Militer sert-il vraiment à quelque chose aujourd'hui ?

Où il est question de débat public et d'enjeux de société...

a marqué ce sujet comme résolu.

Le sujet du véganisme est un sujet d’empathie pure et simple en même temps. C’est une question de morale, et il n’y a pas vraiment de rationnel dedans : il s’agit "juste" de la valeur que l’on donne à la vie animale, et c’est une polémique qui n’est pas logique mais purement émotionnelle.

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Le sujet du véganisme est un sujet d’empathie pure et simple en même temps. C’est une question de morale, et il n’y a pas vraiment de rationnel dedans : il s’agit "juste" de la valeur que l’on donne à la vie animale, et c’est une polémique qui n’est pas logique mais purement émotionnelle.

Phigger

Pas que. Il y a également des arguments écologiques, sachant qu’une grande part des émissions de gaz à effet de serre ont pour origine directe ou indirecte l’élevage bovin. [réf. nécessaire].

Pour peu qu’il soit vérifiable et quantifiable, ceci est un argument rationnel parfaitement recevable en faveur du végétarisme ou du véganisme. Auquel on peut en opposer d’autres. Par exemple : quelles seraient les conséquences économiques/écologiques/sociales d’un arrêt de cette production ?

Pas d’émotion parasite là-dedans, ni besoin de demander aux gens d’empêcher leurs chats de chasser des rongeurs…

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Le sujet du véganisme est un sujet d’empathie pure et simple en même temps. C’est une question de morale, et il n’y a pas vraiment de rationnel dedans : il s’agit "juste" de la valeur que l’on donne à la vie animale, et c’est une polémique qui n’est pas logique mais purement émotionnelle.

Tu peux avoir du rationnel dedans.

La question de manger ou non des animaux a des implications non émotionnelles. Il y a la question de la santé, de l’environnement, etc. Si le véganisme est bénéfique sans inconvénients autre que changer les habitudes, tu pourrais largement recourir à la logique seulement pour convaincre.

Le problème c’est qu’il semble bien que sur cette question, consommer un peu de viande a des bénéfices environnementales et de santé aussi. Pas besoin d’un kilo de steak par jour par personne mais une certaine quantité. Donc s’interdire de manger toute viande a d’autres impacts négatifs qu’il ne faut pas soustraire du débat pour des questions idéologiques ou émotionnelle.

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Oui pardon, c’était par rapport aux point qui étaient soulevés jusqu’à présent et notamment les exemples d’action. Le débat du véganisme est tout de même orienté sur le bien-être animal plus que l’écologie d’ailleurs. J’aurais dû dire la question du bien-être animal en fait ^^

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Après pour clarifier un truc sur le véganisme : je n’ai absolument aucun problème quand quelqu’un me dit « Utiliser les animaux de quelque manière que ce soit n’est pas éthique de mon point de vue parce que je pense qu’il n’y a aucune forme d’exploitation animale dans lequel l’animal puisse être heureux donc je ne le fais pas ». Par contre, j’ai un problème quand la personne me dit « Toi aussi tu dois cesser de consommer des produits d’origine animale sur la base de mon éthique ». Parce que ce glissement suppose que les notions de bonheur animal soient universelles et partagées par tous, ce qui est loin d’être aussi évident (exemple : consommer les œufs de poules que tu élèves avec amour dans ton jardin).

Il me semble qu’ici tu es à côté des enjeux.

@kakiharaa

Euh… non. Quand on me répond pendant un débat que l’on n’a pas « à faire mon éducation », c’est clairement refuser de détailler ou de s’expliquer, et donc refuser de convaincre. J’appelle ça tuer le débat. Si on n’a pas le temps d’expliquer son point de vue aux gens, je ne vois pas à quoi ça sert d’entrer dans un débat, en fait, ou alors c’est considérer qu’un débat, c’est juste des gens qui disent ce qu’ils veulent chacun leur tour sans construire quoi que ce soit ni réfléchir ensemble, ni chercher à se comprendre. Soit une immense perte de temps et d’énergie. :)

nohar

Je vois ce que tu veux dire, mais c’est pour ça que j’essayais de préciser en donnant des éléments concernant le contexte. Il me semble que cette attitude n’a pas du tout la même signification selon plein de paramètres. Qui demande, à quel moment, qu’est-ce qu’on est en train de faire, etc.

Et, parce que j’anticipe un peu (peut-être à tort) une réponse concernant l’importance de débattre et d’expliquer, surtout lorsqu’on défend des idées dites progressistes, je dirais juste : est-ce qu’une telle requête est généralisable ? Une fois qu’on a croisé 15 personnes exigeant qu’on réexplique tout depuis le début, pour elles toutes seules, sous peine d’être taxé d’extrémiste, peut-être que la fois d’après on n’explique pas, mais on demande d’aller se renseigner un peu de son côté.

C’est pas comme si les supports manquaient, et justement il me semble que cette exigence (renseigne-toi un peu d’abord par toi-même) est un peu à l’origine de ce topic :)

Je pense pour ma part que le militantisme et l’« extrémisme » ont un rôle important à jouer parce qu’ils définissent précisément les extrémités du débat public, ce qui est « convenable » et ce qui ne l’est pas, ce qui est « extrême » et ce qui ne l’est pas. Or, sans ces mouvements, les extrémités sont vouées à rester statiques. C’est à mon sens ces mouvements qui rendent certaines idées progressivement « acceptables » et « discutables ».

Taurre

Je trouve cette idée importante, et il me semble qu’on la rencontre peu. Elle permet de questionner l’idée de "juste milieu", la notion de modération, etc. et de montrer que tout cela est situé et susceptible de variations dans le temps et l’espace.

Par contre, encore une fois, je rechigne carrément à rapprocher de façon si simple et directe militantisme et extrémisme. Que les rapports puissent être pensés, certainement ; mais un raccourci comme celui-là ? Je ne crois pas que ce soit pertinent.

Hello, le sujet me touche donc je vais tenter de participer au débat. Mais d’abord, pour me situer : je suis une femme cisgenre, et je me considère comme féministe militante "soft". Le "soft" se rapporte à mon militantisme et certainement pas au féminisme (ça n’aurait pas de sens). En effet, je ne fais pas partie d’assos féministes, je ne manifeste pas, je ne fais rien de "public". Mon militantisme se limite à ma sphère privée et professionnelle dans une certaine mesure.

J’ai lu tous vos postes mais je n’ai pas noté au fur et à mesure ce à quoi je voulais répondre donc je réponds en vrac. J’espère que ce sera pas trop décousu.

J’ai lu à plusieurs reprises que les militants défendaient des positions extrémistes, ou polarisaient le débat et refusaient tout compromis. Pour la plupart des luttes (car oui, il s’agit bien de luttes), je ne comprends VRAIMENT PAS cette position. Pourquoi les féministes devraient-elles accepter qu’on traite les femmes "avec un peu plus de respect que maintenant mais n’exagéront pas quand même" ? Pourquoi les militants antiracistes devraient accepter que les noirs soient toujours controlés 5x plus que les blancs mais en contrepartie les policiers violents seront maintenant jugés pour leurs actes, "parce que bon, trouvons un juste milieu hein" ? Ca a vraiment du sens pour vous, un "juste milieu" dans ce genre de lutte ? Moi je n’en vois pas… Soit chaque être humain est traité de la même manière, accède aux mêmes chances et aux mêmes droits (droits réels, pas droits légaux), soit la lutte continue. C’est aussi simple que ça.

Concernant le parallèle avec le terrorisme : sérieusement ? Le jour où les féministes s’ograniserons pour décapiter les hommes en direct sur Youtube, où les antiracistes placeront des bombes dans le but de tuer un maximum de blancs, où les militants végans tueront des bouchers et des employés d’abattoir d’un coup de décharge électrique dans la nuque, là on pourra peut-être parler de terrorisme. D’ici là, merci de ne pas faire ce genre de parallèles scandaleux. Et qu’on ne me parle pas des dégâts suites à diverses manifestations récentes : c’est soit le fait de petits groupes de casseurs qui n’ont rien de militants, soit des réactions à des répressions policières complètement disproportionnées.

Concernant le "refus de débattre" et les phrases de type "ce n’est pas à nous de t’éduquer", ce sont des choses que j’ai effectivement souvent vu passer dans le féminisme et :

  • ce n’était jamais lors d’un vrai débat (et ce n’est pas parce que quelqu’un exprime une opinion que c’est une invitation au débat)
  • ça fait des décennies que les femmes chantent sur tous les tons qu’elles veulent être respectées, maitresses de leur corps et de leurs décisions et avoir les mêmes chances qu’un homme. Sorry si à un moment on en a marre de vous expliquer chaque slogan mais oui, les ressources existent et elles sont nombreuses. Si vraiment en tant qu’homme, vous vous intéressez au féminisme, c’est pas bien compliquer de faire votre propre éducation en cherchant 2 minutes sur Google. Si vous n’êtes pas prêts à faire cette démarche, alors vous n’êtes pas un allié, vous en êtes même très loin, et il est fort probable qu’on ait pas d’énergie à dépenser pour vous. En tout cas, certainement pas sur commande.

J’avais sans doute encore plein de choses à dire mais c’est tout ce qui me reviens dans l’immédiat.

C’est pas comme si les supports manquaient, et justement il me semble que cette exigence (renseigne-toi un peu d’abord par toi-même) est un peu à l’origine de ce topic

Ah mais là-dessus on est bien d’accord. Et j’ai d’ailleurs pu avoir des discussions enrichissantes avec des militants (je pense notamment à mon voisin), qui m’ont répondu très intelligemment, à l’oral, "va lire Machin, ou écouter les conférences de Untel, en gros ils disent ça". Ça, pour moi, ça relève simplement du bon sens : ma pensée est influencée par telle ou telle source, la voici. Ce dont je parle avec le "j’ai pas à faire ton éducation" est autre chose : c’est réellement le fait de répondre "je n’ai pas à justifier ce que je dis", ce que, rasoir d’Occam oblige, j’interprète comme "je n’ai rien à te donner pour appuyer ce que je dis", soit, plus simplement, "je ne maîtrise même pas le sujet dont je te parle".

Pour moi, c’est inacceptable. Tout comme on ne devrait jamais se lancer dans une discussion pour soutenir quelqu’un en souffrance psychologique si l’on n’est pas soi-même dans un état psychologique et émotionnel assez stable pour être en mesure d’écouter sans juger ni moraliser, on ne devrait jamais se lancer dans un débat si l’on n’est pas en mesure de discuter de façon constructive.

Je ne sais pas comment ça se passe dans les milieux militants, mais pour moi ça devrait être la base de la base à laquelle on forme les gens, débattre one-o-one.

Pourquoi les féministes devraient-elles accepter qu’on traite les femmes "avec un peu plus de respect que maintenant mais n’exagéront pas quand même" ? Pourquoi les militants antiracistes devraient accepter que les noirs soient toujours controlés 5x plus que les blancs mais en contrepartie les policiers violents seront maintenant jugés pour leurs actes, "parce que bon, trouvons un juste milieu hein" ? Ca a vraiment du sens pour vous, un "juste milieu" dans ce genre de lutte ? Moi je n’en vois pas… Soit chaque être humain est traité de la même manière, accède aux mêmes chances et aux mêmes droits (droits réels, pas droits légaux), soit la lutte continue. C’est aussi simple que ça.

Je crois que personne n’a jamais tenu ce genre de propos. Par contre, pourquoi devrais-je me faire traiter de misogyne sous prétexte que je refuse d’utiliser l’écriture inclusive ? Pourquoi devrait-on accepter d’être empêché de circuler pour aller bosser sous prétexte que j’ai pas un gilet jaune sur mon tableau de bord ? Pourquoi je devrais être exclu de tel débat sous prétexte que je suis un homme hétéro ? Ça sert à quoi, exactement, d’exclure les gens d’un débat et de les réduire au silence sur tel ou tel sujet, sous prétexte qu’ils ne font pas partie du groupe ? À quel moment on espère obtenir une égalité et un respect mutuel, si on n’est pas capable de traiter soi-même les autres en égaux et avec respect ?

Quant au fait de nuire et choquer l’opinion pour être entendu, à quel moment on en vient à considérer cela comme normal et sain ? Et surtout, à quel moment on se dit "ah oui c’est bien, on va rallier un tas de monde à notre cause en les faisant chier" ?

Ensuite désolé, mais si la seule différence que l’on peut donner entre les opérations de "résistance" et le terrorisme, c’est que les premières ne font pas de victimes humaines, alors fondamentalement les deux ne diffèrent que par l’extrémité des moyens mis en oeuvre, et sont, par conséquent, parfaitement comparables car ils partent du même principe. Si je choque quelqu’un en disant cela, tant mieux, c’est un peu le but. Si réellement le rapprochement est à côté de la plaque, alors il doit bien exister un argument rationnel pour le réfuter… Et je ne demande qu’à être convaincu, et rassuré par la même occasion.

Si le but est de faire évoluer les mentalités, et je pense notamment au fait de tordre le cou à des comportements profondément ancrés dans la société à tel point qu’ils sont devenus inconscients chez les plus atteints (au hasard, le mansplaining…), est-ce que c’est vraiment en prenant les gens de haut qu’on va les faire changer ?

J’en arrive enfin à la question suivante : le but, c’est de changer les mentalités et faire avancer la société ou bien se faire mousser entre gens qui sont déjà convaincus ? Parce que dans le premier cas, y’a clairement quelque chose à revoir.

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C’est un sujet intéressant, sur lequel j’aurais beaucoup à dire. Mais je vais commencer brièvement en exposant juste quelques points qui me viennent à l’esprit après une lecture rapide. Je précise d’emblée que je me considère moi-même comme militant, et que j’ai eu quelques expériences dans des organisations militantes plus ou moins officielles. J’ai écrit ce post de façon un peu tentaculaire, désolé si c’est décousu… Je reviendrai là-dessus sûrement demain, quand j’aurai un peu plus de temps pour développer.

Concernant le sujet de la violence, je m’excuse de ressortir mes sabots de sociologue, mais je me permets ici de ressortir la célèbre définition de Max Weber de ce qu’est un État, qui fait plus ou moins consensus en sciences sociales et politiques.

L’État moderne est la communauté humaine qui, dans les limites d’un territoire déterminé, revendique avec succès pour son propre compte le monopole de la violence légitime.

Le savant et le politique, Max Weber, 1959

En clair : pour un territoire donné, l’État est l’institution qui se donne le droit d’utiliser le moyen de la violence contre d’autres individus sans que cela ne paraisse illégitime à la plupart des habitants de ce territoire. Il peut certes déléguer ce droit à d’autres individus, mais c’est toujours lui qui en décide. Ainsi, si un individu plaque quelqu’un au sol, cela sera globalement perçu comme violent et illégitime, sauf si cet individu est policier, car il détiendra alors un mandat de l’État pour exercer la violence. Le cadre de l’exercice de cette violence est parfois contesté, mais le droit à faire usage de cette violence l’est beaucoup moins tant il semble évident à beaucoup de gens.

Je me permets ici de citer un article du Monde qui explique bien les conséquences de ce constat (https://www.lemonde.fr/campus/article/2018/05/09/black-blocs-qu-est-ce-que-la-violence-legitime_5296478_4401467.html).

Ici, on peut (très) schématiquement distinguer deux écoles. La première pense que cette légitimité vient (paradoxalement) de l’arbitraire : la violence de l’Etat est légitime parce que c’est l’Etat. Si l’on n’est pas content, alors il faut prendre le pouvoir et devenir soi-même le détenteur du monopole de la violence. Ainsi, on pourra l’utiliser à des fins qui nous semblent meilleures. C’est la position de M. Mélenchon par exemple, mais aussi celle du PS.

La deuxième lecture est très différente. Elle consiste à voir dans la violence non pas seulement un moyen regrettable mais nécessaire, mais le moteur même de l’histoire. La violence de l’Etat ne serait pas plus légitime que celle de ses opposants : ce serait une lutte pour la défense d’intérêts divergents (l’Etat protégeant les intérêts des classes dominantes contre le peuple). Dans cette vision, inspirée par Marx et Engels, la légitimité serait un faux problème et seul compterait le rapport de force. Si l’Etat emploie des moyens violents, alors le peuple doit aussi pouvoir faire usage de la violence.

C’est un des sujets qui déchire le plus les débats, y-compris entre militants… La violence n’est donc jamais parfaitement symétrique, et tant qu’un État existera, il y aura toujours, par définition, un monopole de la violence.


Certes, mais il s’agissait alors de se battre pour faire reconnaître un état de fait qui n’était pas communément admis dans la société : les Noirs sont autant des humains que les Blancs, les femmes sont aussi capables que les hommes d’avoir des idées politiques pertinentes, tout être humain a droit au bonheur et est libre d’exprimer ses opinions… Est-ce réellement le cas en ce qui concerne les causes militantes de nos jours ? Je ne le crois pas.

Je pense qu’il y a là aussi un point de divergence. Il y a certes une majorité de gens qui pensent que les hommes et les femmes devraient être égaux. Néanmoins force est de reconnaître qu’ils et elles ne le sont toujours pas. L’enjeu n’est plus tant de reconnaître que ces luttes sont pertinentes que de les faire accéder à véritable victoire. Ce sont bien plus que des luttes pour la reconnaissance, ce sont des luttes pour une égalité, qui est toujours loin d’être acquise. Pour continuer sur l’exemple des luttes pour l’égalité entre hommes et femmes, les femmes ont certes désormais les mêmes droits civiques que les hommes, mais ça ne veut pas dire qu’elles bénéficient du même statut social que les hommes. Encore en 2020, elles sont bien plus à risque de subir une agression dans la rue ou de se voir refuser des soins, et elles assurent encore très majoritairement la plupart des tâches de care (aussi bien dans la famille que dans le travail). Plus généralement, il n’y a pas besoin de s’attarder très longtemps sur les statistiques sociales pour se rendre compte du gouffre qui existe entre la promesse d’égalité de la devise française et le monde social tel qu’il existe réellement. C’est, je pense, cet écart, qui est à l’origine de la « dureté » apparente du milieu militant face aux notions de « débats apaisés ».


Enfin, j’ajouterais que débattre est certes important — voire indispensable — mais non suffisant à mon sens. Un débat non suivi d’action est un coup dans l’eau. On peut alors considérer qu’une fois un sujet débattu et une position réfléchie est prise, il devient possible de militer pour celle-ci. Les deux ne me semble pas incompatibles mais au contraire complémentaires. Pour parler de ce que j’ai connu, quand il y a le mouvement social contre la loi ORE en 2018, il y a eu de nombreux débats dans mon université pour décider s’il fallait faire des blocus ou pas lors de grandes assemblées générales. Et il était parfois décidé de ne pas en faire, et parfois d’en faire, selon les circonstances du moment et les avancées de ces débats. Mais nombreux étaient ceux qui étaient dépités par l’attitude d’une partie de l’administration d’alors, qui utilisait l’argument « il faut faire des débats apaisés » justement pour mettre fin aux actions militantes qui avaient alors lieu, comme si l’un empêchait l’autre. Au fil du temps, il semblait pourtant clair qu’un débat seul ne mènerait nulle part : le CNESER s’était prononcé contre la loi ORE, un vaste mouvement social estudiantin et professoral était en marche (si j’ose dire), et la loi avait pourtant été votée par une poignée de députés.

De façon plus générale, il y a un déclin majeur des institutions, du fait de l’espace croissant entre leurs façades (ce qu’elles disent d’elles-mêmes) et leurs actions concrètes. Je pense qu’une des manifestations les plus visibles de ce déclin est par exemple la hausse de l’abstention aux votes. Ces institutions déclinant, les valeurs qu’elles portent déclinent également.

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Ca a vraiment du sens pour vous, un "juste milieu" dans ce genre de lutte ? Moi je n’en vois pas… Soit chaque être humain est traité de la même manière, accède aux mêmes chances et aux mêmes droits (droits réels, pas droits légaux), soit la lutte continue. C’est aussi simple que ça.

Attention, tu oublies que dans les revendications du genre, il n’y a pas que des buts de la lutte (souvent assez consensuels en un sens), il y a la question de comment y parvenir. Et ça c’est beaucoup moins consensuel et il y a beaucoup de possibilités. Sans oublier qu’il y a parfois des contradictions sur certains sujets en terme de revendication (par exemple sur la question de la prostitution ou de la pornographie).

Le compromis on peut donc le trouver là. Par exemple, la discrimination positive est souvent demandée. Mais est-ce efficace ? Quelles limites mettre en place à ces dispositifs ? Etc. Il y a des positions là dedans qui sont extrémistes pour certains et qui peuvent être négociés en un sens.

ça fait des décennies que les femmes chantent sur tous les tons qu’elles veulent être respectées, maitresses de leur corps et de leurs décisions et avoir les mêmes chances qu’un homme. Sorry si à un moment on en a marre de vous expliquer chaque slogan mais oui, les ressources existent et elles sont nombreuses. Si vraiment en tant qu’homme, vous vous intéressez au féminisme, c’est pas bien compliquer de faire votre propre éducation en cherchant 2 minutes sur Google. Si vous n’êtes pas prêts à faire cette démarche, alors vous n’êtes pas un allié, vous en êtes même très loin, et il est fort probable qu’on ait pas d’énergie à dépenser pour vous. En tout cas, certainement pas sur commande.

La question me semble plus compliquée que cela, dans le féminisme il y a plusieurs courants et méthodes pour rééquilibrer la balance. Il me semble bien que l’interlocuteur précise ce qu’il a en tête et pourquoi.

Je dirais qu’un militant, par essence, fait une activité de communication. Si la personne refuse de faire cette communication convenablement avec quelqu’un qui pose une question ou qui veut en débattre, pourquoi devenir militant ? Le militant est une porte d’entrée pour un sujet.

D’autant que le but des militants ici est d’appliquer des changements au niveau politique, il faut donc aboutir à ce que la population accepte ces idées. Pas forcément qu’ils deviennent féministes, mais au moins qu’ils ont une certaine sympathie pour ces idées. Donc faire un topo sur le sujet me paraît être une bonne chose si la personne est demandeuse et n’est pas évidemment un troll ou la caricature du machiste.

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Par contre, j’ai un problème quand la personne me dit « Toi aussi tu dois cesser de consommer des produits d’origine animale sur la base de mon éthique ». Parce que ce glissement suppose que les notions de bonheur animal soient universelles et partagées par tous, ce qui est loin d’être aussi évident (exemple : consommer les œufs de poules que tu élèves avec amour dans ton jardin).

SpaceFox

Et je pourrais te répondre qu’elles seront partagées par tous quand tout le monde aura été convaincu par l’aspect émotif de la chose. :D

J’en rigole mais c’est quand même plus ou moins comme ça que ça marche. Pour continuer sur le bien-être animal je vais aborder le sujet de la corrida. La position « je n’y assiste pas mais faites ce que vous voulez de votre côté » ne me semble pas suffisante : mon souhait est que la pratique devienne illégale, et donc interdite à tous, qu’elle ne soit plus dans nos mœurs.
Je ne sais pas si c’est aujourd’hui une position partagée par une majorité de citoyens, mais je pense que de plus en plus en sont convaincus, émus par la cause animale, et que ça finira par être interdit d’ici peu.

À propos de la cause animale, avec un ami on s’était fait cette réflexion un jour de folie (on avait débattu de vraiment beaucoup de choses ce jour-là : si un jour un scientifique crée une espèce animale qui ne ressent pas la douleur et dont on sait qu’elle n’a aucun rapport au bonheur (on va supposer que oui, on a réussi à montrer que c’est vraiment vrai) est-ce que c’est « éthique » de la manger (et on ne se pose pas la question de savoir si c’est éthique de créer cet animal) ? Et on va encore plus loin, qu’en est-il si on a déterminé que le but dans la vie de cet animal, c’était de se reproduire et d’être mangé ?

Et la discussion a ensuite dérivé sur la création d’humains dont c’est également le but dans la vie. Ces humains devraient-ils être mangés ? Une des idées derrière ce dernier point, c’est notamment de se demander à quel point la souffrance est importante dans ce débat. En effet, si une personne pense que c’est OK de manger les nouveaux animaux mais pas les nouveaux humains, cela ne signifie-t-il pas que, peut-être inconsciemment, cette personne considère un autre facteur que la souffrance ?

En fait, les expériences de pensée permettent d’éclairer beaucoup de choses dans les débats (quand les gens ne sont pas sourds, aveugles (mais par contre pas du tout muets)).

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Débat intéressant. Sur un sujet donné, il y aura le plus souvent beaucoup de gens d’un côté et beaucoup de l’autre. Pour arriver à un consensus, et a fortiori un consensus rationnel, il faut du temps quoiqu’il arrive. Le débat public permet de faire évoluer les idées progressivement, le militantisme permet d’agir concrètement et d’exposer le sujet au débat public. A mon avis, il y a besoin des deux. Le militantisme fait forcément un peu le forcing, sans ça impossible d’être audible, de faire contrepoids à l’inertie de la société ou à la répression. Il y a toujours une majorité silencieuse et des minorités agissantes. Mais évidemment un militantisme pur et dur ne suffit pas à mettre en branle toute la société, il faut des arguments. N’y a-t-il pas souvent des militants durs qui ne sont pas forcément dans la bonne logique mais apportent la visibilité, et des militants plus soft qui apportent les arguments et la discussion ? J’ai l’impression que c’est souvent comme ça que les choses changent. Parfois par contre les sujets sont imposés artificiellement. Par exemple le mariage pour tous.

Je pense qu’un bon éclairage sur la question peut venir d’une analyse des situations passées. La révolution, le front populaire, la naissance de l’URSS, la construction du code du travail, le droit de vote aux femmes, la résistance pendant la guerre mondiale, la crise d’Algérie, SOS Racisme, les Restos du coeur, l’IVG, la peine de mort, les émeutes de 2005, les 35 heures, l’évolution concernant la sécurité routière ou le tabac, le CPE, le mariage pour tous, les campagnes électorales… Dans chaque situation, comment est apparu le débat, était-on plutôt sur du débat apaisé ou du militantisme ? Quelles causes, et quelles conséquences à chaque fois ?

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Et je pourrais te répondre qu’elles seront partagées par tous quand tout le monde aura été convaincu par l’aspect émotif de la chose. :D

J’en rigole mais c’est quand même plus ou moins comme ça que ça marche. Pour continuer sur le bien-être animal je vais aborder le sujet de la corrida. La position « je n’y assiste pas mais faites ce que vous voulez de votre côté » ne me semble pas suffisante : mon souhait est que la pratique devienne illégale, et donc interdite à tous, qu’elle ne soit plus dans nos mœurs.
Je ne sais pas si c’est aujourd’hui une position partagée par une majorité de citoyens, mais je pense que de plus en plus en sont convaincus, émus par la cause animale, et que ça finira par être interdit d’ici peu.

entwanne

Merci @entwanne pour ce superbe exemple de ce que je voulais montrer.

Mon point c’est précisément qu’on peut être d’accord sur une notion de base (ici le bien-être animal) mais pas sur les conséquences que ça implique. Or, l’appel à l’émotion signifie généralement « accepter la notion et les conséquences telles que l’imaginent les personnes qui ont fait cet appel ». Et c’est précisément là qu’est le problème pour moi : ce genre de raisonnement implique généralement que les personnes qui y soient soumises acceptent l’intégralité du message comme un tout, sans discussion possible.

Si je reprends l’exemple du bien-être animal : c’est assez évident que la corrida est en gros de la torture et est injustifiable si on pense un peu au bien-être animal. Mais est-ce que c’est pareil pour toutes les formes de fêtes taurines ? Est-ce qu’une forme d’élevage respectueux de l’animal avec une mise à mort propre ne serait pas acceptable ? Est-ce que toutes les formes d’élevage, même celles où l’on ne tue pas l’animal (cf l’exemple précédent des poules) sont à rejeter d’office ? À quelle niveau de conscience de soi considère-t-on qu’un animal a droit à un bien-être, et quels sont les animaux concernés ; corollaire, comment gère-t-on les animaux « nuisibles » ? À une échelle plus lointaine, est-ce moral de cesser totalement les élevages des animaux domestiques, sachant que l’immense majorité est incapable de survivre dans la nature et que donc cesser les élevages revient à causer leur disparition ? Etc.

Un autre type d’exemple avec les féministes qui acceptent le travail sexuel et celles qui sont résolument contre. Les deux partent du même constat : la situation actuelle des travailleuses du sexe est scandaleuse et doit changer.

Mon point de vue est donc qu’une notion, même en l’apparence consensuelle, entraîne énormément de questions. Espérer que grâce à l’émotion la population va accepter la notion et les conséquences telles que l’imaginent les promoteurs de la notion est au mieux naïf, et plus probablement dangereux si le dialogue est impossible parce qu’une partie considère que les réponses aux questions liées sont évidentes.

C’est, je pense, cet écart, qui est à l’origine de la « dureté » apparente du milieu militant face aux notions de « débats apaisés ».

C’est un point de vue intéressant. Creusons un peu.

Sur ce sujet particulier (les inégalités sociales entre hommes et femmes), je ne crois pas qu’il y ait encore réellement matière à combattre et polariser la société de nos jours.

Comme le dit @Renault, il me semble qu’il y a un consensus largement atteint, aujourd’hui, sur la situation souhaitée, l’objectif, et sur le fait, irréfutable, que nous n’y sommes pas encore. Là où va porter le débat, c’est plutôt sur les moyens à mettre en œuvre pour l’atteindre.

Alors oui, on va avoir des gens qui vont exprimer leur colère en manifestant dans la rue pour nous rappeler que "hé ho, c’est pas fini, rien n’est acquis", c’est logique, c’est sain, et je suis même d’accord pour dire que c’est nécessaire de rappeler que c’est un vrai sujet, et qu’il est urgent de s’en occuper.

Là où je suis plus circonspect, c’est sur le fait que l’on ait pour cela besoin de se crisper et de lutter les uns contre les autres.

Quand on "lutte" contre les violences sexistes, par exemple, sur qui on gueule exactement ?

  • Les hommes en général, parce que tous les agresseurs dans les cas de violences sexistes sont des hommes, donc tous les hommes sont susceptibles de se rendre coupables de violences sexistes ?
  • Le législateur ? Pour qu’il se magne de statuer sur le sujet ?
  • La société, pour qu’elle amène ce sujet au centre de ses préoccupations ?

Dans le premier cas, ça ne sert à rien de gueuler sur 50% de la population, et il est parfaitement contre-productif de les diaboliser par défaut. À moins de chercher à susciter chez eux la défense parfaitement légitime des gens que l’on accuse à tort et que l’on présume coupables… Si c’est vraiment contre eux que porte la lutte, alors on se trompe totalement de combat.

Le second cas est sain, "magnez vous de légiférer pour en faire une circonstance aggravante et durcir les peines !". Mais ça ne justifie pas une lutte, en soi. Ou alors si c’est réellement un combat, c’est qu’il y a une couille dans le potage, parce que cela présuppose que le rapport entre le peuple et ses législateurs est nécessairement un rapport de force, même en présence d’un consensus. Et dans ce cas cela répond à une question que j’ai posée plus haut : on a un problème systémique à régler de façon tout aussi urgente que celui des violences faites aux femmes, parce qu’on ne devrait pas avoir besoin de se battre pour que le législateur fasse ce pour quoi on l’a élu. Lui mettre un coup de pression et définir ses priorités, oui. Se battre contre lui, et donc s’opposer à lui, non.

Dans le troisième cas, c’est plus délicat, et je pense que ce sujet n’est pas forcément un bon exemple, mais cela veut dire que l’on cherche des moyens sociaux, hors législation, pour prévenir ce type de violences. Soit, mais qu’est-ce qui justifie une lutte ? Je veux dire, dès lors qu’il y a consensus sur le fait que ces violences soient parfaitement inacceptables et qu’il faut les prévenir à tout prix, on est a priori d’accord sur ce qu’on veut, et puisque c’est pas entre les mains du législateur, chacun peut bien mettre en oeuvre tous les dispositifs qu’il veut, non ? Qu’il s’agisse de campagnes de sensibilisation, de soutien aux victimes… Pour le coup, dans ce cas de figure, je peux comprendre qu’il y ait des débats (telle mesure est-elle souhaitable ? Efficace ?), mais je ne vois absolument pas de nécessité de se battre, ni de polariser la société sur le sujet.

+3 -1

Hello!

Je n’arriverai certainement pas à me positionner sur tous les messages postés, aussi vais-je me contenter de répondre à la question initiale.

Pour moi, l’utilité du militantisme est qu’il met en lumière des enjeux de société. S’il est suffisamment relayé, il force toute personne à avoir un avis sur un sujet donné. Prenons un exemple souvent mentionné dans le fil des messages : le veganisme. Peu importe les avis qui peuvent exister sur la question, toute personne a désormais un avis sur la question, même sommaire. On sait que c’est un sujet de société et naturellement les gens ont tendance à adopter un avis au cas où on leur poserait la question.

Je suis d’accord que le militantisme n’a pas pour but que les idées défendues, quelles qu’elles soient, soient reprises en bloc dans la législation. Néanmoins, il a généralement l’avantage de poser des principes forts et marquants, certainement émotionnels, qui frappent. À partir de là, les gens peuvent développer des réflexions qui reprennent le principe scandé sous une forme atténuée.

Ce n’est pas parce que les slogans ou les messages agressifs ne sont pas faits pour le débat que ces mêmes personnes sont incapables de discourir en face d’une personne qui ne partage pas leur point de vue. Il ne me paraît pas contradictoire de soutenir un message volontiers tranché dans une manifestation et de le nuancer lors d’un quelconque débat. La manifestation vise à frapper les esprits, le débat à convaincre le plus grand nombre.

Aussi le militantisme ne me paraît pas inutile, mais, à mon avis, il n’est pertinent que dans la révélation des sujets de société. Pour se faire entendre, il est clairement efficace de miser sur l’émotion. Par contre, je doute qu’elle soit utile pour convaincre le plus grand nombre, ne serait-ce parce que les opposants useront de l’émotion dans le sens contraire.

On dit toujours qu’il y a des pays démocratiques comme s’il y avait une unité entre tous ces pays. À mon sens, il y a plusieurs démocraties. En France, on vote peu (bon je suis biaisé, je suis suisse, nous, on vote vraiment souvent…). Une fois pour le président, une fois pour les députés, une fois pour les maires, une fois pour les députés européens et une fois pour les départementales (vous me corrigerez si j’ai oublié un scrutin). Aucun de ces votes ne parlent de sujet de société comme thème central. On vote pour une personne, pour une idéologie (il n’y a aucune connotation négative dans ce terme), mais pas pour une idée précise particulièrement. Quand vous votez pour une personne, vous avez un espoir qu’elle fera ce que son parti a intégré dans son programme une fois élue. Et si elle ne le fait pas, vous attendez 5 ans et vous votez pour une autre personne avec le même espoir. Dans une telle société, il me paraît plus utile d’être militant. En effet, le vote du citoyen n’a pas le même poids quand dans une démocratie où l’on peut voter sur des sujets précis comme par exemple le mariage pour tous. Ici, le but est d’influer sur les politiciens en place pour espérer une reprise dans la législation. En revanche, le militantisme est moins pertinent dans les pays où l’on peut forcer une votation sur un sujet de société. C’est à mon sens ce qui explique la montée des militantismes de tout bord en France.

Il ne suffit pas de dire que la France est un pays démocratique, où le peuple choisit ses dirigeants, pour couper l’herbe sous le pied du militant. Car mine de rien, il faut reconnaître que le Français n’influe pas grandement par son vote la direction du pays. Je ne dis pas que le vote ne sert à rien, mais qu’il pèse moins qu’ailleurs. Ca me paraît légitimer de manière générale les mouvements militants.

Finalement, je pense que seule la postérité rendra gloire à un mouvement militant. En effet, on peut dire aujourd’hui que la société considère comme une évidence que le noir est l’égal du blanc et la femme est l’égal de l’homme. Mais à l’époque où l’on pensait différemment, on raisonnait que cette affirmation était un courant partisan comme un autre, où chaque camp pouvait avoir des bons arguments en faveur ou contre cette affirmation. C’est seulement aujourd’hui qu’on considère le mouvement des Civil Rights comme du militantisme légitime. Aussi, je pense qu’il faut tolérer une certaine part d’extrémisme, car on ignore quelle horrreur la société inflige à certaines personnes dans le sentiment au motif que c’est parfaitement normal. C’est l’évolution des conceptions qui nous contredira. Ca force à rester humble, à mon avis, devant les mouvements militants quels qu’ils soient.

Bonne lecture! :magicien:

+6 -0

@SpaceFox : D’accord avec toi sur le fond, cependant on peut toujours tirer le fil des questions à l’infini, et sans forcément pouvoir y apporter de réponses. Soit parce qu’on n’a pas de données scientifiques suffisantes, soit parce que les réponses sont multiples (éthique…). Ca ne me semble pas toujours déconnant de passer à l’action sur une partie d’un sujet sans attendre d’avoir toutes les réponses à tous les sujets connexes. Pour reprendre ton exemple de la corrida, on peut très bien militer pour interdire la corrida, et simplement pour ça dans un premier temps, sans forcément imposer de point de vue sur les questions connexes. De même on peut militer pour l’égalité salariale homme-femme sans entrer dans le débat des travailleuses du sexe.

@nohar & NuX : Vous mettez le doigt sur un élément : la démocratie française est de mauvaise qualité, on n’a pas les outils / le pouvoir, ni législatif (référendums, représentation correcte…) ni de débat (plate-formes, médias de qualité…). Résultat : d’une part les débats tournent directement à la foire d’empoigne à cause des médias et du fonctionnement des réseaux sociaux, d’autre part le militantisme est le seul moyen à disposition pour amener un sujet dans le débat public et influer sur le cours des choses. Effectivement avec un meilleur système politique ce serait probablement différent. Rien à voir, mais je pense que la société dans laquelle on baigne joue un rôle aussi. La société du spectacle, du scandale, des clashes, à l’américaine. Ca moule les comportements vers une idiocratie plutôt qu’une société des lumières… Le vrai débat, construit intelligent et respectueux d’autrui, pour pas mal de gens c’est déjà inconnu (problème d’éducation), et bon pour les gens chiants qui écoutent France Culture. La masse d’informations plus ou moins pertinentes dans laquelle on baigne joue un rôle aussi. La masse des gens accorde donc plus d’attention aux actes militants qu’aux vrais débats d’idées complexes. Et certains militants eux-mêmes le sont pour de mauvaises raisons et sont incapables de débattre rationnellement.

Quelques autres points que j’aimerais ajouter :

Parfois on peut se sentir concerné émotionnellement. Par exemple si soi-même ou des personnes de notre entourage, ont subi une violence sexuelle, une violence policière, etc. Je peux comprendre que dans ce genre de cas on puisse rabrouer un protagoniste complètement externe ou peu concerné qui vient demander un débat apaisé et lui dire "réveille-toi et renseigne-toi avant de venir me demander des comptes".

De plus, parfois le militantisme se fait contre une force établie (des entreprises, lobbies, l’Etat…). Il n’est pas toujours possible de débattre et de s’entendre calmement avec un adversaire si cet adversaire n’y est pas disposé ou est purement et simplement un ennemi. Dans certains cas, hélas, le rapport de force et l’action sont les meilleurs et/ou seuls moyens efficaces de remédier à une situation.

A grande échelle, je pense qu’il est assez rassurant d’avoir des deux dans la société : militantisme, et débat rationnel. Sans militantisme, nous ne serions qu’une masse amorphe, dénuée de tout pragmatisme, incapable de se rebeller et de se protéger collectivement des menaces. Sans débat rationnel, ce serait l’anarchie et la guerre civile.

+2 -0

A grande échelle, je pense qu’il est assez rassurant d’avoir des deux dans la société : militantisme, et débat rationnel.

Ça serait rassurant si nous les avions réellement tous les deux. Mais tout le reste de ton post illustre parfaitement le fait que le second ait disparu des écrans radars.

C’est justement une des raisons derrières ce sujet : on ne débat plus, de nous jours. On ne sait d’ailleurs plus débattre.

Il n’y a vraiment que moi que ça choque ?

+1 -0

Ensuite désolé, mais si la seule différence que l’on peut donner entre les opérations de "résistance" et le terrorisme, c’est que les premières ne font pas de victimes humaines, alors fondamentalement les deux ne diffèrent que par l’extrémité des moyens mis en oeuvre, et sont, par conséquent, parfaitement comparables car ils partent du même principe. Si je choque quelqu’un en disant cela, tant mieux, c’est un peu le but. Si réellement le rapprochement est à côté de la plaque, alors il doit bien exister un argument rationnel pour le réfuter… Et je ne demande qu’à être convaincu, et rassuré par la même occasion.

La différence que tu pointes ne te semble pas suffisante pour rendre absurde le rapprochement ?

Bien sûr qu’il existe des (et j’insiste sur le pluriel) arguments rationnels pour réfuter ça. Par contre, pas aisé de les déployer comme ça, vite fait. Et ce n’est pas un aveu de faiblesse, bien au contraire : quand une question est à ce point non pertinente et mal posée, c’est difficile d’y répondre. Je vais essayer si j’ai un peu de temps dans la journée.

Si le but est de faire évoluer les mentalités, et je pense notamment au fait de tordre le cou à des comportements profondément ancrés dans la société à tel point qu’ils sont devenus inconscients chez les plus atteints (au hasard, le mansplaining…), est-ce que c’est vraiment en prenant les gens de haut qu’on va les faire changer ?

J’en arrive enfin à la question suivante : le but, c’est de changer les mentalités et faire avancer la société ou bien se faire mousser entre gens qui sont déjà convaincus ? Parce que dans le premier cas, y’a clairement quelque chose à revoir.

nohar

"LE" but n’es pas de faire changer les mentalités. C’est un but parmi d’autres, et un moyen pour d’autres buts, mais aussi quelque chose dont on sait que cela prend du temps et ne dépend pas uniquement de l’action militante. C’est capital, certes, mais on ne peut pas tout ramener à cela, tout y réduire. Voir les exemples donnés dans mes autres posts (hébergement, souffrance au travail, droit d’asile…).

Et donc : l’alternative que tu présentes est fallacieuse. Pour moi, la plupart du temps, c’est ni l’un ni l’autre.

Je dirais qu’un militant, par essence, fait une activité de communication. Si la personne refuse de faire cette communication convenablement avec quelqu’un qui pose une question ou qui veut en débattre, pourquoi devenir militant ? Le militant est une porte d’entrée pour un sujet.

Renault

Même remarque que pour beaucoup de posts ici : la proposition est plus que simpliste. "par essence"? Selon qui ? Est-ce que c’est une pseudo-évidence, ou est-ce que tu as des sources pour appuyer cette proposition, assez forte et coûteuse ?

Les exigences rationalistes s’appliquent toujours, même quand on critique une activité qu’on croit à tort peu rationnelle (je trouve intéressant le débat lancé par le post de @SpaceFox sur la place de l’émotion et de la raison, j’essayerai de dire quelques mots là-dessus plus tard). Mon humble avis, c’est que par essence le militantisme est une activité orientée vers des résultats concrets plus ou moins immédiats et accessibles à court terme (situation au travail, droits effectifs, égalité d’accès à des droits existants…), et que les enjeux de communications sont subordonnés à ceux-là. Mais je sais que c’est une vision partielle et je ne me risquerais pas à parler d’essence.

La différence que tu pointes ne te semble pas suffisante pour rendre absurde le rapprochement ?

La différence que je pointe suffit à dire que c’est différent, mais certainement pas à rendre le rapprochement absurde.

D’ailleurs ça rejoint exactement ce qui me choque plus haut : pour faire entendre certaines revendications, d’après ce que je lis plus haut, il est nécessaire et visiblement justifiable d’employer la violence, de choquer les gens et/ou de leur nuire en bloquant un pays.

Qu’il mette sur le tapis des vies humaines ou non, un chantage est un chantage : je ne le tolère pas de la part de mon enfant, on ne le tolère pas de la part de terrorristes, on ne devrait pas non plus le tolérer de la part de groupes militants. Autrement dit, si le terrorisme est inacceptable et insupportable seulement parce qu’il tue des gens, alors notre société a un grave problème.

Et si on en vient à trouver normal d’employer et de privilégier ce mode de fonctionnement pour faire évoluer la société, alors ce problème est beaucoup plus profond que ce que je pensais.

PS : Par ailleurs, j’apprécierais un minimum d’effort : me dire que ma question est mal posée et pas pertinente sans expliquer exactement pourquoi dans le même post n’a aucun intérêt. Nul besoin de se presser pour donner des explications. À ma connaissance une "question mal posée" n’existe pas. Des questions naïves, oui, des questions chiantes, oui, des questions difficiles, oui, mais à aucun moment "ta question est mal posée" est une réponse suffisante et acceptable, ni même utile.

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La différence que tu pointes ne te semble pas suffisante pour rendre absurde le rapprochement ?

La différence que je pointe suffit à dire que c’est différent, mais certainement pas à rendre le rapprochement absurde.

D’ailleurs ça rejoint exactement ce qui me choque plus haut : pour faire entendre certaines revendications, d’après ce que je lis plus haut, il est nécessaire et visiblement justifiable d’employer la violence, de choquer les gens et/ou de leur nuire en bloquant un pays.

Mais peut-on mettre ensemble un blocage routier, le fait de "choquer les gens"(par exemple en demandant le droit de se marier pour les couples de même sexe) et le Bataclan ? Je fais exprès de forcer un peu, mais tout de même, comparer un blocage routier ou une grève à des actes de terrorisme, ma foi…

PS : Par ailleurs, j’apprécierais un minimum d’effort : me dire que ma question est mal posée et pas pertinente sans expliquer exactement pourquoi dans le même post n’a aucun intérêt. Nul besoin de se presser pour donner des explications. À ma connaissance une "question mal posée" n’existe pas. Des questions naïves, oui, des questions chiantes, oui, des questions difficiles, oui, mais à aucun moment "ta question est mal posée" est une réponse suffisante et acceptable, ni même utile.

nohar

Oui, je voulais simplement pointer du doigt le fait que pour moi la difficulté vient de la question, et pas de la chose elle-même. Je sais que ce n’est pas pressé, mais ça se voulait quand même une contribution, en attente de la suite.

Si, une question mal posée, ça existe. C’est même quelque chose de central pour le scepticisme et le rationalisme (voir le cercle de Vienne et les positivistes) que de savoir repérer une question mal posée et de réfléchir aux façons de poser les questions et de problématiser. Je dirais même qu’un bon et vrai débat requiert de questionner les questions.

PS : Je dirais même, tout comme toi plus haut : on ne sait plus débattre de nos jours. J’essayerai, là encore, de contribuer un peu plus dans la journée à ce sujet, parce qu’il me semble que les militants (ceux que je connais, l’expérience que j’ai des milieux que je fréquente, pas dans l’absolu bien sûr) savent débattre, le font très bien et de façon bienveillante et rationnelle.

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