Quoi de plus banal qu’un vulgaire gant ? Les gants sont très connus et très utilisés par de nombreuses personnes pour faire la vaisselle, le ménage, laver une voiture ou un animal, troller sur les forums, en bref, dans de nombreux domaines de la vie quotidienne.
Pourtant, les gants ne se limitent pas qu’à ça. Utilisés pour protéger ses mains de la chaleur, du froid, des risques chimiques, des risques biologiques, des coupures et de beaucoup d’autres dangers, ils protègent la peau des agressions. Dans le sens inverse, ils permettent d’isoler ses mains pour éviter de contaminer quelqu’un ou quelque chose. En bref, les gants sont très utiles voire vitaux dans certains cas. Cet article va donc détailler un peu le pourquoi du besoin d’utiliser des gants et quel gant est le mieux adapté à quelle situation.
- Les mains, outils extrèmement fragiles
- Quels sont les risques auxquels l'on peut être exposé ?
- Un bon gant, une combinaison adaptée aux circonstances
- La catégorisation par le risque
- EN 420 ou les critères généraux pour les gants
- EN 388 ou la protection contre les risques mécaniques
- EN 407 ou la protection contre la chaleur
- Norme EN 12477 = EN 388 + EN 407
- Norme EN 511 ou protection face au froid
- EN 374, risques chimiques et biologiques
- Pour une poignée de gants et quelques normes de plus
Les mains, outils extrèmement fragiles
Les mains sont vraiment très utiles dans énormément d’aspect de notre vie. Rien que pour écrire cet article, j’ai utilisé mes mains à de très nombreuses reprises. Il est donc très important de prendre soin de cet outil pour le conserver le plus longtemps possible en bon état. Car les mains sont vraiment fragiles.
Il faut rappeler que la main est constituée d’une trentaine d’os et autant d’articulations, de 24 tendons, de nombreux nerfs, et d’un riche réseau d’artères et de veines, et de petits muscles. Autant d’occasion de s’abimer les mains si l’on y prend pas garde. Des exemples ? Saviez-vous qu’une plaie de 2 mm de profondeur peut entraîner une section d’un tendon, d’un nerf ou d’une articulation ? Autant d’handicaps dont on se passerait bien volontiers. De plus, la petitesse des os, veines et muscles de la main font que parfois, la douleur ou le saignement peut sembler minime et donc indigne d’attention, alors que c’est une porte ouverte aux infections, complications et handicaps à plus ou moins long terme.
La peau, bien qu’étant une couche de protection relativement efficace, si elle est trop fréquemment et trop longtemps mise en contact avec des produits irritants, assèchants ou autre produits ménagers (entres autres) peut se déssecher, se craqueler, devenir sensible au froid ou au chaud, provoquer des sensations de brûlures et nécessiter des soins plus lourds en crème, pommade et autre qu’on peut facilement éviter avec les bons gants.
Chiffres des accidents en 2012
Voici quelques chiffres éloquants des accidents lors de l’année 20121 :
- 1,4 million d’accident dont 620 000 graves se produisent chaque année.
- 2/3 concernent des accidents de la vie courante et un tiers le monde du travail.
- 35 % des accidents de la main (plus de 165 000) ont fait l’objet d’un arrêt de travail.
- 2,2 % des accidents (plus de 10 000) ont entraîné une incapacité permanente d’une partie de la main.
- 5,5 millions de journées avec arrêt de travail ont été perdues en 2008.
- 12 000 euros : c’est le coût moyen global d’un accident de la main.
Attention, le but n’est pas de vous rendre paranoïaques sur tous les produits avec lesquels vos mains sont en contact ni de vous faire porter des gants à longueur de journée (quoique, ça fairait de vous une personne différente et qui attire l’attention, ou une personne folle, en fonction des points de charisme que vous obtenez au jet de dés). Le but est simplement de mettre en avant que les mains sont fragiles et qu’il convient d’en prendre soin.
À l’opposé, trop vouloir protéger ses mains peut induire l’effet inverse et les fragiliser.
Le port de gants ne doit jamais se substituer aux règles de sécurité concernant le stockage, l’utilisation et la destruction de produits potentiellement irritants ou dangereux.
Quels sont les risques auxquels l'on peut être exposé ?
- Risques chimiques : ils sont bien connus dans les écoles, les laboratoires et tout autre endroit où l’on peut en manipuler. Ce sont sans doute les risques les plus souvent associés au port de gants.
- Risques mécaniques : tout ce qui est lié aux chocs, possibilité de coupure, d’écrasement, piqûre, déchirement, etc.
- Risques électriques : manipulation d’installation électriques, risque de décharge, etc.
- Risques thermiques : chaud, feu, froid, risque de projection de produits brûlants (métaux en fusion par exemple), etc.
- Risques biologiques : agents pathogène, risque d’allergie, d’irritation, d’irruption cutannée, etc.
- Risque de rayonnements : radiations, lasers, ultra-violet, etc.
Un bon gant, une combinaison adaptée aux circonstances
Comme on peut s’en douter, le gant parfait protégeant de tous les dangers n’existe pas. Un même gant peut très bien protéger face à un danger A et être quasiment inefficace contre un danger B. Et même pour un risque donné, un gant peut-être plus ou moins efficace qu’un autre. Voilà pourquoi plusieurs normes européeenes ont été établies. Examinons-en quelques-unes.
La catégorisation par le risque
Tous les gants ne se ressemblent pas. Et on se doute bien qu’on n’utilise pas le même type de gants pour laver la vaisselle et pour manipuler des acides ultra-corrosifs ou des produits radioactifs. Voilà pourquoi trois catégories de gants existent, destinées à aider l’utilisateur dans son choix. 1 2 3
- La catégorie 1 englobe les gants relativement simples, conçus pour des risques minimes. C’est par exemple dans cette catégorie qu’on retrouve les gants de ménage ou de jardinage. Tous les tests sont faits et certifiés par le fabriquant lui-même.
- La catégorie 2 catégorise les gants pour des risques plus élevés mais pas mortel ou excessivement dangereux pour autant. Elle comprend, par exemple, les gants de protection face aux risques mécaniques ou de froid, ou encore résistance à l’abrasion ou à la coupure. Cette fois, les tests sont effectués par un organisme indépendant qui va certifier ou non le gant.
- La catégorie 3 est réservée aux gants protégeants de risques extrèmement graves voire mortels, comme la manipulation d’acides, de produits radioactifs, d’agents biologiques ou autres. Non seulement les gants seront testés et certifiés par un organisme indépendant, aggréé par la commission européenne, mais, en plus, la qualité de la production et l’assurance du fabriquant que les gants sont de bonnes qualités seront contrôlés.
EN 420 ou les critères généraux pour les gants
Cette norme va définir le confort, l’ergonomie, la dextérité et le marquage des gants. Ces marquages sont obligatoires et doivent être appliqués sur le gant lui-même ou, à défaut, sur son contenant le plus petit (emballage plastique, boite, etc). Ce marquage contient plusieurs informations 1 2 3.
- Le nom du fabriquant.
- La désignation du gant.
- Sa taille.
- Le marquage CE.
- La catégorie. En cas de catégorie 3, le numéro d’identification de l’organisme chargé des tests apparaîtra à la suite du marquage CE.
- Et en cas de gant adapté à un risque, le pictogramme associé, la norme EN qui définit ce risque et les niveaux de performances du gants.
Sur l’image ci-dessus, on a affaire à un gant Mapa, de taille M, soit 7 - 7 et demi, certifié CE, sans pictogramme de risque associé. Ce gant convient donc pour des risques minimes tel que le ménage à la maison (si tant est que le ménage ne soit pas un risque majeur pour toi).
EN 388 ou la protection contre les risques mécaniques
Les gants rentrant dans cette catégorie sont indiqués à l’aide du pictogramme suivant.
L’utilisation de ce genre de gants peut être nécessaire quand on rencontre ce genre de pictogramme :
4 tests de résistance sont appliqués pour tester un gant prétendant rentrer dans cette catégorie. Chaque test est noté par un numéro indiquant la résistance au test effectué, par ordre croissant. Si la valeur X apparait à la place, le gant n’a pas subit le test en question. Voici les 4 tests 1 2.
- Résistance à l’abrasion (dans un intervalle de 0 à 4). C’est le nombre de cycle d’abrasion nécessaire pour user l’échantillon. Un indice 0 indique que le gant a été usé en moins de 100 cycles ; à l’opposé, il a fallu plus de 8000 cycles pour user un gant d’indice 4.
- Résistance à la coupure (dans un intervalle de 0 à 5). C’est le nombre de passage d’une lame, à vitesse constante, nécessaire pour couper le gant. Un gant d’indice 5 peut nécessiter plus de 20 passages.
- Résistance à la déchirure (dans un intervalle de 0 à 4). C’est la force nécessaire, en Newton, pour arriver à déchirer le gant. Si moins de 10 Newton arrachent un gant d’indice 0, un indice 4 nécessitera plus de 75 Newton, soit environ 7.6479 kilogrammes-force.
- Résistance à la perforation (dans un intervalle de 0 à 4). C’est la force nécessaire, en Newton, pour un poinçon standard, pour arriver à percer le gant. Un gant d’indice 4 demandera plus de 150 Newton.
Pour qu’un gant puisse rentrer dans la catégorie Protection contre les risques mécaniques, il doit obtenir au moins 1 comme indice d’abrasion et de déchirure. L’un des matériaux utilisés pour ce genre de gant est le Kevlar.
EN 407 ou la protection contre la chaleur
Cette fois, ce ne sont pas moins de 6 tests qui sont appliqués pour déterminer le niveau de protection du gant. 1 2 3
- Résistance à l’inflammabilité. Ce test va compter le nombre de secondes pendant lesquelles le gant va continuer à brûler alors que la source d’ignition a été supprimée. Plus l’indice est élevé, plus les flammes s’éteignent rapidement. Un indice 4 équivaut à une survie du feu inférieure ou égale à deux secondes.
- Résistance à la chaleur de contact. Ici, on mesure la température qui peut être appliquée sans que l’utilisateur ne ressente de douleur après au moins 15 secondes d’exposition. Les indices vont de 0 à 4, 0 étant pour une température inférieure à 100°C, 4 pour une température de 500°C. Ainsi, un gant d’indice 4 garantit que l’on peut être en contact avec un objet à 500°C sans ressentir de douleur, au moins pendant les 15 premières secondes.
- Résistance à la chaleur de convection, c’est à dire le temps pendant lequel le gant retarde le transfert de chaleur d’une flamme. Il n’est indiqué que si le gant a déjà obtenu un indice 3 ou 4 au test d’inflammabilité. Plus l’indice est élevé, plus le gant parvient longtemps à empêcher la chaleur de la flamme de brûler l’utilisateur ; un gant d’indice 4 peut tenir pendant plus de 18 secondes !
- Résistance à la chaleur radiante ou chaleur rayonnante. On va mesurer la protection offerte par les gants lorsque l’utilisateur sera à proximité d’une source de chaleur sans pour autant être en contact direct avec elle ; très exactement, on mesure le temps en secondes pendant lequel le gant retarde la transmission de la chaleur. De même que le test précédant, celui-ci n’est appliqué que si le gant a déjà obtenu 3 ou 4 au test d’inflammabilité. Un gant d’indice 4 peut, par exemple, retarder le transfert de chaleur pendant plus de 150 secondes.
- Résistance à de petites projections de métal en fusion. C’est le nombre de projections de gouttes de métal en fusion nécessaires pour élever la température du gant (élèvation de 40°C ou autre, cela dépend des sources). Les indices vont de 0 à 4, pour une plage de résultats allant de moins de 5 gouttes nécessaires jusqu’à plus de 35 gouttes.
- Résistance à de grosses projections de métal en fusion. Cette fois, on va tester la masse nécessaire de métal en fusion pour arriver à brûler superficiellement une peau artificielle placée dans le gant. Si moins de 30 grammes peuvent brûler la peau d’un utilisateur de gant d’indice 0, plus de 200 grammes seront nécessaires pour un gant d’indice 4.
Le Nomex est très utilisé pour ce genre de gants.
La norme EN 407 ne vérifie pas l’état de déterioration du gant après le test. Celui-ci peut très bien obtenir de bons résultats mais être suffisamment abimé pour perdre en efficacité lors de l’utilisation suivante. C’est un aspect auquel il faut impérativement penser dans le choix du gant.
Norme EN 12477 = EN 388 + EN 407
Cette norme n’est rien de plus que la combinaison des deux précédentes. Elle réalise les tests des deux autres et classe les gants en deux catégories. 1
- Le gant est de catégorie A s’il procure une protection très élevée.
- Le gant est de catégorie B quand il offre une protection moins élevée mais avec un gant plus souple et flexible.
Norme EN 511 ou protection face au froid
Cette fois, seuls trois tests sont appliqués. 1 2 3
- Résistance au froid de convection. Ce test détermine l’isolation du gant par rapport au froid ambiant. Un indice 4 équivaut à un résultat supérieur ou égal à 0.30 W/m2.°C
- Résistance au froid de contact, jusqu’à -50°C. Les indices sont déterminés comme pour le test précédent.
- Perméabilité à l’eau ; c’est un test binaire. Si le test obtient 0, c’est que l’eau a commencé à s’infiltrer après 30 min d’exposition du gant. Si le test obtient 1, l’eau ne s’infiltre toujours pas après 30 min.
EN 374, risques chimiques et biologiques
Là, on attaque un gros morceau. En fait, cette norme est même découpée en 3 parties, c’est dire. Il faut dire qu’avec des milliers de produits chimiques différents, il y a de quoi tester et retester les gants.
Ceux-ci sont impératifs dans le cas des pictogrammes de danger vu au début ou dans le cas de risques biologiques, indiqués par le pictogramme suivant.
EN 374-1, définitions
La première partie de la norme contient le vocabulaire utilisé pour les différents tests. 1
- Pénétration : on va mesurer, à un niveau non moléculaire, le mouvement d’un produit chimique ou d’un micro-organisme à travers des matérieux poreux, des coutures, des micro-perforations et toutes autres imperfections du gant.
- Perméabilité ou perméation 2 : cette fois, on mesure, au niveau moléculaire, le temps qui va s’écouler du moment où le gant est mis en contact avec un produit dangereux jusqu’à ce que celui-ci atteigne la peau. En effet, les gants peuvent être plus ou moins étanches face à un certain produit.
EN 374-2, test de pénétration
Ce test, consistant à remplir le gant d’air ou d’eau, utilise la règle d’échantillonnage définie par la norme ISO 2859, qui définit des Niveaux de Qualité Acceptables. Plus le NQA est petit, moins il y a de gants, dans un même lot, qui échouent au test. 3
- Niveau 1 : le NQA est inférieur à 4.
- Niveau 2 : le NQA est inférieur à 1,5.
- Niveau 3 : le NQA est inférieur à 0,65.
EN 374-3, test de perméabilité
En fait, cette norme a officiellement été remplacée par la norme EN 16523-1 en avril 2015. Cependant, devant le manque de documentation à ce sujet, nous n’aborderons que la norme EN 374-3, qui elle est documentée par des acteurs du marché.
Comme tester tous les produits chimiques serait long et fastidieux, ce test ne va n’en utiliser que trois, identifié chacun par une lettre.
- A pour méthanol.
- B pour acétone.
- C pour acétonitrile.
- D pour dichlorométhane.
- E pour carbone disulfure.
- F pour toluène.
- G pour diéthylamine.
- Y pour tétrahydrofurane.
- I pour acétate d’éthyle.
- J pour n-heptane.
- K pour soude caustique 40%.
- L pour acide sulfurique 96%.
Je rappelle que nous testons, sur le plan moléculaire, le temps nécessaire pour que le produit chimique traverse la membrane du gant et soit en contact avec la peau. Nous avons 6 valeurs possibles.
- Gant de classe 1 si le temps de passage est supérieur à 10 min.
- Gant de classe 2 si le temps de passage est supérieur à 30 min.
- Gant de classe 3 si le temps de passage est supérieur à 60 min.
- Gant de classe 4 si le temps de passage est supérieur à 120 min.
- Gant de classe 5 si le temps de passage est supérieur à 240 min.
- Gant de classe 6 si le temps de passage est supérieur à 480 min.
Pictogrammes associés
Dans le cas où un gant passe le test de pénétration avec au moins un indice 2, il est considéré comme utilisable en présence de micro-organismes (bactéries et champignons, mais pas les virus 2) et est marqué du pictogramme ci-dessous.
Si le temps de passage, pour chacun des trois produits chimiques, est supérieur à 30 min, alors le gant reçoit le pictogramme suivant avec, en-dessous, les trois lettres correspondantes aux trois produits chimiques (voir liste ci-dessus).
Au contraire, si le gant n’a pas tenu 30 min contre un ou plusieurs produits, mais qu’il a passé le test de pénétration, il sera affublé du pictogramme suivant.
Quels gants choisir ?
La résistance du latex au cyclohexane est bien moins forte que celle offerte par le nitrile, par exemple. Il convient donc de choisir les gants en fonction des produits auxquels ils seront le plus souvent et le plus longtemps mis en contact. On peut s’aider des ressources suivantes.
- Site du gouvernement donnant un tableau simple sur les familles de produits et les matériaux composants un gant.
- Le site protection-des-mains contient un tableau bien plus complet.
- La brochure de l’INRS propose aussi un comparatif.
Pour une poignée de gants et quelques normes de plus
J’ai volontairement choisi de passer sous silence certaines normes, car toutes les énumérer serait long et assez répétitif. Par contre, pour ceux qui veulent creuser un peu, voici celles que nous n’avons pas vues.
- EN 421 pour la radioactivité.
- EN 455 (en) pour les gants médicaux à usage unique.
- EN 10819 (en) à propos des gants destinés à atténuer les vibrations.
- EN 60903 (en) concernant les risques électriques.
Nous voici arrivés à la fin de cet article. J’espère que vous avez pu en apprendre un peu plus sur tous les tests et les normes encadrants la création d’un gant, et que vous penserez à cet article chaque fois que vous en porterez. Pour ceux qui veulent en apprendre plus sur la création d’un gant, n’hésitez pas à chercher sur Internet, il y a de bons reportages, comme ceux-ci :
Enfin, un grand merci à Arius pour la validation ainsi qu’à tous ceux qui m’ont fait des retours et des suggestions.