Billet signet : la science clôt-elle le débat ?

Appel de sientifiques dans L'Opinion, Le Solei, Heidi.news et LaLibre

Un billet très court aujourd’hui pour vous présenter un appel qui nous vient de "250 scientifiques" (je ne sais pas comment ils ont été choisis, ça va d’étudiants en medecine, doctorants, ingénieurs, coordinateurs d’exposition techniques, etc.)

L’appel est disponible ici, ou sur les autres journaux mentionnés en sous-titre. Il vise à dénoncer le fait que certains médias choisissent leurs résultats pour appuyer une opinion qui a été décidée avant de lire la litérature scientifique, ou encore que d’autres présentent le fait scientifique au niveau d’une opinion avec laquelle on peut être ou ne pas être d’accord.

Ils insistent aussi sur quelques faits qui sont régulièrement ignorés ou niés :

La santé

  • La balance bénéfice/risque des principaux vaccins est sans appel en faveur de la vaccination (2,3).
  • Il n’existe aucune preuve de l’efficacité propre des produits homéopathiques (4)

L’agriculture

  • Aux expositions professionnelles et alimentaires courantes, les différentes instances chargées d’évaluer le risque lié à l’usage de glyphosate considèrent comme improbable qu’il présente un risque cancérigène pour l’homme (5,6,7). – Le fait qu’un organisme soit génétiquement modifié (OGM) ne présente pas en soi de risque pour la santé (8).

Le changement climatique

  • Le changement climatique est réel et d’origine principalement humaine (9).
  • L’énergie nucléaire est une technologie à faible émission de CO2 et peut contribuer à la lutte contre le changement climatique (10).

Les nombres entre parenthèses sont les sources, disponibles sur le lien de l’appel.

Si les requêtes de considérer le fait scientifique au dessus de l’opinion personnelle ne devrait pas trop générer de débat par ici, il y en a d’autres questions qui me semblent plus intéressantes :

  • Quand peut-on dire qu’on a un concensus sur un fait ? Les 6 faits présentés plus hauts sont-ils des faits ?
  • Comment éduquer la population (scientifiques, journalistes, zesteux, le reste de la société) à placer correctement le résultat scientifique dans le débat ? Par exemple, si on en croit cet appel, le glyphosate ne cause probablement pas de cancers chez l’homme. Outre que l’on aurait aimé une quantification de ce "probablement" (qui se trouve peut-être dans la référence), avant de pouvoir se prononcer pour ou contre, il faudrait savoir au minimum quels sont les risques non-cancèrigènes, quels sont les risques sur l’écosystème, et quels sont les bénéfices de ce produit comparé à d’autres produits ou à aucun produit.

Pour avoir une mini-conclusion de ce billet-signet qui s’est éternisé, il y a très certainement un effort à faire de la part des médias pour comprendre et retranscrire les résultats scientifiques, et surtout comprendre quand quelque chose n’a aucune base scientifique, mais l’objectif de cet appel reste un peu flou pour moi, tant il manque plus que cette compréhension pour avoir un débat de qualité à travers nos médias.

Notons enfin que le sujet a déjà été l’objets de billets sur ZdS, sur les sujets de l’énergie, de l’autisme et des médecines alternatives et de l’endométriose et des médecines alternatives.



13 commentaires

Autant le but de cet appel est noble (la science et la technologie sont traités de manière catastrophiques dans les médias), autant la forme me pose problème. Parce que l’appel mélange un peu tout en fait, surtout quand il s’attaque à des faits.

Les deux points sur la santé sont béton tout comme l’origine du réchauffement climatique.

Mais le point sur le glyphosate est très réducteur, en ce sens qu’il y a sans doute un consensus sur le fait que le glyphosate à des doses normales n’est pas cancérogène pour l’humain, mais ce point n’est qu’une toute petite partie des problèmes posés par ce produit.

Idem pour les OGM : le fait qu’un OGM soit modifié génétiquement n’implique pas forcément que ça pose problème pour la santé humaine… mais ça ne veut pas dire qu’aucun OGM ne pose aucun problème, surtout quand on regarde ailleurs que la santé humaine.

L’appel à l’énergie nucléaire, c’est vrai (et d’ailleurs c’est dans le rapport du GIEC), mais là on parle d’une technologie, pas de science.

De plus, l’appel reprends des modes de fonctionnement qu’il dénonce, c’est un peu dommage.

Mais le point sur le glyphosate est très réducteur, en ce sens qu’il y a sans doute un consensus sur le fait que le glyphosate à des doses normales n’est pas cancérogène pour l’humain, mais ce point n’est qu’une toute petite partie des problèmes posés par ce produit.

En fait c’est LE problème : la science a permis de décrire que :

  • la cancérogénéité du glypho suit un effet dose
  • les doses légales sont calculées pour ne poser aucun risque de cancérogénéité quant à l’exposition.

Habituellement quand le glyphosate arrive dans les débat c’est pour poser les problèmes de l’agriculture intensive. Ce débat est intéressant, le problème c’est qu’il s’est polarisé autour d’un mauvais argument : les lobby du bio ont annoncé que le glypho était cancérigène, puis le CIRC l’a classé "probablement cancérigène (preuve limitées chez l’humain)".

En lui-même le glyphosate ne pose pas beaucoup de soucis, il arrive même à en résoudre certains (réduction des labours). Mais on a focalisé les débats plus larges sur lui et surtout sur un petit ensemble d’assertion déjà démontrées fausses.

Finalement même là, la tribune est bien faite : elle montre bien que la science répond à des questions précises et si tu veux un débat politique, quand tu convoque la science il est important de ne l’utiliser que pour les points précis.

mais là on parle d’une technologie, pas de science.

ça c’est aussi un réel problème : la confusion entre technologie et science dans les média, et aussi dans la tribune.

Je trouve la tribune assez scientiste, même si je ne doute pas que ça parte d’une bonne intention.

Sur le fond, je doute de l’utilité de ce genre de tribune, qui masque le problème. Qui est à mon sens que :

  • Les journalistes en France ne sont pas formés à "la science". Ils ont en écrasante majorité des formations journalistiques. Ils sont formés sur la forme, et très rarement à avoir des connaissances de base (ie au moins licence) dans leur domaine de compétence. C’est donc compliqué de parler sérieusement d’un sujet. Dans mon domaine, environ 95% des journalistes économiques n’ont aucun diplôme en économie. La plupart des invités présentés sur les plateaux comme économistes le sont rarement. Pas étonnant que les débats économiques dans les journaux soient bien souvent au ras des pâquerettes. Et c’est plus ou moins pareil dans tous les autres domaines.
  • Ils ont une double pression : (1) parler de sujets compliqués dans des format courts et (2) attirer l’attention du lecteur moyen pour faire de l’audience, des vues, etc.

Dans ces conditions, il me semble illusoire d’obtenir du "bon" journalisme sur le moindre sujet un poil compliqué. Tu dois faire le buzz tous les jours en parlant de sujets que tu ne maîtrise pas vraiment, et sans avoir été formé méthodologiquement aux bases de la méthode/recherche scientifique.

Les choses changeront quand les journalistes dans leur ensemble auront envie de se renouveler et de bosser le fond. En attendant, ils continuerons à relayer des Idriss Aberkane, à faire des débats équilibré anti/pro réchauffement climatique, à hyper la blockchaine (coucou les echos), etc. Et signer toutes les tribunes du monde n’y fera pas grand chose…

+0 -0

ça c’est aussi un réel problème : la confusion entre technologie et science dans les média, et aussi dans la tribune.

Est-ce un si gros problème ?

Je veux dire, bien entendu les centrales nucléaires sont une technologie. Mais la pertinence de la technologie par rapport à différents enjeux repose aussi sur des analyses scientifiques. Grâce à la science, et autres études scientifiques on peut faire le bilan carbone complet de la technologie pour s’assurer qu’elle est pertinente au regard des autres solutions, mais aussi évaluer si son utilisation a engendré des problèmes sanitaires et à quel hauteur.

Sachant que le nucléaire est une technologie qui est liée à la solution du réchauffement climatique, parler de science et de cette technologie en tandem ne me paraît pas absurde.

Finalement même là, la tribune est bien faite : elle montre bien que la science répond à des questions précises et si tu veux un débat politique, quand tu convoque la science il est important de ne l’utiliser que pour les points précis.

Oui, mais le problème c’est que les médias, le public tout comme les lobby ne s’en servent pas comme ça et changer ce paradigme de communication est je pense assez illusoire.

Je veux dire, on voit régulièrement des études de labo ou très expérimentaux et où les grands titres généralisent déjà la portée du résultat à l’Homme ou à une échelle industrielle alors que ce n’est pas réaliste.

On voit régulièrement des associations lobbyistes comme Greenpeace citer le GIEC pour alerter sur le climat mais ne pas évoquer du tout les avantages du nucléaires dans les scénarios climato-acceptables qu’ils présentent. Pourtant quand tu cites une étude comme référence sur ta position, tu dois accepter la validité des informations de tout l’article et pas seulement ce qui est compatible avec ton idéologie.

C’est assez profond comme phénomène, ça concerne tout le monde en permanence et changer de mentalité ne se fait pas rapidement.

Ce qui est dommage par ailleurs c’est que l’État a plusieurs organismes indépendants (ou pas) qui font ce genre d’évaluation d’état de l’art de la science et de la technique et font des recommandations politiques pour tirer parti de ces renseignements. Mais ils sont trop rarement écoutés. Se pose la question de leur pertinence dans ce contexte et de la possibilité réelle de bâtir une politique qui se base sur des faits plus tangibles que d’habitude.

+5 -0

mais là on parle d’une technologie, pas de science.

De plus, l’appel reprends des modes de fonctionnement qu’il dénonce, c’est un peu dommage. Source: SpaceFox

ça c’est aussi un réel problème : la confusion entre technologie et science dans les média, et aussi dans la tribune.

artragis

C’est un gros point d’achoppement, en effet.

En pratique l’immense majorité qui défend la science, défend aussi la technique. Or ça n’a rien d’évident. Mais ça mène nécessairement à la question : la science peut elle exister sans la technique ?

Qui pour croire qu’on pouvait découvrir la relativité restreinte sans en avoir son application la plus célèbre, la bombe nucleaire (et les autres) ? Qui pour croire que la science peut progresser sans s’appuyer sur la technique qu’elle a permise ?

Dans ce contexte ce genre de phrase :

« La science n’a pas de patrie », nous dit Louis Pasteur. Nous ajoutons qu’elle ne saurait avoir de parti-pris idéologique.

en supprimant les liens existants et inévitables, escamote la vision d’ensemble. C’est le raisonnement : "toutes choses égales par ailleurs" qui n’a que peu de réalité.

Le contexte présent sur l’énergie, les pollutions diverses et variés, le climat, la population etc. met en evidence la responsabilité en "poupée russe" de la science et la technique. Une questions pour imager le propos :

Le boom des engrais/pesticides (puis peut être des OGM) sera-t-il vu dans 20, 50, 100 année comme bénéfique ou ayant mené au pire désastre imaginable ?

+2 -0

Tu dois faire le buzz tous les jours en parlant de sujets que tu ne maîtrise pas vraiment, et sans avoir été formé méthodologiquement aux bases de la méthode/recherche scientifique.

Demandred

Pour moi, une immense partie du problème est dans ce que j’ai mis en gras dans ta phrase. Aujourd’hui – en fait depuis longtemps mais c’est devenu de pire en pire – on attend pas d’un journaliste qu’il fasse du journalisme (donc qu’il transmette des informations à un public), mais qu’il fasse vendre un maximum. La culture du tout gratuit et de l’ingurgitation de masse d’information superficielle (combien de gens se contentent de lire uniquement les titres des articles) ne peut conduire qu’à une « information » de caniveau, qui est au mieux une reprise quasi mot pour mot de la dépêche AFP, au pire une broderie putassière sur une bribe d’information.

Parce que l’information de qualité, ça nécessite du temps et de comprendre ce dont on parle, donc d’avoir des journalistes spécialisés dans divers domaines. Donc c’est cher à produire, et ça génère des articles qui ne se résument souvent pas à un simple titre.

Et évidemment ça continuera tant que le grand public restera persuadé que l’on peut sérieusement se renseigner en parcourant les titres de journaux gratuits. Le fait que l’on puisse se prétendre « journaliste » et toucher des millions de subventions publiques pour au mieux copier le travail de l’APF, au pire se torcher avec la déontologie, n’aide pas vraiment – sans parler du problème des « éditorialistes ».

En résumé, c’est un problème systémique plus que dépendant des journalistes eux-mêmes (bien que comme partout, on en trouve des mauvais). Mais le sujet est trop politique et brasse trop d’argent pour que quiconque au pouvoir n’ose mettre le bon coup de pied pourtant mérité dans la fourmilière.

Pour en revenir au sujet, il y a quelques mois le Figaro avait une journaliste spécialisée sur les sujets scientifiques, donc dans toute l’offre « grand public » c’était là qu’on trouvait les articles les plus sérieux. Je n’ai pas vérifier si c’est toujours le cas.

J’ai été très déçu par cette tribune et la réaction hors communauté SHS. Parce que certainement j’ai passé quatre gros moins à travailler sur les sciences and technology studies, c’est à dire en étudiant la relation science/société. Et pour faire court : lisez les SHS, c’est consternant le niveau de débat (la science à toujours raison, on doit combler un déficit de connaissances pour que le public soit après automagiquement d’accord avec ce que dit la science, etc).

Mais citer une remarque sur twitter : les scientifiques, quand ils affirment, ils ont tendance à toujours mettre un « oui, mais… c’est plus compliqué que ça, parce que… » à leurs affirmations. Chose que ne fait pas la tribune, bien au contraire. Elle fait ce pourquoi elle critique.

Et surtout, que la production et l’énonciation de la science est toujours situé. C’est pas anodin de sortir dans un canard néolibéral cette tribune.

+1 -1

Je trouve presque mensonge leur conclusion sur le Glyphosate.

Aux expositions professionnelles et alimentaires courantes, les différentes instances chargées d’évaluer le risque lié à l’usage de glyphosate considèrent comme improbable qu’il présente un risque cancérigène pour l’homme (5,6,7)

Les trois études traitent uniquement de la substance active. Les deux derniers s’accordent à dire que lié à d’autres produits, le glyphosate peut-être toxique. Le dernier a carrément abouti au retrait du marché français de 132 produits. Et la conclusion, c’est limite l’usage de produit utilisant du glyphosate est saine. La phrase est habilement tournée pour mélanger les deux cas.

+1 -0

« La science n’a pas de patrie », nous dit Louis Pasteur. Nous ajoutons qu’elle ne saurait avoir de parti-pris idéologique.

Perso j’ai trouvé la tribune pas mal jusqu’à ce que je lise ça. Et puis je l’ai relue, et elle fait l’inverse de ce que dit sa conclusion.

La conclusion est éminemment politique, le contenu complet aussi. C’est très bien je pense de remettre la méthode scientifique dans son contexte social et politique, salutaire même. Mais c’est une tartufferie de le faire en prétendant que cela est apolitique et exempt de toute considération idéologique.

La science ne donne jamais aucune réponse politique. Jamais.

+2 -1

Quand peut-on dire qu’on a un concensus sur un fait ? Les 6 faits présentés plus hauts sont-ils des faits ?

J’arrive après la bataille, mais je voulais commenter sur ce point en particulier. La question est violemment mal posée, la notion de consensus n’a aucune valeur scientifique et la notion de fait n’est pas celle à laquelle la science s’intéresse. La méthode scientifique nous permet d’accéder à l’explication la plus pauvre en hypothèses pour expliquer un ensemble d’observations données. C’est tout, le fait que la communauté scientifique se tire dans les pattes ou que tout le monde soit d’accord sur un point n’est pas un gage d’exactitude, et traiter une idée scientifique comme un fait est absurde par construction. Le vrai problème de communication entre la communauté scientifique et le grand public est humain et est un problème d’humilité intellectuelle. Il ne sert à rien d’essayer de montrer pourquoi le grand public devrait croire en une théorie scientifique parce qu’elle fait consensus (parce que le raisonnement même n’est pas compatible avec le raisonnement scientifique), en revanche il serait utile de montrer pourquoi c’est l’attitude la plus raisonnable : le grand public a encore moins de réflexes mentaux et d’expertise pour juger de la qualité d’une étude scientifique, par contre si la communauté scientifique s’accorde sur un point, c’est peut être bien que le considérer serait une bonne idée. C’est un argument d’autorité pur et simple, mais si on est honnête trente secondes c’est le seul disponible en ce qui concerne les théories scientifiques qu’on n’a pas encore pu vérifier par observation directe a posteriori.

Prenons le réchauffement climatique, l’énorme majorité des études sur le sujet (et les scientifiques qui vont avec) montrent qu’il existe et est causé par l’activité humaine. On pose très souvent la question de savoir si c’est un fait ou non. Ce que je dis là, c’est que la position raisonnable, c’est de ne pas poser cette question. On ne sera jamais sûr à 100%. Il vaut mieux se demander si, sachant que c’est une hypothèse séduisant de nombreux expert sur le sujet, il vaut mieux fermer les yeux parce qu’on n’est pas sûr, ou si il vaut mieux écouter cette communauté par argument d’autorité et agir maintenant pour éviter de pouvoir vérifier pour de vrai si les scénarios les plus pessimistes vont se réaliser.

J’ai enfin pris le temps de lire la tribune. Malgré les critiques légitimes qui peuvent lui être faites, j’y souscris. À titre personnel, lorsque je lis un article de presse sur la science, j’y cherche les erreurs et non les informations, et je m’étonne quand l’article est globalement juste. Ça dépasse la méfiance, et le ton de la tribune, en particulier dans sa première moitié, me semble juste, voire trop gentil.

On parle de défiance envers les médias. Pour ma part, elle vient en grande partie des âneries qu’ils écrivent dans les sujets que je connais (pas des approximations, mais des contresens complets). Si la généralisation vous parait abusive, je serais (sans ironie !) ravi que l’on me donne un journal grand public scientifiquement juste. Qui sait, il est peut-être juste sur le reste ?

Est-ce que la tribune est critiquable, je le redis, oui. Et puis j’ai vu passer des informations sur la contamination des eaux par le tritium. Est-ce que la tribune est nécessaire, je pense que oui. Complètement. Donc, malgré ses défauts, j’y souscris.

+2 -0

C’est un argument d’autorité pur et simple, mais si on est honnête trente secondes c’est le seul disponible en ce qui concerne les théories scientifiques qu’on n’a pas encore pu vérifier par observation directe a posteriori.

Je tenais à rebondir dessus car quelque chose me gêne, non pas dans ce que tu dis mais dans l’approche des débats scientifiques en général.

Très régulièrement la question de l’argument d’autorité revient sur la table, et à cause de mauvais exemple il est souvent décrié, considéré comme une tromperie alors qu’elle est tout à fait justifié suivant les circonstances.

Tout d’abord il y a deux types d’argument d’autorité, le bon et le mauvais. Le mauvais, qui doit être rejeté à ce titre, est d’utiliser une personnalité reconnue d’un domaine pour soutenir une thèse dans un domaine qui n’a pas grand chose à voir. Par exemple, utiliser les propos d’un physicien connu (au hasard Einstein) sur un sujet de biologique. Car en dehors de son domaine de compétence, on devrait assimiler ses thèses au même titre que celui de n’importe qui.

Mais il y a le bon, il me paraît pas absurde qu’on considère les propos d’Einstein sur la relativité générale comme juste et ne devant pas être spécialement remis en question par le profane que représente la population en générale. Ses compétences dans le domaine n’étant plus à démontrer, le citoyen lambda n’a pas le recul et le savoir nécessaire pour envisager une telle remise en question.

Pourtant dans le débat scientifique courant, l’argument d’autorité sera systématiquement remis en question, même si un certain consensus dans les experts du milieu semble se dégager. Pourtant à part les experts du dit domaine, qui ont légitimité et la connaissance à priori pour faire cela, je doute qu’on puisse trouver cette position comme raisonnable pour tout le monde.

Cela par ailleurs découler sur la manière dont on acquiert nos connaissances. Notre éducation scolaire repose pourtant sur cet argument de l’autorité. Un enfant n’a pas réellement à remettre en question le savoir de ses parents ou de ses professeurs jusqu’à l’université. Or dans ce contexte, il n’y a pas une levée de bouclier globale pour rejeter ce recours systématique à l’argument d’autorité.

Et si on ne recourt pas à l’argument d’autorité pour quoique ce soit, cela signifie qu’on doit acquérir nos connaissances autrement. Par l’expérience et le raisonnement. Ce que l’on fait dans le supérieur en mathématiques en redémontrant les théorèmes à chaque fois, mais c’est coûteux en temps et énergie. Sans compter que les sciences expérimentales ont besoin de plus de matériel qu’une simple craie pour parvenir à la même chose. On n’a pas tous la possibilité de le faire pour un domaine particulier, alors l’envisager pour être expert en physique, maths et biologie à la fois (en plus des domaines non scientifiques comme l’histoire, la politique, etc.) n’est vraiment pas possible pour quiconque.

Donc on doit avoir recours tôt ou tard à l’argument d’autorité, pour gagner du temps dans l’acquisition du savoir dans les domaines où nous n’avons pas l’expertise suffisante du moins.

Le principal problème c’est que le journaliste devrait être une source raisonnable d’autorité pour diffuser du savoir. Pas forcément le savoir pointu, mais au moins le savoir élémentaire lié à une actualité donnée. Mais ils ont abusé de cette position sans remise en question de leurs méthodes rédactionnelles ce qui rend leur écrit aujourd’hui assez peu fiables sur pas mal de points. Et c’est vraiment problématique, l’adulte moyen acquiert la majorité de ses connaissances nouvelles via la presse et l’actualité, faute de formations scolaires ou d’autoformation poussée.

+3 -0
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