Le Fediverse dans tous ses Meta

L'article qui ne parle pas de chiens écrasés.

Ces dernières semaines ont été mouvementées sur le Fediverse. Les réseaux sociaux fédérés qui le composent, et Mastodon en tête, ont grossi soudainement1 depuis l’acquisition de Twitter par le controversé Elon Musk. Mais des concurrents commerciaux pourraient bien émerger.

Ce long article finit par un petit guide pratique pour se mettre au Fediverse. N’hésitez pas à vous y rendre si le reste vous intéresse moins !

A giant reaper stands in front of a presentation. It's my allegory of Meta: a headband with Meta logo, and a chain around her neck with the WhatsApp, Facebook and Instagram golden logo. She hold a brush and a paint bucket with red painting. She looks angry at her audience and not really understanding.  In background, her presentation screen: the Fediverse logo in big, with the word "THREATS" on the top and arrows going to the logo. The words "THREATS" was fixed to "THREADS" with red painting on the D.  A  group of Fediverse mascots in foreground are anxious and group themselves closely, shacking, in front of this new proposal of the reaper.
"Meta proposing Threads to the Fediverse" by David Revoy, with mascots of Mastodon, Pleroma-tan, AI, Lemmy, Sepia, Fediverse logo, and with fair-use of copyrighted Meta’s logos — CC BY 4.0

Ce billet a été initialement rédigé pour la newsleter FedeRez de Août 2023 (non disponible publiquement).

Le Fediverse

Commençons par le commencement du début : de quoi le Fediverse est-il le nom ? C’est un mot-valise qui nous vient tout droit de l’anglais, en mettant bout à bout les mots « fédération » et « univers ». Il décrit une fédération de serveurs formant un réseau social. Il existe plusieurs protocoles permettant de faire communiquer les membres de la fédération, mais le plus connu et peut-être le plus utilisé est ActivityPub, au point que l’on définit parfois le Fediverse comme étant la fédération des serveurs qui l’utilisent pour communiquer. ActivityPub est une recommandation officielle du depuis janvier 2018.

Un diagramme montrant les interconnections entre différents réseaux sociaux via ActivityPub.
How the Fediverse connects, Imke Senst, Mike Kuketz — CC BY SA 4.0

Parlons justement des serveurs qui composent la fédération. Nombre de logiciels peuvent y tourner, tels que l’agrégateur de liens Lemmy, la plateforme de partage de vidéos PeerTube, le service d’échange de photos décentralisé Pixelfed, ou encore votre propre blog ! Celui qui va principalement nous intéresser aujourd’hui est aussi une des composantes les plus utilisées du Fediverse : Mastodon.

Mastodon est une plateforme de microblogging (comme le sont Twitter ou encore Tumblr) décentralisée et libre. Elle permet à chacun de rejoindre, mais également d’héberger, un serveur qui se chargera d’échanger avec le reste du Fediverse.

Une niche à occuper.

Il faut bien s’en rappeler, Twitter occupe une niche dans l’espace des réseaux sociaux. Bien qu'il soit difficile d’attribuer avec certitude des classes sociales aux utilisateurices de Twitter, il semble ressortir qu’il s’agit d’un réseau social plutôt utilisé par des personnes ayant eu accès à uneéducation supérieure. On peut le voir à l’espace médiatique occupé par le réseau social ; on a tous entendu à la radio ou vu à la télévision une sortie commentée d’un responsable politique sur Twitter. Cela peut sembler étonnant, car le réseau social est loin d’être le plus utilisé par les Français.

Comme je l’ai dit dans l’introduction, le Fediverse a vu exploser son nombre d’inscrits, en grande partie grâce aux innovations proposées sur Twitter par son nouveau propriétaire. Cependant, les réseaux sociaux décentralisés ne sont pas les seuls à vouloir profiter de l’état actuel de Twitter. C’est ainsi que l’on a vu émerger deux contre-propositions: Bluesky et Threads.

Je ne vais pas m’étendre en détails sur Bluesky, qui est une émanation de Twitter créée sous l’impulsion d’un de ses co-fondateurs. La plateforme est décentralisée et basée sur un protocole concurrent à ActivityPub. Pour le moment, une invitation est nécessaire pour rejoindre ce réseau social.

Le second réseau, Threads, est développé par Meta, la société mère de Facebook, Instagram et WhatsApp. La société de Mark Zuckerberg a commencé en janvier 2023 le développement de l’application, en se basant sur ActivityPub. Après des fuites durant le printemps, Meta a sauté sur l’occasion d’une journée de dysfonctionnements particulièrement massive de Twitter1 pour diffuser son application sur l’AppStore le 3 juillet, pour une ouverture annoncée le 6. La promotion de l’application a été assurée par l’invitation de quelques personnalités.


  1. Le réseau social et sa direction ayant jugé opportun de limiter le nombre de tweets qu’un membre peut consulter par jour, à cause d’un trop grand nombre de requêtes effectuées vers leurs serveurs. Il s’est avéré qu’une compagnie d’IA exploitait les données publiques des utilisateurices en parcourant le site, probablement à cause la fermeture récente de l’API de Twitter.

Mark is watching you.

Auprès du grand public, la première inquiétude s’est formée relativement à l’utilisation des données personnelles. Meta n’a pas annoncé de date de lancement pour Threads en Union européeenne, car l’application ne respecterait pas le RGPD.Ainsi, l’entreprise états-unienne, en lien avec la commission de protection des données irlandaise, a annoncé ne pas lancer l’application en Europe dans un futur proche à cause d’incertitudes sur l’application de la RGPD, notamment du fait de l’utilisation dans Threads des données issues d’Instagram. On notera que cela n’a pas empêché certains média français de s’inscrire rapidement sur le site.

Les concurrents de Threads ne se sont pas fait prier pour relever l’approche problématique de la vie privée de l’application, à travers les voix de leurs propriétaires respectifs, Elon Musk et Jack Dorsey. Cependant, quelques internautes facétieux ont décidé de compléter ces informations en listant les autorisations demandés par Threads, Bluesky, Twitter et Mastodon lors de l’installation via l’AppStore.

Twitter Bluesky Threads Mastodon
Purchases Contact Info Health & Fitness Rien !
Location User Content Purchases
Contact Info Identifiers Financial Info
User Content Diagnostics Location
Browsing History Contact Info
Identifiers Contacts
Usage Data User Content
Diagnostics Search History
Browsing History
Identifiers
Usage Data
Sensitive Info
Diagnostics
Other Data

En matière d’autorisations, Threads semble donc bien plus intrusif que ses compétiteurs, bien que les autorisations demandées par Twitter laissent un potentiel invasif important.

Gulliver et les Lilliputiens.

Christine Lemer-Webber, co-créatrice d’ActivityPub, fait très justement remarquer l’ambiguïté de l’utilisation du protocole par un géant comme Meta. En effet, si ActivityPub est aujourd’hui une recommandation du , le groupe de travail chargé de son élaboration a failli être stoppé, car les règles de l’organisation requièrent la participation des membres payants. Membres qui n’ont pas montré un grand intérêt pour ce travail. La CTO du Spritely Institute note que si cela a profité au protocole, qui s’est retrouvé écrit par un groupe de passionnés, il a fallu que le crée une exception pour leur permettre de terminer leur travail.

Et c’est en effet ce qui a fait couler beaucoup d’octets dans le Fediverse1, Threads utilise ActivityPub. Cela signifie que, théoriquement, le réseau social de Meta pourrait se fédérer avec le reste du Fediverse. Dans un long post de blog, Mastodon gGmbH (la société à but non lucratif du créateur du réseau social) répond à quelques inquiétudes de la communauté.

Tout d’abord, il est réaffirmé que si Meta peut bien appliquer les politiques de gestion des données personnelles qu’il souhaite sur son application, cela ne signifie pas que la société sera en mesure d’aspirer les données non publiques des utilisateurices du Fediverse dont les serveurs choisiraient de fédérer avec Threads. Concrètement, les adresses courriel ou les adresses IP des membres ne sont pas partagées par les serveurs Mastodon. Il en va de même pour la publicité : si Meta sera en mesure d’en imposer à ses propres utilisateurices, il n’y a pas moyen d’en inonder les autres serveurs du Fediverse. Les positions listées ici semblent assez consensuelles. C’est moins le cas pour la plus grande crainte que l’on voit resurgir: Embrace, Extend, Extinguish.

Faisons un petit détour par les années 2000, mais pas pour profiter de Tokio Hotel ou revivre les années Tecktonik. Lionel Dricot nous propose de se rappeler comment Google a porté un coup fatal à l’adoption généralisée de XMPP, un protocole de messagerie ouvert. Je vous laisse le soin d’aller lire l’article original, mais l’idée est que la société états-unienne a collaboré au développement de la norme XMPP, tout en gardant sa propre implémentation fermée, qui ne respectait pas toujours le protocole. Non content d’avoir ralenti le développement de XMPP, cela était accompagné d’interruptions de service entre Google Talk et le reste du monde, rendant très frustrante l’expérience pour les nouveaux venus qui auraient voulu discuter avec des personnes présentes sur l’application de l’américain. En 2013, Google débranche la prise, sans réaction de la part de ses utilisateurices. Pour eux, les personnes d’autres serveurs étaient tout simplement responsables de la situation, puisqu’ils apparaissaient « hors ligne ». XMPP ne s’est jamais vraiment remis de cela (en termes de nombre d’utilisateurices). L’auteur nous explique que cette stratégie a été théorisée chez Microsoft à la fin des années 90, dans un texte de Vinod Valloppillil intitulé « Blunting OSS attacks », où l’ingénieur dans la célèbre firme états-unienne nous explique comment « décommoditiser les protocoles et les applications [...]. En étendant ces protocoles et en en développant de nouveaux, nous pouvons empêcher les projets OSS d’entrer sur le marché ». Et Lionel Dricot d’illustrer cela avec la politique de Microsoft pour ce qui concerne les formats de fichier de bureautique. L’auteur avertit le Fediverse sur ce qui pourrait se passer si les communautés décidaient de fédérer avec Threads.

Cette position méfiante vis-à-vis de Meta est très répandue dans le Fediverse. C’est ainsi que les administrateurices de piaille.fr, la plus grosse instance francophone de Mastodon, ont annoncé bloquer toutes les instances présentes ou futures de Threads. En effet, Mark Zuckerberg et Jack Dorsey portent avec eux un lourd passé de décisions douteuses concernant leurs réseaux sociaux respectifs ayant eu des répercutions politiques considérables ; « we’ve seen them radicalize our uncles and put Nazis onto the streets ». Certains allant jusqu’à comparer l’attitude qu’ils préconisent face à Threads à la politique adoptée face au régime iranien : on peut plaindre les futurs utilisateurices de Threads sans pour autant accepter de normaliser leurs oppresseurs2. L’utilisateur Yopox3 propose une analyse plus posée, mais non moins intéressante sur les (futures) relations entre le Fediverse et Meta. Il note que Threads a réussi son coup en ayant l’air attractif, il semble s’y passer beaucoup de choses et de nombreuses célébrités y sont. L’idée de Meta d’importer le graphe social d’Instagram est très bonne et reflète la capacité de l’entreprise de Mark Zuckerberg à surfer sur notre besoin de gratification instantanée : il est facile de gagner rapidement ses premiers followers puisqu’ils sont déjà là ! La question qui se pose maintenant est de savoir si la plateforme conservera son attrait lorsque la pub se fera trop présente ? On peut aussi se demander si les gens, ayant goûté à un fil basé sur leurs abonnements, seront prêt à retourner vers un fil généré par un algorithme qui essaie d’optimiser votre temps sur l’application. Une conséquence très directe de ce mode de fonctionnement est la structure très verticale des réseaux sociaux traditionnels, où une minorité capte l’attention de la majorité. La philosophie de Mastodon, où la nouvelle petite amie de votre grand-mère ou une connaissance d’école peut répondre à votre question très pointue sur la structure minérale du régolite grâce à une bonne utilisation des hashtags risque de ne pas être reproductible sur Threads.

Il est difficile de savoir que penser de l’intégration de grands acteurs dans un univers de petites instances. Si dans leur billet de blog, Mastodon gGmbH semble confiant sur l’avenir du Fediverse (« This is a clear victory for our cause, hopefully one of many to come. »), on peut se demander s’il leur aurait réellement été possible de répondre de manière plus frontale à l’arrivée de Meta sans être ridicule du fait de leur relative faible force de frappe. La société allemande tente de rassurer le Fediverse. D’après elle, la stratégie Embrace, Extend, Extinguish ne marcherait pas sur le Fediverse, car il est déjà suffisamment installé pour survivre : si Meta coupait les ponts on serait de retour à la situation actuelle. Soit, mais cela suppose que les utilisateurices ne migreraient pas en masse vers le silo privé. Elle affirme également que les gros serveurs de Meta ne seront pas en mesure de couler les petits serveurs indépendants, car le follow sur Mastodon se fait au niveau des utilisateurices et non au niveau des serveurs. Mais que penser alors d’une situation où la majorité des membres d’une instance suivraient en majorité des membres de Threads ? La petite instance ne se verrait-elle pas contrainte à suivre les règles du géant, par exemple en termes de modération de contenus ?


  1. Dont l’image qui illustre cet article.
  2. Et ici, j’ajouterai que l’on peut aussi se demander si les utilisateurices de Threads sauront ou voudront voir Meta comme un oppresseur.
  3. Ancien membre du Rézo Metz, un gage de qualité s’il en est.

Et dans les ténèbres les lier.

Revenons un instant sur le lien entre Instagram et Threads. C’est un des points vendeurs du nouveau réseau social : vos amis y sont déjà présents ! Pour ce faire, Meta semble créer des Shadow Accounts, c’est à dire des profils d’utilisateurices qui ne sont pas réellement présents sur la plateforme, mais qui seraient suivis par les vrais utilisateurices s’ils étaient présents. Éric Freyssinet, directeur scientifique pour la Gendarmerie nationale, note que cela pourrait structurellement engendrer la collecte de données personnelles supplémentaires par rapport à ce que l’application collecte déjà.

Le Fediverse face à ses propres défis.

Des défis, il y en a, à commencer par la modération. Alors certes, la modération, en particulier des réseaux sociaux, est probablement l’un des plus grands défis de nos sociétés modernes1 et n’est donc pas spécifique au Fediverse. Meta n’a jamais été très fort pour empêcher la diffusion d’idées et contenus extrêmes, et il semble que des figures de l’extrême droite, incluant des promoteurs du nazisme et des militants anti-LGBT, soient déjà en train de tester la politique de modération sur Threads.

Jean Dujardin en OSS 117 parle à un fonctionnaire de l'ambassade allemande au Brésil.
« Il y a forcément une amicale d’ancien nazis ? Ou un club, une association ? », Jean Dujardin dans OSS 117 : Rio ne répond plus, par Michel Hazanavicius.

Le Fediverse n’est pas en reste sur l’inclusion d’idéologies indésirables. On a ainsi vu fleurir il y a quelques mois une instance de Mastodon ouvertement d’extrême droite. Pour contrer cela, les administrateurices ont recours à des listes de blocage, comme Oliphant. Mais ces listes peuvent se révéler problématiques car gérées par de petits groupes et avec des critères qui peuvent paraître arbitraires. Le blocage n’est pas non plus toujours suffisant : que faire par exemple en ce qui concerne la modération intra-serveur ? Par exemple, la modération des contenus pédopornographiques est une opération qui nécessite des actions rapides que les administrateurs bénévoles d’instances ne peuvent pas toujours effectuer à temps.

Le blocage de la fédération vers certains serveurs est également problématique parce qu’il facilite la création de chambres d’écho. Il est en effet facile de ne se retrouver qu’entre opinions concomitantes sur Mastodon, ce qui n’est pas nécessairement un problème en soi, mais peut le devenir si le choix de ce qui est vu ou non est fortement influencé par l’utilisation de listes de blocages. Sur les problématiques des chambres d’écho, certaines utilisateurices les ont soulevées, en particulier à travers les discussions sur l’arrivée de Threads dans le Fediverse.

Une autre problématique du Fediverse est liée au respect de la vie privée. La gestion des données personnelles par les gros acteurs d’Internet est un sujet récurrent et la question de la gouvernance des données implique de faire des compromis entre des objectifs parfois contradictoires. Mais le Fediverse n’est pas épargné par ces questions. Dans un long article, Bloonface détaille les nombreuses problématiques de vie privée liées au principe même de réseau social fédéré. Par exemple, la question de la supression d’un contenu qui a été partagé sur plusieurs instances nécessite de se reposer sur la bonne foi des propriétaires d’instances. Bloonface nous explique que si l’on craint que nos posts et informations liées aux profils puissent être utilisées par n’importe quel acteur, alors il ne faut tout bonnement pas utiliser le Fediverse. Mais plus important, le blogueur nous montre que l’un des plus gros problèmes de sécurité des données privées n’est pas l’arrivée de gros acteurs identifiables comme Meta. Ces grosses compagnies sont habituées à gérer des demandes RGPD, on peut les poursuivre en justice et l’Union européenne est prête à leur taper sur les doigts le cas échéant. Dans le pire des cas, Meta va vous proposer de la publicité intrusive basée sur votre vie privée, mais la société ne pas vous doxxer ou vous envoyer des menaces de mort. Est-ce bien le cas de la petite instance qui tourne sur une Raspberry Pi cachée au fin fond de la Lozère ?

Il ressort de ces observations que le Fediverse doit se poser la question de sa gouvernance. De fait, les administrateurices d’instances et les développeureuses sont investis d’un grand pouvoir2. La question de l’autorisation du quote post3 est un vieux serpent de mer de Mastodon. Les développeureuses du réseau social ont tout simplement décidé de ne pas intégrer cette fonctionnalité à cause de son caractère jugé toxique. O. Simard-Casanova considère que l’approche de Meta sur Threads est meilleure. Meta a choisi d’autoriser ce genre de posts, mais n’affiche pas les posts citant sur le post d’origine. Selon l’auteur du toot, cela évite de récompenser les membres au comportement toxique. Ce genre de décision gagnerait à être prise collectivement, et il semble que la communauté évolue doucement vers cela. Ainsi, dans le post annonçant le blocage de Threads, les administrateurices de piaille.fr disent préparer la mise en place d’un système de vote pour les décisions.


  1. À ce propos, l'abstract de cet article sur la démocratisation de la modération en ligne est fort intéressant.
  2. Et comme chacun le sait, quand on a des mains qui peuvent tisser des toiles — de réseaux sociaux ou autres —, ce grand pouvoir implique de grandes responsabilités.
  3. Sur Twitter, le quote post est une pratique qui consiste à écrire un tweet contenant un lien vers un autre tweet pour le commenter. C’est différent d’une simple réponse à un post, car il s’affiche dans le fil d’actualités de la personne qui répond et peut parfois mener à du harcèlement.

Prendre l'éléphant par les défenses.

Bon, tous ces sujets très sérieux, c’est bien beau, mais pour que le Fediverse fonctionne, ce qu’il lui manque ce n’est pas un système de vote. Ce n’est pas non plus la possibilité de faire des quote posts. Encore moins un système de stories. Non, ce qu’il lui manque, c’est toi. Si je suis assez d’accord avec Ploum dans sa conclusion quand il dit que l’on ne peut pas forcer les gens à venir sur le Fediverse, ou qu’à faire la course à la croissance avec des de grosses entreprises spécialisées dans ce domaine, le Fediverse est certain de perdre. Il n’en reste pas moins qu’un réseau social est plus drôle quand il y a du monde dessus. Alors supposons que ce soir, après avoir refermé la Newsletter de FedeRez, toi, lecteur, tu souhaites essayer Mastodon (par exemple). Comment t’y prendre ?

La toute première étape est de choisir un serveur. Une liste de serveurs est proposée sur joinmastodon.org. Il y en a dans toutes les langues, dans toutes les régions du monde. Si le choix du serveur a une certaine importance, car votre fil d’actualité local sera généré à partir de lui, il n’est pas non plus totalement crucial pour deux raisons. Tout d’abord parce que quand vous aurez construit un fil d’actualités personnalisé, il est possible que vous cessiez totalement de consulter le fil local. Ensuite, parce que vous aurez la possibilité de migrer entre les serveurs une fois votre compte créé, tout en emmenant vos followers sur le nouveau serveur ! Par exemple, la plus grosse instance Francophone est piaille.fr. Il existe également une instance maintenue par la Quadrature du Net, mamot.fr, et une par Framasoft, framapiaf.org.

Ensuite, il faut choisir une application pour vous connecter. Sur le web, vous pouvez utiliser l’interface de votre serveur, par exemple social.sciences.re. Personnellement, j’aime beaucoup utiliser l’interface elk.zone, qui est globalement plus agréable que l’interface officielle. Sur Android, Tusky est un très bon choix, même si une application « officielle » Mastodon existe aussi. Pour les utilisateurices d’iOS, je dois bien avouer qu’il semble y avoir quelques applications, mais je n’ai utilisé que l’officielle, qui est gratuite.

Vous êtes maintenant en mesure de vous connecter au Fediverse, hourra ! Mais si vous consultez votre fil d’actualités, il vous paraîtra bien vide. Il est temps de rendre l’expérience du Fediverse intéressante. La première chose à faire est de rendre votre page de profil attractive : une image de profil, une bannière, une description qui explique qui vous êtes... Mastodon propose aussi des metadata, qui sont quatre champs que vous pouvez remplir avec des informations que vous jugez importantes, par exemple l’adresse de votre blog ou une citation de votre grand-mère. Vous pouvez également activer une option qui permet aux gens de vous découvrir.

Il est temps d’écrire votre premier toot ! Il est d’usage de le faire en utilisant le hashtag #introduction et de vous présenter pour aider le Fediverse à vous connaître. Il est de bon goût de refaire ce post lorsque vous changez de serveur.

Vous pouvez maintenant commencer à remplir votre fil d’actualité. C’est la partie que j’ai trouvé la moins intuitive en commençant à utiliser le Fediverse, car j’ai toujours été habitué aux réseaux sociaux qui proposent du contenu intéressant immédiatement. Sur Mastodon, pas de fil d’actualité qui s’optimise sur votre temps d’utilisation, donc on va vous demander un peu de travail ! Une bonne stratégie ici est de suivre en masse des hashtags, des groupes1 et des comptes qui sont susceptibles de vous plaire (comme le mien !), puis d’affiner ensuite. Il existe des sites qui recensent les comptes intéressants par thème, comme Trunk, ou les groupes, comme chirp.social. Enfin, pour rendre l’expérience de Mastodon encore plus intéressante, il faut se forcer un petit peu à poster. L’interaction avec les autres utilisateurices est la meilleure part du réseau social, et cela vous aidera à trouver du contenu intéressant.

Pour retrouver tous ces conseils et bien plus, le meilleur site est Fedi.Tips. Vous trouverez tout ce dont vous avez besoin pour rendre votre expérience du Fediverse meilleure.


  1. Les groupes sont des comptes qui repostent tout le contenu envoyé par leurs membres.

Cet article est bien long, alors je ferai une conclusion brève. Je pense que dans le contexte politique actuel, nous avons besoin d’espaces où échanger librement des idées, et les réseaux sociaux ont prouvé leur capacité à créer de la mobilisation et sensibiliser les gens à des causes et raisonnements auxquels ils n’auraient pas eu accès autrement. L’émergence du Fediverse pourrait bien être un moyen de remettre plus d’horizontalité dans nos relations sur ces plateformes. Mais pour cela, nous avons besoin d’en faire des espaces gouvernés de manière transparente. De manière plus générale, les problématiques auxquelles le Fediverse fait actuellement face nous rappellent l’importance de la question de la gouvernance d’Internet, du fait de son impact sur la vie politique et sociale au quotidien.

À notre petite échelle, pour donner une chance au Fediverse d’avoir un impact, nous pouvons essayer de l’adopter. Pourquoi ne pas décider que le renommage récent de Twitter en « X » est la bonne occasion d’essayer Mastodon ? Au niveau de FedeRez, nous avons eu récemment une discussion sur un bon moyen de trier les conversations qui s’entremêlent sur le canal IRC/Telegram/Matrix/pigeons voyageurs. Nous pourrions par exemple créer un groupe FedeRez sur le Fediverse et avoir des discussions là-bas comme on en aurait sur un forum.

En attendant, je vous remercie de m’avoir lu sur ces quatre longues pages, et je vous souhaite un bon mois d’août !

Je profite également de la publication sur Zeste de Savoir pour remercier les relecteurs, qui se reconnaîtront.

Le Logo est une proposition de logo pour le Fediverse par Eukombos — CC 0

10 commentaires

On peut aussi se demander si les gens, ayant goûté à un fil basé sur leurs abonnements, seront prêt à retourner vers un fil généré par un algorithme qui essaie d’optimiser votre temps sur l’application.

C’est marrant, le fil chronologique sans algorithme que propose Mastodon, j’ai fini par trouver ça au moins aussi pénible que l’algotihme des grands réseaux commerciaux. En allant qu’occasionnellement sur le réseau, la présentation purement chronologique ne marchait pas : impossible de faire le tri entre ce qui m’intéresse le plus ou le moins depuis ma dernière visite. Et me retaper tout le fil jusqu’à la date de ma dernière visite, bof. L’algorithme des deux autres réseaux que je connais le mieux n’ont pas ce problème (YouTube et Instagram), mais nous savons bien que cela ne viens pas sans son lot de problèmes.

Dans la pratique j’ai l’impression que le mode sans algorithme convient mieux à des personnes qui rattrapent le fil en quasi-continu, typiquement en visitant le réseau plusieurs fois par jour, du moins quand on a pas mal de comptes suivis.

Cela dit, le système étant ouvert, libre à quiconque d’implémenter son propre algorithme en choisissant ses propres biais. Et ça, c’est cool.

Dans la pratique j’ai l’impression que le mode sans algorithme convient mieux à des personnes qui rattrapent le fil en quasi-continu, typiquement en visitant le réseau plusieurs fois par jour, du moins quand on a pas mal de comptes suivis.

Cela dit, le système étant ouvert, libre à quiconque d’implémenter son propre algorithme en choisissant ses propres biais. Et ça, c’est cool.

sgble

Je plaide coupable, c’est bien comme cela que j’utilise mes réseaux sociaux donc il est possible que ça explique que je trouve le fil de Mastodon plus agréable. Il y a aussi le fait que sur Twitter j’ai toujours eu des problèmes de fil qui "saute" en plein milieu de la lecture et me fait perdre à jamais des posts qui auraient pu m’intéresser.

Salut,

Merci pour ce billet très intéressant.

Il m’amène quelques réflexions que je vous livre en vrac.

La complexité du Fediverse

L’un des problèmes inhérents au Fediverse est sa complexité qui limite sa compréhension et son utilisation ; le schéma présent en début de billet en est un excellent exemple. Ce simple schéma montre :

  • Quatre protocoles différents (ActivityPub, Zot, Diaspora et DFRN) ;
  • Quatre outils de macroblogging (Zap, Hubzilla, friendica et diaspora*) éparpillés sur autant de protocoles, dont plusieurs multi-protocoles (mais jamais tous) ;
  • Deux outils outils de microblogging et deux outils de video/audio-streaming sur le même protocole ;
  • Un protocole qui sert un peu à tout.

Alors certes la diversité est une chance, mais là ça rends difficile l’identification de l’outil approprié à un usage.

À propos de Threads

Depuis la rédaction de l’article, Threads a été lancé… et a déjà perdu plus de la moitié de ses utilisateurs actifs.

À propos de l’utilisation des données personnelles

Clairement, Threads demande des autorisations qui n’ont aucune utilité apparente pour le service rendu.

Cela dit, l’autorisation contact info est typiquement une autorisation qui serait utile dans le cas d’un réseau social : elle permet de récupérer automatiquement ses contacts dans le nouveau réseau, ce qui est une fonctionnalité qui peut être très pratique (tant qu’elle n’est pas obligatoire). Je ne sais pas si ça pourrait être applicable à Mastodon de par son fonctionnement.

À propos du Fédivers, Threads et XMPP

Je renvoie à mon propre billet au sujet de Mastodon. De plus, je trouve le texte (très partagé) de Lionel Dricot (a.k.a. Ploum) un peu catastrophiste ; et surtout j’ai une expérience différence de lui sur le cas XMPP. Il me semble important ici de rappeler (c’est dans son article) qu’il occupait un rôle important dans XMPP au moment de son usage par Google et Facebook, ce qui lui donne une vision « interne » du problème. C’est à la fois une chance et une limite, parce qu’en vivant les choses « de l’intérieur », il n’a plus la vision de l’utilisateur « lambda ».

J’utilisais XMPP à cette époque, et mon expérience en tant que simple utilisateur (qui ne vaut rien de mieux que ça), c’est que XMPP n’a en réalité jamais été utilisable par le grand public. Déjà en 2007 XMPP était un foutoir sans nom, avec des tonnes de clients disponibles et un énorme éléphant au milieu de la pièce : sans version unique et centrale du protocole, chaque client avait déjà ses propres spécificités incompatibles avec la majorité des autres clients. Résultat : les fonctionnalités de chat fonctionnaient à peu près partout, l’échange de fichiers c’était déjà plus délicat, le reste une grosse blague. L’ergonomie douteuse (voire absente) des clients, le nombre de clients, la notion de serveurs séparés et bien sûr les incompatibilités rendaient la chose pénible à utiliser pour les personnes qui n’étaient pas sensibilisées au logiciel libre1.

L’usage de XMPP par Google et Facebook a fait exploser ses utilisateurs, leur abandon a fait effondrer ce même nombre d’utilisateurs. Cela dit, XMPP est loin d’être mort dans l’histoire.

Cette aventure peut se voir comme une panique morale2, mais l’aventure XMPP est un excellent cas d’école pour les gestionnaires du protocole ActivityPub en général et Mastodon en particulier. Il montre que le protocole et les outils associés peuvent très bien résister à une tentative de Embrace, Extend, Extinguish (en admettant qu’une tentative de ce type existe réellement) et conserver sa base d’utilisateurs et d’outils. Deux conditions sont nécessaires : que les mainteneurs des protocoles et outils ne cherchent pas à courir après les spécifiques Threads ; et que les outils communiquent clairement que les extensions non-standard de Threads (si elles arrivent) ne sont pas standard, ne sont pas supportées et que la compatibilité n’est en aucun cas garantie. Ça nécessite sans doute une entité centralisatrice assez performante sur le protocole, pour éviter les dérives observées avec XMPP (tentatives de raccrocher les wagons avec la version Google, foultitude d’options dans le protocole…).

À propos des risques apportés par Threads au Fedivers

De ce que j’observe de mon point de vue limité (je vous renvoie au billet susmentionné), le risque à court ou moyen terme de l’activation d’ActivityPub dans Threads (ça n’est pas encore disponible) n’est pas dans un quelconque Embrace, Extend, Extinguish mais plutôt dans l’effondrement des serveurs Mastodon (et autres clients ActivityPub) sous une masse intraitable messages provenant de Threads. Je renvoie à la difficulté qu’ont à gérer ces serveurs les petites3 vagues d’utilisateurs et d’utilisation provoquées par les remous du côté de Twitter/X, j’ai un vrai doute sur les capacités de ces serveurs à tenir le moindre partage/renvoi par un gros compte Thread sur un serveur Mastodon classique.

À propos de l’utilisation de Mastodon

J’aime beaucoup ta présentation.

À ce que j’en dis déjà dans mon billet (ça va, je ne remets pas le lien), je rajoute deux points.

Le premier c’est que les hashtags sur Mastodon fonctionnent bien. C’est probablement le meilleur aspect de ce réseau, d’ailleurs. Surtout si on prends en compte le fait que les communautés sont plus petites mais avec de meilleures interactions que sur les réseaux propriétaires, même sur un simple partage d’images.

Le second, c’est que un réseau fédéré comme Mastodon est fondamentalement cassé sur mobile. En effet, chaque instance a son propre nom de domaine, donc par défaut aucun lien Mastodon ne s’ouvre dans l’application Mastodon. C’est extrêmement pénible pour suivre des comptes ou reposter des messages trouvés au hasard d’une navigation Internet sur mobile, hors de l’application Mastodon elle-même.


Merci de m’avoir lu.

Ceci n’est que mon avis et n’engage que moi, n’hésitez pas à me contredire courtoisement.


  1. Je ne dis pas « pour les non-informaticiens » à dessein : étudiant à l’époque, j’ai proposé l’outil à nombre d’amis informaticiens en devenir, et beaucoup ne voyaient pas l’intérêt de se prendre le chou avec des logiciels et protocoles incompatibles avec le reste du monde, et sur lesquels il n’y avait personne d’autre.
  2. Là encore, je choisis mon vocabulaire avec soin. Beaucoup de réactions dans le monde de Mastodon, lors de l’annonce de Thread et de son utilisation d’ActivityPub, sont tombées dans le registre de la panique morale, y compris de la part de personnes ferventes défenseresses du libre, promoteurs actifs d’ActivityPub et zélotes de la liberté d’usage. Threads a été massivement rejeté et condamné, voire bloqué préventivement, avant même qu’on ait une quelconque information réelle à son sujet. L’article de Ploum / Lionel Dricot n’est pas neutre dans ce mouvement de panique. Beaucoup d’acteurs du libre m’ont, à titre personnel, beaucoup déçu dans ce mouvement, à commencer par les administrateurs de piaille.fr ou David Revoy (avec son dessin qui orne le chapeau de ce billet, entre autre, et dont j’admire pourtant le travail depuis longtemps). Mon opinion sur Ploum dépasse le cadre de cette réponse.
  3. Là encore, le terme n’est pas choisi au hasard. Cf ce commentaire pour plus de détails.

Hello, merci pour les précisions!

C’est l’article que tu cites sur Threads est aussi intéressant parce qu’il revient un peu sur un autre point de mon billet, le shadow accounting. A priori, si Threads perd des utilisateurs cela signifie qu’ils ne comptent pas les shadow accounts comme des utilisateurs comme certains l’avaient supposé, ce qui est un bon point pour eux. Je suis également curieux de savoir comment le lien avec Instagram va se faire côté Instagram, et si ça va marcher. J’ai l’impression que les utilisateurs d’une plateforme type Instagram sont très différents de ceux d’une plateforme de microblogging, mais je peux me tromper.

Pour la différence avec le cas de XMPP, il est vrai que j’aurai pu développer un petit peu plus. Je suis trop jeune pour avoir connu XMPP dans ses grandes heures, mais même il y a trois-quatre ans c’était toujours pas très agréable à utiliser, même pour quelqu’un avec un background technique, et surtout en terme de clients proposés. J’ai l’impression que Mastodon fait mieux, mais qu’on pourrait encore s’améliorer. Par exemple l’étape du choix du serveur me semble un peu hasardeuse pour une personne non technique, et on pourrait imaginer que les gens soient guidés vers un serveur (par exemple choisi au hasard avec un distribution qui encourage la répartition des membres selon les capacités techniques de chacun?). Je pense aussi que les nouveaux membres devraient être un peu plus guidés lors de leur première inscription. Il faudrait peut-être les encourager à s’abonner immédiatement aux hashtags ou groupes qui peuvent les intéresser. S’un point de vue non technique j’ai vu tourner ces derniers jours (et j’ai oublié de le sauvegarder donc évidemment je n le retrouve plus…) un article qui regroupait des interview de personnes ayant rejoint Mastodon puis étant partis et leur demandait les raisons. Une des principale était la réception des utilisateurs historiques du réseau social, en gros ils se faisaient engueuler car ils n’utilisaient pas "bien" Mastodon. J’ai l’impression que c’est un peu un marronnier du logiciel libre en général1, mais en particulier pour un réseau social, il faut que la communeauté accepte que de nouveaux usages ou des critiques des usages historiques puissent apparaître.

Pour ce qui est de la stratégie des gros acteurs vis-à-vis du Fediverse, on peut aussi se demander s’il y en a une tout simplement. Si on renverse le problème des petites instances qui auraient du mal à suivre les gros serveurs de Meta que tu soulèves, on peut aussi imaginer que passer du temps à aller chercher des petits serveurs d’une dizaine de membres au fin fond de la Creuse ne soit pas rentable pour eux. Il y a un monde dans lequel Threads atteint la masse critique qui satisfait Meta, et ne s’embête pas à rejoindre le Fediverse.

J’avais initialement pensé faire une partie un peu plus technique liée au problématiques de l’auto hébergement, en me basant notamment sur ton billet, mais les membres de FedeRez sont pour la plupart plus techniques que moi (j’ai arrêté de faire du réseau autre que de l’autohébergement peu après l’école d’ingénieur). J’en profite pour te poser une question! Ma petite expérience m’a montré qu’en effet, héberger des services fédérés c’est compliqué. Sur mon serveur Matrix j’évite par exemple de me connecter sur des grosses rooms (typiquement @matrix@matri.org), au risque de mettre mon serveur à genoux. Donc je suis tout disposé à croire que l’avenir du Fediverse n’est pas dans une situation où chacun a son propre serveur. Mais est-ce qu’on peut imaginer que des petites structures associatives (type CHATONS) puissent atteindre une situation où il est possible d’héberger des serveurs suffisamment puissant pour supporter la fédération?


  1. Et ça peut s’expliquer, quand les gens investissent de leur temps personnel dans quelque chose, ils peuvent avoir du mal à laisser quelqu’un de nouveau le tordre à leur propre usage.

On peut aussi se demander si les gens, ayant goûté à un fil basé sur leurs abonnements, seront prêt à retourner vers un fil généré par un algorithme qui essaie d’optimiser votre temps sur l’application.

C’est marrant, le fil chronologique sans algorithme que propose Mastodon, j’ai fini par trouver ça au moins aussi pénible que l’algotihme des grands réseaux commerciaux. En allant qu’occasionnellement sur le réseau, la présentation purement chronologique ne marchait pas : impossible de faire le tri entre ce qui m’intéresse le plus ou le moins depuis ma dernière visite. Et me retaper tout le fil jusqu’à la date de ma dernière visite, bof. L’algorithme des deux autres réseaux que je connais le mieux n’ont pas ce problème (YouTube et Instagram), mais nous savons bien que cela ne viens pas sans son lot de problèmes.

Dans la pratique j’ai l’impression que le mode sans algorithme convient mieux à des personnes qui rattrapent le fil en quasi-continu, typiquement en visitant le réseau plusieurs fois par jour, du moins quand on a pas mal de comptes suivis.

Cela dit, le système étant ouvert, libre à quiconque d’implémenter son propre algorithme en choisissant ses propres biais. Et ça, c’est cool.

sgble

Personnellement j’ai juste appris à accepter de rater des trucs. Le contenu d’un réseau social de micro-blogging n’est pas important, en fait. Les trucs qui m’intéressent que je ne veux surtout pas rater sont sur des sites/blogs qui disposent de flux RSS et finissent dans mon agrégateur (et encore, même là je lis pas tout, les journées ne font que 24 heures).

Remonter du contenu qui a plus d’une semaine (je dis une semaine parce que par le biais des boost et des discussions ça peut remonter jusque-là, mais en soi dès quelques heures pour le contenu spontané) n’est pas pertinent. Vouloir lancer en vrac contenu intéressant et bruit dans un flot continu, et compter ensuite sur un algorithme ou un système de recherche pour extraire le contenu intéressant (qui en plus dépends de chacun !) me semble contre-productif en plus d’être techniquement lourd.

+1 -0

Remonter du contenu qui a plus d’une semaine […] n’est pas pertinent

Et pourquoi donc ?

Vouloir lancer en vrac contenu intéressant et bruit dans un flot continu, et compter ensuite sur un algorithme ou un système de recherche pour extraire le contenu intéressant (qui en plus dépends de chacun !) me semble contre-productif en plus d’être techniquement lourd.

Les concurrents commerciaux semblent pourtant y arriver, et plutôt bien même en prenant en compte le fait que « ça dépend de chacun », justement. Je l’admets volontiers alors même que je ne suis pas bon client des RS en général.

Le contenu d’un réseau social de micro-blogging n’est pas important, en fait. Les trucs qui m’intéressent que je ne veux surtout pas rater sont sur des sites/blogs qui disposent de flux RSS et finissent dans mon agrégateur (et encore, même là je lis pas tout, les journées ne font que 24 heures).

Eh bien en réalité je suis arrivé à la même conclusion que toi… Dès lors, je me demandais bien à quoi pouvait encore me servir Mastodon, avant de finalement supprimer mon compte. Mais comme je l’ai dit, je ne suis pas un bon client pour ces choses-là, à la base. Tant mieux si d’autres y trouvent leur compte.

Les concurrents commerciaux semblent pourtant y arriver, et plutôt bien même en prenant en compte le fait que « ça dépend de chacun », justement. Je l’admets volontiers alors même que je ne suis pas bon client des RS en général.

Semblent. En pratique, Twitter est absolument infernal à utiliser pour retrouver du vieux contenu. Des fois ça marche, des fois t’as des milliers de résultats à côté de la plaque, et bon courage pour trouver la perle au milieu. Et Facebook est pire… (d’autant plus si t’as pas de compte, d’ailleurs).

Et comme je l’ai dit, leur résultat convaincant (à défaut d’être bon, je reconnais qu’il est convaincant) se fait à quel prix techniquement ? Une recherche locale basique peut fonctionner (encore qu’il faut voir la taille de l’instance, sa durée de vie (si tu recherches sur 3 mois ou sur 5 ans c’est pas pareil, la technologie (un ElasticSearch c’est plus efficace, mais tu doubles facilement les ressources nécessaires pour ton instance…), etc.). Une recherche fédérée est juste impensable.

Il est bien plus facile de faire une recherche sur un blog parce que la quantité de contenu vs. du simple bruit n’a rien à voir, et que la plupart des blogs sont structurés (via des tags ou des répertoires), ce qui permet une recherche filtrée plus facilement (les hashtags peuvent servir de tag sur le Fédivers, mais en pratique je trouve pas ça très efficace. Et même sur sur Twitter, les tags sont souvent moins pertinents que ceux de la plupart des blogs que j’ai pu voir).

+0 -0

Tu cites deux exemples (Twitter et Facebook) que j’aurais du mal à juger car je n’utilise pas ces plateformes, mais je te crois volontiers.

Mais mon point initial ne portait pas tellement sur l’aspect technique et personne ne mettra en doute l’idée qu’une timeline brute c’est techniquement plus simple qu’un algorithme de mise en avant personnalisé. Et par ailleurs, je ne pensais pas non plus particulièrement à de la recherche dans le contenu. Je ne recherche pas de contenu, je me contente ici de consulter la timeline qu’on me propose, et je parle de cet aspect précis.

Mon point était simplement qu’en tant qu’utilisateur, je n’ai pas trouvé l’expérience de Mastodon agréable car je ratais les choses qui m’intéressent le plus. Sur Instagram, un RS que je consulte occasionnellement, ce n’est pas le cas : même après une absence de quelques jours l’algorithme me remonte les posts des gens dont j’estime le contenu le plus. En ce qui me concerne ça remplit son office et ça optimise mieux mon temps que Mastodon.

Maintenant je veux bien entendre que Mastodon n’est pas taillé pour ce genre d’expérience, qu’il faut apprendre à rater des choses, etc. Soit, je n’ai rien à y redire et tant mieux que certaines personnes y trouvent de la valeur là où je n’y suis pas parvenu.

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