Si les équations du premier degré sont assez simples à résoudre, c’est une autre histoire avec les équations du second degré. Rappelez-vous, il s’agit des équations faisant intervenir les quatre opérations de base et des carrés dont nous avons vu dans la première partie de ce cours qu’elles peuvent se réduire à l’expression suivante :
Ce qui nous embête dans ces équations, c’est que l’inconnue est présente deux fois. Impossible donc de l’isoler simplement comme nous le faisions jusque ici. Il va donc nous falloir faire preuve d’ingéniosité.
La forme canonique
La forme standard sous laquelle on trouve la plupart du temps une équation du second degré est la suivante :
C’est ce que l’on appelle la forme développée de l’équation. Ce nom vient du fait que tout est développé : il n’y a pas de parenthèses ou de facteurs à distribuer dans cette expression. La forme développée est notre point de départ. Le but du jeu est maintenant de tourner et retourner cette équation dans tous les sens pour en faire sortir ses solutions. Tous les coups sont permis !
La première simplification que l’on fait la plupart du temps, c’est une division par le nombre .
Ce qui après simplification donne ceci :
Notez que le nombre est différent de 0 sinon nous n’aurions pas de et l’équation serait simplement du premier degré. Nous avons donc bien le droit de diviser.
Pour prendre un exemple concret, l’équation devient après avoir diviser par 2. Cette opération permet de n’avoir plus que deux paramètres à contrôler dans l’équation : à la place des trois nombres , et , nous n’avons plus que et .
Bon, cette division par était un tour de chauffe. Notre équation est un peu simplifiée, mais le plus gros problème demeure : il y a toujours deux occurrences de l’inconnue .
Les identités remarquables à la rescousse
Pour faire disparaître l’un des de notre équation, nous allons user d’une arme redoutable : les identités remarquables. Ce nom vous dit-il quelque chose ? Les identités remarquables sont les égalités suivantes qui sont vraies pour n’importe quelle paire de nombres et :
- ;
- ;
- .
Ce qui va nous intéresser dans les identités remarquables, c’est leur capacité à faire apparaître et disparaître des termes. Regarder la première par exemple : dans le terme de gauche, le n’apparaît qu’une fois tandis que dans le terme de droite il s’y trouve deux fois. Mieux : il se trouve une fois au carré et une fois avec une simple multiplication par . Si l’on remplace par dans cette première identité on obtient :
Vous ne trouvez pas que le terme de droite ressemble étrangement à notre équation du second degré ?
Pour qu’elle lui ressemble encore plus, il faudrait que les coefficients de soient égaux, autrement dit, il faudrait que soit égal à . Rien de plus simple, il suffit de choisir égal à , notre identité remarquable devient alors :
On brûle ! Cette fois, on sent que nous sommes tout proches, pourtant le dernier terme nous embête. Dans notre équation, on a :
tandis que l’identité remarquable nous donne :
Attention, ce n’est pas le moment de nous emmêler les pinceaux entre notre équation et notre identité remarquable. Il faut bien faire la différence. Une identité remarquable est une égalité qui est toujours vraie, les lettres , , et peuvent être n’importe quels nombre l’égalité sera juste. Pour l’équation en revanche, tous les ne marchent pas : le but du jeu est précisément de trouver les valeurs de pour lesquelles l’égalité est vraie.
Alors que fait-on de notre identité et de notre équation ? C’est le moment d’avoir une autre idée astucieuse. Eh bien puisque nous avons besoin d’avoir le terme pour pouvoir utiliser notre identité, nous allons l’ajouter à notre équation. Seulement comme il faut que l’équation reste la même, nous allons aussi le soustraire pour compenser. En clair, on fait ça :
Et voilà le travail, nous pouvons maintenant utiliser l’identité remarquable avec les trois premiers termes de l’équation et on obtient :
Et c’est gagné ! Enfin quand je dis que c’est gagné, bien sûr nous n’avons pas encore les solutions, mais à partir de maintenant, nous savons faire : il n’y a plus qu’un . Or quand il n’y a plus qu’un x, il suffit comme nous l’avons appris dans la première partie du cours de revenir en arrière pour isoler peu à peu notre inconnue. Bref, nous n’avons pas encore fini, mais nous savons d’ores et déjà que nous allons y arriver !
La fin de la résolution
Pour simplifier commençons par réduire au même dénominateur les deux derniers termes pour les ajouter :
L’équation devient alors :
Oui, je l’encadre ! Mesdames, messieurs, je vous présente la forme canonique de notre équation du second degré. D’une manière générale, la forme canonique d’une équation du second degré est une écriture de du type
Et si vous avez bonne mémoire, vous devez vous souvenir que c’est exactement ce genre d’équation que nous avions trouvées lorsque nous cherchions des équations ayant deux solutions dans le chapitre Inventons des équations.
Nous verrons à la fin de ce chapitre que la forme canonique peut nous révéler beaucoup de choses sur l’équation et en particulier sur sa représentation graphique. Mais pour l’instant notre but est de trouver les solutions, donc nous n’avons pas une minute à perdre, isolons notre .
Pour cela, commençons par passer le terme constant à droite :
Il est maintenant temps de prendre la racine carrée. Oui mais voilà, pour prendre la racine carrée, il faut un nombre positif, or à bien y regarder, rien ne nous indique que le terme de droite soit positif : le dénominateur est bien positif, mais le numérateur peut avoir n’importe quel signe.
L’équation va donner un résultat différent selon le signe de . Cette quantité joue donc un rôle important dans la résolution de l’équation au point qu’on lui a donné un nom : le discriminant. On le note :
L’équation se réécrit alors de la façon suivante :
Nous devons maintenant distinguer les cas selon le signe du discriminant :
- si , alors le terme de gauche est positif et celui de droite strictement négatif. Ils ne pourront donc jamais être égaux et l’équation n’a pas de solution.
- si , alors on peut prendre la racine carrée et poursuivre notre résolution.
Continuons donc dans le cas où . En remontant le carré, on fait apparaître deux solutions opposées :
Et en faisant passer le de l’autre côté, on obtient les deux solutions suivantes :
Et voilà le travail ! Notre équation est résolue. Notez qu’à cette dernière étape j’ai mis deux petits indices à notre inconnue pour pouvoir distinguer les deux solutions : et .
Il faut également remarquer un cas particulier : si , alors les deux solutions que nous venons de trouver sont égales. Il n’y a donc réellement qu’une seule solution.
Avec des schémas
Si vous avez encore un peu de mal avec les résolutions algébriques, voici en cadeau le schéma de l’équation en partant de la forme canonique :
Ce schéma se résout de la façon suivante, qui correspond étape par étape à tout ce que nous avons fait ci-dessus.
Comparez ce dessin à la méthode algébrique : vous verrez que c’est exactement le même raisonnement, mais juste présenté différemment.
Récapitulons
Ouf ! Nous venons de faire le plus gros du travail sur les équations du second degré. Cette section était assez longue et mérite un petit tableau récapitulatif.
Dans l’équation , on note le discriminant et on a alors trois cas possibles :
|
|
|
Pas de solutions | Une solution | Deux solutions |
| et |
La forme factorisée
Nous avons vu que la forme canonique d’une équation du second degré permet de la résoudre sans problème quand c’est possible. Il existe cependant une deuxième forme également bien utile et qui offre un point de vue différent sur l’équation : la forme factorisée.
Pour la trouver, il nous faut repartir de la forme canonique :
Cette fois, c’est l’identité remarquable que nous allons utiliser. En effet, dans le cas où le discriminant est positif, le dernier terme de l’équation peut se réécrire sous la forme d’un carré :
Nous pouvons alors appliquer notre identité pour trouver ceci :
Soit après réduction au même dénominateur
C’est cette forme que l’on nomme la forme factorisée. À première vue, elle peut sembler moins pratique que la forme canonique : après nous être donnés tant de mal à faire en sorte que l’inconnue n’apparaissent qu’une seule fois, voilà qu’on en fait réapparaître une deuxième !
Mais à bien y regarder, cette forme nous permet d’utiliser une règle que nous avons déjà vue dans le chapitre Inventons des équations :
Quand un produit de deux termes est égal à 0, alors, c’est que l’un des deux est égal à 0.
Or là, nous avons écrit notre équation du second degré comme le produit de deux équations du premier degré ! C’est donc que l’une des deux est vérifiée :
Et les équations du premier degré, pas de problème, on sait faire ! On obtient bien les mêmes solutions que nous avons trouvées dans la section précédente.
Pour les équations du second degré, la forme canonique et la forme factorisée sont aussi utiles l’une que l’autre, car elles permettent toutes deux de retrouver les solutions. Mais d’un point de vue plus général, la forme factorisée est plus puissante. À partir du degré 3, il n’est plus possible de transformer l’équation de façon à ce que l’inconnue n’apparaisse qu’une seule fois. En revanche, pour tous les degrés, comme nous le verrons dans le prochain chapitre, il existe une factorisation de l’équation en petites équations de degré inférieur.
Quelques énigmes
Il est temps de passer à la pratique : voici quelques énigmes qui se résolvent grâce à des équations du second degré. Essayez de chercher les réponses par vous-même avant de regarder les solutions !
Retour à Babylone
Vous souvenez-vous, dans le premier chapitre de ce cours, nous avions vu que les babyloniens étudiaient aussi les équations du second degré et nous avions donné l’exemple suivant présent sur la célèbre tablette BM13901 :
J’ai additionné la surface et le côté de mon carré : 0,75.
Dans notre langage algébrique, l’équation posée est la suivante :
Maintenant à vous de la résoudre !
Commençons par passer tous les termes à gauche pour obtenir :
On a donc , et on peut par conséquent calculer le discriminant :
Ce nombre est positif, il y a donc deux solutions :
Les deux solutions sont donc -1,5 et 0,5. Rappelez-vous que dans la tablette BM13901, les babyloniens qui ne connaissaient pas les nombres négatifs n’avaient trouvé que 0,5. Nous sommes donc plus malins que les babyloniens.
Le nombre d’or
Le nombre d’or est un nombre positif noté dont le carré est égal à lui-même plus 1. Mais combien vaut-il ?
Le nombre d’or est un nombre très important en mathématiques qui intervient dans de nombreux contextes différents. C’est par exemple le rapport de la diagonale et du côté d’un pentagone régulier. C’est aussi le nombre vers lequel tend le rapport de deux termes consécutifs de la suite de Fibonacci.
L’équation du nombre d’or est la suivante :
Ou en passant tout du même côté :
On a donc et , ce qui donne . Ainsi, les deux solutions sont :
Le nombre d’or est un nombre positif, c’est donc la deuxième solution :
Représentation graphique
Déplacer une courbe
Avant d’attaquer la représentation des équations du second degré, commençons par une propriété générale de la représentation des fonctions. Supposons que l’on ait une fonction dont le graphe est le suivant :
Alors, si on ajoute ou soustrait une constante à , cela revient à translater son graphe verticalement. Voici par exemple, le graphe de :
Si en revanche, on ajoute ou soustrait une constante à x avant de lui appliquer , alors on translate le graphe horizontalement. Voici le graphe de :
Évidemment, il est possible de combiner les deux effets : la représentation graphique de la fonction correspond à celle de , mais décalée de vers la droite et de vers le haut.
Maintenant que nous savons ça, nous allons pouvoir l’appliquer aux fonctions du second degré.
La parabole
La fonction a le graphe suivant :
Cette figure se nomme une parabole. Et si l’on veut translater cette parabole horizontalement et verticalement, il faut regarder les fonctions de la forme :
Mais dites-moi, ça ne vous rappelle rien ça ?
Mais si bien sûr : la forme canonique ! Nous avons vu au début de ce chapitre que la forme canonique d’une équation du second degré s’écrit de la façon suivante :
Sa représentation graphique correspond donc à celle de la parabole mais décalée de vers la gauche et de vers le bas. Voici deux exemples :
On retrouve donc bien les résultats obtenus algébriquement au début du chapitre :
- Si , la parabole est décalée vers le haut. Elle ne croise donc pas l’axe des abscisses et il n’y a pas de solution.
- Si , la parabole reste au même niveau. Il y a donc une seule solution.
- Si , la parabole est décalée vers le bas. Elle croise donc l’axe des abscisses en deux points et il y a deux solutions. Plus est grand, plus la parabole est enfoncée vers le bas et plus les deux solutions sont éloignées l’une de l’autre.
Le décalage de donne lui la position horizontale de la parabole : la pointe de la parabole se trouve à l’abscisse . Vu que la parabole est symétrique, cela signifie que se trouve juste au milieu des deux solutions : c’est leur moyenne.