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De l’écriture d’un article scientifique

L’écriture d’un article scientifique est un exercice exigeant, tant sur la forme que sur le fond. Sur la forme, il faut notamment veiller au respect d’un patron fournit par la conférence, faire attention à ne pas dépasser un nombre de pages, se préoccuper des caprices de $\LaTeX$, faire attention à adapter le vocabulaire couramment utilisé dans le domaine de recherche concerné (la même notion peut potentiellement ne pas être désignée par le même mot selon les communautés). Sur la forme, il convient d’adopter une démarche rigoureuse qui s’apprend à force de recevoir toujours les mêmes « métacritiques » : bien introduire les notions que l’on utilise, faire clairement la distinction entre sa contribution et l’état de l’art, ne pas utiliser deux mots pour désigner la même chose.

La rédaction d’un bon article est donc un long chemin de croix, au bout duquel vous avez de grandes chances de ne même plus être en mesure de profiter du travail accompli. Pourtant, ses vertus ne sont pas à négliger ! Je n’ai, pour ma part, rédigé « que » deux articles, mais chaque fois, l’expérience a été ô combien salutaire pour la qualité de mes travaux de recherche. C’est comme l’écriture d’un tutoriel, cela permet de se rendre compte très vite des notions floues, peu maîtrisées, mal nommées, etc. Votre travail de fond reste le même, mais la façon dont vous l’abordez et le présentez peu changer du tout au tout.

Ma dernière semaine de rédaction ayant été particulièrement éprouvante, je me suis amusé sur Mastodon à poueter de temps en temps mes états d’âme. Il en résulte un petit florilège qui personnellement m’amuse bien et que je me permets de vous partager ici.

Ce moment quand tu as écrit tout ton article en utilisant l’anglais britannique, et que tes encadrants préfèrent l’anglais américain.

lthms

Ce moment quand rajouter une phrase fait passer toute ta conclusion dans la seizième page de ton article, mais que ta limite est toujours à quinze pages.

lthms

Ce moment quand tu te lances dans la centième relecture de ton article, si bien que tu ne le lis pas vraiment.

lthms

Ce moment quand quelqu’un te suggère de rajouter un ou deux paragraphes pour mieux détailler une notion, mais que tu ne comprends même plus comment $\LaTeX$ se débrouille pour que ta version courante tienne dans les quinze pages limites.

lthms

Je pense que, dans une certaine mesure, ces petits témoignages spontanés peuvent parler aux personnes qui ont déjà eu à subir l’épreuve de rédaction.



Pour conclure, je détournerai la fameuse maxime des romains défaits d’Astérix et Obélix :

« Faites des thèses, qui disaient. »

22 commentaires

Ce moment quand quelqu’un te suggère de rajouter un ou deux paragraphes pour mieux détailler une notion, mais que tu ne comprends même plus comment $\LaTeX{}$ se débrouille pour que ta version courante tienne dans les quinze pages limites.

Quand le génie de $\LaTeX{}$ deviens un désagrément. J’ai déjà eu quelques désagréments de rédaction, sans avoir jamais écris un article scientifique. Rien que les rapport de projet, stage, alternance… sont usants, même les lettres de motivation. Je n’ose imaginer le niveau de difficulté de rédaction que l’écriture de tels articles impose :D .

+0 -0

Par curiosité, quelqu’un pourrait m’expliquer pourquoi vous m’avez donné des pouces rouges à mon précédent message? Je voulais simplement exprimer un problème courant en recherche, j’ai absolument aucun préjugé. :)

Si c’était simplement parce que j’étais HS, désolé. :P

+3 -0

Ce moment quand tu te lances dans la centième relecture de ton article, si bien que tu ne le lis pas vraiment.

C’est un problème que je vivais ici aussi. La relecture, vraiment relire c’est trop épuisant au bout d’un moment :( .

+3 -0

Ce moment quand quelqu’un te suggère de rajouter un ou deux paragraphes pour mieux détailler une notion, mais que tu ne comprends même plus comment LATEX se débrouille pour que ta version courante tienne dans les quinze pages limites.

lthms
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\usepackage[top=0cm,bottom=0cm,margin=0cm]{geometry}

% […]

\begin{document}
\tiny

% […]

\end{document}

;)


Sinon bonne chance pour ton oral ta soutenance, si c’est pas déjà fait. :)

+1 -0

« Faites des thèses, qui disaient. »

Je n’ai pas l’impression que ça soit si simple. Déjà parce que, je pense t’en avoir déjà parlé, j’ai essayé de partir en thèse malgré mon cursus qui n’aidait pas (je n’étais pas passé par un M2 "recherche" aussi…), ensuite parce que j’ai l’impression que c’est réservé à une catégorie de personnes bien informées (pour ne pas dire élite) dont je ne fais pas partie.

Au final je me satisfais de mon cursus, je travaille depuis 4 ans et il reste une interrogation : ai-je un intérêt à vouloir rédiger un article scientifique et donc me conformer à la rigueur dont tu parles ?

Oh boy. Sincèrement bonne chance. Bon, par contre, j’avoue que j’ai jamais du écrire de letter ou de communication, donc j’ai jamais connu la limite de $x$ pages pour un article scientifique (d’autant que j’ai jamais vraiment bien compris comment les éditeurs, qui sont quand même des magiciens aussi, se démerdaient pour mettre des choses à des endroits ou on aurait jamais dit qu’il y avait de la place). Bon, évidement, pour ce qui est des rapports et tout ça, j’ai déjà pu le mettre en oeuvre et même le voir à l’oeuvre (puisque certains de mes petits étudiants ne conaissent pas la concision). Du coup, LudoBike, tu peux rajouter l’option twocolum tant que t’es dedans :p

Bonne chance pour la suite :)


Au final je me satisfais de mon cursus, je travaille depuis 4 ans et il reste une interrogation : ai-je un intérêt à vouloir rédiger un article scientifique et donc me conformer à la rigueur dont tu parles ?

Ge0

Il faut de tout pour faire un monde. Puis, j’en ai déjà parlé ailleurs, mais tout est loin d’être rose dans le monde académique (précarité, peu de positions disponibles, salaire ridicule quand tu es thésard, etc). De toute façon, on peut très bien se débrouiller sans une thèse, et c’est même parfois overkill (dans le sens ou ça te ferme certaines portes plutôt que ça n’en ouvre). Donc c’est un choix à faire, et si tu ne sentais pas que c’était le tient, je préfère encore que tu arrêtes à temps que tu ne traine ça pendant des années avec tout ce qui va avec (dépression, etc), parce que c’est jamais beau à voir.

Après, moi, ça me plait beaucoup, et comme le dit lthms, on apprend au final beaucoup dans la phase de rédaction d’un article aussi (et encore, il a passé sous silence la délicieuse étape des retours des reviewers :p ).

Sauf qu’on ne peut pas faire ce genre de choses, @LudoBike. :p

@Ge0, le but n’était pas de placer subtilement de la propagande pro-doctorat, il fallait plutôt le lire avec cette image en tête :

Engagez-vous

@pierre_24, marrant, ça doit vachement dépendre du domaine alors. En informatique, on soumet beaucoup à des workshops et des conférences, et donc il y a plus ou moins toujours une limite de pages.

+2 -0

Par curiosité, quelqu’un pourrait m’expliquer pourquoi vous m’avez donné des pouces rouges à mon précédent message? Je voulais simplement exprimer un problème courant en recherche, j’ai absolument aucun préjugé. :)

Je ne sais pas pour les autres, mais si j’ai mis un pouce rouge c’est parce que c’est justement un préjugé qu’on entend beaucoup et qu’il me sort par les trous de nez (dans les cas extrêmes, c’est même utilisé par des gens qui s’en servent comme excuse pour dire qu’ils ne publient alors que c’est juste que leur recherche n’est pas innovante, ce qui est un beau oxymore).

Si tu parles de publier dans une revue sexy du genre Nature ou Science, alors c’est complètement assumé par la ligne éditoriale de ces journaux que les articles qu’ils publient sont sur les sujets cools qui font couler de l’encre. Que l’on cautionne ou non ce choix, c’est autre chose, mais on ne peut décemment pas se plaindre que l’on ne peut pas publier dans Nature parce que son sujet de recherche est un sombre détail qui intéresse 3 personnes dans la communauté (indépendamment de l’intérêt intrinsèque du sujet bien sûr).

Si tu parles de publier en général, c’est simplement faux. Il y a des tonnes de journaux scientifiques dans tous les sens qui traitent de tout ce que tu peux imaginer et plus.

Il faut prendre conscience que la science est dirigée par un ensemble d’humains et que l’on ne peut donc pas s’attendre à ce qu’un sujet de recherche qui à un instant donné n’intéresse personne se mette du jour au lendemain à intéresser tous les scientifiques de ton domaine (encore une fois, quelque soit son intérêt intrinsèque). Si tu veux qu’un sujet négligé par la communauté soit remis au goût du jour, il faut pouvoir montrer que ce sujet est pertinent. C’est entre autre à ça que servent les conférences, à pouvoir dire "eh les gens, vous avez jamais pensé à regarder ça, moi si et ça marche vachement bien, vous voulez filer un coup de main?". Si tu ne peux pas finir ta phrase par "et ça marche vachement bien", c’est la raison pour laquelle le sujet en question est négligé et n’a de fait aucune raison d’être publié. L’avancé de la science se fait de manière auto-organisée entre humains, il n’y a pas de grand superviseur de la science qui va venir nous dire de prendre une piste si personne ne la prend un jour et montre que c’est pertinent.

Ma conclusion, c’est que si ton sujet n’est pas cool à un instant donné, c’est soit qu’il y a une raison pour ça, soit c’est que c’est à toi de le rendre cool. Ça se fera pas tout seul, et ce n’est pas une excuse valable pour se faire rejeter un papier.

+9 -0

@Ge0, le but n’était pas de placer subtilement de la propagande pro-doctorat, il fallait plutôt le lire avec cette image en tête :

Engagez-vous
lthms

Non, le but était de placer que tu es bon en rédaction d’articles scientifiques.

La rédaction d’un bon article est donc un long chemin de croix

En fait je dis ça parce qu’en ce moment je commence à me poser des questions sur ce qu’est un "bon développeur". Outre le pâté d’expériences difficiles (tu es au courant de l’une d’entre elles), je commence à apercevoir des qualités chez des personnes qui de mon point de vue sont des (très) bons développeurs. Ils le sont de mon point de vue.

Maintenant, imagine que j’ai envie de partager tout ça sous un article où je parle de "ce qui fait un bon développeur". Cela ne sous-entendrait-il pas que je me considère comme un bon développeur ou une référence quelconque ? A défaut de préciser des choses genre :

Tous les avis exprimés ici sont purement subjectifs, discutables et probablement incomplets. Ils n’engagent que moi.

la tribune de Spacefox sur la création de jeu de rôle

Ou encore "comment éviter d’être un mauvais développeur", ce qui serait plus juste.

En fait, pardonne-moi de détourner la question. Tu pourrais croire que je détourne complètement le sujet de ta tribune. Si c’est le cas ce n’est pas voulu, parce que même si je n’appartiens pas au cercle très fermé des thésards, je me sens concerné car j’ai voulu à une époque de ma vie en faire partie. J’ai échoué parce que je pense que mon cursus n’était pas assez solide et parce que je ne devais pas avoir les mêmes motivations. Je dois être fait pour rester avec un grade de master et tout le monde est heureux.

Pour recentrer le sujet, j’adresse une question à tout le monde : est-ce qu’il y a un intérêt à rédiger un (bon) article scientifique outre la démarche ? Peut-on espérer qu’il ait un impact quelconque dans je ne sais quel milieu même si nous n’avons pas la mention Dr. devant son nom ou si nous n’avons pas versé sueur et larmes (et du sang ?!!?!) pendant 3 ans ou plus à préparer une thèse ?

Le seul article sur lequel figurait mon nom a été un draft rejeté par je ne sais plus quel organisme car nous étions hors sujet et il était question de sécurité des systèmes SCADA. J’ai eu la chance d’y participer car j’ai été stagiaire dans un laboratoire d’Airbus. Mais ça s’arrête là.

Cela ne sous-entendrait-il pas que je me considère comme un bon développeur ou une référence quelconque ?

Je ne pense pas. Ça voudrait simplement dire que tu considères avoir assez de recul sur le sujet pour donner ton avis. Je suis incapable d’écrire un bon article sans beaucoup d’aide, mais je sais apprécier quand j’en lis un.

+1 -0

est-ce qu’il y a un intérêt à rédiger un (bon) article scientifique outre la démarche ?

Tout dépend à quel point ton article est bon. Un bon article peut changer le monde de façon plus ou moins significative même si la plupart des gens ne le sauront jamais. Je pense par exemple aux articles en économie à l’origine de la politique monétaire de la BCE ou de la titrisation et des subprimes.

De façon plus modeste un article peut être aussi une pierre à un édifice qui sera appréciée par la communauté pour ce qu’elle apporte. Dans mon domaine tester une théorie existante sur de nouvelles données (nouveau pays, méthode statistique différente etc) est quelque chose de très courant. L’impact individuel est souvent relativement marginal, mais c’est une passage obligé et indispensable pour faire progresser la science.

Je pense qu’il n’y a pas de raison pour que ça soit vraiment différent dans ton domaine, apporter une petite pierre est toujours appréciable. :)

+0 -0

est-ce qu’il y a un intérêt à rédiger un (bon) article scientifique outre la démarche ? Peut-on espérer qu’il ait un impact quelconque dans je ne sais quel milieu même si nous n’avons pas la mention Dr. devant son nom ou si nous n’avons pas versé sueur et larmes (et du sang ?!!?!) pendant 3 ans ou plus à préparer une thèse ?

Si il n’y en avait pas, soyons honnête, on se ferait pas chier à les écrire. En science, la communication est ce qu’il y a de plus important. Si tu découvres quelque chose sur un sujet quelconque mais que tu le gardes pour toi, c’est comme si tu n’avais rien fait. Si en revanche tu le publies, ça laisse une trace exploitable par les autres scientifiques pour continuer à creuser dans cette direction. Que tu sois docteur ou thésard ou un ingénieur du bureau des poids et mesures de Bern, on s’en balance pas mal.

+4 -0

Malheureusement il est difficile de publier si ton sujet de recherche n’est pas « cool ». :(

Le Gigot

Il faut juste trouver le bon angle de présentation de ton sujet de recherche. Un exemple avec un article sur la mecanique des fluides : lien. On pourrait croire que le sujet n’est pas "cool", mais on voit très vite, en lisant l’article, que l’auteur a réussi a mettre en avant les atouts de son sujet.

+1 -1

À titre personnel, ça m’embête un peu d’avoir incrémenté le compteur de vue de ce truc ; sans rien savoir de la qualité du travail de recherche derrière, je trouve que cet article relève surtout du sexisme ordinaire le plus bête.

+6 -3

Il y a d’autres moyens que d’être sexistes pour rendre quelque chose cool.

Un exemple avec quelque chose qui ne n’est pas trop à première vue : la théorie des catégories. Jetez un coup d’œil à cet article ;) . Bon à l’origine c’est plutôt pour se moquer des papiers incompréhensibles sur les catégories.

+3 -0
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