Ce premier chapitre s'attaque à deux questions importantes.
Dans la première partie, vous verrez pourquoi vous devriez apprendre à programmer en Haskell. Cette partie introduit beaucoup de concepts pas forcément simples à expliquer et que vous ne comprendrez peut-être pas du premier coup. Ce n'est pas grave : ils seront réexpliqués au fur et à mesure du tutoriel. La deuxième partie va vous donner quelques exemples de programmes codés en Haskell. Ensuite, il vous faut quelques outils pour programmer en Haskell : c'est le sujet de la troisième partie.
- Pourquoi apprendre Haskell ?
- Qu'est-ce qu'on peut faire en Haskell ?
- Téléchargez et installez un compilateur
Pourquoi apprendre Haskell ?
Haskell est un langage différent des autres : voici quelques-unes de ses particularités.
Haskell est un langage statiquement typé : les types sont déterminés à la compilation, et le compilateur détecte les erreurs de type. Si vous additionnez une chaîne de caractères et un entier, le compilateur refusera de continuer. Plutôt que d'avoir à écrire les types de chaque variable, Haskell utilise l'inférence de types : le compilateur détermine tout seul le type des fonctions, variables et arguments. Cela permet de profiter de la sécurité donnée par le typage statique sans avoir à se fatiguer à écrire des types partout (il est quand même conseillé d'en indiquer quelques-uns, puisqu'ils peuvent aider à comprendre le code). Le système de types du langage est plutôt puissant : on peut s'en servir pour garantir certaines propriétés, par exemple qu'un programme ne renverra jamais d'informations secrètes au monde extérieur.
C'est un langage fonctionnel : les fonctions sont des valeurs comme les autres, qu'on peut prendre en arguments, renvoyer ou appliquer partiellement. Plutôt que de penser un programme comme une suite d'instructions à appliquer les unes à la suite des autres, on essaye de l'exprimer comme des transformations à appliquer aux données en entrées. On peut créer des transformations plus complexes en appliquant une fonction à une autre fonction.
Les fonctions sont toutes pures : elles ne peuvent pas modifier l'environnement extérieur à la fonction, et doivent toujours renvoyer le même résultat si on leur donne les mêmes arguments. Les variables ne sont pas modifiables, ce qui fait qu'on ne peut pas programmer de manière impérative, avec des boucles dans lesquelles on modifie des variables. Cela n'empêche pas de faire des programmes utiles, mais force juste à les exprimer différemment. Les fonctions qui interagissent avec le monde extérieur ont un type spécial, ce qui fait qu'on ne peut pas les utiliser à la place d'une fonction pure.
Enfin, c'est un langage paresseux : les calculs ne sont effectués que lorsque leur résultat est nécessaire. Cela permet dans certains cas d'exprimer des programmes de façon beaucoup plus simple, par exemple quand on ne sait pas jusqu'où on devrait normalement évaluer les données. Cela permet aussi de créer des fonctions plus génériques, où on n'a pas à se soucier de calculer des résultats non nécessaires à l'opération qu'on veut réellement effectuer : si la fonction est suffisamment paresseuse, ils ne seront pas calculés du tout. On peut manipuler de cette façon des structures de données infinies de la même façon qu'on manipulerait des structures de données finies.
Tout cela fait de Haskell un langage intéressant et amusant à apprendre : il est différent de ce que vous avez pu voir jusqu'ici, donc vous allez apprendre beaucoup de choses nouvelles, que, même si vous ne programmez pas tous les jours en Haskell, vous pourrez utiliser pour mieux programmer dans votre langage préféré. D'ailleurs, certains langages intègrent maintenant des concepts empruntés à la programmation fonctionnelle.
Qu'est-ce qu'on peut faire en Haskell ?
Vous vous demandez maintenant après cette présentation quel genre de programmes on peut faire en Haskell. En fait, on peut à peu près faire tout ce qu'on peut faire dans un autre langage, mais ce chapitre va vous montrer quelques exemples.
Jeux et interface graphique
Frag, un FPS en 3D
En Haskell, on peut faire des jeux vidéo (même si, comme dans tous les langages, ça peut devenir compliqué) : Frag est un jeu de tir à la première personne en 3D, utilisant OpenGL pour les graphismes, capable de charger des niveaux au format Quake3. Pour plus de détails, vous pouvez lire la page dédiée sur le wiki haskell : Frag. Voilà une capture d'écran :
xmonad, un gestionnaire de fenêtres
xmonad est un gestionnaire de fenêtre (ou WM) X11 (donc pour Linux et autres). C'est un programme qui se charge de placer les fenêtres au bon endroit à l'écran. Cependant, xmonad à la particularité d'être un tiling wm : par défaut, il organise les fenêtres de telle façon qu'elles occupent tout l'espace de l'écran et ne se recouvrent pas (cependant, certains modes permettent d'arranger les fenêtres différemment). Il est très léger, mais très configurable : le fichier de configuration est écrit en haskell. Il est aussi extensible, avec de nombreux modes de placement des fenêtres, et gère les écrans multiples.
Outils pour développeurs
GHC, le principal compilateur Haskell, est écrit en Haskell, mais c'est aussi le cas de la plupart des autres compilateurs pour Haskell. Pugs, un interpréteur et compilateur pour Perl 6, a aussi été codé en Haskell. darcs, un logiciel de gestion de version distribué, est aussi codé en haskell.
Et plus encore !
Plein d'autres choses
Il aussi possible de faire beaucoup d'autres choses, parmi lesquelles :
- lambdabot, un bot irc utilisé sur le canal irc #haskell
- Yi, un éditeur de texte
- leksah, IDE en Haskell
De nombreuses bibliothèques
Il y a aussi de nombreuses bibliothèques en Haskell, qui permettent de ne pas avoir à réinventer la roue pour coder quelque chose de simple et de faire beaucoup de choses : des applications web, de la musique, du traitement d'images, manipuler du XML, de la cryptographie, des mathématiques et beaucoup d'autres choses. Vous pouvez voir une liste de bibliothèques et d'applications disponibles en Haskell sur hackage.
Téléchargez et installez un compilateur
Choix d'un compilateur
Il existe de nombreux interpréteurs et compilateurs pour Haskell. Vous pouvez trouver une liste (pas forcément complète) sur la page Implementations du wiki Haskell. Ce tutoriel vous apprendra à vous servir de GHC : c'est un compilateur qui produit du code rapide, et qui supporte un grand nombre d'extensions au langage. Si vous souhaitez vous renseigner sur GHC, lire la documentation, voir si de nouvelles versions sont sorties ou comment le compilateur évolue, rendez-vous sur le site officiel de GHC. Pour permettre d'installer plus facilement GHC et un certain nombre de bibliothèques et d'outils utiles, un paquet unique, appelé Haskell Platform a été créé.
Installation
Sous Windows et Mac OS X
Sous Windows et Mac OS X, l'installation est simple : allez sur le site de Haskell Platform, téléchargez l'installateur pour votre système et lancez-le. Voilà, vous êtes prêts pour la suite de ce tuto.
Sous Linux et autres systèmes Unix
Rendez-vous sur le site de Haskell Platform. Si vous avez de la chance, votre distribution fournit un paquet pour la plateforme. Cliquez donc sur le lien correspondant à votre distribution pour suivre les instructions d'installation. Si votre distribution ne fournit pas de paquet, vous devrez installer la plateforme vous-même. Pour cela, commencez par installer la dernière version de GHC (le mieux est d'utiliser les paquets de votre distribution, la compilation de GHC est assez longue), puis téléchargez le tarball des sources de Haskell Platform sur la même page et suivez les instructions.
Maintenant que vous avez installé les outils nécessaires pour programmer, on peut commencer. Dans le chapitre suivant, vous allez commencer à écrire du code !