Cet article est à l’origine paru sur mon blog à cette adresse le 15 novembre 2016. J’ai longtemps hésité à le publier ici, mais finalement je tiens énormément à partager cette vision, morale, appelez ça comme vous voulez.
Je vous laisse directement lire ça.
Tic-Tac
Tic-tac, tic-tac
fait l’horloge.
L’horloge ? Quelle horloge ?
Celle de votre vie.
Comment ? Vous préféreriez
un sablier ?
Voir, plus qu’entendre,
votre vie s’écouler ?Point de temps pour ces questions.
Vous devriez en user,
voir même l’user.
Il est urgent d’en profiter.
Pressez-vous !
Il est grand temps
de prendre votre temps.Tic-tac, tic-tac
fait l’horloge.
N’oubliez pas : l’heure tourne.
Je suis relativement fier de ce poème écrit aujourd’hui en cours de mécanique. Laissez-moi y ajouter mon témoignage en guise d’explication.
Il y a de ça à peine plus qu’une semaine, j’ai enterré mon oncle. On ne peut pas dire qu’il soit mort vraiment jeune : il avait 58 ans. Mais comment vous dire… Ma grand-mère est gâteuse, un autre oncle plus âgé est en fauteuil roulant à cause d’une maladie dégénérative qu’il subit depuis plus de 10 ans.
Mais surtout il méritait vraiment de mourir vieux.
C’est étrange d’apprendre des choses sur son oncle à son enterrement. Ce que j’ai appris, c’est que du Liban il est allé en Syrie. Et dans ce pays, il fut le seul à rester en poste dans un hôpital pendant trois semaines de bombardements. Après quoi il est venu en France.
Il y a rencontré ma tante. Il s’est également dégotté un travail plutôt intéressant : il était pédiatre. Tous les ans à Noël, c’était visite médicale offerte pour tous les petits cousins-cousines. Ses patients, il les aimait. Il montrait leurs dessins à sa famille proche comme on montre un tableau à ses amis.
Par-dessus tout, il aimait sa famille. Son fils et ses filles (mon cousin et mes cousines). Je me souviens de ses cinquante ans, où on était tous invités pour un superbe repas libanais. Je me souviens des quantités de photos qu’il prenait à chaque fête en famille, pour nous les envoyer sur Picasa après. De sa quantité d’albums remplis d’images prises pendant ses voyages avec ma tante et mes cousins.
Alors oui, il méritait de mourir vieux. Il méritait d’atteindre les 80 ans, et de voir peut-être son corps doucement s’affaiblir. D’être entouré d’une grande famille qui viendrait organiser Noël chez lui. De recevoir des tas de cartes postales de toutes les vacances de ses petits enfants.
Et d’ailleurs… Ma cousine s’est mariée le 15 juillet. Lorsqu’il l’a appris, l’année dernière, il a pris ma tante dans ses bras en s’exclamant « On va être grands-parents ! »
Mais non.
Parce qu’il y a 5 mois, à peu près, on lui a diagnostiqué un cancer du pancréas. Alors, au mariage de sa fille, on lui a interdit de prendre des photos (c’était aussi pour qu’il profite de la fête). Et il a passé la journée, ou presque, dans un fauteuil.
Et il y a deux semaines il est mort.
Comprenez bien, je ne vous demande pas vos condoléances. En fait, je n’en veux même pas, même si je voudrais crier à tout le monde que ce n’est pas juste, que mon oncle ne devrait pas mourir comme ça. Même si je sais qu’il y a bien d’autres personnes pour lequel c’est pire.
Ce que je veux vous dire, c’est qu’il ne faut pas oublier l’essentiel. L’essentiel c’est de vivre. Mon oncle ne connaîtra pas ses petits-enfants. Comme le dirait Grand Corps Malade : je me suis bien renseigné, on en sortira pas vivant. Alors moi je dis qu’il est urgent de prendre son temps. De prendre son temps pour en profiter pleinement. Pour profiter du fait d’être en vie. Il est urgent d’arrêter de se compliquer les choses. Urgent d’arrêter de se prendre la tête. Urgent de laisser couler.
Un petit exercice comme ça. Mettez-vous bien en situation : on vous annonce que dans 24h précise, vous mourrez. Pas de dégénérescence, rien. Juste une mort instantanée dans 24h. Que feriez-vous ?
Au (re)mariage de ma mère, j’ai failli avoir l’occasion de danser un slow avec ma cousine. Ça fait peut-être un peu étrange dit comme ça, mais à chaque fois que je me livre à ces pensées, c’est cela qui me vient en tête. L’envie de faire ce slow avec ma cousine.
Il est urgent de prendre son temps. Parce que, peut-être, demain, ce sera fini.