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Skate-punk #1 - Les variations

Une rétrospective sur la musicalité du punk

Ce billet est le premier d’une série de ressource qui tenterons de clarifier musicalement les différents styles de musique punk qui existe. Non pas en en faisant une revue exhaustive des sous-genres, mais plutôt en exacerbant les points clés autour d’un des cas d’école les plus complexe, le skate-punk.

Nous allons essayer de créer une base de compréhension de ce qui est produit musicalement dans un groupe de skate-punk et surtout pourquoi c’est intéressant de le décortiquer.

Cette exercice ne s’intéressera pas aux mouvements punk mais plus humblement au sujet de la musique. Qui réunit cette sous-culture tel un point névralgique.

  • Les partitions ou tablatures utilisés tout le long de ce billet proviennent d’une ré-interprétation du travail de Jussi Heinonen ou de mon propre travail de restitution des morceaux.
  • Aussi les notations des notes et accords seront anglo-saxonnes.

C'est quoi le punk ?

Lors de la rédaction de ce billet, je n’avais pas envisager de parler de ce qu’était le punk musicalement. Mais un anonyme m’a dit ceci peu de temps après l’écriture de ce billet :

Trouve simplement un accord de puissance, migre deux frets plus bas et recommence…

Cette définition est plus ou moins celle qui est admise par la communauté des compositeurs et chez les punk eux-mêmes. C’est à dire qu’il n’y a pas de recherche précise a part :

Est-ce que je suis entrain de faire quelque chose qui me plait ?

Je tiens a préciser que comme dans beaucoup de genre musicaux (le métal, le jazz, le classique…) les sous-genre sont nombreux et possèdent chacun des motifs bien particulier. Cette simple définition, au sujet de la naïveté de quelques accords de puissance s’applique assez bien au punk-hardcore :

Mais cette scène n’est pas la seule, il y a donc bien d’autres sous-genre souvent plus complexe. Notamment le punk-rock ou encore le skate-punk. Que je vais essayer de traiter tout le long de ce billet.

Mais reprenons, car finalement la réponse n’est pas bête, à défaut d’être courte.

Est-ce une règle absolue, avec des accords de puissances on fait du punk ?

Le punk musicalement n’est pas dicté par des codes précis, donc personne ne se restreint réellement. Par contre on y retrouve communément et majoritairement des accords de puissance ainsi que des paroles vulgaire.

Parental Advisory Explicit Lyrics

En fait à mon avis il est difficile de différencier le punk du RAP, en disant cela vous devriez déjà mieux cerner le propos du punk. Si l’on ne prenait que les paroles et l’idée d’une certaine répétition simpliste en fond, les deux seraient extrêmement lié de part les enjeux sociétaux qu’ils traitent.

Malgré tout il est possible de prendre des accords complexe et d’en faire une chanson punk, car finalement c’est le message accompagné de distorsion qui fait la vrai nature du punk.

En fait on n’impose pas un code dans l’anti-code

Les variations

Quand j’ai commencé a étudier la guitare j’ai appris les bases avec les groupes que j’aimais bien, le premier étant Green Day (punk-rock). Dans ce groupe je me suis rendu compte qu’il y avait des changements d’accord assez subtiles entre deux phrases d’un couplet, qui ne sont d’ailleurs pas toujours convenablement restitué dans les tablatures disponibles en ligne, tant cette variation est discrètes.

C’est ce changement que j’appelle ici variation, subtiles et souvent passé sous silence… Cela permet potentiellement à la voix de toucher d’autres gammes lors de ces changements et à la musique de sembler moins répétitive au bout de $8$ phrases de couplet.

Prenons pour exemple la fameuse introduction de American Idiot de Green Day :

Partition de l’introduction de American Idiot de Green Day

J’attire votre attention sur le dernier accord joué en fin de ligne. Il n’y a pas besoin de s’y connaitre en solfège pour voir que les deux accords sont différents, assimilable à un changement $\mathrm{F\sharp\; \rightarrow\;G6}$

Ce changement est justifié pour deux raisons principales :

  • J’ai parachuté précédemment que ça rendait moins répétitif le morceau de guitare, ce riff compose la majorité de la chanson, c’est finalement assez intelligent de lui faire subir une variation subtil qui permet de casser le coté systématique de l’enchainement.

  • D’un autre point de vue, ces cordes sont jouées à vide dans le cas d’un $\mathrm{G6}$ à la guitare. Cela veut dire que d’un point de vue scénique le guitariste n’as plus besoin de toucher la guitare dès qu’il fini cette phrase, c’est en fait intéressant car pour la musique American Idiot le chanteur commence le couplet à la fin de chaque riff. Il peut ainsi lâcher le manche de la guitare et commencer à chanter en faisant preuve d’imagination, de divertissement scénique.

En fait ce dernier point est le plus important dans cette chanson, car le riff est en fait embrassé par ces cordes à vides, avant la reprise du riff il y a ces cordes à vides joué de manière à anticiper le riff. C’est sur la dernière syllabe que Billie Joe Armstrong joue ces cordes à vide :

Première ligne est la représentation vocal de ce que fait le chanteur et la seconde est le silence laissé par la guitare qui reprend seulement à la dernière note

Plus récemment Green Day a aussi sorti une trilogie d’album ($2012$) dans lesquels se trouve 99 Revolution où il y a encore une fois ce type de variation :

Dernier accord du couplet change.

Continuons le jeu des $7$ erreurs. Les plus vifs ont vu encore une fois une transition entre les accords en fin de phrase. Cette fois-ci la conversion est la suivante : $\mathrm{C5\;\rightarrow\;G5}$

Deuxième accord du refrain change.

Cette fois la variation subtile se fait au milieu du riff. On converti un $\mathrm{C5\;\rightarrow\;G5}$, comme précédemment. On constate bien que dans cette chanson les variations ont une place importante…

C’est bien normal car les membres fabriquent ici une sorte d’hymne dont l’air ne doit pas sembler trop compliqué pour être chanté et d’un autre coté les paroles doivent être plutôt répétitives pour que ces dernières restent dans la tête.

Finalement ils utilisent des variations pour rendre le tout cohérent, ainsi la mélodie vocale changent et permet de moins lasser l’auditeur, le tout est donc mélodieux et tenace à l’oreille :

Retranscription du vocale du refrain de 99 Revolution

Les $\mathrm{4^{ièmes},5^{ièmes},6^{ièmes},7^{ièmes} }$ notes ne sont pas du tout les mêmes dans le chant. Ce changement est permis plus habilement avec la variation d’accord dont on a parlé.

A titre d’exemple je vais parachuter quelques variations additionnelles, pour illustrer le propos, libre à vous d’essayer de les repérer ou juste apprécier la musicalité qui en ressort. Car admettons-le, le punk-rock est finalement plus élégant que vous ne pouviez le penser ?


Encore une chanson de la trilogie d’album ($2012$), voici Stay The Night :

Exrait de Stay The Night, les lignes impaires se jouent simultanément et pareillement pour les lignes pairs

Encore une fois ici les variations permette un certain changement de gamme pour la voix. Si l’on superpose le vocal avec la guitare on se rend vite compte que le changement $\mathrm{G5\;\rightarrow\;A5}$ s’effectue après la plus grande prise de liberté vocal. C’est sur le $\mathrm{3^{ième}}$ accord que le chant se complexifie.

En fait c’est parce que l’accord de $\mathrm{G5}$ dure deux fois moins de temps qu’on peut se permettre de solliciter toute les possibilités sans en abuser.


Cette fois-ci je vais me permettre une transition vers le skate-punk, avec le groupe Lagwagon :

Alison’s Disease de Lagwagon

Pour ce dernier accompagnement on peut voir que le guitariste (deuxième ligne) ne joue que des octaves, mais les premières mesures (de chaques lignes) sont en fait identiques :

$$\mathrm{E5-F5\sharp-G5\;\rightarrow\;E-F\sharp-G}$$

En lisant les fins de phrase (qui ont bel et bien des différences) :

$$\mathrm{E5-B5\sharp-C5\;\rightarrow\;G-F\sharp-E}$$

Comme un reversement, au lieu de monter l’escalier ($\mathrm{E5-F5\sharp-G5}$) cette fois il est descendu ($\mathrm{G-F\sharp-E}$).


Suite à la vague de billet autour de la musique, notamment le Jazz. Je me suis senti obliger de commencer une petite série autour du skate-punk. Ce dernier étant, je l’espère, inconnu pour beaucoup de monde. Histoire de vous faire découvrir les choses en douceur je commence par parler de Green Day.

Plusieurs autres billet sont en cours de rédaction. On parlera de parti-pris un peu plus technique dans les prochains épisodes.

Je fais plein de fautes d’orthographe, si jamais vous pouvez m’en signaler ça serait sympatoche. :ange:

Et pour ceux qui sont arrivé jusqu’au bout… une petite surprise. Voici la version acoustique de la dernière chanson traité dans ce billet :

6 commentaires

Yes !! \o/

Merci pour ce super billet musical. Ça commence à faire des émules, c’est cool !

Cette définition est plus ou moins celle qui est admise par la communauté des compositeurs et chez les punk eux-mêmes. C’est à dire qu’il n’y a pas de recherche précise a part :

Est-ce que je suis entrain de faire quelque chose qui me plait ?

C’est paradoxal, je trouve. À mes yeux cette question est justement le moteur de toute création musicale : que ce soit en écoutant de la musique ou en cherchant sur son instrument, c’est le fait de se poser cette question pour des milliards de détails qui permet de se forger une personnalité musicale, et c’est au-dessus de tout ça que l’esthétique commence à rentrer en jeu.

En fait, je pense qu’il y a quand même des critères, même implicites, qui entrent dans l’esthétique du punk. Ne serait-ce que le fait d’utiliser une guitare électrique qui sature plutôt qu’un banjo ou un ukulélé dans la section rythmique. ;)

+1 -0

En fait justement je pense, mais c’est bien en ça que c’est mon avis personnel, que le punk est une caractéristique propre à beaucoup de gens. Plus on fait ce qui nous plait plus on se rapproche de ça. En fait pour être plus complet il faudrait rentrer dans l’idéologie punk qui veut que :

  • On fasse tout ce que l’on souhaite
  • Sans entacher la liberté d’autrui (Bakounine au sujet de l’anarchisme)
  • En s’en foutant de ce que les autres pense

Et en fait c’est ce triptyque qui doit animer un punk, aussi bien qu’un artiste. Je suis bien d’accord avec toi Nohar, il ne faut jamais se limiter bêtement. Il faut faire ce qu’on aime c’est indéniable.

Alors j’ai des dizaine de chansons punk en mode acoustique avec guitare ou ukulélé, pour le banjo ça me demanderai de reconnaître sa sonorité mais j’suis sûr d’en trouver plus que 3 anecdotiques.

Justement c’est bien là où je veux en venir dans cette série de billet. Le punk on en a de toutes les couleurs.

+0 -0

Je ne suis absolument pas un expert, mais je vais essayer, parce que je pense quand même qu’il y a pas mal de traits communs :

Déjà, musicalement parlant, on a un point commun à tous ces titres : ils aiment beaucoup les quintes justes. Ça se ressent évidemment dans les power chords, mais aussi dans le morceau acoustique que tu viens de poster (quoique j’ai beaucoup de mal à le faire rentrer dans le même genre que les autres, musicalement), et c’est assez cohérent : si un artiste joue beaucoup sur un intervalle caractéristique, il va l’entendre dans tout ce qu’il compose.

S’expliquer "pourquoi la quinte" est assez facile : c’est la première harmonique que l’on trouve dans la nature en dehors de l’octave, et donc celle que l’on distingue le mieux quand il est joué dans les graves à pleine saturation, et donc l’intervalle roi qu’on veut jouer quand on veut faire grogner sa guitare. On peut déjà en déduire que le punk est une musique bien vénère au départ. C’est un héritage qui lui vient du rock.

Le fait d’être à ce point tourné sur les quintes justes est aussi à l’origine d’un autre phénomène particulièrement intéressant que je ne trouve que dans le punk-rock (à part peut-être, mais dans une moindre mesure, dans certains styles de metal, mais c’est beaucoup moins caractéristique) : vu que la quinte n’apporte pas réellement d’information en dehors de grossir la fondamentale, elle libère également le riff de la plupart des contraintes du système tonal. Les musiciens peuvent jouer ce qu’ils veulent en power chords tant qu’ils gravitent autour d’au moins une "tonique", et en punk ils ne se privent pas d’en profiter pour aller chercher des couleurs originales : l’aspect "majeur" ou "mineur" est très dilué. Les riffs ont une voix à part entière, distincte du chant, sans pour autant l’enraciner dans une tonalité particulière (en dehors de l’utilisation de la dominante pour revenir sur la tonique : du moment que la quinte existe, cette force de gravité existe) : la "cohérence" vient de sa répétition et de l’insistance sur la tonique.

Autre point commun assez caractéristique : l’énergie. On a souvent un tempo autour des 200 à la noire, et les riffs qui jouent rythmiquement sur des micro-silences placés savamment dans la mesure. Même si pour une oreille profane, "tout ça, ça se ressemble quand même vachement", si on y regarde de près, pas tant que ça, et le rythme de chaque riff est aussi unique qu’une empreinte digitale sur chaque chanson.

+1 -0

Mais en fait j’suis tout à fait d’accord avec toi Nohar, si ce n’est qu’un des points que tu viens de soulever m’interpelle :

Ils aiment les quintes juste.

Et bah dans le prochain billet on parlera d’intervalle et de progression d’accord et tu vas voir que c’est très riche. Et qu’il y a même assez souvent des accords Jazzy :D comme des $\mathrm{C7}$.

+0 -0

Attention, je ne dis pas qu’ils ne jouent que des quintes et des quartes, hein, c’est pas du chant grégorien non plus ! :D

Mais on sent clairement que la quinte est prépondérante dans les accords, ce qui leur permet de progresser plus librement en allant un peu où ils veulent (alors qu’en jazz, si on va par là, elles ne sont presque jamais jouées dans les accords, par contre ceux-ci progressaient beaucoup de quinte en quinte… Du moins au début, parce qu’après les 50s c’est une autre histoire).

+1 -0
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