C'est aussi s'arracher les cheveux de voir l'inconsistence des raisonnements de juges, d'avocats, de journalistes, de politiciens, et j'en passe, voire même l'ancrage de ces absurdités de l'intelligence au sein même de nos systèmes sociétaux (et l'inertie quasi-nulle par rapport aux sciences vers l'amélioration et l'objectivisation, comme freinée par le poids de l'Histoire - mais ce n'est pas à toi que je vais faire la leçon d'Histoire). En fait tous les métiers qui ont oublié de passer par la case mathématique et plus précisément « méthode scientifique », dont les mathématiques ou les sciences ne sont qu'une instance particulière, souffrent d'un manque flagrant de rigueur intellectuel - ou en tout cas peuvent en souffrir, ne généralisons absolument pas -. En fait c'est plus la méthode scientifique que je défends que les mathématiques en elles même, mais je constate juste que les mathématiques forcent l'utilisation de celle-ci lors des études alors que l'on peut être diplomé d'un tas d'autres domaines par des ruses intellectuelles qui sont regrettables.
Seriously ?
Je ne sais pas si tes connaissances sont compétents dans leur(s) domaine(s) mais si tu penses - sincèrement - que des professions juridiques, économiques ou d'autres branches de la science "non-liée" aux mathématiques manquent de rigueur scientifique parce que l'ampleur des mathématiques en est "réduite" alors je suis désolé de te dire, en toute cordialité, que tu ne sais absolument pas de quoi tu parles et je m'en sens presque insulté.
Toutes les routes mènent à Rome, les mathématiques mènent effectivement à une rigueur en forçant l'utilisation de ta matière grise d'une certaine manière. Mais c'est loin d'être la seule. Et tu te trompes également si tu penses que parce que Mme Michu suit une filière juridique ses capacités de rigueur en sont diminuées ou altérées. L'une des premières règles pour effectuer un travail rigoureux, ce n'est pas l'outil mathématique. C'est l'observation d'une situation donnée, le raisonnement intervient dans la phase suivante, celle de l'analyse. Et c'est quelque chose que l'on retrouve dans toutes les professions (notamment en biologie ou en physique). Il est de même très faux de croire que les mathématiques et leurs principes sont absents des autres cursus. J'ai fait du droit, j'ai eu droit à ma dose de mathématique, de rigueur dans l'analyse et la modélisation de données, des cours et formation en criminologie et sciences forensiques (avec le lot de biologie et de physique qui vont avec). Les mathématiques sont un outil utilisé dans tous les domaines. Mais ce n'est qu'un outil parmi tant d'autres : la mémoire et sa capacité à assimiler des informations pour en formuler des propositions,… tes sens mêmes entrent en compte. Je ne sais pas où tu sors que les raisonnements de juristes ou d'autres professions sont inconsistants. Je n'en connais aucun qui ne soit en mesure d'analyser correctement une situation donnée aux regards de la loi, de la psychologie des personnes concernées, de leurs antécédents, etc. etc.
Un raisonnement, qu'il s'agisse de maths, de droit, de bio, de construction nécessite qu'une seule chose : des données. Ce n'est uniquement qu'à partir de ces données que tu vas utiliser les outils analytiques dont tu disposes : statistiques, physiologie, aspect légal, criminologique, etc. Peut-être que les cas que tu as observés sont des mecs qui - en un lieu et un temps donné - n'avaient pu formulé leurs idées en bonne et due forme (oui, c'est ce que l'on nomme les lacunes du système), ce qui est vite arrivé surtout dans le milieu juridique où tu ne peux pas traiter tous les dossiers comme ils le méritent. Tu as beaucoup d'avocats (bon, moi j'ai la chance d'en connaître aucun de ce type) qui expédient vite fait leurs dossiers parce qu'ils en ont 15 autres en attente, que le BAJ connait des retards dans les distributions des points (et donc du gagne pain de l'avocat). Ce ne sont pas des lacunes intellectuelles (ils ne sont pas stupides parce qu'il n'ont pas un BAC+5 en mathématiques !) mais factuelles. Ils n'ont pas le temps (puisque de toute façon, si le mec n'a pas les moyens, le BAJ va encore trainer des pieds et payer en retard les prestations de l'avocat), alors ils passent le moins de temps possible sur le dossier ou font faire le travail à un stagiaire lui aussi surchargé de boulot par son maître de stage qui lui donne les dossiers par piles de 10 et dont le maître de stage ne se pointera qu'aux audiences faire sa plaidoirie sans jamais avoir eu le ou la cliente une seule fois devant lui avant ladite audience (et encore, si elle se présente). Certains avocats bâclent leurs conclusions par laxisme et non par un quelconque manque intellectuel et à moins que la personne risque gros ou que les faits relèvent d'une certaine gravité, ils s'en contrefichent.
Crois-moi, ce genre d'avocats (ou de magistrats) vont pas se faire chier pour le 8ème larcin de la journée. Ils vont lui donner une peine de prison (genre 3 mois, un à 3 an(s) avec sursis) ou accepteront la prestation d'un travail d'intérêt général (45h à 300h max) qui ne seront pas prestés directement par manque de places (t'en as qui attendent 2 à 3 ans avant de prester ces heures, s'ils ne commettent pas de nouveaux méfaits entre temps)… jusqu'à son prochain passage devant les tribunaux. Ça, c'est la réalité du terrain.
And for the record, je connais des juristes qui sont devenus ingénieurs (dont un, en biochimie), physiciens, mathématiciens, infirmiers (et qu'on ne me dise pas que ces études sont "relax") avec succès. J'ai horreur d'entendre dire que, parfois, certaines personnes n'ont "pas les capacités pour devenir X". C'est d'une stupidité sans nom. Tout le monde peut et sait raisonner, il suffit de lui en donner les outils. Qu'il s'agisse de rigueur mathématique ou de connaissances en physique ou en chimie.
Gosh, j'utilise des modèles mathématiques au quotidien pour étudier les réseaux de criminalité ou de délinquance, j'utilises des stats, de la probabilité, j'utilises des outils d'analyse criminologique, d'Histoire, de toxicologie, de physiologie, de criminalistique, de linguistique, de classification d'informations, d'informatique (évidemment). Je ne saurais te citer une liste précise d'outils, de concepts, de modèles qu'utilise un juriste dans son travail quotidien tant ils peuvent être nombreux et que cela dépende des cas. J'ai une amie juriste qui aborde au quotidien des domaines comme la biotechnologie ou les nanomatériaux et pour faire son boulot proprement, il est obligatoire qu'elle connaisse relativement bien le sujet et puisse dialoguer avec les interlocuteurs.
Aujourd'hui, la profession juridique est à la croisée des mondes (on fréquente des gens avec des profils extrêmement variés, des mathématiciens aux architectes en passant par les médecins, des historiens ou les physiciens spécialisés dans le nucléaire), ce qui fait que tu ne peux absolument pas "rester dans ta bulle" parce que le droit touche à tout, même l'espace. De la même façon que les mathématiques sont partout autour de nous. Et je suis très loin d'être le seul en Belgique ou dans le monde à utiliser ces outils au quotidien.
Pour information, ce sont mes études (en informatique, puis de droit) qui me permettent aujourd'hui de valider des tutos ou d'aborder des sujets dans des domaines comme le machine learning, les algos génétiques, la linguistique computationnelle, l'astrophysique, de la biologie, et une bonne partie de ce que l'on publié ici. Mes études, mes expériences font que je n'ai absolument aucune crainte d'aborder des sujets qui sortent de ma "zone de confort" parce que j'ai acquis une méthodologie d'observation, de recherche d'informations et d'analyse complète (et efficace, AMHA) et la capacité de formuler une analyse, un jugement exhaustif et des conseils pour améliorer le travail produit.
Bref, tout cela pour dire que c'est extrêmement réducteur. Qu'un mec fasse du droit, du journalisme, des maths, peu importe. De mes contacts et connaissances, ils apprennent tous une méthodologie. Après, tu en as toujours qui l'appliqueront et d'autres non, par manque de temps, de volonté ou que sais-je encore. Mais je n'ai jamais connu quelqu'un qui, après de longues études, soit toujours incapable de se servir d'outils pour en faire une analyse et en tenir un raisonnement. Tout ce que l'être humain a besoin, ce sont des données.
On ne naît pas intelligent, on le devient. Et quand on croit l'être, on cesse de le devenir.
This ends my 2 cents. Have a good night everyone. Love. <3