En discutant avec des amis des prochaines élections départementales et régionales en France, j’ai appris que beaucoup de gens ne connaissaient pas leurs compétences. Or, il s’avère que certains politiciens en profitent, en mettant dans leur programme des choses qui attirent les électeurs, mais qu’ils ne pourront pas mettre en place, puisque ce sont des compétences d’autres échelles ! C’est mal. N’ayant pas le temps de faire un article propre, voici un billet à l’arrache sur les compétences des régions et départements français.
Pour info, dans tout ce billet « compétent » signifie « qui s’occupe de (pas forcément seul) », et non pas « doué ».
Régions
Budget
Voyons le budget d’une région type, afin de voir ce dont elle s’occupe. Aussi incroyable que ça puisse paraitre, cette information est difficile à trouver. Le budget par catégorie (transport, éducation…) n’est pas disponible pour toutes les régions de manière centralisée, et est absent de Wikipédia, pourtant d’habitude pas mal sur le sujet.
Il faut donc fouiller les sites des régions : ici pour l’Île-de-France (oui, la brochure n’est disponible qu’en anglais…), là pour l’Auvergne-Rhône-Alpes (oui, les traits sont mal alignés sur le camembert), je n’ai trouvé qu’un machin illisible pour les Hauts de France, uniquement ce truc nul pour la Bretagne, rien en PACA, ça pour l’Aquitaine (c’est lisible, pour une fois !), ce truc pour l’Occitanie), le minimum syndical pour le Centre, là pour la Normandie (avec des labels trop mignons : pourquoi dire « lycée » ou « éduation » voire « jeunesse », quand on peut écrire « Pour permettre à chacun de batir son avenir » ?) et enfin ici pour les Pays de la Loire (d’une sobriété absolue). La Corse, je n’ai rien trouvé. Pour les TOM-ROM, j’ai la Guyane (un truc flou de 2019), la Guadeloupe, rien pour Mayotte ou la Martinique, et seulement un communiqué de presse politique pour la Réunion.
Les trois compétences les plus couteuses sont presque toujours :
- les transports (et l’aménagement du territoire au sens large) ;
- les lycées (la jeunesse de manière générale) ;
- la politique économique.
Ces trois points représentent 60 % des dépenses en Aquitaine, 70 % en Île-de-France, et plus de 50 % en Guyane.
Et la sécurité, grand thème de cette (toutes, en fait) campagne ? 3 % en Guyane. Et très peu ailleurs (je n’ai pas les chiffres exacts, ce n’est pas un élément propre du budget des autres régions, tellement c’est peu). En gros, un candidat qui parle de sécurité sur la moitié de son programme se fout de votre gueule à un point incommensurable. Encore plus s’il est déjà président de région. Et oui, j’ai un exemple en tête.
Compétences
En zoomant un peu, les régions s’occupent des choses suivantes :
- Lycées (entretien des bâtiments, restauration scolaire, personnel d’entretien, mais PAS les profs, payés et répartis par l’État) ;
- Transport par rail (les fameux TER), et tout transport hors des villes (auparavant géré par les départements1), y compris scolaire ;
- Le développement économique (les régions sont censées être chef de file de la chose).
Le reste, ce sont les Agences régionales de santés (ARS), mais les régions les financent sans avoir trop de pouvoir dedans, le tourisme, l’apprentissage, les grands équipements (ports…), les parcs naturels régionaux, certains musées (compétence partagée régions-départements-communes), et le financement de projets des échelles territoriales plus petites.
Entre les 60 % des trois premières dépenses, et les 20 % de dépenses de fonctionnement et dette, tous les petits trucs représentent ensemble seulement 20 % du budget ensemble.
- Étrangement c’est encore le cas chez moi, et je n’arrive pas à trouver pourquoi, surement une délégation de service…↩
Départements
Budget
Je souhaite remercier l’assemblé des départements de France pour fournir un document synthétique utilisable. MERCI.
En 2016, le premier poste de dépense était l’aide sociale avec 50 %, dont la moitié est due à des aides, dont les bénéficiaires et le montant est déterminé par l’État (RSA…). Le reste, c’est la protection de l’enfance, l’aide aux personnes âgées et handicapées. J’y reviendrai.
Le deuxième poste est le personnel, avec 17 %. Je rappelle que les départements s’occupent entre autres des cartes grises, permis de conduire, etc. Là encore, peu de liberté de la part du département.
Les trois suivants sont le budget des collèges (comme pour les lycées : entretien, batiment, pas les profs), la voirie (les fameuses départementales) et les services antiincendies (SDIS), soit 16 % à eux trois.
Suit une grosse catégorie Autres, pour 15 %.
Compétences
Dépendant des régions pour la politique économique et de l’État pour l’aide sociale, les départements ont des fonctions importantes, mais peu de latitude. Les domaines dans lesquels ils sont chefs de file ou ont une importance sont les suivants :
- Collèges ;
- Incendies et secours ;
- Plan de gestion des déchets (les communes s’occupent de la collecte, pas du plan de gestion à large échelle) ;
- Entretien des routes ;
- Financement de projets communaux ;
- Aide sociale à l’enfance (ASE).
Je me permets de parler de ce dernier point en particulier. L’ASE s’occupe des jeunes orphelins, de la lutte contre la maltraitance. Globalement, en France, l’État (ici représenté par les départements) ne fait pas son travail. Ces dernières années, différents scandales ont éclaté sur la piètre gestion par les ASE des enfants. Rien que ça : à 18 ans, des jeunes sans famille pour les aider sont souvent laissés seuls et sans ressource. Un programme qui ne parle pas d’eux ne changera probablement rien à cette situation, généralisé sur le territoire français.
Voilà. J’espère que ce court billet vous permettra de juger mieux les différents programmes que vous avez dû recevoir. Étant un billet, je n’ai pas tenté d’être objectif, mais vu le nombre de programmes raccord entre les compétences et les promesses de campagne, ça ne doit pas changer grand-chose.