salut,
puisqu’on a jugé bon de supprimer le petit message que je m’étais fait chier à rédiger (le mettre en « secret » devait être trop difficile1), je le remets, na.
au passage, j’aimerais souligner que :
- il était bien statué dans le message initial qu’il risquerait d’y avoir des spoils, au cas où on ne s’y attendrait pas déjà en ouvrant le sujet.
- si je n’avais pas caché mon texte, c’est justement pour m’adresser aux gens qui n’auraient pas vu le film, pour les dissuader de le faire. c’est aussi le but d’une critique, non ?
STAR WARS ÉPISODE VIII : LE PREMIER ORDRE RIPOSTE
formée par Luke sur sa planète secrète et solitaire[1], Rey commence son entraînement de jedi. mais maîtriser la Force est difficile et Rey est impatiente de retrouver ses amis les Résistants.
ceux-ci, justement, sont attaqués[2] par le Premier Ordre[3] ; heureusement, grâce à leurs exercices tous les premiers mercredis du mois, ils évacuent en deux-temps-trois-mouvements et se retrouvent dispersés dans l’espace. BB-8, Finn, Poe et Chewbacca, qui sont restés en arrière pour jouer les héros, manquent se faire capturer par Dark Bouclette mais s’échappent de justesse à bord du Falcon Millenium dont l’hyper-propulsion est en panne parce que sinon ce serait pas drôle.
pour semer les méchants poursuivants, ils se réfugient dans un champ d’astéroïdes et se cachent à l’intérieur d’un spécimen particulièrement gros. mais horreur, ils se trouvaient en fait dans le gosier d’une créature géante[4] qui tente de les dévorer ! heureusement, ce sont des héros et ils émergent in extremis des monstrueuses machoires qui se referment[5].
Rey, elle, coure dans les bois avec Luke sur le dos et pense très fort à ses amis.
le Falcon Millenium est toujours endommagé ; nos héros rejoignent donc la cité de l’espace la plus proche afin de s’y cacher du Premier Ordre et de procéder aux réparations. La ville s’avère gouvernée par un ami de longue date de Chewbacca, Edmund Landau, qui leur offre donc une limonade dans son salon pendant que les esclaves locaux réparent le vaisseau. cependant, des plans avec des gens bizarres qui se serrent la main dans des couloirs obscurs invitent le spectateur à la méfiance, et l’on découvre bientôt l’horrible vérité : le Premier Ordre était déjà là, et il oblige Landau à trahir ses amis ! Lors d’une scène insoutenable, Chewbacca[6], en tant que brigand de longue date, est plongé vivant dans une cuve de congélation, sous les yeux de ses amis prisonniers et de Dark Bouclette fraîchement débarqué.
cependant sur Perpette-les-Deux-Soleils, Rey a un accès d’intuition mystique qui lui révèle que ses amis sont en danger et que, forte de sa maigre formation et de son sabre laser d’occasion, elle doit aller les sauver. Luke désapprouve son caprice puéril mais la laisse finalement partir à bord de son vaisseau spatial fort justement sorti de la vase (ah flûte, il va falloir l’y plonger avant).
la voilà donc qui se pointe fièrement à la cité volante et qui délivre ses amis avec l’aide de Landau qui en fait est gentil. cependant, elle se retrouve prise en duel au sabre laser avec Dark Bouclette qui l’exhorte à « laisser parler la colère qui bout en elle », des trucs comme ça. le combat fait rage dans les sous-sols de la ville, à grands renforts d’effets de sabres lumineux trop classes, jusqu’à ce que Rey se retrouve acculée au-dessus d’un gouffre insondable. Bouclette lui affirme alors être son père[7][8] et lui tranche la main pour la forme. main et sabre dégringolent dans le précipice[9]. désespérée, Rey s’y jette à son tour afin d’échapper à Bouclette qui l’invite à se joindre à lui pour renverser le Grand Snoopy et régner sur la galaxie. Le Falcon Millenium passait justement par là et elle atterrit pile dans l’écoutille de la boîte de conserve volante.
le film se conclut sur une scène de communication mystique entre les deux cousins antagonistes, à bord de leurs vaisseaux respectifs qui s’éloignent.
- Maître Luke est devenu un peu maboule avec l’âge et l’isolement, mais il reste très Fort.
- en fait c’était pas si dur de trouver leur base, à défaut de capturer le moindre de leurs droïdes contenant ses coordonnées il suffisait de suivre n’importe lequel de leurs vaisseaux.
- ils sont pas contents parce que les Résistants ont cassé leur jouet préféré.
- « ce n’est pas un ver de terre de l’espace, c’est beaucoup plus gros. »
- non sans moultes remarques cinglantes de Finn, comme « je veux pas mouriiiir » et « grosse limace, tu nous mangeras pas !!! »
- c’est sûr, ça aurait eu plus de classe avec Han Solo, c’est ballot de l’avoir tué bêtement comme ça.
- donnant lieu à ce qui deviendra la réplique culte du cinéma, détrônant même le mythique « ce n’est pas une Étoile de la Mort, c’est beaucoup plus gros » de l’opus précédent
- ce n’est évidemment qu’un mensonge éhonté destiné à la déstabiliser ; il est en réalité son cousin puisqu’elle est la fille de Luke Skywalker.
- je ne m’inquiète pas pour le sabre, il commence à prendre l’habitude.
(coucou GouleFutée, je ne maîtrise pas encore totalement la langue française, je veux bien que tu m’indiques mes nombreuses fautes pour m’aider à progresser
(et GouleFutée, je suis absolument navré d’exprimer un avis désagréable pour ceux qui ont aimé le film)
et puisqu’apparemment c’est une discussion éminemment sérieuse et il faut faire des critiques constructives, voici la mienne.
oh, et avant de la classer dans la catégorie « crachat de fana frustré », je précise que je ne suis absolument pas un passionné de Star Wars.
résumé-garanti-sans-spoil :
- plagiat éhonté
- script absurde et contradictoire, autant avec lui-même qu’avec l’univers Star Wars
- compilation des clichés et trucs les plus éculés de 110 ans de cinéma
- réalisation tout simplement mauvaise
- conclusion : bouse commerciale dans l’air du temps, dignes des pires Marvel actuels et en rude concurrence avec Jupiter : le destin de l’univers (et il y a du niveau) pour le titre de pire film de 2015
pour la production de cet événement cinématographique, le mot d’ordre semble avoir été : subtilité.
Tout d’abord, je pense que vous l’aurez compris maintenant, le film est un plagiat éculé du premier film Star Wars (le numéro IV, là). évidemment, c’est un défaut majeur qui n’augure rien de bon par ailleurs, mais juste pour la suite de cette critique, admettons comme beaucoup de gens que ce ne soit pas grave, que la production ne se moque pas ouvertement de notre poire avec une troisième Étoile de la Mort (après tout, l’ablation de la mémoire est déjà chose courante dans le cinéma actuel2) et que la non-création scénaristique soit nécessaire pour séduire les fanas de la première heure.
passons donc aussi sous silence les innombrables « références » aux films précédents, d’une subtilité affligeante, en fait des répliques et des scènes entières qui sont plagiées ; ces clins d’œil sont déjà assez insupportables en eux-mêmes mais leur multitude rend difficile de ne pas trouver au film un goût de mauvaise imitation.
voici tout de même un inventaire des quelques éléments prétendûment nouveaux que j’ai trouvés dans le film (notons l’ambition créative) :
- un nouveau droïde mignonnement nommé BB-8 : en fait ce n’est rien de plus qu’un R2D2 relooké et surjoué (ses incessants bip-bips parodiés de R2D2 sont juste agaçants)
- un noir dans le casting !
- une fille dans le casting !
- un sabre laser en forme de croix de Jésus : bravo, c’est le détail qui change tout ; Bouclette aurait même pu s’en servir pour décapiter Finn lors de leur duel épique au sabre, au lieu de jouer au bras de fer avec lui en lui laissant une petite égratignure au col après l’avoir acculé contre un arbre, mais bon.
- « ce n’est pas une Étoile de la Mort, c’est beaucoup plus gros. » bon.
je reviendrai plus tard sur le noir et la fille.
si on oublie qu’il y a eu des films avant 2015, il faut donc oublier aussi les nombreuses incohérences de Star Wars 7 avec le propre univers de Star Wars. ça m’arrange parce que j’ai un peu la flemme d’en faire une liste détaillée et que d’autres en ont déjà relevées avant moi. qu’il suffise de savoir qu’elles existent et sont aussi gênantes que le reste même si je ne développe pas.
par contre, il est difficile de faire l’impasse sur les contradictions du film avec lui-même.
- le script ne tient tout simplement pas debout : il repose sur la quête de
Luke, et la course pour récupérer le droïde qui contient des informations à
ce sujet3.
- les gentils ont cette carte et veulent la transmettre à leur base pour qu’ils trouvent Luke et le convainquent de venir sauver le monde. les gentils n’ont qu’à faxer la carte à leur base. pouf, fini, plus de film. admettons donc qu’il ne peuvent pas, pour une quelconque raison non donnée dans le film. dans ce cas, pourquoi personne ne se gêne pour communiquer d’un bout à l’autre de la galaxie à une foule d’autres moments ?
- les méchants veulent récupérer cette carte pour éliminer Luke et l’empêcher de sauver le monde. leur vrai problème en fait, c’est la Résistance, pas Luke. visiblement, elle a beau réussir à se cacher depuis trente ans, trouver sa base n’est pas si difficile puisque, même si le moindre de ses droïdes ne connaissait pas son emplacement (les méchants sont sans doute trop empotés pour en capturer un seul), il suffit de suivre un de ses vaisseaux, ce qu’ils font à la fin du film pour savoir où pointer leur Étoile de la Mort (parce qu’eux ont fini par comprendre qu’en fait, l’histoire avec Luke et tout, c’est débile et que ce serait intelligent d’éliminer la Résistance pour de vrai plutôt).
- visiblement, le moindre petit officier
de l’Empiredu Premier Ordre peut désactiver les boucliers de l’Étoile de la Mort (la méga-base des méchants, de la taille d’une planète, rappelons-le) en tapant le mot de passe et en cliquant sur OK (heureusement, pour donner le change, ledit officier nous inflige les répliques les plus vides et usées du film : « d’accord, mais vous allez le regretter »). - je ne sais pas si vous avez compris ce qu’était Finn exactement avant de devenir gentil, moi pas. on nous le présente comme un soldat des troupes d’élite, ignorant tout de la vie et même de l’équipement de sa propre armée, capable uniquement de manier un blaster. mais bon en fait le grand gaillard se débrouille bien tout seul aux manettes d’un vaisseau et dans la vie. ah, mais en fait il nettoyait les toilettes de la base (mais alors il foutait quoi dans les troupes d’élite ? réponse : c’est un échantillon de l’humour à la con du film). oh, mais il tient tête au sabre à Dark Bouclette, certes apprenti et affaibli, mais quand même.
- de façon moins critique (bien que pour un budget pareil, on pourrait grincer des dents), le film a évidemment sa pléthore de coïncidences improblables, de petites incohérences (il ne manquerait pas un cratère autour du vaisseau écrasé ?) et de faux-raccords (comme relevés par dab).
pour masquer la vacuité du script, on a fait appel à une très vaste panoplie de ressorts de narration usés jusqu’à l’os, et plus généralement à tous les clichés du cinéma depuis 1950. citons en vrac :
- le personnage noir qui fait respecter les quotas ethniques et montre l’ouverture d’esprit des producteurs : tant qu’à faire, autant lui refiler son rôle habituel de clown incompétent, le faire parler comme Will Smith4 et lui confier l’humour du film ;
- l’espèce de princesse Disney qui attend sagement ses parents disparus ou le prince charmant, mais attention hein, quand elle n’est pas occupée à regarder le lointain d’un air triste elle sait se battre et conduire des vaisseaux comme les garçons, ce film est tellement moderne (c’est sûrement affectif quand on l’appelle « la fille ») ;
- l’inévitable, inutile, artificielle histoire d’amour entre les deux héros (extrêmement subtile, commme le reste du film, est-il besoin de le dire) ;
- Finn qui, en vrai héros, s’interpose dans une bagarre pour sauver la demoiselle en détresse (enfin essaye, n’oublions pas que Finn est le clown de service et Rey la princesse guerrière), sans connaître ni les protagonistes ni la cause de la rixe, et alors qu’il a d’autres soucis ;
- le méchant qui fait des trucs cruels dans sa première scène (comme faire exécuter tous les villageois, comme ça, sans raison) pour bien qu’on comprenne qu’il est méchant ;
- le méchant tourmenté, le jeune qu’a ses problèmes identitaires de jeune, à la personnalité vachement profonde et complexe (il hésite entre être gentil et être méchant) ;
- les liens de parenté entre personnages ; le film n’en fait pas un mystère (même la bande-annonce le dit)5, mais ça permet de grandes scènes du cinéma américain à base de « nous sommes des parents désespérés, qu’est-ce qu’on a raté dans son éducation ? »4 et « — je sais qu’il y a encore du bon en toi… arglh, tu m’as tué, c’est tellement triste. — eh oui, je suis méééchant ! ») ;
- le vieux papy (Han Solo) qui trouve le premier jeune venu (Rey) très doué et qui voit en lui l’enfant qu’il aurait aimé avoir, etc. (absolument inutile au reste du film, d’ailleurs) ;
- l’ex-méchant repenti, dans le camp des méchants depuis sa naissance mais qui décide subitement de devenir gentil, auto-converti aux idéaux supérieurs de Justice et d’Amitié (il est vrai que l’idéologie dans Star Wars n’est déjà pas des plus nuancées…) ;
- les personnages qui se connaissent depuis deux minutes et sont déjà les meilleurs amis du monde (outre que ça tombe comme un cheveu sur la soupe dans leur brillante conversation, Poe est vraiment très sympa de révéler à Finn le méga-secret sur la carte planquée dans BB-8 (oui celui qu’il n’a avoué à Dark Bouclette que sous la torture), juste avant de pseudo-mourir) ;
- le gentil qu’on croit mort mais en fait non (quelle surprise) ;
- les sables mouvants qui font une frappe chirurgicale autour du vaisseau écrasé (sans oublier l’explosion parce que voilà), ou encore la fissure qui sépare pile-poile Bouclette et Rey ;
- le levier au milieu de la paroi du gouffre métallique, judicieusement placé pour que Rey puisse se sauver ;
- le vaisseau spatial « qui n’a pas volé depuis des années » pour créer une petite atmosphère légendaire, mais on arrête là le cérémonial et on se casse parce que les méchants nous tirent dessus ;
- R2D2 qui se réveille juste à la fin pour révéler la carte qui mène à Luke (ça alors, personne ne s’y attendait depuis le premier plan où on voit R2D2) ;
- …
il n’y manque à peu près que la femme fatale, mais j’ai bon espoir pour les films suivants.
pour ne rien gâcher, le film souffre de touches d’humour à la con qui se veulent probablement modernes. un humour pathétique pour lequel a pourtant été sacrifié la crédibilité du grand méchant masqué (les remarques irrévérencieuses à la con de Poe) et la cohérence du script (le gag à la con de Finn récurrant les toilettes des méchants).
la réalisation proprement dite est mauvaise : le film est une cacophonie informe, ça ne ressemble à rien6. évidemment, c’est un film d’aventures, il faut attirer les jeunes à l’heure d’Internet et des smartphones où tout va plus vite, mais ça n’excuse pas la médiocrité du cadrage7 (voir l’inoubliable scène finale) ni le rythme bordélique. je crois que si j’ai pu suivre le film, c’est grâce au vide abyssal et prévisible du script.
contrairement à ce que j’ai pu lire ici, la musique est anecdotique : le peu que j’en ai entendu (en fermant les yeux dans des moments de grande fatigue, sinon je ne l’aurais même pas remarquée) se résume à des reprises de quelques secondes des thèmes les plus populaires des épisodes précédents (toujours aussi inventif quoi) à des moments plus ou moins judicieux. le reste doit être du bruitage.
je concède ceci au film : il a de très chouettes décors, notamment les carcasses
de vaisseaux dans le sable du désert. c’est vraiment dommage qu’on n’ait pas
l’occasion de les regarder entre deux pirouettes. la meilleure scène du film est
donc selon moi la scène d’expositon de Rey dans sa vie quotidienne de
récurreuse de toilettes (ah non pardon ça c’était Jupiter : le destin de
l’univers) pilleuse d’épaves sur cette planète qui ne s’appelle pas Tatooine.
en second choix, bien tournée, la scène finale aurait pu être belle aussi (mais
il a fallu cet interminable clignotement de plans yeux-dans-les-yeux pour nous
faire comprendre l’intensité émotive du moment, suivi de cet immonde plan
gyroscopique).
finalement, il faut reconnaître que les producteurs connaissent bien leur commerce pour s’attirer le public le plus large possible : les anciens en jouant sur leur corde sentimentale à grand renfort de placement d’anciens personnages, de références lourdingues et de reproduction du scénario du premier film ; et les jeunes en jouant sur le succès des films comme Hunger Games avec la jeune héroïne. le tout réalisé à la façon moisie des Marvel du moment pour avoir l’air moderne8.
bref, tout ceci m’avait semblé tellement flagrant que je ne voyais pas l’intérêt d’expliquer par le menu à quel point le film est mauvais, sur tous les plans. d’après la majorité des réactions, j’avais tort.
-
édit : ah oui c’était difficile, à cause des notes de bas de page. bon. ↩
-
suis-je le seul que ça effraie légèrement ? ↩
-
qu’après n millénaires de civilisation, il n’existe pas de carte de la galaxie hormis dans le cerveau de R2D2 a de quoi surprendre, mais bon. ↩
-
merci à Disney d’appliquer à la galaxie lointaine de Star Wars les clichés de la société étasunienne, il ne manquait que ça. ↩
-
et puis, comme ce n’est pas totalement évident dès le début du film, c’est plutôt le fait que Luke soit le père de Rey qui constituera le climax de cette trilogie). ↩
-
enfin, à regarder les derniers Marvel c’est ce qui marche, donc ça doit être moi qui trouve ça nul à chier. ↩
-
à ce stade, je dois préciser que j’ai commis l’erreur d’aller voir le film en 3d, ce qui n’aide pas, mais quand même. ↩
-
je suis même surpris qu’on ne voie jamais Rey sortir son smartphone. ↩