Max Weber et la « violence légitime »

Petite leçon d'autodéfense intellectuelle à l'usage de l'opinion publique

Ces derniers temps, l’actualité brûlante de la France donne lieu à de nombreux discours faisant intervenir la notion de « violence légitime ». C’est dans ce contexte que l’on peut lire ou entendre dans les médias des opinions construites autour d’une distorsion des travaux du sociologue Max Weber, et qu’il serait dangereux de laisser infuser dans l’opinion publique.

Dans ce billet, je vous propose d’examiner plus en détail ce que Max Weber nous dit à propos de la « violence légitime », afin de réarmer l’opinion publique contre son instrumentalisation, et d’alimenter une réflexion nécessaire à propos des diverses violences qui secouent le pays depuis plusieurs semaines.

L'État et le « monopole de la violence légitime »

L’une des contributions majeures des travaux sociologiques de Max Weber à la pensée politique contemporaine est sans doute cette définition de l’État moderne, datant de la fin des années 1910 :

L’État est cette communauté humaine, qui à l’intérieur d’un territoire déterminé (…) revendique pour elle-même et parvient à imposer le monopole de la violence physique légitime.

Max Weber, « Le savant et le politique »
Bien situer le contexte de cette citation

Il est important de préciser dès maintenant qu’il s’agit là d’une définition de l’État par Max Weber, à savoir une description de ce qu’est un État basée sur ses observations, préalable au reste de ses travaux sociologiques et économiques. Une « hypothèse », si vous préférez. En aucun cas cela n’a de valeur prescriptive sur ce que devrait être un État.

De cette définition, nous pouvons dégager trois axes de réflexion intéressants, que nous allons examiner dans ce billet :

  1. « qui (…) revendique pour elle-même et parvient à imposer »,
  2. « le monopole »,
  3. « de la violence physique légitime ».

Pour commencer, nous allons nous concentrer pour l’instant sur l’axe le plus évident : « l’état est détenteur du monopole de la violence légitime ».

Ainsi, Weber définit l’état comme celui à qui vous et moi cédons l’exclusivité de l’usage de la violence légitime. En effet, pour maintenir l’ordre et assurer la protection des citoyens sur un territoire donné, il est parfois nécessaire d’exercer une forme ou une autre de violence physique (arrestation et restriction, mise hors d’état de nuire…), et cette violence physique est exercée par la police qui en est le dépositaire au nom de l’État. Autrement dit : pour vivre en paix dans une société, n’importe qui n’a pas le droit d’être violent n’importe quand. Quand il est nécessaire d’user de la violence, c’est à l’État de le faire, et selon Weber c’est le cœur du "contrat" sans lequel l’État ne peut pas exister.

La première déduction importante que l’on peut en faire, c’est que toute violence exercée sur le territoire par tout autre que l’État est illégitime. Il existe évidemment une dérogation à cela avec le principe juridique de légitime défense, où l’on considère que dans certains cas exceptionnels, l’État a rétrocédé l’usage de la violence à un citoyen pour défendre sa vie ou son intégrité physique, dans une situation où elle était absolument nécessaire et où la police était en incapacité de l’exercer elle-même (typiquement, parce qu’elle n’était pas sur place et qu’il y avait urgence).

Un sophisme autoritaire et sa parade

Il est temps maintenant d’aborder le sujet qui fâche, à savoir le sophisme que l’on entend trop souvent dans la bouche de certains chefs d’États, ministres, hauts fonctionnaires de l’État ou chroniqueurs influents dans les médias.

Ce que ne dit PAS Max Weber
  • « Toute violence exercée par l’État est légitime »
  • « La "violence policière", ça n’existe pas, c’est un non-sujet »

Pour expliquer et parer ce sophisme, nous devons examiner l’épithète « légitime » tel qu’il est utilisé dans la définition : « un État est celui qui détient le monopole de la violence physique légitime ».

C’est très simple en réalité : si Max Weber avait voulu laisser entendre que toute violence exercée par l’État était forcément légitime, il ne se serait pas encombré d’un adjectif superflu et aurait déclaré que « l’état est celui qui détient le monopole de la violence physique », tout court. Or ce n’est pas du tout ce qu’il a écrit !

L’utilisation de cet épithète est sans équivoque. Dans la définition de Weber, il signifie précisément ceci :

  • Il existe un exercice de la violence physique qui est légitime (et donc également un exercice qui est illégitime),
  • Lorsqu’un usage légitime de la violence est nécessaire, c’est l’État qui en a le monopole.

Et… c’est tout !

Ce que l’on peut en déduire, c’est justement qu’il peut exister des cas où l’État ou la police exerce une violence physique qui n’est pas légitime. C’est notamment pour cela qu’existent certains corps comme l’IGPN (la "police des polices"), et que nous avons tout à fait le droit, en France, de saisir la justice lorsque la police exerce une violence qui dépasse le cadre strict de sa mission de protection des citoyens et de maintien de l’ordre.

Ce qui est d’autant plus faux dans les déclarations plus haut, c’est qu’en faisant dire ce genre de choses à Max Weber, on transforme sa définition de l’État en autre chose : une thèse, un résultat, ou une conclusion de ses travaux. Il m’est déjà arrivé d’entendre ce sophisme introduit de cette manière : « on sait depuis Max Weber que l’État a le monopole de la violence légitime… », comme si c’était une découverte qu’il aurait faite en 1917…

Ne plus se laisser avoir

Je vous encourage très vivement à écouter les diverses interventions des représentants de l’État et de l’ordre dans les médias, pour vous entraîner à détecter tous les cas où l’on prête à Max Weber ces propos qu’il n’a jamais tenus.

Chaque occasion que vous aurez d’entendre ce sophisme devrait vous faire redoubler de vigilance sur les intentions de la personne qui en fait l’usage : le but d’un sophisme est de persuader pour manipuler l’opinion sans avoir besoin de convaincre sur le fond, et cela cache généralement quelque chose de peu reluisant.

En particulier, ce genre de propos peut servir de justification pour ne pas considérer des violences policières comme le symptôme d’une possible dérive répressive et autoritaire d’un État donné.

Implications dans une société démocratique

Nous en arrivons à la partie la plus sensible et la plus intéressante de la définition de Max Weber, car c’est à partir de là que se jouent toutes les questions sur l’actualité française, et c’est donc ici qu’il est primordial que l’opinion publique reste lucide.

Il s’agit du troisième axe de la définition de Weber : l’état est une communauté « qui (…) revendique pour elle-même et parvient à imposer le monopole de la violence physique légitime ».

Ne sombrons pas dans le sophisme inverse

À aucun moment, Max Weber ne raisonne sur ce qu’est une démocratie, ni ne prescrit ce que devrait être une démocratie. Il est question ici d’État, et uniquement d’État.

En particulier, cette partie de sa définition s’applique aussi bien à une démocratie qu’à un état purement autoritaire. En effet, l’État peut tout à fait revendiquer et parvenir à imposer son monopole de la violence par la force… Ce qui suit va donc légèrement sortir du cadre (très large) de la définition de l’État par Max Weber en nous plaçant dans le contexte qui nous intéresse : celui d’une démocratie comme se revendique de l’être la république Française, à savoir une société où le pouvoir de l’État émane du peuple.

En clair, dans le contexte d’une société démocratique, cela signifie que si l’État existe, c’est parce que la population (au travers de la société civile) est globalement d’accord pour lui céder le monopole de la violence physique légitime. Autrement dit, lorsque l’État exerce une violence, c’est le fait que le peuple soit convaincu que son usage de la violence est légitime qui assoit son rôle en tant qu’État.

Par exemple, lorsqu’un groupe d’individus surgit, armés de fusils d’assaut, dans une salle de concert bondée et se met à massacrer tout le monde, l’opinion publique est unanime : la police a toute légitimité à mettre le plus rapidement possible ces individus hors d’état de nuire, quitte à les tuer si nécessaire. C’est la définition même de la "violence physique légitime", du maintien de l’ordre, et de la protection des citoyens.

Là où cela devient intéressant, c’est que dans l’hypothèse où il ne serait pas très clair si une violence exercée par l’État au travers de la police est légitime ou non (selon le droit ou la volonté du peuple), donc dans l’hypothèse où il est difficile de convaincre, il arrive que l’État cherche à persuader le peuple de sa légitimité pour se maintenir.

Les outils à disposition d’un État pour opérer une telle persuasion sont multiples, mais on peut en citer trois :

  • Le premier que l’on a vu juste au-dessus, à savoir le sophisme qui consiste à dire "c’est la police, la police est dépositaire du monopole de l’État sur la violence légitime, donc elle a tout à fait raison de faire ce qu’elle fait, dans tous les cas" ;
  • Le second, beaucoup plus grossier, est l’instauration d’une post-vérité où des mensonges sont ouvertement proférés pour justifier certaines actions, et notamment des déclarations de guerre comme cela s’est déjà produit à plusieurs reprises dans le monde durant les dernières décennies ;
  • Le troisième, plus insidieux, est la distillation d’éléments de langage ayant pour but de manipuler l’opinion en l’exposant à un champ lexical du danger.

Par exemple, puisque l’attentat du Bataclan est encore frais dans nos mémoires, on pourrait facilement envisager un glissement sémantique sur la notion de "terrorisme", et habituer l’opinion publique à l’associer à un groupe de personnes arbitraires. Si l’on voulait opérer ce genre de glissement sémantique sur, disons, un groupe d’activistes écologistes radicaux, on pourrait former le terme "éco-terrorisme" quand bien même les activités de ces militants n’ont rien à voir avec le massacre d’innocents. Un autre exemple de glissement sémantique pourrait être d’habituer le peuple à qualifier une idéologie politique "de gauche" comme étant "d’extrême gauche", et donc inventer le terme "ultra-gauche" pour qualifier ce qui était avant cela considéré comme "l’extrême gauche", ce qui a pour effet de renforcer une connotation négative sur une idéologie dont on voudrait détourner l’opinion…

Ces deux exemples ne sont bien évidemment pas anodins, et l’interprétation que j’en fais ici relève de ma propre opinion sur l’actualité, mais ce qu’il est primordial de garder en tête, c’est que dans un État démocratique, la légitimité de la violence exercée par l’État lui est conférée, directement ou indirectement, par le peuple, et qu’en vertu de cela, il est d’autant plus important que celui-ci soit libre et que chacun et chacune d’entre nous exerce sa pensée critique face à l’actualité, en faisant notamment très attention aux sophismes et autres éléments de langage qui peuvent être utilisés dans les médias pour influencer son opinion.


Pour finir, j’espère que cette petite exploration de la définition de Max Weber permettra au plus grand nombre de comprendre, désormais, ce qui se joue politiquement dans les médias quand il est question de violents affrontements entre une partie de la population et les forces de l’ordre.

Je ne saurais trop vous encourager à exercer votre esprit critique face à ce que vous lisez, voyez, ou entendez dire à propos de l’actualité.

20 commentaires

Merci pour ce billet.

Ce n’est pas la pensée qui fabrique les mots, mais les mots qui fabriquent la pensée. Les utilisateurs de tels sophismes en ont parfaitement conscience.

Pour le reste je ne vois pas ce qu’il y a à ajouter, à part que j’ignorais que des gens pouvaient penser sincèrement que toute violence exercée par l’État était légitime et que les violences policières étaient un non sujet. Ou alors ça signifie que les médias font un sacré travail de désinformation.

Pour le reste je ne vois pas ce qu’il y a à ajouter, à part que j’ignorais que des gens pouvaient penser sincèrement que toute violence exercée par l’État était légitime et que les violences policières étaient un non sujet. Ou alors ça signifie que les médias font un sacré travail de désinformation.

Malheureusement, on a pu entendre ces propos explicitement sortir de la bouche d’un chroniqueur et ancien candidat à la présidentielle dont le nom de famille commence par Z, mais aussi sans aucune ambiguïté de celle de l’actuel ministre de l’intérieur français et de certains préfets de police, et plus indirectement de celle du président de la république.

D’où ce billet pour au moins raviver la vigilance, parce que j’estime personnellement que ces propos sont très graves, et signes d’une dérive préoccupante.

Libre à chacun de construire sa propre opinion sur la question, mais je pense que l’attention mérite au moins d’être attirée sur ce point.

Et puis c’était aussi, au titre de la culture générale, l’occasion d’aborder une définition importante en sociologie et en science politique. :)

+2 -0

Hello,

Petite remarque par rapport à « qui (…) revendique pour elle-même et parvient à imposer ». Ce dont Weber fait référence ici, ce n’est pas l’opinion publique mais la société civile.

En disant l’opinion publique, cela donne quelque peu l’idée qu’elle est un bloc homogène permettant à l’État d’exercer une violence jugée légitime ou non. Or, l’opinion publique est une notion intrinsèquement plurielle et plurale. Même face à l’actualité des manifestations dans le cadre de la réforme des retraites, il n’existe pas une opinion mais des opinions.

L’idée de la violence légitime de Weber, telle qu’elle a notamment été implémentée par les juristes dans les lois qui régissent l’action de la police, la législation sur la légitime défense ou la notion de contrainte irrésistible (une autre exception) et discutée notamment en doctrine, est que c’est la société civile — ensemble de personnes qui ont décidé d’établir un Etat ainsi que les lois régissant et édictant les règles de vie en société acceptables pour eux-mêmes, dans le temps et sur un territoire déterminé — qui autorise l’État a jouir de ce droit.

Ainsi, il y a clairement un caractère législatif et un lien avec la notion que cette violence légitime est un pouvoir qui est investi à l’État par le peuple, la société civile (et donc à travers ses représentants… qui sont d’ailleurs chargés de contrôler l’action du gouvernement, notamment par le biais de la création de commissions d’enquête) et non par une opinion publique.

La notion de société civile voire de peuple est distincte de celle de l’opinion publique en ce sens qu’elle n’implique pas une opinion. Mais des droits et obligations. Elle évite d’ailleurs un deuxième écueil, plus idéologique, qui viendrait à considérer que, si X dizaines/centaines/milliers de personnes manifestent, elles représenteraient l’opinion publique et que l’État devrait céder séance tenante face à la « volonté du peuple », ce qui est pour le coup aussi dangereux que de penser que toute violence de la police est légitime. Je ne fais pas ici spécifiquement référence à la réforme des retraites, c’est plus une remarque générale. Mais dans le cas des manifestations sur la réforme, si l’opinion publique est divisée, le gouvernement devrait toutefois sérieusement écouter l’ensemble des opinions et notamment celles qui s’expriment actuellement et réévaluer sa position. Ça fait aussi partie du jeu démocratique.

Ainsi, fut un temps, la société considérait par exemple que les travailleurs avaient droit à une meilleure protection sociale et ainsi la société civile s’est exprimée par l’établissement de lois sur le travail qui sont venues régir de nouvelles règles de société.

Bien entendu, avant que cela ne se produise, il y a eu des drames, des manifestations, etc. Mais il n’y a jamais eu qu’une opinion publique. C’est la société civile qui, dans sa pluralité d’opinions, a investi ses représentants de la mission d’édicter de nouvelles lois.

L’on remarque très vite que, dans nos systèmes, la notion de société civile est extrêmement proche de la manière dont nous concevons la vie en société : le fonctionnement démocratique. :)

+3 -0

Merci Arius pour cette distinction particulièrement intéressante, qui rajoute une indirection supplémentaire et change quelque peu le poids donné à la manipulation de l’opinion.

Comme je le disais sur Discord, je ne suis pas sociologue pour 2 sous, et donc je suis très heureux que mes errances soient corrigées sur la question parce que ça me permet d’affiner ma propre compréhension.

Je vais donc devoir corriger ma copie sur la troisième partie de ce billet. :)

+0 -0

Je ne dirais pas que ce soit une erreur (puisqu’en soi, l’on pourrait dire que c’est la "volonté du peuple" (opinion publique majoritaire, ce qui serait correct d’un point de vue sociologique)), juste l’interprétation "pratique" qu’en font les juristes pour déterminer le fonctionnement de nos Etats en évitant d’entrer dans le terrain brûlant de la détermination de la qualification d’une opinion majoritaire.

Et c’est d’ailleurs, aussi, le jeu de certains politiques de dire "Ah oui, il y a X milliers de personnes qui manifestent, mais ils ne représentent pas l’opinion majoritaire ! Nous avons été élus, nous avons la légitimité démocratique !". Ou, comme je le disais sur un autre serveur Discord : l’une des principales critiques des politiciens envers le pouvoir judiciaire est de dire "Mais vous, les juges, qui êtes-vous pour annuler pour illégalité les lois que nous votons ?! Vous n’êtes pas élus !" (c’est par exemple les propos tenus par Berlusconi, les critiques adressées par le gouvernement au pouvoir judiciaire en Pologne ou en Hongrie et les tentatives pour exercer un contrôle sur celui-ci, etc.).

On a déjà entendu cela en France et en Belgique aussi.

https://www.youtube.com/watch?v=0dvOyA01lcs

+2 -0

Si je comprends bien, cela signifie que je pourrais grosso-modo remplacer "l’opinion publique" par "le peuple" ou "la volonté du peuple" ou "le peuple (par le biais de la société civile)" pour que cette partie du texte soit plus exacte ?

+1 -0

Oui, ou encore "la population (de l’Etat)". C’est ce qu’il vise par "L’État est cette communauté humaine" (la population étant l’une des caractéristiques de ce qu’est un Etat1). Donc sa population, sa société civile,…


  1. Selon les termes de la convention de Montevideo, un Etat a quatre caractéristiques constitutives qui doivent être constatées de manière évidente : 1) l’existence d’un territoire délimité et déterminé ; 2) l’existence d’une population résidante sur ce territoire ; 3) l’existence d’une forme minimale de gouvernement et 4) la capacité à entrer en relation avec les autres États.
+2 -0

J’ai l’impression qu’un des drames de ce qu’il se joue actuellement est d’avoir fait croire que dénoncer les violences policières est un acte de gauche. Alors que non, c’est quelque chose de démocratique, qui devrait être important aussi bien à droite qu’à gauche.

+6 -0

Je pense qu’il y a erreur.

Il faut voir que Weber ne donne pas une définition de ce que devrait être l’État. Il tente juste de définir un concept, celui d’État (moderne).

Weber ne dit pas que l’organisation du pouvoir devrait être l’État tel qu’il le décrit. Il essaye juste de trouver ce qui caractérise l’organisation de la société (de son époque, et de celles qu’il connait par ailleurs) avec les concepts et les mots les plus justes.

Ça n’a pas de valeur à définir ce qui devrait être.

Je pense egalement que tu fais une erreur. Dans le "l’État est une communauté", communauté ne désigne pas le peuple d’un pays mais la communauté qui compose l’État en temps qu’organe de pouvoir (c’est à dire le gouvernement, le parlement, les administratif, l’armée etc. je connais pas le périmètre exact, ça doit dépendre des auteurs, des définitions etc.). D’ailleurs la définition de monopole de la violence légitime dans un autre livre de Weber (Économie et société) est plus clair de ce point de vue :

Nous entendons par État "une entreprise politique à caractère institutionnel" lorsque et tant que sa direction administrative revendique avec succès, dans l’application de ses règlements, le monopole de la contrainte physique légitime.

On voit bien que c’est la "direction administrative" qui "revendique avec succès" le monopole etc. On sent bien que c’est pas forcement lié à la démocratie.

En d’autre terme on assiste bien à travers les discours à une "direction administrative" (composé de ministre, élu, préfet) qui revendique la légitimité de la violence. Si ils y arrivent "dans l’application de ses règlements", (cad qu’ils ne soient pas condamné par la justice) on se rapprochera de fait de la description de l’État de Max Weber. Si ils n’y arrivent pas, l’organisation actuelle perdra un peu de son "Etatisme", la violence légitime devenant un peu plus partagé entre différent pole (l’État est un concept, il n’est jamais parfaitement atteint dans la réalité).

Comme le concept de Weber est large il permet même de décrire de manière plus général ce qu’on observe :

La compétition entre deux entités qui revendiquent la "direction administrative" d’un territoire donnée à travers la "légitimité" de "la contrainte physique" : l’administration actuelle versus un mouvement plus "démocratique" (ou "qui se veut plus démocratique", je ne veux pas rentrer dans le débat de savoir si les manifestations sont oui ou non plus démocratique c’est pas ce qui nous intéresse ici).

Si on s’intéresse à la définition de la légitimité de Weber (toujours dans Economie et societé) :

La légitimité d’un ordre peut être garantie :

A. De façon purement intime :

vael : je passe

B. Ou (et même uniquement) par les expectations de certaines conséquences spécifiques externes, par exemple l’intérêt. Il s’agit cependant de l’expectation d’une certaine espèce. Cet ordre nous l’appelons :

  1. Convention, lorsque sa validité est garantie extérieurement par la chance que, si on s’en écarte à l’intérieur d’un groupes d’hommes déterminé, on s’expose à une réprobation (relativement) générale et pratiquement perceptible;
  2. Droit, lorsque la validité est garantie extérieurement par la chance d’une contrainte (physique ou psychique), grâce à l’activité d’une instance humaine, spécialement institué à cet effet, qui force au respect de l’ordre et châtie la violation.

Bref Weber décrit les fonctionnements sociaux, il ne dit pas qu’on doit vivre en démocratie, que la légitimité, la violence etc. ne doivent être démocratique ou autre. Il décrit juste des concepts et leur l’articulation qui semblent avoir une validité pour décrire la réalité.

Il ne me semble donc pas qu’il dise :

c’est le peuple qui assoit la légitimité de l’État

(je pense pas que tu trouveras de politiste ou sociologue qui soit d’accord avec cette affirmation).

Si la direction de l’État est assez fort pour assoir n’importe qu’elle autorité, arbitrairement aux dépens de n’importe qui, c’est toujours un État au sens de Weber.

PS : ça veut pas dire que je suis d’accord avec les préfet et autre hein, juste que je pense que ta lecture de Weber est tous aussi fausse que celle qui justifie moralement la violence d l’État grâce à Weber.

Ça n’a pas de valeur à définir ce qui devrait être.

Mais nous sommes parfaitement d’accord sur ce point, et ce n’est pas du tout ce qui est écrit. J’attire d’ailleurs l’attention dans le billet, sur le fait que la déclaration de Weber est une définition préalable à ses travaux économiques et sociologiques, et non une prescription ni un résultat : c’est même exactement une des mécaniques du sophisme que je pointe du doigt dans la seconde partie. Cela dit si tu es passé à côté de cette précision, c’est peut-être que je devrais m’appesantir dessus d’entrée de jeu.

Tu noteras également qu’à aucun moment je ne cherche à faire dire à Weber qu’il définit une démocratie (terme qui n’apparaît nulle part dans le billet) : ce n’est pas du tout de démocratie que parle Weber, par contre la définition est absolument claire sur le fait que ce monopole soit cédé à l’État par la population du territoire, et le fait que ce dernier maintient ce monopole de la violence légitime. Ensuite, on peut tout à fait se questionner et raisonner en tenant compte du contexte de la république Française (où se déroule l’actualité dont il est question dès l’introduction du billet), qui est supposée être une démocratie, donc où l’autorité et la légitimité de l’État sont censées émaner, directement ou indirectement, du peuple.

Je pense donc qu’il y a une confusion, mais en premier lieu sur ce qui est effectivement dit dans le billet. Il est tout aussi possible que la troisième partie du texte manque de clarté et favorise une interprétation biaisée de la définition de Max Weber, en déduisant trop vite de la définition ce que cela signifie dans une démocratie, auquel cas il me revient de rajouter une précision importante dans cette partie (notamment en changeant déjà son titre en "implications dans une société démocratique" et en clarifiant le raisonnement), et donc je vais de ce pas clarifier ces points dans le billet.

Mais de là à parler de "lecture fausse" en me faisant dire ce que je n’ai pas dit, ou bien, dès le départ, l’inverse de ce que j’ai pris le temps de préciser, il y a quand même un sacré pas à franchir…

+1 -0

Effectivement.

C’est moi qui ait fait le rapprochement, dans nos systèmes, avec la démocratie.

Je dis clairement que c’est l’application qu’en ont fait les juristes dans la création de nos systèmes.

Dans un système démocratique, ce pouvoir donné à l’État vient du peuple, par l’entremise de ses représentants élus, au travers des lois votées.

Cela est spécifique à notre système mais ne préjuge nullement que le propos de Weber est système-agnostique.

+2 -0

Et donc c’est pour cela que je viens de mettre à jour le billet, en répétant la précision initiale (ce que dit Weber est une définition et non une prescription) dès l’introduction de la citation, et en articulant plus précisément la troisième partie pour éviter de faire un raccourcis trompeur entre la définition de Max Weber et ce que cela signifie dans une société démocratique.

+1 -0

J’avais commencé une réponse mais elle n’est plus valable avec les modifs de ta conclusion qui se concentre sur l’état dit "démocratique". Je suis en effet beaucoup plus d’accord maintenant. Toutefois quelque remarques quand même ! A la vue de tes modifications dans la conclusion tu devrais être, dans les grandes lignes, d’accord :

En effet, pour maintenir l’ordre et assurer la protection des citoyens sur un territoire donné, il est parfois nécessaire d’exercer une forme ou une autre de violence physique (arrestation et restriction, mise hors d’état de nuire…), et cette violence physique est exercée par la police qui en est le dépositaire au nom de l’État. Autrement dit : pour vivre en paix dans une société, n’importe qui n’a pas le droit d’être violent n’importe quand. Quand il est nécessaire d’user de la violence, c’est à l’État de le faire, et selon Weber c’est le cœur du "contrat" sans lequel l’État ne peut pas exister.

Tu extrapoles, Weber ne dit pas à quoi sert la violence de l’État, il ne dit pas que c’est pour maintenir l’ordre et assurer la protection des citoyens. Weber ne dit pas non plus que c’est l’État uniquement qui possède l’usage de la violence mais plutot qu’il en dicte les modalités. Il peut très bien en déléguer son usage. Par exemple l’État démocratique à longtemps autorisé un père de famille à châtier ses enfants, sa femme et ses esclaves (exemple de Weber lui même). En vérité il serait intéressant de lire un approche historique du concept de "maintenir l’ordre et protéger les citoyens", même si c’est sans doute assez vieux, ce que veut dire "protéger" et "maintenir l’ordre" à très probablement beaucoup, beaucoup évolué avec le temps, cf. mon exemple avec le droit de châtier.

Autrement dit : pour vivre en paix dans une société, n’importe qui n’a pas le droit d’être violent n’importe quand.

Weber ne dit pas non plus que la fin (au sens de but) de l’État c’est de vivre en paix. D’ailleurs c’est pour ça que la définition de l’État d’après Weber est celle du monopole de la violence légitime. C’est la seule caractéristique commune de tous les États. Il n’y a pas de but commun à tous les États (si ce n’est à s’opposer, par tous ses moyens, à sa destruction, mais je sais pas si Weber le dit).

La première déduction importante que l’on peut en faire, c’est que toute violence exercée sur le territoire par tout autre que l’État est illégitime. Il existe évidemment une dérogation à cela avec le principe juridique de légitime défense, où l’on considère que dans certains cas exceptionnels, l’État a rétrocédé l’usage de la violence à un citoyen pour défendre sa vie ou son intégrité physique, dans une situation où elle était absolument nécessaire et où la police était en incapacité de l’exercer elle-même (typiquement, parce qu’elle n’était pas sur place et qu’il y avait urgence).

Cf premier remarque. Et les éventuelles dérogations sont beaucoup plus large que la "légitime défense".

Sur un autre sujet :

Je ne connais pas les causes du maintient de l’ordre du type Sainte Soline/Gilet Jaune où il y a clairement une coté "nous arrêterons les "délinquants" quoi qu’il en coute". Ça peut être vu comme des stratégies défectueuses, mal pensées, ou au contraire volontaire, répressive par principe (il faut répliquer avec la force aux criminels)et dont le but est entre autre de décourager les oppositions radicales par la violence. Et donc, même si j’ai pas de source (j’ai pas lu les bouquins qui sortent de ce genre https://www.seuil.com/ouvrage/politiques-du-desordre-olivier-fillieule/9782021433968 qui peuvent discuter de ce genre de sujet) je pense que la these de la dissuasion l’explique en partie. Dans ce cas l’usage de la violence physique (indépendamment des discours qui là sous-tende, là justifie etc.) fait partie des moyens de persuasion de l’État, même dans un État démocratique.

Sur encore un autre sujet :

« La "violence policière", ça n’existe pas, c’est un non-sujet »

nohar

Cette phrase n’a pas de rapport avec Weber, puis qu’elle dit "qu’il n’y a pas de violence". Et vient plutôt sous entendre que : "ce qui est légitime n’est pas de la violence". Et les idées peuvent facilement glisser vers "ce qui est illégitime c’est la violence". Cela me semble peut-être encore plus dangereux que de dire que la violence de l’État est forcement légitime (qui dans la bouche de l’État sous entend généralement "et donc moralement légitime"). De là on est pas loin de un "tir de LBD n’est pas violent". (souvent accolé à : "casser une vitrine, détruire une pompe de mega-bassine etc. est violent").

Et en ouvrant le sujet , c’est toujours intéressant de rappeler l’ouvrage de Francis Dupuis Deri : Démocratie : Histoire politique d’un mot aux États-Unis et en France . Ça remet dans une perspective historiquement comment a été construit et pensé la "démocratie représentative" et du coup ça peut un peu aider à comprendre comment l’État se comporte.

+0 -0

Oui, je suis effectivement d’accord avec tout ce que tu dis. Là on est plutôt plus sur des errances dûes à ma volonté de vulgariser et de rendre mon propos plus simple à digérer (ce qui entraîne un manque de précision et, comme tu le soulignes, un manque de rigueur) qu’à une vraie mésinterprétation de Weber.

Il y aura donc quelques trucs à revoir dans cette phrase.

Je ne sais pas les causes du maintient de l’ordre type Sainte Soline/Gilet Jaune où il y a clairement une coté "nous arrêterons les "délinquants" quoi qu’il en coute" et si ça peut être vu comme des stratégie défectueuse, mal pensée, ou au contraire répressive par principe (il faut répliquer avec la force aux criminels) on peut aussi le voir comme une manière de faire peur et de décourager les oppositions radicale par la violence.

Il y a effectivement une volonté de "passer le goût de recommencer" lorsque les forces de l’ordre ont comme instruction de défendre la bassine "quel qu’en soit le coût humain". Ce que je déplore, personnellement, c’est qu’au lieu d’assumer une ligne stratégique claire ("on a mis en place un appareil répressif musclé, deal with it"), la communication en provenance du ministre de l’intérieur vise clairement à minimiser la force employée pour qu’elle n’apparaisse pas trop disproportionnée, et à criminaliser les manifestants et activistes aux yeux du reste du pays.

À ce titre, c’est un durcissement plutôt inquiétant quand on remarque, en parallèle, que l’appareil de maintien de l’ordre mis en place pour les diverses autres manifestations dans le pays (contre la réforme des retraites) a pour effet d’effrayer et de dissuader les gens d’aller manifester, puisque de nombreuses personnes qui n’avaient rien à voir avec les black blocs en ont fait les frais. Dans mon esprit cela fait beaucoup trop d’éléments conjugués pour être simplement de l’incompétence, et pas une dérive autoritaire.

Cette phrase n’a pas de rapport avec Weber, puis qu’elle dit "qu’il n’y a pas de violence".

Alors, effectivement, hors contexte, c’est présenté comme une négation de la réalité. Néanmoins, dans les diverses interventions de Darmanin, il est clair que cette formulation est utilisée dans le sens de la phrase précédente ("La violence en question est parfaitement légitime parce qu’elle vient de la police qui est mandatée par l’État pour cela, donc le concept de violence policière n’existe pas"). Il faudrait que je retrouve l’intervention de Darmanin où il nomme explicitement Max Weber. C’est juste un peu difficile vue la masse de prises de paroles provocatrices et indignes de sa fonction que l’on retrouve sur le net par ailleurs ("quand on me parle de violences policières, j’étouffe !", etc.).

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qu’à une vraie mésinterprétation de Weber.

oui, si j’ai réagis (vivement) à ton billet c’est parce que dans son écriture global : ton intro + la conclusion (avant modif) j’y vois (voyais) un coté "l’État c’est intrinsèquement bon et bien, il nous protège, éventuellement grâce à la violence, selon des lois que nous le peuple à travers la démocratie fabriquons, c’est son usage à la marge qui est mauvais".

Vision qui me semble erroné. Cette vision est entre autre un construction que l’état à façonné (a travers le genre de discours que tu dénonces)

("on a mis en place un appareil répressif musclé, deal with it")

L’État nie quasi systématiquement sa violence, au mieux parfois il la minimise tous en la justifiant (ce qui veut pas dire que parfois il ne soit pas condamné, ou fasse un mauvais mouvement et perde de la légitimité). Il suffit de lire le volume pléthorique de travaux de recherche en sociaux/science po sur la police en banlieue, sur les problemes sanitaire lié à l’utilisation de produits toxique (chlordécone en tête), la non réponse aux rapports pointant les violences policière émanant de l’Onu, Amnesty etc.

Dans mon esprit cela fait beaucoup trop d’éléments conjugués pour être simplement de l’incompétence, et pas une dérive autoritaire.

nohar

Je le pense egalement sauf que je n’utiliserais pas le mot "dérive", car cette "dérive autoritaire" de l’État est pour moi naturel, ce n’est donc pas une "dérive" au sens commun du terme dans cette expression qui sous entend que : "le principe est bon c’est juste pas par là que ça devrait aller" (bizarrement c’est par contre, pour moi, bien une "dérive" au sens ou "dériver" peut signifier "ne mettre aucun contrôle et aller là où le sens naturel du courant porte"). Quand les fins de l’État diffèrent d’une partie de la population, et que celle ci entend ne pas le laisser faire l’usage de la violence est son ultime recours. Et si son usage de la force fait douter sa population, tous les moyens sont éventuellement bon pour garder sa légitimité, les meilleurs comme les pires.

Bref au risque de me répéter. Si l’État ment, redéfinis le vocabulaire et violente, çà ne me semble pas être une "erreur de parcourt", "une dérive" ou autre mais un fonctionnement sinon "normal" au moins attendu et déjà expérimenté mainte fois. Et par conséquent dire de l’État que "c’est le peuple qui le légitime", "qu’il a pour but de maintenir la paix" me parait erroné. Même en "démocratie", et peut être même surtout en "démocratie" où le verni des mots (parfois eux même galvaudés) cache des fonctionnements sociaux et politique sous-jacent si prompt à ressortir quand les conditions se présentent. Définir au plus juste ce qu’est l’État, sans l’enjoliver, permet sans doute de prendre de meilleurs décision sur ce qu’il faudrait faire en fonction de ce que l’on souhaite.

oui, si j’ai réagis (vivement) à ton billet c’est parce que dans son écriture global : ton intro + la conclusion (avant modif) j’y vois (voyais) un coté "l’État c’est intrinsèquement bon et bien, il nous protège, éventuellement grâce à la violence, selon des lois que nous le peuple à travers la démocratie fabriquons, c’est son usage à la marge qui est mauvais".

Pour ma part je dirais que tu as prêté des intentions derrière les propos de @nohar, et je n’ai pas vu d’affirmation type « l’État c’est intrinsèquement bon et bien […] ». Ceci même en sachant que l’auteur du billet n’est pas libertarien.

L’État (avec un « É » s’il vous plaît, à ne pas confondre avec le mot « état » qui désigne tout autre chose) est une entité qui exerce le monopole de la violence légitime (@nohar a fait le tour de la question) sur une autre entité qu’on appelle la Nation. Nation qui peut avoir plusieurs définitions selon Renan, etc.

J’aimerais beaucoup savoir comment tu définirais l’État autrement.

Ce que je sais, c’est que les libéraux voient l’État comme un mal nécessaire (on est très éloigné du « c’est intrinsèquement bon et bien »), les libertariens n’en veulent absolument pas…

… Et il y a le fascisme (le vrai) qui prône « Tout dans l’État, rien hors de l’État, rien contre l’État ! » Dans cette maxime, est-ce que Mussolini définissait l’État autrement ?

Perso je vois bien ce que Vael veut dire, et je suis très satisfait d’avoir une critique aussi rigoureuse de mon billet. Ça me permet de l’affiner en évitant les tournures de phrase malheureuses qui prêtent à des interprétations biaisées des notions qui sont manipulées dedans, et donc ça me permet également d’affiner mon propos et ma pensée.

Même si la forme de la critique est parfois un peu brute, ce billet n’en sortira que plus précis et plus exact. :)

J’aimerais beaucoup savoir comment tu définirais l’État autrement.

En fait même si dans l’histoire on peut recenser plus de 150 définitions distinctes de l’État, de nos jours c’est la définition de Max Weber qui est considérée de façon consensuelle comme celle de référence en socio et en science politique. Et surtout c’est totalement celle qui est détournée quand un intervenant aux intentions peu recommandables veut enfumer son monde sur les plateaux télé.

Dans le dictionnaire on peut en trouver une autre définition comme celle du Larousse qui montre qu’on peut le voir différemment suivant l’angle selon lequel on se place, mais ce n’est pas forcément pertinent dans le présent contexte (et on sent quand même l’héritage de la définition de Weber) :

Société politique résultant de la fixation, sur un territoire délimité par des frontières, d’un groupe humain présentant des caractères plus ou moins marqués d’homogénéité culturelle et régi par un pouvoir institutionnalisé. (En droit constitutionnel, l’État est une personne morale territoriale de droit public personnifiant juridiquement la nation, titulaire de la souveraineté interne et internationale et du monopole de la contrainte organisée.)

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Et en ouvrant le sujet , c’est toujours intéressant de rappeler l’ouvrage de Francis Dupuis Deri : Démocratie : Histoire politique d’un mot aux États-Unis et en France . Ça remet dans une perspective historiquement comment a été construit et pensé la "démocratie représentative" et du coup ça peut un peu aider à comprendre comment l’État se comporte.

@Vael

Je l’ai entamé hier soir et… Vous entendez ce bruit ? C’est celui de ce qu’il me restait de naïveté benoîte qui part en fumée.

Merci pour cette référence. En effet, ça remet pas mal en cause certains éléments de la fin du billet.

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Merci pour cet article, salutaire en ces temps troublés !

La question maintenant est de savoir comment s’opposer (oserais-je utiliser le verbe « résister » ?) à ces glissements sémantiques très dangereux. J’ai l’impression que la quasi-totalité des personnes qui s’intéressent à la question des violences policières ont déjà, au moins intuitivement, la conviction que cette histoire de « violence automatiquement légitime » est une vaste fumisterie. Même si tout le monde n’a pas les fondements théoriques.

Il reste maintenant à en discuter avec les gens qui seraient, a priori indifférent⋅es ou hostiles à la notion de violence illégitime de l’État… Et ça c’est quand même très difficile à faire, notamment en raison de la mainmise sur la presse du pouvoir en place et de ses alliés. Mon expérience personnelle là-dessus est assez démoralisante. Dans mon entourage (plutôt positionné à gauche), le discours est plutôt : « Il y a des policiers violents, mais la violence n’est pas systémique et encore moins organisée. Si illégitimité dans l’usage de la force il y a, elle se situe au niveau individuel ». Et l’évocation des dizaines d’études, de reportages et articles de presse (indépendante) ne convainc personne de plus celles et ceux déjà convaincu⋅es.

Bref, en résumé : je suis plutôt inquiet et pas très optimiste pour la suite des événements. La lecture de Démocratie : Histoire politique d’un mot aux États-Unis et en France semble intéressante, mais je ne suis pas certain d’avoir le courage de me désillusionner encore plus.

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