La question est difficile est assez inédite, il y a plein de scénarios possibles et comme toujours…un seul qui va se réaliser qui sera probablement un mix entre tout cela.
Déjà, commençons par le vote en lui même. Soyons honnêtes, le pays n'a pas bien géré les conditions pour interpréter le résultat du pays. Je veux dire, le Royaume-Uni étant un État avec 4 nations en son sein, il semblait évident ou du moins important que tous ses composantes soient d'accord pour que la sortie soit effective. Là on a bien un désaccord interne avec l'Écosse et l'Irlande du Nord.
L'autre est que l'adhésion ou le retrait d'une telle union devrait être approuvée par une majorité claire, soit des deux tiers de suffrage exprimés, ou de la majorité de l'ensemble des personnes pouvant voter (donc en comptant les nons votants comme non favorables au Brexit). Ici, quoiqu'on en dise, le résultat est serré et je trouve bizarre qu'il suffise de 50%+1 voix des voix exprimés pour que cela entraine tout le pays. Cela ressemble à la dictature de la majorité. C'est bizarre aussi que la consultation des expatriés mais britanniques, pleinement concernés, soit si difficile pour une question d'une si grande importance.
D'ailleurs, notez l'hypocrisie, David Cameron était lui même opposé à une indépendance de l'Écosse avec un résultat proche des 50% de favorables hein… On est donc dans le deux poids, deux mesures.
Bon, outre que je trouve tout ceci choquant, le résultat est en effet le risque pour eux que l'Écosse et l'Irlande du Nord décident de les abandonner dans leur isolement. La meilleure idée, avec un score tel qu'il est, aurait été de demander seulement une renégociation des traités plus importante encore.
Après il y a la campagne et l'histoire. La campagne a été désastreuse des deux côtés. Les arguments apocalyptiques d'un côtés, répugnants de l'autre. Je n'ai jamais suivi une campagne avec aussi peu d'arguments raisonnés. Après il y a l'Histoire. Ce pays a quand même un culte de l'eurosceptiscisme profond que ce soit via les médias ou les politiques. Ils ont le dons depuis des décennies de rejeter le moindre problème sur l'UE, voire d'inventer des problèmes faux. Comment un peuple peut être attiré par une Union responsable de tous ses maux ? L'UE aurait du, je pense, condamner les politiques et médias qui pratiquaient cela. Elle aurait du également faire de la communication de ses apports positifs depuis tout ce temps car il y en a. Aujourd'hui, elle a perdu faute d'une image favorable, d'une publicité négative qui dure depuis trop longtemps. D'ailleurs, on notera que le clan du maintient n'a pas su montrer le visage positif de l'UE, seulement le risque de la quitter. On a vu des communications plus sexy. Sans compter qu'ils ont passé sous silence bien des programmes intéressants de l'UE pour ne garder que l'apport économique, ou presque. Bref, l'UE n'est pas forcément responsable de ce départ, les britanniques eux même en sont largement responsables aussi.
Passons à un autre sujet. Les conséquences négatives pour l'UE risquent d'être multiples. Un tel choix peut en effet renforcer les eurosceptiques des autres pays et donc amener à une dislocation d'une partie de l'UE. Ne nous y prenons pas, de nombreux pays restent très favorables à l'UE, même la France semble pas favorable de manière nette à une sortie donc sa destruction entière me paraît très peu probable. Quelques pays risquent de partir, mais là encore, c'est très hypothétique à ce stade.
Le principal risque, à court et moyen terme, c'est en effet le blocage de l'UE autour de la question du traitement avec le Royaume-Uni d'une part, mais aussi comment répondre au défi soulevé par ce désaveu d'autre part. Si le blocage dure longtemps, cela pourrait très mal finir pour la poursuite du projet.
L'autre risque, outre les éventuelles séparations supplémentaires, c'est la renégociations des traités par chaque membre à tout va. Ce risque me semble bien plus grand.
Ensuite il y a les relations extérieures. Le Royaume-Uni reste une économie puissante, 2e ou 3e de l'Union, une population grande et riche et une industrie également intéressante. Son départ va rendre l'UE moins attractive pour les étrangers en terme de partenariats économiques et d'investissements.
Bien entendu, le Royaume-Uni c'est aussi une voix politique forte. C'est un pays très influent dans le monde, doté d'un vaste réseau de pays partenaires via le Commonwealth et qui a le droit de véto au Conseil de sécurité de l'ONU par exemple. Son départ va rendre l'UE moins influente sur les négociations internationales.
Et forcément, tous ces points négatifs vont toucher les pays membres individuellement, certains plus que d'autres. Donc l'impact en terme d'emploi et autres ne sont pas à négliger.
Mais, fort heureusement, cela ne sera pas forcément que négatif. Le Royaume-Uni était le fer de lance des eurosceptiques dans l'UE. Maintenant ils seront moins représentés et probablement moins gênants aux évolutions nécessaires. Certains pays, comme le Danemark ou la Suède qui ont un commerce important avec le Royaume-Uni pourrait rejoindre l'euro, pour simplifier le commerce avec leurs voisins au détriment du Royaume-Uni. C'est très spéculatif, mais cela fait sens.
L'Irlande pourrait se rapprocher de l'UE. Une sortie du Royaume-Uni rendrait impossible l'accord de libre échange avec son voisin. L'Irlande aura donc l'occasion de rejoindre Schengen, comme elle l'avait affirmé si le Royaume-Uni mettait fin à cet accord entre les deux pays il y a quelques années de cela.
Tout ceci renforcerait les liens de l'UE en stoppant la politique de l'UE à plusieurs vitesses dont le Royaume-Uni était le plus grand garant.
D'un point de vue économique, les pays encore membres pourront bénéficier des investissements plus importants qui aurait du (ou qui sont revenus) au Royaume-Uni car elle était dans l'UE. Je pense notamment à certains industriels ou entreprises financières qui préfèreront délocaliser vers l'UE suite à ce retrait. Il semble très peu probable que ce retrait favorise le Royaume-Uni sur cette question par rapport à l'UE.
D'un point de vue politique, le Royaume-Uni était souvent l'arbitre entre la France et l'Allemagne sur nombre des sujets. Son départ pourrait, de manière sensible, renforcer le poids de la France sur les institutions, surtout pour certaines questions. Le couple franco-allemand devra s'habituer à converger sans s'appuyer sur un autre État ou justement choisir d'autres États (une coopération renforcée de certains États semble sur la table).
Après, c'est une occasion unique de réformer l'UE. Le sujet étant important, il semble évident que l'UE doit changer ce qui ne fonctionne pas (l'UE n'est pas parfaite bien entendue). Cette réforme pourrait très probablement redonner de l'élan aux sujets importants à traité : la défense commune, politique monétaire et fiscale mieux harmonisée encore et l'accessibilité démocratique de l'UE avec notamment une refonte des pouvoirs et d'accès au pouvoir entre la Commission, le Parlement et des États.
Je pense que cela ne fera pas de mal et je ne doute pas que les politiques voudront changer pas mal de chose sur ces sujets, mais difficile à dire dans quel sens cela ira finalement.
L'incertitude repose sur le devenir du Royaume insulaire. Difficile à dire si son économie s'en portera mieux, je suis plutôt sceptique sur la question. Ce qui est certain, c'est que selon la réussite ou non de cette entreprise, les eurosceptiques seront soit condamnés au silence en cas d'échec pour le pays, ou alors cela ravivera de plus belle leurs exigences. Mais il faudra du temps pour tirer les conclusions (probablement une décennie). Je pense que le scénario final dépendra très fortement de ce résultat, à moins que l'UE ne connaisse des jours très heureux pendant ce temps également.