Ni injective, ni surjective, ni bijective

Le problème exposé dans ce sujet a été résolu.

On peut définir dessus ce qu’est une partie mesurable et une partie négligeable de manière canonique, sans forcément avoir toute une mesure. Ici ce sera sûrement arbitraire de définir une mesure sur l’espace des triangles (pourquoi vouloir faire ça ?), mais on a une structure de variété lisse canonique qui nous donne les parties négligeables (ça donne du sens à l’affirmation « un triangle arbitraire n’est presque jamais rectangle »).

blo yhg

Oui enfin une structure lisse c’est quand même bien plus difficile à donner qu’une mesure.

D’ailleurs il n’y a probablement pas de structure lisse canonique, pour peux que ça soit un objet à $6$-dimensions, on est pas à l’abri de structures exotiques.

Banni

Ça dépend de ce qu’on appelle "canonique", ce n’était pas forcément "unique". Même sur $\left]0,1\right[$ il n’y a pas de notion d’ensembles négligeables uniquement défini par la topologie. (D’ailleurs si on prend comme définition d’un triangle « triplet de points », sur $ℝ^6$ il parait qu’il n’y a pas de structure exotique. Mais ça ne donne même pas de structure lisse « unique » au sens où l’identité de l’ensemble sous-jacent n’est pas forcément un difféomorphisme…)

Je voulais juste dire qu’il n’y a pas besoin de choisir une mesure, il n’y en a pas forcément de canonique mais il peut y avoir une notion canonique d’ensemble négligeable. Je suis d’accord qu’une mesure est plus facile à définir, il suffit de prendre la mesure de comptage par exemple mais ça n’est pas très naturel. Mais le cas des triangles est trop simple et on a de toute manière la mesure de Lebesgue sur $ℝ^6$.

Pour prendre un exemple moins simple on peut prendre l’espace des cercles. Là on peut les paramétrer d’au moins deux manières :

  • Par centre et rayon.
  • Par trois points non colinéaires et en quotientant.

Ces deux paramétrisations donnent sûrement des mesures différentes mais la même structure lisse. Et ça me semble assez naturel de vouloir munir l’espace des cercles d’une structure lisse, non ? Ça donne une notion d’ensemble négligeable sans avoir besoin de mesure, par exemple l’ensemble des cercles tangents à une droite fixée.

Pareil pour l’espace des plans vectoriels dans $ℝ^4$, c’est la Grassmannienne $\mathrm{Gr}(2,4)$. Ça ne donne pas de mesure mais donne bien des ensembles négligeables.

Ça dépend de ce qu’on appelle "canonique", ce n’était pas forcément "unique".

Canonique ça a un sens plutôt bien établit. Ça signifie que ça ne dépend pas d’un choix conventionnel/arbitraire et que c’est une façon naturelle de procéder.

D’ailleurs si on prend comme définition d’un triangle « triplet de points », sur ℝ6 il parait qu’il n’y a pas de structure exotique.

D’après qui ? À ma connaissance on en sait trop peu.

Ces deux paramétrisations donnent sûrement des mesures différentes mais la même structure lisse. Et ça me semble assez naturel de vouloir munir l’espace des cercles d’une structure lisse, non ? Ça donne une notion d’ensemble négligeable sans avoir besoin de mesure, par exemple l’ensemble des cercles tangents à une droite fixée.

À mon avis tu te trompes dans ta parade. Les mesures sont peut-être différentes, mais les ensembles négligeables probablement pas.

D’ailleurs je comprends pas comment tu définis un ensemble négligeable sans passer par une mesure.

Pour prendre un exemple moins simple on peut prendre l’espace des cercles. Là on peut les paramétrer d’au moins deux manières :

  • Par centre et rayon.
  • Par trois points non colinéaires et en quotientant.

Ces deux paramétrisations donnent sûrement des mesures différentes mais la même structure lisse. Et ça me semble assez naturel de vouloir munir l’espace des cercles d’une structure lisse, non ? Ça donne une notion d’ensemble négligeable sans avoir besoin de mesure, par exemple l’ensemble des cercles tangents à une droite fixée.

blo yhg

Je vois mal comment 2 façons de représenter un ensemble peuvent aboutir à 2 résultats différents. Ici, avec les 2 représentations, on a l’impression que dans un cas, on est dans R3, et dans l’autre cas, dans R6. D’où l’idée d’un résultat différent.

Mais c’est parce que le 2ème ensemble est trompeur. Pour un cercle donné, si tu choisis de le représenter par 3 points, tu as une infinité de représentations ; je dirais même une triple infinité. Alors que centre+rayon, il n’y a qu’une représentation.

Ça serait rigolo d’essayer de trouver une preuve de ça au sens de la théorie de la mesure. Mais il faut choisir un espace mesuré, et ça demande d’y méditer un peu… Mais je suis sûr que ça peut être intéressant

Une fonction de tirage de trois points ? Genre $f: [0,1]\to \mathbf (R^2)^3$

Holosmos

Oui, je pense que c’est l’idée qui a le plus de chances d’aboutir. Mais j’y ai un peu réfléchi, et en fait je pense qu’il faut se placer dans $(\mathbb R^2)^3$ et regarder l’ensemble des éléments qui ont une position particulière (par exemple, les angles orientés sont droits). On munit cet espace de la tribu de Borel (ou de Lebesgue, mais ici Borel devrait suffire) et de la mesure de Lebesgue. Il ne doit pas être très difficile de montrer que l’ensemble des triplet de points formant un angle droit est mesurable. Mais quant à calculer sa mesure, je n’en ai strictement aucune idée. :D

Je n’arrive pas non plus à voir le lien avec les variétés, et j’ai l’impression que précisément le problème est à l’intersection entre de la topologie et de la mesure… Ce qui incite à considérer un espace mesuré dont la tribu et la mesure sont engendrés par la topologie. D’où l’idée d’utiliser la tribu borélienne et la mesure de Borel (ou de Lebesgue).

Il ne doit pas être très difficile de montrer que l’ensemble des triplet de points formant un angle droit est mesurable.

Ok et ça me donne l’idée de pourquoi on passerait par une variété lisse.

Si on imagine une variété lisse de l’ensemble des triangles, le sous-ensemble des triangles rectangles est certainement une sous-variété de codimension au moins une. À partir de là, c’est facile de montrer que c’est de mesure nulle.

Bon voilà, j’ai tenté une formalisation et une résolution. Je me permet un double post (parce que je le peux).


On va commencer par définir la nature d’un triangle : c’est un triplet d’éléments de $\mathbf R^2$. Alors, bien-sûr, comme d’habitude, c’est plus sympa d’avoir des objets compacts. Donc je vais directement passer à une autre formalisation :

Un triangle, c’est un élément de $(\mathbf RP^2)^3$. ($\mathbf RP^2$ c’est le plan projectif réel, on le munit des coordonnées homogènes $[p_0:p_1:p_2]$)

Ce choix me permet d’obtenir naturellement une compacité (c’est toujours utile en topologie). On est pas si loin du cas originel : on a rajouté des triangles à ceux pensés initialement mais retiré aucun.

Cet ensemble, je l’appelle $M$. C’est évidemment une variété (parce que c’est $(\mathbf RP^2)^3$) mais ce n’est pas tout à fait celle que je veux étudier. En effet, il y a des symétries : quelque soit l’ordre dans lequel je prends les points du triangle, je veux obtenir le même.

Donc je considère le quotient de $M$ par l’action de $\sigma$ qui permute les trois coordonnées du produit. Comme son action est propre et discrète, le quotient $M/\sigma$ est encore une variété lisse (et compacte), que j’appelle $T$.

Maintenant, les propriétés spéciales des triangles (rectangle, isocèle, blablabla) sont interprétables en termes de fonctions à valeurs dans $\mathbf R$. (Exercice, si vous êtes sceptiques, mais c’est normalement assez clair.)

Ces fonctions, on peut les prendre comme submersions. De sorte que maintenant, les zéros de ces fonctions désignent les triangles spéciaux et sont de codimension au moins une.

Mais si $X$ est une sous-variété de $N$ de codimension une, elle est de mesure nulle. Par exemple, par compacité, on peut recouvrir $X$ d’un nombre fini de boules dont le diamètre est laissé libre.

Banni

Canonique ça a un sens plutôt bien établit. Ça signifie que ça ne dépend pas d’un choix conventionnel/arbitraire et que c’est une façon naturelle de procéder.

Ok donc ce n’est pas "unique" que ça veut dire. Si on prend l’espace des lignes dans $ℝ^2$, j’imagine que tu comprends de quoi je parle si je dis « la structure lisse canonique dessus ». Pour les triangles c’est pareil, je ne vois qu’une manière de les munir d’une structure de variété lisse à moins de déformer la première avec un homéomorphisme qui n’est pas un difféomorphisme.

D’après qui ? À ma connaissance on en sait trop peu.

Pas d’après moi en tout cas, je ne connais rien au sujet. Mais je lis qu’il n’y a de structure exotique sur $ℝ^n$ que pour $n=4$, ça se trouve par exemple sur wikipédia ou sur le ncatlab (avec une référence à un papier).

D’ailleurs je comprends pas comment tu définis un ensemble négligeable sans passer par une mesure.

De manière générale on peut augmenter une tribu d’un $𝜎$-idéal d’ensembles négligeables (clos par union dénombrable et prise de sous-partie). On trouve ici le nom d’« espace mesurable localisable » (lorsqu’un axiome est satisfait).

Pour une variété lisse (ou même juste $C^1$), une partie de la variété est négligeable si elle l’est sur chaque carte locale. Comme les parties négligeables de $ℝ^n$ sont invariantes par difféomorphismes, ça fonctionne bien. C’est cette notion qui est utilisée dans le théorème de Sard par exemple.


Je vois mal comment 2 façons de représenter un ensemble peuvent aboutir à 2 résultats différents. Ici, avec les 2 représentations, on a l’impression que dans un cas, on est dans R3, et dans l’autre cas, dans R6. D’où l’idée d’un résultat différent.

Mais c’est parce que le 2ème ensemble est trompeur. Pour un cercle donné, si tu choisis de le représenter par 3 points, tu as une infinité de représentations ; je dirais même une triple infinité. Alors que centre+rayon, il n’y a qu’une représentation.

elegance

Oui c’est pour ça que j’ai dit « en quotientant » pour la deuxième manière de faire. Et ce quotient de variété lisse est la même variété lisse que la première manière de faire. Ça pourrait très bien ne pas être le cas. Ça vient du fait que quand on a trois points non-colinéaires $A$, $B$ et $C$, le centre du cercle défini est une fonction de ces trois points qui est différentiable une infinité de fois (lisse). Pareil pour le rayon du coup.

Pour moi, un triangle est défini par ses 3 angles a,b,c. Et on peut classer les 3 angles : a <=b <=c. Et connaissant a et b, c est redondant, puisque forcément a+b+c=180.

Donc l’ensemble des triangles, c’est l’ensemble des couples (a,b), avec 0<=a<=60 et a<=b<=180-a-b.

Connaissant les 2 angles les plus petits, on peut construire tous les triangles possibles (par rotation/translation/homotétie/symétrie).

Et parmi cet ensemble, l’ensemble des triangles rectangles , c’est le segment de droite d’équation a+b = 90. Et l’ensemble des triangles isocèles, c’est la réunion des 2 segments d’équation a=b ou b=180-a-b.

Et l’ensemble des triangles équilatéraux, c’est le point à l’intersection de ces 2 segments, c’est le point (60,60).

Ces 3 ensembles sont de mesure nulle par rapport à l’ensemble des triangles.

Pour moi, un triangle est défini par ses 3 angles a,b,c. Et on peut classer les 3 angles : a <=b <=c. Et connaissant a et b, c est redondant, puisque forcément a+b+c=180.

elegance

Je suis un peu sceptique, j’ai l’impression que donner trois angles ayant la propriété demandée ne définit pas un triangle de manière unique (à cause par exemple des triangles semblables).

Holosmos, j’aime bien ta preuve. En particulier, je trouve assez élégante la manière dont tu de débarrasses des symétries. Et je suis toujours impressionné par ta capacité à recaser de la géométrie différentielle partout. :-° Sinon, je n’ai pas trop compris à quel endroit la compacité intervient ici. J’ai l’impression qu’on peut rester dans l’espace $\mathbb R^6$ usuel, non ?

On a des classes d’équivalences : 2 triangles qui ont exactement les mêmes dimensions et la même orientation sont identiques à une translation près. ex : ((0,0)(1,0)(0,1)) et ((4,0)(5,0)(4,1)) Etudier tous les triangles, ou étudier les triangles qui s’appuient sur le point (0,0), c’est similaire.

Idem, les rotations, et les homothéties définissent des classes d’équivalence.

Banni

D’après la définition que j’ai de « mesure nulle », la compacité ne change rien : il faut que la mesure soit nulle dans n’importe quelle carte locale, indépendamment du fait qu’on puisse recouvrir la variété par un nombre dénombrable/fini de cartes locales (de toute manière c’est toujours le cas si on prend la définition normale). Comme une sous-variété d’un espace euclidien de dimension strictement plus grande est de mesure nulle, il en va de même pour une sous-variété d’une variété quelconque.

Ou alors tu voulais recouvrir la sous-variété par des boules de rayon arbitrairement petit afin de majorer d’une certaine manière la mesure de leur union. Mais déjà on n’a pas de notion de mesure autre que « mesure nulle/non nulle », et puis leur nombre serait fini mais non borné… donc ça ne doit pas être ça qu’il fallait comprendre.

du fait qu’on puisse recouvrir la variété par un nombre dénombrable/fini de cartes locales (de toute manière c’est toujours le cas si on prend la définition normale)

C’est pour ce genre de subtilités que j’ai pris la compacité. Pour peu que quelqu’un ait des définitions différentes, ça peut jouer. Et j’ai un peu la flemme de réécrire tous les axiomes d’une variété, alors que quelque soit ta notion de variété, une variété compacte fait le boulot.

Après c’est de l’ordre de la pratique. Ce sont des réflexes qu’on prend rapidement quand on fait de la topologie. Au pire ça change rien, au mieux ça simplifie. (Donc le choix est vite fait)

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