyau et la partie intérieure de la chevelure sont parfois désignés collectivement comme formant la tête de la comète. Enfin, de longs serpentins de poussières, et de gaz ionisés forment ce que l’on appelle les queues (les comètes actives en ont deux de types différents, nous y reviendrons plus en détail), elles forment par ailleurs la plus longue partie de la comète.

La comète est alors assez grande et assez lumineuse pour être vue depuis la Terre, même en pleine journée.

Nomenclature des comètes

Par tradition, les comètes sont nommées d’après leur(s) découvreur(s). Par souci de précision, il était nécessaire d’immatriculer les comètes. Ainsi, depuis 1995, l’Union astronomique internationale a codifié la nomenclature des comètes. Premièrement, précédant les noms des comètes, un identifiant permet de définir le type de comète (voir ci-dessous).

  • Les noms des comètes à longue période sont précédés par C/ (par exemple, la comète C/Kohoutek).
  • Les noms des comètes à courte période sont précédés par un P/ (par exemple, P/Halley). Si l’on a observé plus d’un retour, on ajoute un nombre séquentiel devant le préfixe P/ (par exemple, 19P/Borrelly).
  • Les comètes qui sont entrées en collision avec le Soleil ou une planète ou simplement désintégrées sont précédés par D/.
  • On indique X/ pour les comètes pour lesquelles une orbite n’a pu être déterminée (ce qui est assez rare, au point qu’aucun exemple ne nous vient à l’esprit :D ).
  • Lorsqu’une comète se divise, à chaque fragment est donnée la désignation et le nom de la comète mère suivie par une lettre majuscule, en commençant par la lettre A pour le fragment qui passe en premier le périhélie1, par exemple, 73P/Schwassmann-Wachmann 3A.
  • Si un fragment se divise encore, les pièces reçoivent des indices numériques, par exemple, les composants Q1 et Q2 de la comète D/Shoemaker-Levy 9.

Il s’en suit une désignation séquentielle suivant l’ordre des découvertes : l’année, puis d’une lettre majuscule correspondant à la quinzaine du mois en cours (par exemple, la lettre A correspond à la première quinzaine de janvier, la lettre B à la deuxième quinzaine de janvier, etc.) suivi d’un nombre indiquant l’ordre de la découverte dans ce demi-mois. Enfin, le nom du (ou de deux au plus) découvreur est ajouté (mais c’est optionnel) pour respecter la tradition. Pour reprendre un exemple cité précédemment : la désignation officielle de la comète Kohoutek est C/1973 E1 (Kohoutek).

Exception à la règle (toujours… sinon ce serait trop simple :P ), pour les comètes à courte période, on ne garde que le nom du découvreur de la première apparition (un nombre séquentiel peut suivre le nom du découvreur si ce dernier a trouvé plusieurs comètes à courte période).

D’où viennent les comètes ?

Habituellement, les orbites des comètes sont classées comme ayant soit une période orbitale2 de courte durée, soit de longue durée. La distinction entre ces deux classifications se fait grâce à une « ligne de démarcation » d’une période orbitale de 200 ans. La plupart des nouvelles comètes découvertes sont des comètes ayant une périodicité longue, avec des périodes orbitales de plus de 200 ans. Elles arrivent près du Soleil à partir des régions aux confins du système solaire, leurs trajectoires sont si allongées qu’elles les ramènent aux régions éloignées d’où elles proviennent.

Toutefois, les astronomes ont subdivisé la désignation des comètes à périodicité courte en deux « familles ». Il y a la famille de Jupiter où sont classées les comètes ayant des périodes orbitales de moins de 20 ans, et les comètes de type Halley qui ont des périodes orbitales qui varient entre 20 et 200 ans.

Comme énoncé précédemment, les comètes proviennent de deux réservoirs, l’un dont l’existence est établie, il s’agit de la ceinture de Kuiper qui est une zone du système solaire s’étendant au-delà de l’orbite de Neptune, entre 30 et 55 UA3. L’autre, bien plus lointaine et à ce jour au stade hypothétique, le nuage d’Oort.

Des milliards de comètes hiberneraient dans le nuage d'Oort (gauche), montré ici en coupe transversale. La ceinture de Kuiper (à droite) est un réservoir situé juste au-delà de l'orbite de Neptune et près du plan de l'orbite des planètes. On estime qu'elle contient de 100 millions à 10 milliards (si ce n'est plus) de comètes. Beaucoup de comètes à période courte entrent dans le système solaire intérieur en provenance de la ceinture de Kuiper (NASA's Cosmos)
Des milliards de comètes hiberneraient dans le nuage d’Oort (gauche), montré ici en coupe transversale. La ceinture de Kuiper (à droite) est un réservoir situé juste au-delà de l’orbite de Neptune et près du plan de l’orbite des planètes. On estime qu’elle contient de 100 millions à 10 milliards (si ce n’est plus) de comètes. Beaucoup de comètes à période courte entrent dans le système solaire intérieur en provenance de la ceinture de Kuiper (NASA’s Cosmos).

Mais pourquoi émettre une hypothèse sur l’existence d’une zone éloignée du système solaire où se trouveraient des milliards de comètes s’il existe un réservoir plus proche de nous ?

La longueur et l’orientation des trajectoires des comètes à longue période ne peuvent s’expliquer que si elles proviennent d’une lointaine zone appartenant aux frontières du système solaire. Ce vaste réservoir de comètes fut nommé « le nuage d’Oort » , du nom de l’astronome néerlandais Jan H. Oort (1900–1992) qui reprit l’hypothèse de l’astronome estonien Ernst Öpik et postula son existence en 1950. Oort examina scrupuleusement les trajectoires des comètes de longue période observées, devenues visibles à leur entrée dans les régions intérieures du système solaire, et constata que celles-ci ne pouvaient s’expliquer que si ces comètes provenaient d’un réservoir éloigné, qu’il situa entre 50 000 et 150 000 UA.

Il avait noté que les comètes à longue période entraient dans le système solaire sans que leurs orbites ne se limitent sur le plan de l’écliptique. Pendant quelque temps après la publication de l’hypothèse d’Oort, la théorie la plus couramment admise était que les comètes à courte période étaient d’anciennes comètes à longue période dont la trajectoire avait été modifiée par l’action des planètes qu’elles rencontraient en chemin.

Toutefois, un autre problème apparut : si les comètes à longue période entrent dans le système solaire avec des inclinaisons aléatoires dans l’espace, les comètes à courte période, quant à elles, ont presque toutes une trajectoire dans le plan de l’écliptique. Cette distinction indique qu’elles viennent de « centres de population » différents.

En 1972, Paul Joss, un professeur de physique théorique à l’Institut de Technologie du Massachusetts, calcula qu’une masse de la taille de Jupiter serait nécessaire afin d’attirer les comètes depuis le nuage d’Oort vers les régions intérieures du système solaire, mais que la probabilité que Jupiter puisse capturer ces comètes pour en modifier l’orbite était extrêmement faible.

En 1980, dans son article « On the existence of a comet belt beyond Neptune », Julio Ángel Fernández appuya aussi l’idée que les comètes périodiques ne pouvaient venir du nuage d’Oort car elles arrivaient bien trop souvent dans le système solaire interne, et que seule l’existence d’une ceinture de plusieurs millions de comètes au-delà de Neptune pouvait expliquer de telles trajectoires.

Ces deux théories seront appuyées par les simulations de Martin Duncan, Tom Quinn et Scott Tremaine en 1988.

Ce qui confirme donc la théorie de Kuiper (et de Kenneth Edgeworth avant lui avec son article « The Evolution of Our Planetary System » publié en 1943 dans le journal de la British Astronomical Association), qui postulait que les comètes à courte période provenaient d’un anneau situé dans le système solaire externe, à savoir la ceinture d’Edgeworth-Kuiper ! :D

Contrairement aux comètes à période longue, les planètes géantes peuvent engendrer des perturbations gravitationnelles susceptibles de modifier l’orbite d’une comète à courte période et d’en changer la trajectoire.

Anatomie d’une comète

Schéma d'une comète : noyau, coma, les deux queues et le nuage d'hydrogène (Personnel - Arius)
Schéma d’une comète : noyau, coma, les deux queues et le nuage d’hydrogène (Personnel - Arius)

Comme dit précédemment, les comètes se situent dans les régions les plus éloignées du Soleil, au-delà de Neptune. Elles sont dites « inertes ». Ce n’est que lors de leur passage périodique dans les régions intérieures du système solaire (et du Soleil, plus précisément) que les comètes deviennent actives. En effet, lorsqu’une comète arrive dans le système solaire interne, la glace à la surface de son noyau s’échauffe sous l’effet du rayonnement solaire et se vaporise, entraînant avec elle les particules de poussières.

Du fait de leur taille et de leur richesse en composés volatils, les noyaux des comètes ne doivent pas avoir subi d’évolutions thermiques importantes. De fait, les comètes sont donc considérées comme faisant partie des objets observés les plus primordiaux dans notre système solaire, d’où l’intérêt d’une étude minutieuse. Toutefois, les couches externes d’une comète ont peut-être subi une transformation importante pendant leur séjour dans la ceinture de Kuiper ou le nuage d’Oort.

L’exposition à l’environnement spatial (aux rayons cosmiques, etc.) pendant plusieurs milliards d’années a fortement assombri la surface des comètes, ce qui explique que leur albédo (la proportion de lumière réfléchie par le corps) est très faible. Cette couche externe est dénommée le manteau irradié.

Notez que le noyau est plutôt fragile. En raison de l’attraction du Soleil (ou d’un corps ayant une masse importante, comme Jupiter), le noyau peut se briser en plusieurs parties.

Autour du noyau se forme alors une enveloppe diffuse de gaz et de poussières, vous le savez maintenant, c’est la chevelure dont la taille peut atteindre jusqu’à 100 000 kilomètres et qui continue à grandir à l’approche du Soleil (au fur et à mesure du réchauffement de la surface du noyau). Cette enveloppe est composée principalement d’eau, de monoxyde de carbone (CO), dioxyde de carbone (CO2), de méthane (CH4), de méthanol (CH3OH), et d’autres gaz volatils. La mission Rosetta a également permis de trouver de faibles quantités de formaldéhyde (CH2O), de sulfure d’hydrogène (H2S), du cyanure d’hydrogène (HCN), du dioxyde de soufre (SO2) et du disulfure de carbone (CS2).

En fonction de la taille apparente de la chevelure et la queue, une comète peut être très lumineuse (du fait de la fluorescence de ses gaz et de la réflexion de la lumière solaire par ses poussières) et devient ainsi facilement visible à l’œil nu.

Plus la comète se rapproche du Soleil, plus le vent solaire et la pression de radiation de notre étoile étirent la chevelure jusqu’à atteindre 105 kilomètres de diamètre ! C’est ce procédé qui donne naissance à la queue de la comète.

Pour rappel, il y a généralement deux queues (dont l’une est courbée) qui apparaissent dans la direction opposée au Soleil. La première queue est de couleur jaunâtre. Elle est formée de particules de poussières qui sont « poussées » par la pression de radiation des photons solaires qui, associée au mouvement de la comète, courbe la queue. C’est également la partie qui est visible à l’œil nu pour les comètes les plus spectaculaires.

La seconde est la queue ionique issus de la photochimie dans la coma. À l’approche du Soleil, les gaz neutres sont excités par les photons UV et perdent leurs électrons, c’est le phénomène de fluorescence. Le gaz ainsi ionisé devient sensible au vent solaire. Elle tend habituellement vers le bleu et est de forme rectiligne.

Enfin, autour de cette queue se trouve le nuage d’hydrogène, une énorme enveloppe très ténue d’atomes d’hydrogène pouvant atteindre 107 kilomètres de diamètre et qui provient de réactions chimiques entre photons solaires et molécules d’eau échappées du noyau.


  1. Point de la trajectoire le plus proche du Soleil. Le point de la trajectoire le plus éloigné du Soleil se nomme aphélie.

  2. Soit la durée mise par un astre pour accomplir une révolution complète autour d’un autre astre (par exemple une planète autour du Soleil ou un satellite autour d’une planète).

  3. Une unité astronomique. Soit, la distance moyenne de la Terre au Soleil.

Les prémices ou la comète de Halley

La comète de Halley possède une période de 75 ans et le dernier passage proche de la Terre qu’elle a effectué était en 1986. À cette occasion de nombreuses sondes spatiales ont été lancées par diverses agences. Une course à l’armement bien plus pacifique que ce qu’il pouvait y avoir à l’époque, en somme.

Ces différentes sondes ainsi que d’autres observations ont été coordonnées depuis 1982 sous l’International Halley Watch. L’objectif de ces missions était de déterminer la composition chimique de la comète.

Vega 1 et Vega 2

Les sondes Vega ont été lancées en décembre 1984 par l’Union Soviétique. Leur mission était l’étude de la planète Vénus via un module atterrisseur et un ballon pour étudier l’atmosphère. Le vaisseau mère, quant à lui, devait continuer sa route vers la comète de Halley en utilisant l’assistance gravitationnelle de Vénus.

Elles sont le fruit d’une coopération de l’Union Soviétique et de nombreux pays européens des deux côtés du rideau de fer à l’époque : Autriche, Allemagne (RDA et RFA), Bulgarie, France, Hongrie, Pologne et Tchécoslovaquie.

La sonde Vega 1 largue le ballon et l’atterrisseur le 11 juin 1985 et continue donc son chemin vers la comète de Halley qu’elle va approcher (à environ 8900 km) le 6 mars 1986. Sa jumelle Vega 2 envoya sa charge utile vers Vénus le 15 juin 1985 et elle côtoiera la comète de Halley au plus près (environ 8000 km) quelques jours après Vega 1, le 11 mars 1986.

Voici quelques images rapportées par les deux sondes :

Image grand angle de la comète Halley par Vega 1
Image grand angle de la comète Halley par Vega 1.

Le noyau de la comète Halley pris par la sonde Vega 2
Le noyau de la comète Halley pris par la sonde Vega 2

Sakigake et Suisei

Ces deux petites sondes japonaises (environ 140 kg chacune) ont été lancées respectivement le 8 janvier 1985 et le 19 août de la même année.

Le but de Sakigake était d’étudier le plasma et les champs magnétiques de l’espace interplanétaire, plus précisément étudier l’interaction du vent solaire avec le plasma cométaire. Cette sonde étant la première de sa catégorie envoyée par le Japon, elle a principalement servi d’équipement de test pour le lanceur M-3SII, la détermination de trajectoires et d’orbites dans l’espace interplanétaire ainsi que les communications longue distance. Tout ceci étant nouveau (au niveau application) pour le Japon spatial.

La sonde Suisei était identique à la sonde Sakigake mais avec une charge utile différente puisqu’elle emportait, entre autres, une caméra UV. La prise d’images UV était d’ailleurs le principal objectif de cette sonde.

Du fait de sa fenêtre de lancement, Sakigake n’est passée qu’à plusieurs millions de kilomètres de la comète, mais cela était suffisant pour sa mission. Suisei devait en revanche rencontrer la comète à une distance plus faible tout en tenant compte qu’elle n’avait pas de protection contre la poussière et les particules que pourrait dégager la comète. La rencontre initialement prévue à environ 200 000 km s’est finalement faite à environ 150 000 km le 8 mars 1986.

Sakigake (JAXA)
Sakigake (JAXA).

Suisei (JAXA)
Suisei (JAXA).

Giotto

Giotto est une mission d’exploration élaborée par l’Agence Spatiale Européenne (ESA en anglais). La sonde éponyme fût lancée par une Ariane 1 le 2 juillet 1985. À l’origine, la sonde devait être accompagnée par une sonde américaine, mais des coupes budgétaires à la NASA ont eu raison de cette sonde et l’ESA a décidé de continuer l’aventure en solo. L’objectif principal de la mission était le survol à très faible distance de la comète de Halley.

Le survol de la comète s’effectua le 12 mars 1986 à une distance de 596 km ! C’est grâce aux précédentes missions, notamment les missions Vega et aux données qu’elles ont renvoyées, que la sonde Giotto a pu être guidée à une distance aussi faible.

Contrairement aux deux sondes japonaises, Giotto possédait des protections contre les particules mais lorsqu’elle fût touchée par une particule d’environ 1 gramme, elle se mit à tournoyer et perdit temporairement la liaison avec la Terre. Une fois stabilisée, le contact reprit après 30 minutes d’interruption. Néanmoins au cours de ce survol, après être passée au plus près, des impacts ont endommagé la caméra couleur définitivement, ce qui empêchera la sonde de prendre des photos de la comète Grigg–Skjellerup qu’elle survola en 1992.

La sonde embarquait dix instruments scientifiques (voir l’image ci-dessous).

Instruments embarqués sur Giotto (ESA)
Instruments embarqués sur Giotto (ESA).

  • Une caméra couleur pour avoir des images : Halley Multicolour Camera (HMC).
  • Trois spectromètres de masse pour étudier la composition chimique des gaz et des poussières de la comète : Neutral Mass Spectrometer (NMS), Ion Mass Spectrometer (IMS) et le Particle Impact Analyser (PIA).
  • Un détecteur d’impact de poussière pour analyser la masse des particules : Dust Impact Detection System (DID).
  • Deux instruments d’analyse du plasma pour étudier le vent solaire et les particules chargées : Johnstone Plasma Analyser (JPA) et Reme Plasma Analyser (RPA).
  • Un analyseur de particules énergétiques (électrons, protons, particules alpha) : Energetic Particles Analyser (EPA).
  • Un magnétomètre pour étudier le champ magnétique (MAG).
  • Une sonde optique pour étudier la luminosité de la comète : Optical Probe Experiment (OPE).
  • Une expérience radio pour étudier l’environnement électromagnétique de la sonde : Giotto Radio Experiment (GRE).

Ci-dessous une image de la comète lorsque la sonde était au plus près :

Le noyau de la comète Halley (ESA)
Le noyau de la comète Halley (ESA).

Grâce aux résultats des précédentes sondes, Giotto a pu s’approcher suffisamment pour déterminer la composition chimique de la comète mais aussi pour étudier sa surface.

Tout d’abord, une comète est plutôt composée de poussières que de glace et au lieu d’avoir un noyau sphérique comme une boule de neige, la forme de celui-ci est plus allongée à l’instar d’un grain de riz. D’autre part, la surface est constellée de cratères, ce que ne soupçonnaient pas les scientifiques.

Une comète sous toutes les coutures

Deep Space 1

La sonde Deep Space 1 lancée le 24 octobre 1998 avait comme objectif principal de tester des charges utiles de grande avancée technologique avec notamment le premier propulseur à ionique (bien que les Russes en aient utilisé une centaine depuis les années 70) ainsi qu’un système de navigation automatique (Autonav) autrement appelé viseur d’étoile qui permet de connaître sa position et sa trajectoire dans l’espace en prenant plusieurs photos en intervalle.

Pour tester ces charges utiles, la sonde est envoyée vers l’astéroïde 9969 Braille qu’elle survole en juillet 1999, malgré un petit raté du moteur ionique au démarrage mais qui finalement fonctionne correctement par la suite. Suite à ce survol réussi, la mission est prolongée vers la comète 19P/Borrelly.

Durant ce voyage vers la comète, le viseur d’étoile tombe en panne ce qui aurait dû mettre un terme à la mission puisque la sonde était incapable de se repérer dans le vide intersidéral. Mais c’était sans compter l’ingéniosité du personnel de la NASA qui modifia le logiciel de la sonde pour utiliser la caméra d’observation comme viseur d’étoile de secours. Ce sauvetage qui eut lieu en juin 2000 (6 mois après la panne du viseur d’étoile) permit à la sonde de survoler et même frôler la comète Borrelly en septembre 2001.

L’image suivante représente une photo de la comète prise à environ 5000 kilomètres de distance et montrant la comète en elle-même ainsi que ses jets de poussière, représentés selon l’intensité de la luminosité résultante.

Image composite de la comète Borrelly (NASA)
Image composite de la comète Borrelly (NASA).

Stardust

Lancée en février 1999, la mission de cette petite sonde spatiale (300 kilogrammes tout de même) était de collecter des échantillons de la queue de la comète 81P/Wild mais surtout de les ramener sur Terre ! Un collecteur d’une surface d’environ 1m² et tapissé de petits conteneurs en aérogel était chargé de collecter les particules, il faisait partie d’une capsule qui devait retourner seule sur Terre.

Après un voyage sans encombre d’environ 4 ans, la sonde survole la comète Wild entre le mois de novembre 2003 et le mois de février 2004. Outre la collecte d’échantillons, elle a aussi pour objectif l’étude plus générale de la comète via la prise de photographies et un instrument d’analyse des particules (différent du collecteur à aérogel puisque l’analyse est faite par la sonde) permettant de déterminer leur composition chimique.

À noter que l’instrument de navigation de la sonde qui fait aussi office d’appareil photo, utilise le principe Autonav développé pour la sonde Deep Space 1 en prenant des photos des étoiles pour se repérer et se diriger.

Le retour de la petite capsule avec le collecteur de particules s’effectue le 15 janvier 2006. La sonde frôle la Terre à moins de 300 kilomètres et largue la capsule qui atterrit aux Etats-Unis sans encombre. La sonde est ensuite envoyée vers la comète Tempel 1 qui vient d’être étudiée par la sonde Deep Impact (voir ci-après) en 2005, c’est la mission NExT (New Exploration Tempel 1).

Capsule de retour d'échantillon de Stardust exposée au National Air & Space Museum (Personnel - zeqL)
Capsule de retour d’échantillon de Stardust exposée au National Air & Space Museum (Personnel - zeqL).

CONTOUR

Planifiée pour 2002, la sonde CONTOUR (COmet Nucleus TOUR) devait survoler trois comètes : 2P/Encke, 73P/Schwassmann–Wachmann et soit 6P/d’Arrest soit une autre comète qui aurait été découverte pendant la mission.

Lancée le 3 juillet 2002, la sonde fut considérée comme désintégrée le 15 août 2002 après l’allumage de son booster, des télescopes ayant repéré trois objets proches à la place de la sonde.

La sonde embarquait des instruments de mesure classiques pour l’étude des comètes : un télescope accompagné d’un spectrographe, un analyseur de particules et enfin un spectromètre de masse pour analyser la composition des gaz des comètes.

Une rencontre explosive

Deep Impact

Lancée le 12 janvier 2005, la sonde Deep Impact avait pour mission l’étude de la composition interne de la comète 9P/Tempel 1 via l’envoi d’un impacteur. Les précédentes missions vers des comètes n’ont en effet consisté qu’en des survols de comètes. Or pour comprendre comment se sont formées les comètes, il fallait connaître leur composition interne, c’est l’objectif de la mission Deep Impact.

La sonde arrive au voisinage de Tempel 1 le 3 juillet 2005 après quelques mois de voyage. L’impacteur se sépare alors de la sonde et se dirige vers la comète qu’il percutera le lendemain à 05:45 UTC. L’énergie de l’impacteur est équivalente à environ 5 tonnes de TNT mais les scientifiques doutaient qu’un cratère d’environ 100 mètres de diamètres puisse être fait. Plus d’un an après l’impact, le cratère résultant avait un diamètre de 150 mètres (mission NExT de Stardust).

Impact sur la comète vu depuis la sonde (NASA)
Impact sur la comète vu depuis la sonde (NASA).

L’analyse des données montra que les débris étaient principalement composés de poussière et moins par de la glace, ce qui surprit les scientifiques. D’autre part, ils s’attendaient à des débris similaires à du sable au niveau de la taille mais la réalité était comparable à du talc, des poussières très fines.

Le télescope Swift a aussi pris part à l’analyse des données ainsi que la sonde Rosetta qui voyageait à plusieurs millions de kilomètres de là, certains de ses instruments furent utilisés pour analyser l’impact. De même, la NASA demande l’aide d’astronomes amateurs pour suivre la comète sur le long terme, les télescopes professionnels (comme Hubble) n’étant pas disponibles sur de longues périodes.

Après cette réussite, la sonde se voit gratifiée d’une nouvelle mission : EPOXI (Extrasolar Planet Observation and Deep Impact Extended Investigation) dont le but est de visiter d’autres comètes. Initialement, elle devait atteindre la comète Boethin mais cette dernière ne fût pas repérée lorsqu’il fallut faire les manœuvres. La sonde fût alors envoyée vers la comète Hartley 2 qu’elle survola en novembre 2010. En août 2013, plusieurs pertes de communication eurent lieu et malgré les tentatives de correction de l’équipe, le 20 septembre 2013 la mission prit fin, probablement à la suite d’un "bug de l’an 2000" au niveau du logiciel de la sonde.

Rosetta

Lancée le 2 mars 2004 par une fusée Ariane 5, la sonde Rosetta comprenant aussi un petit atterrisseur, Philae, a pour mission l’étude détaillée de la comète 67P/Tchourioumov-Guérassimenko. Pour ce faire, elle doit se mettre en orbite autour de celle-ci et déposer un petit robot d’analyse.

Après quatre assistances gravitationnelles de la Terre et de Mars, ainsi que l’étude de quelques astéroïdes, la sonde est mise en sommeil en 2011, l’énergie que peuvent lui fournir ses immenses panneaux solaires n’étant pas suffisante, car la sonde est assez éloignée du soleil. La sonde est remise en activité en janvier 2014 avant de se mettre en orbite autour de la comète Tchourioumov au mois d’août de la même année.

L’apothéose arrive le 12 novembre 2014 avec l’atterrissage de Philae sur la comète et sa transmission de données, malgré le fait qu’il soit dans une position indélicate et peu éclairée, les scientifiques ont bon espoir que ses panneaux solaires puissent le réactiver lorsque la comète sera plus proche du soleil d’ici quelques mois.

La sonde Rosetta embarque de nombreux instruments, douze au total : plusieurs spectromètres (ALICE, ROSINA, VIRTIS), des analyseurs de particules et de poussières (COSIMA, GIADA, MIDAS), un système d’imagerie (OSIRIS), des appareils d’étude du plasma (RPC), etc.

Les instruments de Rosetta (ESA)
Les instruments de Rosetta (ESA).

De même, l’atterrisseur Philae est aussi un véritable petit laboratoire avec 10 instruments (APXS1, CIVA2, CONSERT3, COSAC4, PTOLEMY5, MUPUS6, ROLIS7, ROMAP8, SD29, SESAME10) :

Les instruments de Philae (ESA)
Les instruments de Philae (ESA).

Ainsi se termine notre découverte des comètes et des cousines de Rosetta. Vous savez maintenant ce que sont les comètes, leurs origines et les missions antérieures à Rosetta ! Toutefois, si l’histoire de la découverte de ces petits objets a déjà connu de nombreuses révélations et théories (dont nous en avons cité une toute petite partie), c’est un monde de découverte qui s’ouvre à nous. Ce n’est que le premier chapitre d’une aventure qui, avec Rosetta et Philae, s’écrira pendant quelque temps encore. :D

Nous tenons également à remercier @dri1, Taguan, elyppire et Coyote pour leurs relectures attentives.


  1. C’est un spectromètre (Alpha Particle X-ray Spectrometer) à rayons X, alpha et protons chargé de déterminer la composition du noyau de la comète.

  2. CIVA (Comet Infrared & Visible Analyser) comprend 5 caméras panoramiques, un couple de caméras stéréoscopiques fournissant des images en relief, un spectromètre infrarouge et un microscope optique pour l’analyse d’échantillons.

  3. CONSERT (Comet Nucleus Sounding Experiment by Radiowave Transmission) est un sondeur radar. Plus d’information par ici.

  4. COSAC (Cometary Sampling and Composition experiment) est un pyrolyseur et analyseur (spectrométrie de masse et chromatographie) utilisé pour l’analyse des gaz et des molécules organiques complexes prélevés dans le sol par l’instrument SD2.

  5. PTOLEMY est un analyseur de gaz qui obtient des mesures précises de rapports isotopiques des éléments légers (Hydrogène, carbone, azote et oxygène).

  6. MUPUS (Multi-Purpose Sensors for Surface and Subsurface Science) est un ensemble de détecteurs mesurant la densité, les propriétés thermiques et mécaniques de la surface de la comète.

  7. (Rosetta Lander Imaging System) est une caméra CCD à haute définition située sous l’atterrisseur utilisé pour obtenir des images de la descente et des images panoramiques des zones échantillonnées par les autres instruments.

  8. C’est un magnétomètre (Rosetta Lander Magnetometer and Plasma Monitor) qui doit mesurer l’intensité du champ magnétique de la comète et les interactions de la comète avec le vent solaire.

  9. Le Sample and Distribution Device est un instrument de forage capable d’atteindre une profondeur de 25 cm et de préparer un échantillon qui est ensuite transmis aux mini-laboratoires PTOLEMY et COSAC pour analyse.

  10. Le Surface Electrical, Seismic and Acoustic Monitoring Experiments est un ensemble de 3 instruments chargés d’étudier la propagation des ondes sonores à travers la surface (Cometary Acoustic Sounding Surface Experiment (CASSE)), les propriétés électriques (Permittivity Probe (PP)) et les poussières retombant à la surface (Dust Impact Monitor (DIM)).

Pour en savoir plus


12 commentaires

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Le masse et la taille de la sonde dépendent du lanceur, de l'altitude de largarge, de l'accélération que tu veux donner à la sonde au départ, etc. Mais il faut aussi prendre en compte le budget de la mission et ses objectifs : plus tu as d'instruments et plus la mission sera coûteuse : prix du développement de la sonde mais aussi sonde plus lourde donc potentiellement lancement plus cher.

Je n'ai pas mis la masse de toutes les sondes mais voici :

  • Giotto : 960kg
  • DS1 : 500 kg
  • Stardust : 385 kg
  • Deep Impact : 973kg (dont 373kg pour l'impacteur)
  • Rosetta : 3t (dont 100 kg pour Philae)

Mais Rosetta a plus de la moitié de sa masse faite d'ergols (1670kg) pour permettre sa mise en orbite autour de la comète.

D'autre part, les coûts de missions influent aussi sur les instruments embarqués : Stardust, CONTOUR, Deep Impact font parties du programme Discovery de la NASA dont le but est de lancer des missions plus rapidement avec des objectifs très précis avec un budget limité (moins de 450 millions de $) donc le nombre d'instruments est limité pour éviter une trop grande complexité.

Alors que Rosetta est un projet majeure de l'ESA et a coûté plus d'1 milliard d'euros.

+6 -0

Excelent article aussi, décidément, cette première édition de CdS permet d'apprendre plein de chose !! Un mini reproche peut-être, c'est que cet article aurait dû (pour moi), arriver avant celui de Gabbro de mercredi, dont il aurait alors été une introduction (mais peut-être que je me trompe).

En tout cas, très intéréssant, tout ça, et ce petit historique permet de mieux remettre en contexte la mission de Rosetta/Philae et ce qu'on sais du coup sur les comètes. J'aime ! <3

(j'vais avoir du mal à faire le poids la semaine prochaine avec la chiralité :o )

En effet mais bon, ce n'est pas spécialement grave (puis, il est fréquent que les visiteurs lisent les articles plus récents avant de descendre plus bas sur la page/lire les articles antérieurs).

Pssst !! Washington :P

+1 -0

Merci pour cet article ! Je trouve la photo de l'ESA somptueuse !

Je ne comprends pas trop comment une irradiation par des $\gamma$ peut changer l'albedo, ni que ce changement tende apparemment toujours à rendre l'objet plus sombre. Le nom du phénomène suffirait pour que je me renseigne, pas besoin de se lancer dans de grandes explications ;)

Pour le phénomène de fluorescence, si je ne m'abuse, c'est le fait d'émettre un $\gamma$ après avoir été excité, pas le fait de perdre un ou plusieurs électrons à cause de l'excitation.

Pour le phénomène de fluorescence, si je ne m'abuse, c'est le fait d'émettre un γ après avoir été excité, pas le fait de perdre un ou plusieurs électrons à cause de l'excitation.

Pas forcément des rayon $\gamma$, si je ne m'abuse, mais également des rayons X (et de manière générale, n'importe quel photon qui aie été généré par l'absorption par une substance d'une onde électromagnétique)

Merci Arius :-°

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Je ne comprends pas trop comment une irradiation par des γ peut changer l'albedo, ni que ce changement tende apparemment toujours à rendre l'objet plus sombre. Le nom du phénomène suffirait pour que je me renseigne, pas besoin de se lancer dans de grandes explications

Plus le temps passe, plus les rayons cosmiques irradient la surface du noyau et endommagent ses liaisons moléculaires. Des expériences en laboratoire avec des accélérateurs de particules montrent que lors de l'irradiation, il y a une augmentation de la complexité chimique de la surface irradiée. De nombreux composés organiques complexes peuvent alors se former rendant la surface du manteau plus sombre (comme le charbon de bois) ou (mais ça dépend de la composition chimique du noyau avant et pendant l'exposition) tendre vers une couleur rouge brun. Dans le même temps, alors que le noyau se réchauffe en s'approchant du Soleil et que l'eau et les matériaux volatils s'évaporent, restent sur la surface des structures organiques et des poussières entourées d'alvéoles (clathrates). Ces structures ont pour particularité de très bien absorber la lumière (tout en agissant comme un isolant en refroidissant les couches intérieures du noyau).

Résultant de cette irradiation, on aurait présence de tholins. Et selon les cas, soit une surface très sombre, soit une surface tendant vers le rouge brun.

Formation of an irradiation mantle of a cometary nucleus. a, Cross-section of the irradiation mantle of a cometary nucleus. Ice (yellow) and dust (red) are exposed to the flux of cosmic rays. Over time (T0 to T3 is about a billion years) a surface layer with a thickness of roughly one metre is carbonized, forming an irradiation mantle (black). b, Cross-section of the rubble mantle of a cometary nucleus. Ice sublimates due to the heat of the Sun, dragging out small particles of dust and leaving behind large dust grains that are too heavy to lift. They accumulate over time (T0 to T3 is a few years) to form a surface mantle. (Nature)

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Salut!
Super article, très intéressant, bravo:) J'ai juste une question, concernant la nomenclature des comètes.

Si l'on a observé plus d'un retour, on ajoute un nombre séquentiel devant le préfixe P/ (par >exemple, 19P/Borrelly).

Article

C'est quoi un retour? C'est le nombre de fois qu'on l'a vue?

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