Enseigner les Mathématiques

a marqué ce sujet comme résolu.

Typiquement j'avais mis une étude de cas permettant d'apprendre à éviter des pièges. Et dans le cours même quelques exemples très simples (énoncés en une ligne chacun) pour se faire une idée de la situation lors de nouvelles notions importantes.

Du coup, effectivement, c'était pas des exemples méga passionnant. Mais si je suis ce que tu dis c'était les plus utiles …

Peut-être que c_pages et Vayel peuvent réagir dessus ?

Pour moi, la question à laquelle il faut répondre en cours de maths est "Pourquoi" (ce qui est différent de "A quoi ça sert")

Pourquoi faire des démonstrations? Au collège, les démonstrations sont "imposées" à l'élève. Du coup il ne comprend pas pourquoi il faut démontrer par récurrence alors qu'il a vérifié pour 10 valeurs, et "c'est bon, ça marche". Ce qu'il faut par exemple, c'est montrer un contre-exemple, une propriété qui est vraie jusqu’à 10, puis qui se casse la gueule après.

Pareil pour les identités remarquables. Faire comprendre que c'est une forme développée dans laquelle on ne voit plus les facteurs communs parce que justement il y en avait trop, et du coup ils se sont faits "avaler" dans la simplification des expressions. Du coup on comprend pourquoi il faut les apprendre par coeur, et quand les utiliser: quand on doit factoriser et qu'on ne voit pas de facteur commun.

C'est juste deux exemples mais ça pourrait se généraliser à d'autres concepts (cosinus/sinus, matrices, groupes, espaces vectoriels…).
Le but n'est pas de rendre les maths intéressantes (même si je pense que ça y contribue), mais de faire comprendre la logique des concepts. Et éviter ainsi de former des auto-maths (le mot n'est pas de moi, mais d'une psychologue je crois), des élèves qui vont appliquer bêtement les formules apprises en cours sans les comprendre.

Sur le tuto sur les DL par exemple, dans l'ensemble je trouve le sujet bien amené : présenter ce qu'on cherche à faire (approximer), montrer une méthode (linéaire), montrer que c'est pas toujours suffisant (contre-exemple), donc amener à chercher d'autres méthodes. Du coup on sait pourquoi on étudie les DL.

L'approche historique peut être une aide dans cette démarche. Montrer pourquoi on a eu besoin d'élaborer tel concept, pourquoi Gauss a défini la multiplication des matrices ainsi… Ça a un autre avantage, celui de nous faire entrer dans la tête du mathématicien, comprendre comment ça réfléchit ces bêtes-là :), et donc apprendre à réfléchir comme un mathématicien.
C'est ce qui manque totalement à l'approche axiomatique des livres universitaires je trouve (on commence par se taper deux chapitres de définitions et théorèmes sans même voir c'est quoi le sujet principal du cours).

J'aime bien ton analyse. J'ajoute que je suis à 100 % d'accord avec toi pour ce qui est de l'approche historique. C'est l'approche la plus naturelle, beaucoup plus naturelle que l'approche logique en terme de structures mathématiques.

La raison en est simple : suivre le cours de l'histoire, c'est suivre le cheminement qu'a eu l'esprit humain au cours du temps. C'est probablement une bonne façon d'aborder les sciences. Et en plus, ça permettrait, là encore, de lier plusieurs disciplines entre elles, ce qui est toujours bon à prendre.

Pour moi, la question à laquelle il faut répondre en cours de maths est "Pourquoi" (ce qui est différent de "A quoi ça sert")

Looping

Vu les exemples que tu as donné dans ton message, ainsi que la référence aux automaths de Stella Baruck (qui est professeur de mathématique, pas psychologue, de mémoire), j'ai envie de faire une petite remarque. Les exemples que tu donnes ne demandent pas vraiment expliquer un "Pourquoi ?" - en clair, d'expliquer quelque chose à partir de concepts déjà connus et plus fondamentaux. Ils demandent plus de répondre aux question :

  • "Pourquoi est-ce qu'on doit procéder comme ça, et pas autrement ?", pour les procédures et automatismes ;
  • ou "Pourquoi on va aborder ce concept là ?", pour les concepts.

Je me trompe ?

Je suis un peu perplexe sur l'approche historique en maths. Le gros soucis étant qu'avec les siècles, les formalismes ont beaucoup changé. Alors donner une approche historique supposerait de les aborder tous … ce qui serait (trop?) long.

Parler des motivations et des dates importantes, pourquoi pas. Mais par contre, suivre un sujet sur toute l'histoire ça me paraît vraiment compliqué pour peu de gains. C'est intéressant, mais pour un cours d'épistémologie (d'ailleurs c'est vraiment la matière qui manque dans les premières années de post-bac).

@Mewtow : Pourquoi un cours magistral (du genre ça) n'est-il pas accepté sur ZdS du coup (vraie question) ?

Où as-tu vu que c'était interdit ? C'est plus une question de structure (du contenu) qu'autre chose. Chaque auteur a une pédagogie qui lui est propre, on n'impose pas une limite là-dessus. Qu'un tutoriel soit basé sur un cours magistral n'est pas un problème, surtout s'il est de qualité. ^^

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Je suis un peu perplexe sur l'approche historique en maths. Le gros soucis étant qu'avec les siècles, les formalismes ont beaucoup changé. Alors donner une approche historique supposerait de les aborder tous … ce qui serait (trop?) long.

Holosmos

Ah, mais rien n'empêche de faire des maths dans l'ordre chronologique, mais avec le formalisme actuel. C'est d'ailleurs plus ou moins ce qui est fait, au moins dans les grandes lignes. Mais cela manque clairement, et quelles que soient les notions, d'une approche « comment on en est arrivés là ».

Je crois aussi qu'il y a un détail que l'on a oublié de mentionner.

Personnellement, ma grande référence de pédagogie en mathématique c'est le génial J.W. Milnor, dont tous ses livres sont des références dans leurs domaines et sont d'une clarté incroyable.

Quelque chose qui m'a toujours frappé chez Milnor c'est qu'il n'a pas peur d'aller dans les détails mais qu'il reste extrêmement simple. Je ne l'ai jamais vu définir un objet qui lui servira à peine et j'ai souvent vu beaucoup de démonstrations assez atypique pour démontrer des résultats avec moins d'outils.

Finalement est-ce que c'est pas ce qui manque aux cours de maths : la simplicité ?

On voit souvent dans des cours utiliser de manière compliquée des objets simples. Rien que la notion de voisinage n'est pas connue par la majorité des L1/Math sup alors que c'est peut-être l'une des définitions qui permet d'alléger le plus de choses en analyse… Fini la formulation tordue des limites, continuité et des notations étranges où jamais personne ne s'y retrouve (vous savez, le fameux " $f:I\to \mathbf{R}$ avec $I$ un intervalle ouvert de $\mathbf{R}$ " absolument immonde ?). Sans parler du mythe des "propriétés locales" où les élèves ne savent pas que ce sont des propriétés qui s'appliquent à des voisinages et pensent que c'est un joli nom qu'on donne pour le plaisir des $\epsilon$

Là on définit ce que c'est qu'un voisinage, et tout le monde voit avec quel point les notions deviennent claires dans $\mathbf{R},\mathbf{R}^2,\mathbf{C},etc.$. C'est quand même dommage de formuler de manières différentes et bizarrement de même concepts.

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Je me permets d'apporter ma petite expérience personnelle. Passons rapidement sur les poncifs sur les super-profs et les profs de merde qui ne relèvent que de jugements personnels et bien souvent partiaux : certains profs que j'ai adorés étaient détestés de mes amis et inversement, certains parents d'élèves me lancent des fleurs et 5 minutes après, d'autres remettent mes compétences en cause. Profs, élèves et parents ne sont jamais que des humains, avec tous leurs travers.

Quand les profs trouvent ça normal d'avoir une part des élèves nuls en maths, c'est scandaleux.

Je n'ai encore jamais vu de collègue qui érigeait cette idée en dogme. En revanche, il est facile de constater que certains ont intégré cette idée au fil des ans, à leur corps défendant. Avant de crier au scandale, laissez-moi juste vous raconter une anecdote. Un jour, alors que j'aidais une gamine de 4ème (~14 ans) dans un de ses problèmes, je dus lui faire calculer $3 \times 40$. La tâche lui semblant ardue (non vous ne rêvez pas) je décide de me ramener au problème $3 \times 4$. Après de nombreux essais infructueux, j'en viens à lui demander $4 + 4 + 4$. Après une erreur ou deux, j'obtiens $4 + 4 =8$ puis, après de nombreux échecs, à $4 + 4 + 4 = 12$ ! Victoire ! A cet instant, la gamine (14 ans dont 8 à faire des maths) me fixe du regard et me dit : "Mais alors, $3 \times 4$ ça veut dire 3 fois, 4 ? ". Elle venait (à 14 ans je le rappelle) de découvrir le sens de la multiplication. C'était certes une victoire pour moi, mais également un grand désespoir car je réalisais de mon côté le gouffre qu'il y avait entre ses connaissances et celles qu'elle aurait du avoir à son âge. Répétez ce type d'expérience à longueur d'année durant plusieurs années, et je pense que tout le monde finira par sentir un léger découragement.

Non mais en plus, pourquoi une courbe de Gauss devrait être centrée autour de 10 ? Un prof qui fait bien son boulot devrait réussir à la centrer autour de 12, tout en ayant un niveau d'exigence normal vis-à-vis de ses élèves.

Cela n'a aucun rapport. Je peux tout à fait être très exigeant avec les élèves, les emmener tous à un haut niveau de pratique, avoir une moyenne de classe à 8 et pour autant préconiser leur passage en classe supérieur. A contrario, avoir une moyenne à 12, 13 ou 14 n'est pas non plus le gage d'un bon enseignement. Je peux tout à fait abaisser mon niveau d'exigence le jour du contrôle voire pire, enseigner à un niveau nettement en dessous de ce que les programmes imposent. De façon plus générale, le débat sur les notes est souvent un faux problème car on y associe très souvent l'idée de la stigmatisation. On peut casser ou ré-étalonner le thermomètre facilement, cela ne change pas pour autant le degré de compréhension des élèves (leur estime d'eux-même certes, mais ce n'est pas le sujet). Par exemple, cela fait de nombreuses années que les écoles primaires ont (en très grande partie) abandonner les notes pour des systèmes de smiley ou de points verts-orange-rouge. Cela ne s'est nullement accompagné d'une hausse des compétences. Certains objecteront même le contraire, et il n'est pas rare de voir des élèves ou des parents découvrir en 6ème que le niveau de leur enfant est très en dessous de ce que l'on pourrait attendre (avoir 10 points verts, 4 oranges et 6 rouges ne signifie pas que l'on a 12/20, toutes les compétences n'ayant pas le même poids.

Mais revenons au problème : pourquoi un tel désamour et tant de difficultés pour les Maths ? Un point qui ne semble pas avoir été soulevé (mais qui n'est pas l'unique raison) est le caractère particulièrement cumulatif des Maths. Pas de résolution d'équation de degré 2 sans identités remarquables. Pas d'identités remarquables sans factorisation-développement. Pas de factorisation-développement sans calcul littéral. Enfin, pas de calcul littéral sans calcul numérique. Rares sont les matières où le fait de manquer une marche a autant d'impact sur la suite de la scolarité. Avoir loupé le chapitre sur la poésie du XIXème n'empêche pas de comprendre celui sur le roman au XXème. Cela ne veut pas dire qu'un élève qui trébuche est perdu pour la science à plus ou moins longue échéance, mais il est nécessaire qu'il se relève rapidement de son échec afin d'affronter les futures notions. Et vous aurez beau illustrer, réexpliquer, justifier, recontextualiser votre chapitre sur les polynômes autant que vous voudrez, un élève n'ayant toujours pas intégré que $x+x=2x$ et pas $x^2$ aura toutes les peines du monde à en comprendre l'intérêt.

Il n'y a qu'à prendre le temps de lui expliquer me direz-vous. Sauf que ce raisonnement oublie un problème simple : chaque niveau ne dure que 36 semaines, chaque semaine ne compte que 4H de Math la plupart du temps et la progression compte généralement une dizaine voire une quinzaine de chapitres. Eh oui, ce serait si beau de fournir "un soutien individualisé et adapté au rythme de chaque élève". Malheureusement, cette vision est loin des contingences bassement matérielles. Tout prof n'a qu'un temps limité pour transmettre ses connaissances (rappelons au passage que l'élève n'a pas non plus qu'une seule matière à apprendre). De plus, quiconque a un jour du gérer seul un groupe (et a fortiori un groupe d'ados) sait que la personnalisation a ses limites.

Il ne serait pas idiot de réfléchir également aux priorités : est-il utile de connaître le cosinus en 4ème et le sinus en 3ème quand on s'apprête à partir en apprentissage coiffure ou charcuterie ? N'y a-t-il pas plus urgent ? Est-il raisonnable que certains niveaux (comme la 4ème) aient des programmes si chargés et surtout dénués de cohérence (Que viennent faire la tangente à un cercle ou la distance d'un point à une droite à ce niveau) ?

Comment réussir tout de même à intéresser ? Plusieurs idées ont été soulevées, toutes sont nécessaires mais aucune n'est suffisante. Montrer la nécessité de démontrer, replacer dans le contexte historique, montrer les éventuelles applications … j'ajouterai à cela la nécessité de savoir (ou pouvoir) gérer un groupe et lui transmettre son dynamisme. Tout cela est éminemment nécessaire mais gourmand en temps. C'est tout l'art du prof que de savoir doser et alterner chacune de ces idées. Toutefois, il faut garder à l'idée que tout ne peut pas toujours être illustrer. Prenons l'Algèbre en 5ème - 4ème. Il est difficile de présenter des cas où les expressions littérales et équations ont un réel intérêt (je veux dire un intérêt vraiment convaincant pour l'élève). La plupart des problèmes du niveau des élèves peuvent être résolus par tâtonnement ou avec un peu de malice, ceux vraiment intéressants aboutissent généralement à des équations de degré 2 ou 3 ou à des systèmes, bien au delà de leurs compétences !

mes cours forment tous une suite de théorèmes, définitions, propositions… à apprendre, accompagnés d'exercices. Selon vous, cette méthode est-elle concluante ?

Personnellement, et avec du recul, je n'appelle pas cela de l'enseignement (même si certains profs savaient faire vivre ce type de cours). C'est ce genre d'enseignement que j'ai suivi et plus le temps passe plus je trouve qu'il est lamentable. C'est ainsi que j'ai déroulé des dizaines et des dizaines de séries de Fourrier sans jamais qu'un de mes "profs" de fac (notez les guillemets) n'ait l'idée d'évoquer la façon de générer un signal carré à partir d'un signal sinusoïdal par exemple. Le temps a passé et régulièrement je pense à la façon dont je m'y prendrais si je devais enseigner l'algèbre linéaire, la géométrie affine ou la topologie. Une chose est sûre, je ne m'y prendrai pas comme cela.

Avant de crier au scandale, laissez-moi juste vous raconter une anecdote. […] Répétez ce type d'expérience à longueur d'année durant plusieurs années, et je pense que tout le monde finira par sentir un léger découragement.

Je reviens vite fait là-dessus. Pour faire un parallèle avec une autre matière, et montrer que ce type d'état d'esprit n'est pas spécifique aux maths, je peux vous affirmer que la quasi-totalité des profs de lettres de lycée ont abandonné l'idée d'avoir des élèves qui savent écrire sans faute, à quelques exceptions près.

Pas par méchanceté ni par mépris, mais parce que quand des gamins de 15 ans (qui ont donc appris à écrire 10 ans plus tôt, je rappelle) ne savent toujours pas faire la différence entre « et » et « est », et que ça ne les choque pas d'écrire « vous savaient » ou « les arbrent », il n'y a plus d'espoir. Parce qu'en toile de fond, ça montre qu'ils n'ont pas acquis la compréhension de la structure de leur langue, qu'ils ne font pas la différence entre un verbe et un nom commun ou une conjonction de coordination.

Par ailleurs, le découragement vient aussi du fait que même en étant enseignant au lycée, on a une bonne idée de comment bossent les collègues des années antérieures, et même avec la meilleure volonté, ils n'ont pas les outils pour que leurs gamins apprennent à écrire correctement. Pour préciser, les profs de collège n'ont plus le droit de faire des leçons de grammaire, et les profs de primaire n'ont plus le droit de faire apprendre par cœur des pages du Bled (ou assimilé). Alors forcément, il ne faut pas s'attendre à des miracles…

Je sais qu'il ne faut pas stigmatiser, mais à force de faire pression année après année pour que les élèves bossent le moins possible et sur des exercices les moins abstraits possibles, les associations de parents d'élèves sont en partie responsables de l'échec actuel dans l'apprentissage.

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Pour préciser, les profs de collège n'ont plus le droit de faire des leçons de grammaire, et les profs de primaire n'ont plus le droit de faire apprendre par cœur des pages du Bled (ou assimilé). Alors forcément, il ne faut pas s'attendre à des miracles…

Dominus Carnufex

Sauf que c'est faux, notamment depuis les programmes datés de 2008. Avant ces programmes, les professeurs avaient le droit de faire la grammaire, mais en lien avec des textes, dans ce qu'on appelle une séquence pédagogique. Grosso-modo, le but de cette ancienne réforme était de décloisonner les connaissances, et faire une sorte d'interdisciplinaire interne au français. C'était clairement inefficace et mal vu par pas mal d'anciens professeurs, mais on pouvait quand même faire de la grammaire, même sans chapitres dédiés.

Et de toutes façon, ce n'était pas appliqué sur le terrain. Ma mère est professeur de français et dans tous les collèges dans lesquels elle est passée (3/4), elle était la seule à appliquer cette réforme. Comme quoi, quand les inspecteurs ne passent que tous les 3 à 5 ans, ça laisse de la marge…

Depuis les programmes de 2008, les cours de grammaire explicites, non-liés à une séquence décloisonnée sont possibles et même recommandés.

Même chose pour les professeurs de primaire : l'interdiction ne porte que sur les devoirs écrits, mais les récitations de cours ou autres formes d'apprentissage par cœur sont autorisées. Et si le bled était au programme, le faire réciter serait possible. Et encore une fois, il faudrait peut-être que cette interdiction soit respectée.

Je sais qu'il ne faut pas stigmatiser, mais à force de faire pression année après année pour que les élèves bossent le moins possible et sur des exercices les moins abstraits possibles, les associations de parents d'élèves sont en partie responsables de l'échec actuel dans l'apprentissage.

Dominus Carnufex

Ce ne sont pas les associations de parents qui écrivent les programmes.

Salut tout le monde. je vais tenter d'apporter quelque chose à la discussion en me recentrant sur la question initiale car je e m'avancerai pas sur un autre domaine que les maths. :)

Ensuite l'approche axiomatique pour un cours me paraît finalement très efficace. Personnellement quand j'aborde un nouveau sujet j'ai horreur de devoir lire 20 pages avant d'avoir le droit aux définitions. D'un autre côté, quand on comprend rien de rien c'est plus facile.

Holosmos

Je suis personnellement d'accord avec ça mais il faut savoir que tu as déjà un très bon niveau mathématique (lié à tes études). Et donc tu n'as évidemment pas besoin de rentrer petit peu par petit peu dans la matière et tu sais manipuler des objets très abstraits. Tu peux donc te retrouver face à des définitions d'objets que tu comprends sans avoir besoin de les manipuler.

Par contre c'est pas l'approche historique, je comprends d'ailleurs mal comment tu fais le lien entre les deux. C'est pourtant assez clair que l'axiomatique proposée dépend aussi des résultats que l'on obtient … Et donc finalement, on passe beaucoup plus de temps à établir les axiomes que l'on passe à les énoncer.

Holosmos

Une approche historique a pour moi, ici, le sens d'une remise en contexte. Et de ce que je peux en dire via mon expérience, une remise en contexte peut parfois s'avérer très utile pour comprendre un raisonnement, un cheminement. Ceci dit, Il est effectivement difficile de garder un certain formalisme et donc ça peut empiéter sur la compréhension de la notion enseignée.

Sinon tout le monde semble être d'accord sur le fait que le plus gros problème est le fait de garder des lacunes qui poursuivent et qui empêchent de progresser. Devoir continuellement revenir sur des notions censées être acquises est totalement contre productif. Je me souviens d'avoir dû réexpliquer à quelques élèves de rhéto comment faire des intégrales, comment s'en servir, dans quel cas les utiliser, etc. alors qu'ils n'avaient pas compris ce qu'était une fonction. Le problème c'est donc que, si on prend le cadre scolaire, on se retrouve avec des élèves qui ont des lacunes et qui donc ne sont pas capables de comprendre ce que l'on tente de leur expliquer mais les enseignants n'ont pas le temps de revenir sur ces mêmes notions. Et donc on se retrouve sur un gros problème mais qui n'est plus lié aux maths (ou à quelque matière que ce soit), qui est lié au système scolaire. Je ne connais pas le système français, je ne connais que le système belge. Mais visiblement, on se coltine les mêmes problèmes.


À part ça, je suis dans une optique qui dit qu'effectivement c'est à l'enseignant de rendre son cours attractif, mais dans les petites classes. J'entends par là jusqu'à une quinzaine d'année à la grosse louche. Je m'explique : dans l'enseignement belge secondaire général, à partir de la 3e année d'étude, on commence à s'orienter vers plus de maths ou plus de langues ou plus de ceci ou plus de cela. Pour la 5e et la 6e année, on choisit réellement son option, qui est censée nous préparer à faire des études supérieures dans le même domaine. Attention, domaine est à prendre au sens très large de science, histoire, lettres, …

Je me dis donc qu'à partir d'un certain âge, lorsque l'on a choisi son option, il faut commencer à trouver son propre intérêt et ne pas se faire mâcher le travail par les enseignants. Je ne prône pas pour autant les cours ex-cathedra et hermétiques mais je pense qu'à un moment, l'élève doit commencer à chercher lui-même des exemples qui illustrent tel ou tel axiome, théorème, autre. Je suis actuellement à l'université en informatique et je vois beaucoup d'étudiants qui, au cours de math, ne cessent de demander des exemples, des exercices (alors que nous avons des cours théoriques et des exercices totalement disjoints). Le problème étant que des exemples qui parlent à l'un ne parlent pas obligatoirement à un autre. Et donc on se retrouve à énoncer un théorème, et à donner des exemples pendant 25 minutes avant même de savoir à quoi il va bien pouvoir nous servir. Il y a à nouveau contre productivité.

Et surtout, est-ce que c'est vraiment nécessaire de rendre un cours motivant ? Modifier un cours pour le rendre motivant, c'est considérer que les élèves réussissent parce qu'ils sont motivés. Mais les recherches sur la motivation montrent surtout l'influence inverse : on est motivé parce qu'on réussit, parce qu'on est performant dans la matière enseignée !

Enfin, dernier détail : quoiqu'on fasse, il y aura toujours des élèves qui ne s’intéresseront pas du tout à la matière enseignée, y compris avec un cours conçu pour être intéressant. Par exemple, je défie quiconque de m'intéresser à la littérature classique, ou au latin.

Mewtow

Je vais juste poser une question là dessus, quelle est la légitimité d'apprendre quelque chose qui n'intéresse pas ? Et est-ce qu'une matière qui n'intéresse pas un élève/étudiant pourra toujours lui être rendue intéressante ? Alors je sais bien que quand on veut avoir un diplôme, on se retrouve avec des cours qui intéressent moins et certains qui n'intéressent pas du tout. Tu donnes toi-même l'exemple du latin, moi c'est la géographie et je sais que l'année prochaine j'aurai des cours de µéconomie qui m'emmerdent déjà alors que je ne les ai même pas commencés. Cependant, j'estime la question assez importante tout de même.

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Un truc tout bête à essayer dans les cours de maths : faire les démonstrations deux fois, d’abord avec un exemple ensuite dans le cas général (avec la même technique dans les deux cas bien entendu). Et insister lourdement après que l’on ne fait que généraliser et formaliser le raisonnement.

L’intérêt est triple :

  • On répète le raisonnement (la répétition est la base etc.)
  • On permet au retardataire de se raccrocher au wagon du formalisme
  • On manipule les notions du cours au plus près de leur première exposition

Alors évidemment pour les élèves doués qui sont à l’aise avec le formalisme ce sera chiant puisque l’on fait essentiellement deux fois la même chose. De plus cela rend le cours nettement moins élégant. Mais je pense honnêtement que ça peut aider un paquet d’élèves.

Bon, c’est une idée comme ça…

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Je ne prône pas pour autant les cours ex-cathedra et hermétiques mais je pense qu'à un moment, l'élève doit commencer à chercher lui-même des exemples qui illustrent tel ou tel axiome, théorème, autre. Le problème étant que des exemples qui parlent à l'un ne parlent pas obligatoirement à un autre.

poupou9779

Un truc tout bête à essayer dans les cours de maths : faire les démonstrations deux fois, d’abord avec un exemple ensuite dans le cas général (avec la même technique dans les deux cas bien entendu). Et insister lourdement après que l’on ne fait que généraliser et formaliser le raisonnement.

simbilou

Je tiens à vous signaler que dans les deux cas, vos recommandations ne respectent pas ce qui est conseillé par la majorité des théories pédagogiques sur la formation des concepts. A ce sujet, je conseille vivement la lecture de ces deux documents : Theory of instruction - SIegfried Engelmann et Theory of instruction - SIegfried Engelmann - 2, qui explique un petit peu mieux que le chapitre sur le sujet dans mon tutoriel de pédagogie.

Il faut bien se rendre compte que les exemples en eux-mêmes doivent servir à induire des règles, définitions, méthodes, etc (c'est aussi ce mécanisme qui est mis en jeu quand on illustre un concept avec des exemples) . Ainsi, ce qui compte, c'est ce que ces exemples ont en commun, ce qui se dégage en comparant les exemples entre eux. Or, pour bien dégager ces propriétés et relations communes, pour faciliter l'induction de règles, il faut :

  • présenter une série d'exemples les uns à la suite des autres à un rythme assez rapide ;
  • faire précéder les exemples par une définition, règle, ou procédure quand c'est possible : celle-ci permet de donner des indications sur ce qui est pertinent dans la série d'exemples, ce qui est commun aux différents exemples, facilitant l'abstraction d'une règle ;
  • le choix des exemples dans la liste ne doit permettre qu'une seule interprétation possible, et ne peut permettre de n'induire qu'une seule et unique règle ;
  • les exemples doivent être le plus variés possible à l'intérieur de la liste ;
  • deux exemples consécutifs doivent être les plus dissimilaires possible, histoire que leur comparaison puisse dégager le plus possible un concept ;
  • l'usage de contre-exemples est fortement recommandée quand c'est possible ;
  • les contre-exemples doivent s'intercaler entre les exemples (mieux vaut éviter des contre-exemples consécutifs) ;
  • un exemple et un contre-exemple consécutif doivent être les plus similaires possibles.

On peut remarquer que c'est assez différent de ce que propose simbilou, qui n'utilise qu'un seul exemple, introduit avant la définition/règle générale. De plus, un élève ne peut pas générer une suite d'exemples qui respecte ces recommandations en cherchant par lui-même, contrairement à un professeur : ainsi, la technique de poupou9779 ne peut pas marcher.

A ce propos, je tiens à signaler qu'il existe une méthode pédagogique, le Direct Instruction, qui a conçu un grand nombre de scripts d'exemples de ce type. Il existe de nombreux scripts pour l'enseignement des mathématiques au primaire, ainsi qu'au collège. L'existence de ces scripts tient du fait que créer soit-même une séquence d'exemples qui respecte bien les critères mentionnés plus haut est difficile : les créateurs du Direct Instruction on préféré créer eux-même de telles séquences, calibrées au millimètre près. Et les études scientifiques sur le sujet sont très claires : ça fonctionne très bien.

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Après avoir rapidement survolé les 2 liens que tu donne, je n’ai pas l’impression qu’on parle de la même chose. La proposition n’a pas pour but de faire deviner une notion aux élèves en les laissant généraliser à partir d’exemple. J’ai fait une liste très clair de ce que je pense que cette approche peut apporter, et ça n’en fait pas parti.

Maintenant je ne prétend pas que c’est le remède miracle, je pense que vaudrait le coup d’essayer par contre. Et ce n’est pas révolutionnaire au demeurant, j’ai déjà vu faire (notamment dans ce cours de théorie du calcul).

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Tu ne parlais pas des méthodes de démonstration assez générales (par récurrence, par analyse-synthèse, par l'absurde), ou d'autres canons et méthodes de démonstrations/raisonnement plus spécifiques (déterminer de l'aire d'une figure en la décomposant en figures d'aire connue, etc) ? Parce que c'est ce que j'avais en tête quand j'ai posté mon message, et dans ces situations, ce que je propose peut marcher.

Ou alors tu voulais parler de cas du genre : "on démontre que telle propriété vaut pour les entiers, puis on généralise la démonstration aux réels" ? Dans ce cas, ce que je propose ne marche pas, à priori.

Mais sinon, je ne vois pas comment tu pourrais donner des exemples d'une démonstration qui ne rentre pas dans ces cas bien précis.

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Le problème avec la double démonstration quelle que tu la proposes c'est que c'est quasiment jamais réalisable.

Pour plusieurs raisons mais dont une importante : les outils pour démontrer le cas général et le cas particulier n'ont pas de raison d'être les mêmes (ou alors la démo du cas générale se ramène à celle du cas particulier …).

Exemple simple : le théorème de récurrence de Poincaré. À démontrer c'est pas très compliqué, par contre essayer de le démontrer sur un exemple .... bonjour la galère.

Sinon Kaji9, tu dis que l'intérêt de motivation des notes est pas le sujet. Ah bon ? Un élève démotivé sera pas moins efficace ?

Et pourquoi toutes les compétences n'ont pas le même poids ? Tu entends quoi par là ? Certes, lire et compter c'est plus important que de connaître la date de la mort de Louis XIV (avec l'un on peut faire l'autre …) mais à partir du collège/lycée je vois pas ce qui permet de différencier l'importance de certaines matières par rapport à d'autres. C'est exactement le problème qu'on a, les maths sont devenues une matière de sélection à tord et ça fait beaucoup de mal à tout le monde.

les outils pour démontrer le cas général et le cas particulier n'ont pas de raison d'être les mêmes (ou alors la démo du cas générale se ramène à celle du cas particulier …)

Holosmos

J’aurais plutôt dit le contraire mais oui. Et c’est précisément le but, on le fait deux fois. Il n’y a aucun ajout d’information ou quoique ce soit, regarde (au moins un bout) du cours que j’ai donné plus haut, c’est assez frappant.

Par contre ce n’est effectivement pas toujours possible. Ne serait-ce que pour les preuves non constructives.

Aussi ça n’a d’intérêt que pour un cours magistral à l’oral, je ne pense pas que faire ceci à l’écrit soit très pertinent.

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Sinon Kaji9, tu dis que l'intérêt de motivation des notes est pas le sujet. Ah bon ? Un élève démotivé sera pas moins efficace ?

Et pourquoi toutes les compétences n'ont pas le même poids ? Tu entends quoi par là ? Certes, lire et compter c'est plus important que de connaître la date de la mort de Louis XIV (avec l'un on peut faire l'autre …) mais à partir du collège/lycée je vois pas ce qui permet de différencier l'importance de certaines matières par rapport à d'autres. C'est exactement le problème qu'on a, les maths sont devenues une matière de sélection à tord et ça fait beaucoup de mal à tout le monde.

Holosmos

Concernant les notes, tu déformes mes propos Holosmos :) Ce que je dis c'est qu'il est facile de mettre toute le monde à 12 en simplifiant un devoir ou en abaissant ses exigences : on oublie les fautes d'orthographe, on ne tient pas compte de la présentation du raisonnement, tant pis si le schéma Données=>Propriété=>Conclusion n'est jamais respecté, si l'élève ne distingue pas Thalès et Pythagore, s'il écrit que $3 \times 4 + 5 = 3 \times 4 = 12 + 5 = 17$ … Cela remobilise les troupes certes et peut éviter ou limiter des décrochages, mais cela n'a absolument AUCUN effet bénéfique sur les apprentissages de l'élève qui se dit toujours (et c'est humain) que si le prof ne le sanctionne pas c'est que ce n'est pas grave. On confond souvent la fièvre et le thermomètre. Le débat sur la note (qui n'est pas le sujet ici) est souvent un faux problème car on se focalise sur cet aspect de sanction-stigmatisation. Or je n'ai jamais vu de progrès dans les capacités des élèves suite au passage à une évaluation par point rouge/vert ou par lettres. Mais je ne dis pas non plus que la démotivation n'a aucun impact.

Deuxième point, effectivement j'affirme que toutes les compétences n'ont pas le même poids d'un point de vue scolaire. Le "Savoir nager" est une compétence. Or il me semble plus important de savoir lire et décrypter un texte dans sa propre langue que de savoir nager (on est plus souvent confronté au texte qu'à la noyade). Un élève de primaire voyant son bulletin avec beaucoup de points verts dans des items tels "sait nager", "sait se comporter en société", "sait prendre des initiatives" se dit qu'il réussit à l'école. Il négligera vite le petit point rouge "sait faire une addition à deux chiffres" qui pourtant est le premier but de l'école. De même qu'il me semble plus important d'avoir de solides bases dans sa langue maternelle, en calcul et dans une langue étrangère (disons l'Anglais) qu'en Solfège, Croate et Foot. Mettre des priorités ce n'est pas dénigrer les compétences ou matières moins urgentes (avoir une bonne culture musicale est un plus, mais une maigre consolation si l'on est illettré). L'école ne peut pas tout faire, mettre toutes les compétences à un même degré d'importance, ne pas savoir les hiérarchiser est une catastrophe (et une vaste mascarade à laquelle personne ne croit vraiment). Cela conduit entre autres à donner aux élèves qui auraient besoin d'une attention particulière en Français le même emploi du temps que les As de la matière, ou que toute aide se fasse en supplément de la charge de travail habituelle. Ceci étant, je suis d'accord sur le fait que les Maths ont un statut néfaste à leur bon apprentissage et qu'il n'est pas absolument nécessaire de connaître la fonction exponentielle. Ce rôle prépondérant des Maths en Lycée n'a pas de raison d'être.

[…] Ceci étant, je suis d'accord sur le fait que les Maths ont un statut néfaste à leur bon apprentissage et qu'il n'est pas absolument nécessaire de connaître la fonction exponentielle. Ce rôle prépondérant des Maths en Lycée n'a pas de raison d'être.

Kaji9

Je ne connais pas le statut des maths dans les filières technologiques et littéraires, mais je ne crois pas qu'elle soit prépondérante, tant en terme de volume horaire que de coefficients au bac. À ce niveau-là, il me paraît faux de dire que les maths ont une place prépondérante au lycée. À dire vrai, s'il y a une matière scientifique qui gagne en importance, c'est plutôt la physique — je ne dis pas que ça soit une mauvaise chose, c'est juste un constat.

C'est un peu vrai en seconde, parce que le niveau se corse par rapport au collège, mais là encore il y a aussi un problème majeur de prérequis : une masse importante des élèves qui arrivent en seconde sont loin d'avoir un niveau suffisant en maths, même selon les critères de l'Éducation nationale.

Par contre, effectivement les maths ont un rôle important à jouer dans les filières à dominante scientifique, essentiellement en S en gros, et aussi un peu (même si c'est beaucoup moins, à juste titre) dans certains bac technos du genre STI2D. Et pourtant, le volume horaire en maths, et en sciences en général, a beaucoup diminué même dans ces filières. Quand tu dis « qu'il n'est pas absolument nécessaire de connaître la fonction exponentielle », je suis d'accord avec toi pour la quasi-totalité des gens. Mais cela ne s'applique pas aux filières scientifiques et à mon sens, cela fait partie du bagage culturel mathématique que l'on est en droit d'attendre après un bac scientifique.

Quand je vois le nombre d'élèves en première ou en terminale S qui ont purement et simplement horreur des maths, et qui auront quand même leur bac avec mention AB voire B, je me dis qu'il y a quand même une erreur de casting, indépendamment de ce qu'ils veulent faire post-bac.

Ce ne sont pas les maths qui ont un rôle prépondérant au lycée, mais le bac S. Et c'est plutôt ça le vrai problème.

Pour moi il faut inscrire l'enseignement des mathematiques dans une vision beaucoup moins utilitariste mais historique, comme construction de la pensee au cours de l'Histoire. Comment saisir l'importance si ce n'est la necessite de l'analyse de Fourier sans introduire son contexte historique ? Comment saisir l'importance du calcul integral sans aborder a minima les besoins de Newton, la necessite des notations introduites par Leibniz, etc. Les mathematiques n'echappent pas a l'orientation d'une epoque, des contemporains et une necessite des concepts ou a defaut un environnement propice a l'elaboration des concepts (il faut avoir du temps a perdre, etre un bon aristocrate avec des servants pour se permettre de traiter toute la journee de la geometrie lemniscatique au 17 ou 18eme siecle).

Le probleme est a mon sens qu'on ne donne aucune envie d'apprendre en lancant des formules magiques sortis du chapeau comme si c'etait une evidence. Rappelez-vous que ce qu'on apprend en CPGE, bien que tres vieux est tout de meme le resultat d'annees de sacrifices individuelles et de tourmentes intellectuelles de la part de centaines de mathematiciens durant des siecles. Un excellent professeur que j'ai pu avoir en theorie de la mesure, en equivalent L3, Erik Lenglart1 pour ne pas le citer, rassurait ses eleves a la fin du cours en disant: "ne vous inquietez pas si cela vous semble difficile, cela semblait egalement extremement difficile pour les mathematiciens du debut du XXieme siecle. Vous en savez autant sur la theorie de la mesure que les plus grand noms de cette epoque".

Un grand probleme est que l'on ne donne pas les clefs de comprehension dans les cours pour en comprendre la portee. On donne simplement de quoi faire manipuler des equations. C'est valable tres generalement en sciences: combien d'eleves de CPGE et d'ecole d'ingenieurs ont une vision aristotelicienne de la mecanique. Pour reprendre l'exemple d'Etienne Klein dans beaucoup de ses conferences, prenons un systeme Soleil / Terre, dont les deux corps ne sont soumis qu'a la force de gravite. Posez la question: que se passe-t-il lorsque l'on remplace la Terre par une theiere, et observez un tiers de theiere qui partent a l'infini, un tiers de theiere qui s'ecrasent sur le soleil et un tiers de gens qui ne se prononcent pas. C'est a dire que ces gens la ont vu les equations de la gravitation, savent faire un PFD mais sont incapables d'en saisir les implications et de penser les equations. La reponse est pourtant evidente a la vue des equations: le mouvement d'un corps dans un champs gravitationnel ne depend pas de sa masse2.

Comment remedier a cela ? Alleger allegrement les programmes de CPGE et scolaires pour eviter de former des machines de calcul sans aucun recul, et forcer la construction de la pensee et la conceptualisation des idees simples sous-jacentes en contextualisation le cours dans un environnement historique depassable et en guidant l'eleve dans les implications des concepts sous-jacents (c'est le "depassable" du contexte historique).
A defaut d'etre la solution miracle, cela permettrait au moins aux eleves de comprendre, et je renvoie une nouvelle fois a Etienne Klein, que les sciences ne sont pas faites par des ruptures conceptuelles introduitent par des genies presque resultat d'un hasard genetique, mais le fruit d'une comprehension superieure de ce qui etait deja present dans les travaux acceptes par ses contemporains. C'est a dire que Galileo prouve l'independence de la masse dans la chute libre des corps par une incoherence logique de la pensee d'Aristote, Einstein developpe la relativite par une meilleure comprehension de ce qui est DEJA inscrit dans les equations newtoniennes (et peut etre par une influence de Poincare et de ses travaux geometriques - a verifier, je ne voudrais pas dire de betise), etc.


  1. Petite anecdote par rapport au premier message de Vayel pour initier ce message. Ce professeur refusait les phrases debutants par "On dit que […]" en se moquant "Ha bon ? C'est une rumeur ?", ce qui montre en quelque sorte le rejet des definitions dogmatiques. A savoir qu'il donnait assez rarement les noms des theoremes qu'il enseignait (ceux portant un nom de mathematiciens, pas ceux du type theoreme spectral, theoreme ergodique, etc.), sauf quelques tres importants et les nomme par rapport a l'idee qu'ils representent. C'est ainsi que j'ai appris 3 ans plus tard le nom du Théorème de Radon-Nikodym alors que j'en connaissais le contenu, l'utilisation et les demonstrations. 

  2. Notons $m_1$ et $m_2$ respectivement la masse de la Terre et du Soleil. On rappelle que la force de gravitation attractive qui s'applique a un objet de masse $M_1$ par un objet de masse $M_2$ eloigne d'une distance $d$ s'exprime par $F = G\frac{M_1 M_2}{d^2}$ avec $G$ constante (modulo une notation vectorielle correcte). On peut deduire la position de la terre par rapport a son acceleration par simple double-integration. Un petit PFD sur la Terre nous donne $m_1 a = \text{Somme des forces}$, avec $a$ acceleration de la terre, c'est a dire en l'occurrence uniquement la force de gravitation: $m_1 a = G\frac{m_1 m_2}{d^2}$. On voit bien que $m_1$, la masse de la Terre, se simplifie. 

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