Une expérimentation libertaire : l'université de Vincennes

À l’heure où Macron et son gouvernement veut réformer l’université, je veux vous parler d’un projet d’université un peu hors du commun : le centre universitaire expérimental de Vincennes.

Mai 68, et la volonté d'un autre monde

Mai 1968. Des mobilisations importantes de la part des étudiants, puis du monde ouvrier. On conteste la société de consommation, et surtout les inégalités qu’elles génèrent : le taux de chômage explose. Il y a encore des bidonvilles en région parisienne. L’exode rural bat son plein. La massification de l’enseignement supérieur entraîne des problèmes de disponibilité de locaux. Le pouvoir Gaullien s’use.

On milite contre le capitalisme, l’autoritarisme, le consumérisme, l’impérialisme américain et de Gaulle. C’est dans cet esprit que va naître l’université de Vincennes.

L'anomalie ?

À la Sorbonne, durant Mai 68, on discutait de l’université idéale : intervention des usagers (étudiants…) à tous les niveaux, pluridisciplinarité1, une évaluation sans notation… Ça tombe bien, il faut construire de nouveaux bâtiments pour accueillir les étudiants. Cette université modernisée plaît à Edgar Faure, ministre de l’éducation national. Il fut loué à la ville de Paris un emplacement dans le bois de Vincennes. Mais le but n’est pas seulement d’innover pédagogiquement : c’est surtout et avant tout de rassembler dans un coin tous les agitateurs gauchistes parisiens, et laisser tranquille les autres universités.

Mais bon, loin d’un ghetto, on retrouve les grands intellectuels de l’époque : Lacoste, Deleuze, Foucault, Badiou, Serres… Que la crème de la crème. Quand on regarde les images de l’époque, on voit des amphis bondés, avec une lignée de magnétophones devant le professeur. Quand on écoute des témoignages de personnes ayant vécue cette période, on peut noter qu’ils ont retrouvé le goût de l’école. On retrouve aussi des cours du soir, permettant aux ouvriers et autres travailleurs de pouvoir se former tout au long de sa vie. Ainsi, un ancien camionneur est devenu professeur titulaire en histoire.


  1. c’est ici qu’on invente le système des UV. Pour encourager la pluridisciplinarité, l’étudiant doit prendre tant d’UV de sa discipline, puis peut piocher dans d’autres matières. 


Gênant un peu trop le pouvoir, de par son effervescence intellectuel, le bail ne fut pas reconduit et l’université fut rasé en 1980, et transféré à Saint-Denis. Il ne reste aujourd’hui qu’une clairière.

Macron a annoncé qu’il voudrait célébrer les 50 ans de Mai 68. Pourquoi pas rendre hommage en s’inspirant de cette expérimentation dans la refonte de l’université ?

Bibliographie

13 commentaires

Article intéressant. :) Je serai curieux de savoir comment était jugé le systéme d’organisation de cette université, si il était efficace, pour quel coût, comment on pouvait y entrer etc.

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Article intéressant. :) Je serai curieux de savoir comment était jugé le systéme d’organisation de cette université, si il était efficace, pour quel coût, comment on pouvait y entrer etc.

Demandred

Les sources sont là pour compléter ^^

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J’ai l’impression d’être passé à côté de ton article, car à part le discours alter-mondialiste, je ne vois pas en quoi il faudrait refaire cette expérimentation : en fait l’université actuelle permet les avantages que tu cites.

Tu cites en effet deux innovations :

  • La possibilité d’avoir un enseignement plus à la carte ;
  • Les cours du soir.

Les cours du soir existent dans de nombreuses universités. Si Toulon est capable de le faire, toute université digne de ce nom en a les moyens.

Et l’université actuelle est bien plus malléable et transdisciplinaire que par le passé. Entre les passerelles nombreuses entre les filaires (je connais quelqu’un qui est passé de Lettres à médecine), des cours plus transverses ou plus ouvertes sur d’autres domaines.

Bref, comme je ne peux pas consulter tes sources (erreur 404 pour Arte, le reste est payant), je ne comprends pas ce que j’ai pu louper.

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Mouais, et qu’est-ce qui dans cette université a expliqué ce comportement ? Car ici, rien n’est expliqué à ce sujet.

Après, je trouve délicats de comparer deux situations de ce genre avec 50 ans d’écart :

  • Mai 1968, c’était durant les 30 glorieuses, l’économie fonctionnait très différemment ;
  • À l’époque, beaucoup de gens n’avaient pas le bac et encore moins une formation dans le supérieur. Le besoin pour les cours du soir était donc plus fort, aller en cours donnait une véritable chance de changer de vie (aujourd’hui c’est moins le cas) ;
  • Les loisirs n’étaient pas les mêmes, qui sait comment auraient été les étudiants dans les conditions de mai 68 avec Facebook et les téléphones ?
  • L’université a eu apparemment des enseignants de très haute qualité, tu ne peux pas avoir de tels noms dans toute la France. Or on sait que des enseignants de grand calibres peuvent faire la différence.

Bref, je cherche à être convaincu. Pour l’instant je ne vois rien d’intéressant, du moins dans ce que tu présentes.

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@Renault : le fait que les gens étaient motivés d’aller en cours et écoute au lieu de traîner sur facebook ?

qwerty

Cela me semble difficile à comparer. Pour commencer le bac était moins démocratisé ce qui veut dire que les étudiants à la fac avaient un meilleur niveau moyen qu’actuellement et probablement une meilleure motivation. A l’époque seul 15% d’une classe d’âge avait le bac contre 80% maintenant. Il me semble aussi que il y avait une selection pour entrer. De plus, vu la réputation "gauchiste" de cette université on peut imaginer un effet d’auto selection : seuls les étudiants sensibles à ces idées et à ce courant postulaient (et donc étaient motivés).

Donc je suis assez dubitatif sur la relation causale entre l’organisation de l’université et une meilleure motivation des étudiants.

L’université a eu apparemment des enseignants de très haute qualité

Des gens qui soutenaient la Chine communiste et Mao pour la plupart, c’est dire la lucidité qui devait régner dans ces milieux… :D

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Des gens qui soutenaient la Chine communiste et Mao pour la plupart, c’est dire la lucidité qui devait régner dans ces milieux… :D

Je ne partage pas leur point de vue sur tout, mais cela reste des personnes intéressantes et certains sont de très bons orateurs.

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Un truc qui qui était fait à Vincennes et qui et fait à Oxford (et aussi ailleurs je pense) : le prof lance un sujet et ça débat. Ça apprends à argumenter, nuancer sa pensée, et tu apprends autant voir plus qu’un long cours magistral (parce que tu retiens mieux dans la praxis).

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