L’histoire est faite de batailles, de guerres, de traités, de décisions, tous plus ou moins lourds de conséquences. Certains aspects sont très connus, d’autres moins. Certains auraient pu avoir des conséquences inimaginables si un seul minuscule aspect avait changé.
Aujourd’hui, nous allons remonter le temps et découvrir un conflit frontalier qui aurait pu dégénérer en une guerre ouverte et destructrice.
Contexte
Le monde d’il y a 50 ans est en pleine guerre froide. Et parmi le bloc communiste, tant la Chine que l’Union Soviétique font partie des leaders. Seulement voilà, les relations se dégradent au fil du temps depuis la mort de Staline, en 1953. Le nouveau dirigeant de l’URSS, Nikita Khrouchtchev, a dénoncé les crimes de ce dernier et cherche une coexistence pacifique avec l’Ouest, ce que Mao Zedong, dirigeant chinois, n’apprécie pas. Pour lui, la révolution doit être mondiale et cohabiter avec le bloc occidental reviendrait à trahir les principes du communisme.
L’URSS, qui au début soutenait les programmes chinois de modernisation, d’armement et de nucléaire, se montre de plus en plus réticente à continuer à aider cet allié de plus en plus gênant et belliqueux. La Chine, plongée dans le Grand bond en avant, souhaite le rattachement, coûte que coûte, de l’île Zhenbao / Damanski, minuscule bout de terre de moins d’un kilomètre carré.
Le monde communiste au bord de la guerre
Dans la nuit du 1er au 2 mars 1969, les Chinois lancent une offensive visant à prendre le contrôle de l’île. Plusieurs dizaines de Soviétiques sont tués ou blessés, dont la délégation partie en pourparler. Ne se laissant pas faire, l’URSS envoie des renforts. Les combats sont sanglants, l’île reste sous contrôle soviétique.
Seulement voilà, l’escarmouche échauffe les esprits et les deux pays massent des troupes de plus en plus nombreuses le long de la frontière. Et les incidents reprennent plusieurs milliers de kilomètres plus à l’ouest en septembre de la même année.
Au Xinjiang, à la frontière entre la Chine et la RSS du Kazakhstan, de nouveaux coups de feu sont échangés. C’est l’incident du Tielieketi. La tension devient telle que l’Union Soviétique va jusqu’à envisager des frappes nucléaires préventives sur les installations chinoises. En effet, Moscou sait que son armement est meilleure et que ses troupes font mieux formées, mais elle craint la guerre avec un pays disposant de ressources humaines bien supérieures.
La résolution
Les deux pays savent ce qu’une guerre ouverte veut dire. Les relations sino-soviétiques vont rester froides pendant toute la guerre froide, mais le conflit sera évité de justesse. Ce n’est qu’en 1991 que l’Union Soviétique se retirera et laissera le contrôle de l’île à la Chine.
Les raisons
Pourquoi deux pays, à fortiori le premier et le troisième mondial en terme de superficie, se seraient-ils battu pour une île ridiculement petite, qui n’offre aucune ressource ni intérêt stratégique ? Cette question divise les historiens. S’il apparaît clair aujourd’hui que la Chine est responsable du déclenchement, les avis sont multiples sur les raisons ayant poussé Mao Zedong à prendre ces risques.
Détourner l’attention des résultats médiocres du Grand bond en avant ? Prouver au monde que la Chine est désormais une puissance avec laquelle il faut compter ? Montrer aux Américains que la Chine peut être un bon allié, ce dont elle a besoin aux vues des relations dégradées avec le Pacte de Varsovie ? Une autre raison encore ?
Ce qui est sûr, c’est que le monde a échappé à une guerre qui aurait été très destructrice. L’Histoire regorge de faits semblables. Parfois, un rien décidé dans un bureau d’une capitale peut changer la vie de millions d’hommes…
Pour ceux qui veulent aller plus loin, je conseille l’article Wikipédia en anglais. Si vous parlez russe, vous pourrez trouver de nombreuses ressources, dont un documentaire sur le sujet.