J’aurais bien aimé aimer Mastodon

Hélas, c’est un amour impossible

Cela fait maintenant deux ans que j’héberge ma propre instance Mastodon – depuis qu’Elon Musk a racheté Twitter.

Depuis, Twitter a été renommé en « X (anciennement Twitter) », sont apparu Threads (théoriquement interopérable avec Mastodon) et Bluesky, il est apparu qu’Elon Musk n’a pas « payé un jouet 44 G$ » mais « s’est offert l’élection présidentielle des USA pour 44 G$ » (ce qui est un meilleur investissement), Trump va de nouveau être président desdits USA, Twitter (pardon, X ) s’est définitivement transformé en dépotoir au point d’être fui par de grands médias, et je n’aime pas Mastodon. Et je vais détailler ce dernier point.

Pré-requis

Je considère que si vous lisez ceci, vous connaissez un minimum Mastodon ; en particulier que vous savez que Mastodon (le logiciel) n’est pas ActivityPub (le protocole), et que vous avez une idée de ce qu’est une instance et la fédération d’instances.

Billet d’humeur

Ceci est un billet d’humeur qui n’a pas vocation à être une critique exhaustive, pas plus qu’à une quelconque forme de neutralité. Vous êtes prévenus.

Le fonctionnel

Mastodon est compliqué. Toute personne qui prétendrait le contraire est, au mieux, quelqu’un d’habitué qui a oublié cette complexité ; au pire de mauvaise foi.

La raison principale est que Mastodon expose et impose une séparation stricte entre les instances, ce qui oblige à exposer cette notion et toutes ses conséquences à l’utilisateur, ce qui casse énormément de choses pour l’usage quotidien.

Pour commencer, la notion même d’instance est incompréhensible pour la plupart des utilisateurs non-techniques. Et c’est pas en criant très fort le contraire que ça résoudra le problème, désolé.

Ensuite, ça provoque des comportement eux-mêmes incompréhensibles. Par exemple, si je suis connecté à mon instance, que je vois que quelqu’un a republié un message de Toto que je n’ai jamais croisé avant. Toto dit un truc intéressant, je veux voir si c’est un compte à suivre, je vais sur son profil et… je ne vois rien. Parce que mon instance n’a pas récupéré les messages de Toto. Il faut que je clique sur un lien pour voir le profil de Toto directement sur l’instance utilisée par Toto pour avoir ce profil au complet.

Même cause, mêmes conséquences, le lien « voir les messages et réponses » d’un profil fédéré est inutile en usage réel.

Comme chaque instance a son URL et qu’il n’y a pas de protocole spécifique (tout passe par https://…) ni de nom de domaine bien connu (chaque instance a le sien, et potentiellement n’importe quel nom de domaine est concerné), ça interdit de créer une configuration de type « ouvrir ce lien avec cette application » au niveau du système sur mobile. Autant dire que l’ouverture de lien / le suivi / etc… ne fonctionnent jamais correctement et se lancent toujours sur le navigateur et pas l’application. Ça suffit à rendre l’usage extrêmement pénible sur mobile. Or, le gros de l’usage informatique se fait sur mobile aujourd’hui.

… et tout est comme ça. La notion d’instance est partout, elle complexifie tout. Comme tout est découpé en instances, tout ce qui sort de l’instance sur laquelle on est est soit défectueux, soit lent, soit incomplet, et souvent les trois à la fois.

Or, Mastodon – et surtout ses utilisateurs – déteste les grosses instances.

L’ergonomie

Ce point rejoint beaucoup le précédent : Mastodon est assez compliqué à utiliser à cause de cette notion d’instance qui apparait partout, et qui doit être comprise par l’utilisateur pour comprendre ce qu’il fait.

Pire, en copiant Twitter (souvent assez littéralement, y’a des pages qui à une époque étaient quasi indiscernables) alors que le concept derrière est très différent, Mastodon a contribué à rendre son propre usage difficile et à pousser un usage incohérent avec le protocole.

Mastodon en tant que réseau

L’aspect technique

Le système de modération et de blocage d’instances est complètement pété par conception, ce qui fait que plus une instance est grosse, plus on a de risque d’être isolé d’une partie du réseau sans même être au courant et ce à cause d’agissement de personnes dont on a même pas l’idée de l’existence.

D’autre part, des instances ferment régulièrement, y compris des grosses. Il existe bien un outil de migration, mais difficile à utiliser, peu fiable, et très partiel lorsqu’il fonctionne.

Enfin, Mastodon, le logiciel, voit son développement agoniser. Oh, il y a encore des mises à jour régulières. Mais Mastodon est en version 4.x depuis maintenant deux ans, et n’a sorti aucune nouvelle fonctionnalité notable depuis. Or, des idées à implémenter, il y en a plein. On pourrait faire une longue liste à partir des bonnes idées de modération de Bluesky1 (et des moins bonnes idées qui sont faciles à améliorer2). Ou même implémenter des trucs comme « pouvoir configurer la longueur des messages sans avoir à maintenir un patch ».

L’aspect humain

Entre :

  • Les geeks persuadés qu’ils utilisent un outil simple et ergonomique et donc prennent de haut les nouveaux venus un peu perdus ;
  • Les gatekeepers qui engueulent les nouveaux qui n’ont pas leurs codes ;
  • Et surtout les administrateurs d’instances ni ne sont d’accord sur aucune règle de modération et donc se bloquent mutuellement à vue. En réalité, beaucoup d’instances gagneraient à ne pas se fédérer (ce qui est prévu dans la configuration), ça aurait le mérite d’être clair.

Mastodon est un repoussoir pour qui veut venir sans être déjà intégré à une communauté.

D’une certaine façon, ça se voit dans les chiffres. À l’heure où j’écris ces lignes, Bluesky a dépassé les 20 millions de comptes, lui et Threads ont à peu près le même nombre d’utilisateurs actifs… et les statistiques de Mastodon que je donnais il y a un an et demie n’ont pas significativement bougé (mastodon.social est passé de 221 milliers d’utilisateurs actifs à 278 milliers, et c’est la plus grosse évolution).


  1. Bluesky permet de détacher son message d’un « repost avec citation » (c’est comme si la personne citait un message qui n’existe plus. Mastodon a « évité le problème » en n’implémentant pas la fonctionnalité de repost avec citation… ce qui n’interdit absolument pas de citer le message via son URL, ce qui revient au même sauf qu’on ne sait pas qu’on a été cité.
  2. Comme la liste de blocage partagée de Bluesky, à laquelle il ne manque aujourd’hui que des raisons des blocages (individuelles) et un énorme avertissement sur le pouvoir qu’elle donne au mainteneur de cette liste, pour être parfaite.

Le protocole

Le protocole – ActivityPub – ne passe pas correctement à l’échelle.

Ici quand je parle d’échelle, il faut comprendre « l’échelle des réseaux sociaux de microblogging tels qu’ils fonctionnent actuellement », à savoir : des dizaines de millions d’utilisateurs, dont de très gros producteurs (plusieurs dizaines de messages par jour) à une très forte audience (plusieurs millions d’utilisateurs).

C’est assez difficile de savoir exactement dans quel but ActivityPub a été conçu : la spécification ne donne pas de cas d’usage concret, en particulier aucune forme de volumétrie ciblée. Mais de ce que j’en comprends, c’est un protocole qui a été conçu pour un usage de type « email » ou, plus généralement, « de petits groupes qui communiquent beaucoup en interne mais peu avec l’extérieur », ou encore de type « blog », c’est-à-dire « diffusion à une audience potentiellement grande mais assez passive, avec des messages peu fréquents ».

Le problème, c’est que Mastodon n’en a pas du tout cet usage. Mastodon, c’est du micro-blogging, beaucoup de messages à une audience extrêmement diverse et potentiellement énorme.

En conséquence, un serveur Mastodon consomme beaucoup pour le service rendu – CPU, mais surtout RAM et espace disque nécessaires. Un seul gros producteur sur l’instance, ou la fédération d’un gros producteur qui fait beaucoup réagir, peuvent provoquer de fortes charges serveur.

Mastodon, la version qui fonctionne

Je vois pourtant un usage de type « micro-blogging » à Mastodon qui fonctionnerait – mais hélas, c’est un usage très minoritaire.

Il s’agit de faire du micro-blogging sur une instance dédiée à un thème, sans chercher spécialement à se fédérer avec une autre instance.

Pour que ça marche, il faudrait un compte par instance qui nous intéresse, avec éventuellement du SSO pour se connecter une seule fois à toutes celles auxquels on est inscrit, et un moyen de changer facilement d’instance. Ça ne résoudrait pas certains problèmes (comme tout ce qui concerne l’utilisation sur mobile), mais serait déjà beaucoup plus cohérent.

Mais en l’état, utiliser Mastodon pour faire du Twitter/Bluesky, c’est complètement nul. Hélas, c’est comme ça qu’il se présente pour le grand public.


Je pense honnêtement que les péchés de Mastodon (et pas ActivityPub !) c’est :

  1. La volonté claire, mais pas totalement assumée, de vouloir refaire un Twitter avec un protocole inadapté, au lieu de se poser la question de ce qu’on pourrait faire comme réseau social intéressant à partir de ce protocole (ou de réinventer un protocole, mais là c’est pas le même boulot).
  2. Les geeks qui, comme souvent, sont pionniers, mais ont refusé de voir la complexité et se sont refusés à la critique « parce que c’est libre » (le seul critère qui compte chez certains, et qui s’imagine que c’est le cas pour le reste de l’univers)
  3. Les gestionnaires d’admin qui veulent la fédération mais que l’univers se plient à leurs règles de modération, et qui donc de fait refusent la fédération, mais sans l’admettre.

J’aurais bien aimé aimer Mastodon. Mais en l’état, je ne peux pas.


Le logo est celui de Mastodon.

10 commentaires

Je ne peux que plussoyer sur la marche d’entrée beaucoup trop haute.

Sur ça

Il s’agit de faire du micro-blogging sur une instance dédiée à un thème, sans chercher spécialement à se fédérer avec une autre instance.

Ça ressemblerait pas un peu à Reddit ? Ou tu vois quoi comme différence fondamentale ?

Ça ressemblerait pas un peu à Reddit ? Ou tu vois quoi comme différence fondamentale ?

Rockaround

Je connais très mal Reddit ; mais de ce que j’en vois : ouais, ça serait du Reddit, mais avec des instances complètement isolées (hébergées et modérées par les différents propriétaires d’instances). Reddit décentralisé, en fait.

Billet très intéressant qui rassemble tous les défauts que j’ai vécu également avant de délaisser le réseau.

Le sujet mériterait probablement un billet entier, mais je serais curieux de connaître ton opinion sur Bluesky en comparaison. Le réseau semble moins ouvert que Mastodon avec une plateforme centralisée (modération, etc), mais il est possible d’héberger des PDS sur leur protocole ouvert. Est-ce une bonne alternative?

Bluesky en vitesse :

Côté réseau

Là en ce moment, fin novembre 2024, c’est le crash-test. Avec la grande migration de comptes depuis X-anciennement-Twitter, viennent aussi les trolls. Est-ce que la modération va réussir à suivre ? Mystère. Les listes de modération aident bien, mais elles ont le double défaut de laisser un pouvoir démesuré à leur créateur (et on a déjà des problèmes de blocage indus sur certaines d’elles) et de ne pas permettre d’indiquer pour chaque compte le motif de blocage.

Cette histoire de modération c’est un point critique du réseau, c’est le test de sa résilience face à une volonté assumée de le transformer en nouveau nid à trolls.

Concernant les gens dessus, la plupart des comptes « moyens » ont l’air de s’y être mis sérieusement, avec beaucoup de témoignages qu’il y a plus d’engagement que sur Twitter-nouvellement-X ou sur Threads. Est-ce que ça va continuer (et donc inciter les moyens et gros à rester) ou s’évaporer une fois la mode suivie ? À voir.

Côté pilotage

L’équipe de Bluesky est transparente et très accessible. Ils ont plein de bonnes idées, notamment dans la modération, ou dans les starter pack (des listes éditorialisées de comptes à suivre pour bien démarrer sur la plateforme).

Reste l’éléphant dans la pièce : comment financer ?

Un réseau social, ça coute extêmement cher, et Bluesky a donné des plans pour un financement sans publicité, mais qu’est-ce que ça va donner en vrai ? Ben ça, on ne sait pas. On sait juste qu’aujourd’hui, ils sont financés par une boite de crypto.

Côté technique

Bluesky est basé sur le protocole AT, développé par eux-même à priori. Les tenants et aboutissants sont beaucoup mieux exposés que ceux d’ActivityPub (notamment, Speech, reach, and moderation sont explicites).

Le protocole a ceci de particulier que absolument tout ce qui y est posté est définitivement public (c’était très clair au début de Bluesky, beaucoup moins maintenant) et non déniable (tout est signé). Ça permet des outils comme celui-ci qui permet de retrouver plein d’informations publiques (tout l’est, par conception) mais pas forcément exposées par bsky.app (comme : les listes auxquelles un compte appartient, qui il a bloqué, qui l’a bloqué, etc).

Le protocole est aussi déclaratif (d’une certaine façon il me fait penser à Git : déclaratif, décentralisé, signé), et ça donne des possibilités d’abus comme mettre n’importe quelle date dans les posts et c’est volontaire. À voir ce que ça peut donner comme comportement toxique et comment ça pourra être modéré.

Pour l’instant ça a l’air de tenir la charge avec 22,5 millions d’utilisateurs sur grosso modo une instance (dont on ne connait pas le dimensionnement).

J’ai pas creusé la fédération Bluesky, en l’état ça ressemble vachement à « donner de la puissance de calcul à un système centralisé », mais je peux me planter.

Un peu de lecture (étonnante !) sur la technique chez BlueSky.

Reddit décentralisé, en fait.

SpaceFox

Reddit libre et decentralisé, c’est Lemmy, et la notion d’instance se voit dans l’interface même mais je pense moins marqué que Mastodon dans l’utilisation

Merci beaucoup pour ces retours d’expérience ! Je me demande depuis longtemps si je dois m’interesser à Mastodon par geekitude, mais tout les réseaux sociaux de ce type ne m’interessent absolument pas. Cependant la question se pose pour des associations auxquelles je participe, notament mon GUL local, où le sujet est en plein débat.

+0 -0

Pour moi, il y a dans tout ça un facteur humain énorme et des intérêts antagonistes.

  1. On souhaite un réseau social avec un maximum de personne mais pas mettre de l’argent dedans pour soutenir le trafic (et je comprends, j’ai pas envie de payer pour utiliser un réseau social1). Donc soit on découpe le problème en instances, soit on est bien content de tous se retrouver sur un une plateforme centralisée (Bluesky, me concernant) qui finira effectivement par nous la mettre à l’envers à plus ou moins long terme, mais qui paye les factures.
  2. On souhaite une modération efficace, des bans et autres, mais on souhaite un protocole décentralisé (parce que c’est cool). Je me rends bien compte que c’est pas un problème facile, mais le principe d’un protocole décentralisé (comme le web, par exemple), c’est que tout le monde fait ce qu’il veut, et que c’est quasiment impossible de faire disparaitre un contenu. Encore une fois, victoire des plateformes centralisées, qui peuvent réellement appliquer une modération, aussi arbitraire soit elle.
  3. On souhaite être vu par tout le monde, mais n’interagir qu’avec des gens "bien" (ou qui pense comme nous, ce qui revient quasi au même). On bloque, on crie, on s’agite, on crée des listes de blocage à partager aux copains (basés sur des critères arbitraires, parfois même plus que ceux des plateformes qui les héberge) mais on reste quand même là, parce que ben … Les likes (et les interactions), quoi ;)
  4. On souhaite du débat et de la nuance, mais on garde des protocoles avec des limites sur le nombre de caractères, qui empêchent la nuance (mais quand on étend la limite, alors c’est trop long, et g pa lu, lol) et favorisent les jugements à l’emporte-pièce. Typiquement, je suis catalogué "nazi" (ouais, point Godwin direct) par 2 ou 3 comptes, parce que j’ai défendu le fait qu’une tradition évolue avec le temps et n’a généralement plus le sens qui lui était donné à l’origine (manque de pot, c’était la cérémonie d’ouverture des JOs et je l’ai fait en 250+ charactères).2
  5. On souhaite un protocole décentralisé, mais embrace, extend, extinguish. Au-delà des raisons techniques qui font que faire interagir Threads et Mastodon est une très mauvaise idée, j’y vois un aveu d’échec de ne pas avoir envisagé que ça pourrait arriver et s’en être prémuni (limite, c’est même un manque d’ambition de se dire que "non, mon projet ne sera jamais assez connu pour que ça arrive").

Donc bon, avant de penser à créer le protocole de demain, il s’agirait déjà de savoir ce qu’on veut, et de se donner les moyens pour le faire. Ou d’accepter qu’il n’est pas possible de concilier certains de ces intérêts, arrêter d’essayer parce que clairement c’est pas fait pour, refaire des blogs, des forums, et retourner sur IRC ;-)


  1. Ce qui est fondamentalement stupide, parce que tout coute de l’argent, donc ne pas vouloir payer un service est déjà une partie du problème
  2. PS: ça sert à rien de relancer le débat, j’ai compris que j’étais un être détestable, et je porte donc un écriteau pour en informer les gens depuis.
+1 -0

Super intéressant! Je suis d’accord pour la partie ergonomie.

Quand tu dis que la notion d’instance est incompréhensible, est-ce que c’est pour dire qu’il est impossible de l’expliquer, ou qu’elle est actuellement mal expliquée? Les gens ont l’air de bien comprendre comment marchent les serveurs Discord par exemple.

Pour ce qui est de l’aspect humain j’imagine que ça dépend beaucoup de où on se trouve. Effectivement, sur une grosse instance on va être plus facilement tributaire de décisions prises à notre place, j’ai l’impression que c’est moins le cas sur des petites instances. Ça permet d’être assez raccord avec qui l’instance bloque par exemple. Je suis assez d’accord pour dire que la marche d’entrée est abrupte sur Mastodon (et il y a définitivement du gatekeeping). Ceci dit j’ai aussi l’impression que l’interaction avec les gens sur ce réseau social a eu une influence sur mon comportement. Je pense par exemple à l’utilisation d’alt-text pour les images (c’est quelque chose qui est extrêmement demandé dans les comptes avec qui je peux interagir). J’ai aussi l’impression que la structure du réseau social empêche un peu l’émergence de très gros comptes qui monopoliseraient toutes les timelines via du clash, ce que je trouve assez intéressant (et particulièrement apaisant).

Concernant Bluesky, il y a un thread assez intéressant (que je n’ai pas encore terminé) de Christine Lemmer-Weber (co-autrice d’Activity-Pub) qui parle de la décentralisation via le protocole AT, mais montre aussi des problèmes d’Activity-Pub que Bluesky résout. En particulier pour ce qui est de l’auto-hébergement, on dirait que ça demande quand même des ressources.

Pour ce qui est de l’aspect humain j’imagine que ça dépend beaucoup de où on se trouve. Effectivement, sur une grosse instance on va être plus facilement tributaire de décisions prises à notre place, j’ai l’impression que c’est moins le cas sur des petites instances.

klafyvel

Disons que ça va beaucoup dépendre de ton instance. Mais je t’accorde que c’est beaucoup plus facile d’être d’accord avec les règles de modération (ou même d’être au courant desdites règles) sur une petite instance.

Je pense par exemple à l’utilisation d’alt-text pour les images (c’est quelque chose qui est extrêmement demandé dans les comptes avec qui je peux interagir).

klafyvel

C’est intéressant parce que, par exemple, Bluesky a depuis longtemps (à son échelle) une fonctionnalité de type « empêche-moi de poster une image sans texte alternatif » (c’est une option du compte). Et depuis longtemps les utilisateurs demandent, généralement poliment à ce que ces textes soient mis.

Les textes alternatifs sont aussi très demandés sur Mastodon, mais c’est beaucoup moins poli. C’est même très – trop – souvent agressif ou passif-agressif, et donne une mauvaise image « des gens qui demandent exigent cette fonctionnalité ».

Je me demandais si c’était une différence d’outil, mais même pas vraiment : dans les deux cas la fonctionnalité est simple d’accès (c’est pas Instagram par exemple), et dans le cas de Bluesky la fonctionnalité de rappel dit juste « Nécessiter un texte alt avant de publier », ce qui n’est pas informatif si tu ne sais pas déjà à quoi ça sert.

Concernant Bluesky, il y a un thread assez intéressant (que je n’ai pas encore terminé) de Christine Lemmer-Weber (co-autrice d’Activity-Pub) qui parle de la décentralisation via le protocole AT, mais montre aussi des problèmes d’Activity-Pub que Bluesky résout.

klafyvel

Ça c’est le drame de Bluesky comme de Mastodon : les gens continuent à faire des threads, et c’est de la merde. C’est illisible et c’est une usine à perdre de l’information.

Si l’un comme l’autre réseau avait une fonctionnalité de blog (de vrai, où on peut publier une page longue, mise en forme et accessible via une URL HTTPS publique), ça serait génial. Parce que mine de rien, ces réseaux de « microblogging » sont beaucoup utilisés pour du blogging tout court, mais en beaucoup moins bien.

En particulier pour ce qui est de l’auto-hébergement, on dirait que ça demande quand même des ressources.

klafyvel

Là il faut rentrer dans le détail de la conception de Bluesky pour comprendre, mais le type de serveur dont il est question ici (« relay ») est de très loin le plus consommateur, et c’est pas celui qui a vocation à être le plus décentralisé. Cela dit, le problème soulevé – « auto-héberger la pile complète Bluesyk est infiniment plus complexe qu’auto-héberger la pile complète Mastodon » est un vrai point d’attention.

Merci @Spacefox de confirmer les points que je craignais à propos de Mastodon et qui m’ont démotivé à l’utiliser : même si la promesse est bonne, la réalisation est trop nébuleuse et complexe pour le commun des mortels pour que ce soit viable.

Et comme @pierre_24 le dit, le format micro-blogging est souvent inadapté à un discours et des échanges respectueux et constructifs.

C’est d’ailleurs une des raisons qui m’ont fait quitter (ou du moins réduire) mon usage de pas mal de plateformes comme Twitter, Instagram et même Discord : à vouloir de l’immédiat et du contenu court on prend plus le temps de nuancer ni de chercher de la nuance. Tout devient noir ou blanc, et on prend plus le temps en publiant de détailler nos pensées. Et c’est encore pire en consommant ce contenu : on se retrouve inondés de pensées parasites et non nuancées qui aident pas vraiment à comprendre mais nous poussent plutôt à choisir un camp.

Plus le temps passe plus je me dis qu’au final le web d’avant était pas si mal : un blog classique où on prend le temps d’écrire et détailler nos pensées, et un réseau de syndication simple (coucou les RSS !) pour suivre les copains… qui peuvent à leur tour partager les contenus qu’ils trouvent intéressants.

On se débarrasserait peut-être aussi de la FOMO liées à ces plateformes où le contenu défile à toute vitesse et qui nous rendent accrocs. A-t-on vraiment besoin d’être au courant de tout ce qu’il se passes partout dans le monde et dans la vie des autres ? Ou est-ce qu’on devrait pas plutôt se concentrer sur nos propres vies et challenges et profiter de ce qu’on a devant nous dans la vraie vie ?

Vous avez 4 heures, interligne simple et oubliez pas de laisser une marge pour la correction :D

Il y a 4 ans, je disais "Twitter, c’est le cancer", maintenant je dis "X est une fosse sceptique". Punchlines nuancées mises à part, merci pour ce billet intéressant. Les départs apparemment massifs de X peuvent être une occasion, voire une chance, pour certaines personnes de réaliser l’impact négatif que ces réseaux peuvent avoir sur la santé mentale, le comportement, etc. D’un côté, je suis curieux de jeter un œil à Bluesky, de l’autre, je me demande quel est l’intérêt. Combler un vide, occuper du temps que je n’ai pas envie de consacrer à faire quelque chose d’intéressant, oublier les démarches ou le travail en retard qu’on n’a pas envie de faire ? Si c’est pour s’injecter du poison, je préfère prendre le risque de m’ennuyer.

Aussi, en lisant le billet, ça m’a rappelé un service similaire que j’avais essayé il y a une dizaine d’années, nommé identi.ca. Ça vous dit quelque chose ?

Edit :

On se débarrasserait peut-être aussi de la FOMO liées à ces plateformes où le contenu défile à toute vitesse et qui nous rendent accrocs. A-t-on vraiment besoin d’être au courant de tout ce qu’il se passes partout dans le monde et dans la vie des autres ? Ou est-ce qu’on devrait pas plutôt se concentrer sur nos propres vies et challenges et profiter de ce qu’on a devant nous dans la vraie vie ?

Pour répondre très sérieusement, j’ai plus l’impression que c’est de la peur de l’ennui que de la peur du manque. Ou peut-être une peur de montrer qu’on ne fait rien, d’admettre qu’on n’a rien à faire ou qu’on n’a pas envie de faire des choses qu’on repousse. C’est peut-être une manière de procrastiner en enterrant la culpabilité, puisque le contenu qui défile occupe l’espace dans le cerveau. Ce n’est pas propre aux réseaux sociaux, le phénomène existe aussi avec les jeux vidéo, les séries, etc. Pour les personnes concernées, le vrai problème n’est pas leur utilisation mais la raison de leur utilisation. Il me semble que rares sont les personnes qui acceptent ne serait-ce que d’envisager d’y penser sérieusement. Enfin là, on touche aux peurs intimes, c’est un autre sujet.

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