Le débat est intéressant et j'aimerais y apporter mon grain de sel.
Déjà, je suis surpris que personne n'est cité Franck Lepage dans ce débat. Et j'invite tout ceux qui sont intéressés par le débat à aller voir sa conférence gesticulée sur l'éducation : L'éducation . Certes, c'est gauchiste , mais il y a une critique du système qui est vraiment fondée.
Une remarque de sa part que j'aime beaucoup c'est lorsqu'il parle de l'égalité des chances et qu'il fait l'analogie avec la fable le lièvre et la tortue : la ligne de départ est la même.
C'est à dire que certes, on commence tous l'école au même âge, mais les facteurs sociaux font qu'un élève aura plus ou moins de mal à avancer dans le système scolaire.
L'exemple qu'il donne est le BAC. Je n'ai pas de sources, mais je pense que ça doit se trouver : pour 30% de fils d'ouvriers, seulement 1% ont accès aux études supérieurs.
Du coup, à quoi sert la sélection aujourd'hui ? Est-ce vraiment pour se retrouver avec moins de monde à la fac, ou bien c'est plutôt une manière de faire un tri dans la société ?
Je parle de ce facteur social pour rebondir sur le fait qu'à mon avis, oui le bac ne certifie plus l'acquis d'un niveau, c'est plus une barrière sociale.
Si on parle de la fac, le deuxième problème concerne les classes prépas. En sciences, la plupart des bons et très bons étudiants vont partir en classe préparatoire. Si bien que la fac se retrouve plutôt avec les "moins bons". Je me souviens qu'en L1 (maths-info), j'étais avec des gens dont la majorité n'avait pas eu la moyenne en maths au bac. C'est assez dérangeant car comme le fait remarquer l'article de Gabbro, les profs doivent toujours revoir à la baisse leurs exigences. J'ai le souvenir en L2 maths-info toujours, qu'une majorité de ma promo était incapable de discerner si une fonction comme $cos$ ou $sin$ était injective/surjective ou non. En L3 info, une majorité de ma promo ne savait plus comment manipuler des pointeurs.
Donc jusqu'ici je rejoins ce qui a été dit, oui il y a un problème de niveau. Mais quelles solutions mettre en place ?
La sélection, telle qu'elle est appliquée à la fac est à mon avis inutile. D'expérience, on peut aller en L3 d'info sans faire beaucoup d'efforts et en comptant sur les rattrapages par exemple. Pour moi les gens qui étaient le plus gênés étaient ceux qui devaient travailler à côté pour se payer leur loyer et de quoi vivre (oh encore un facteur sociale) car ils n'avait juste pas le temps de travailler en dehors des cours.
Un second problème c'est l'orientation. Pour avoir discuter avec différentes personnes, beaucoup se demandaient ce qu'il faisait là. En leur avait dit de faire Bac S, car c'est apparemment un gage de réussite ensuite. Mais beaucoup des gens que j'ai pu côtoyer à la fac ne sont pas arrivés là par plaisir, mais presque par obligation. Si bien qu'à le fin de la L1, ces gens là ont du se réorienter (s'ils le pouvaient). Mais le système ne laisse pas un étudiant se réorienter si facilement. On devrait faire les études qui nous plaisent, mais est-ce si facile ?
Quand j'ai voulu faire un double cursus maths-info à la fac, on m'a tout simplement dit non (ou presque). Le système n'était pas vraiment prévu pour ça. J'avais alors demandé si je pouvais suivre des cours en "auditeur libre", et là pareil : refus (faut comprendre, pour les personnes de la scolarité, c'est trop difficile à gérer, surtout niveau emploi du temps…).
Je garde un souvenir de la fac comme un système "fermé". En informatique, je n'avais pas le choix des cours que je pouvais suivre. Certes, il y a un tronc commun à avoir, mais si on veut faire de l'informatique théorique, il y a des cours qui ne nous intéressent pas. Pourtant j'étais obligé de les suivre car la majorité des étudiants de L3 finiront développeurs dans une SSII et c'est tout.
A l'opposé, pour des gens qui souhaitaient faire du développement, ils se retrouvaient en L3 avec des cours théoriques qui ne les intéressaient pas du tout.
Donc mon deuxième point c'est que forcer les étudiants à suivre des cours, en général ce n'est pas bon et ça conduit souvent à des échecs. Alors toutes les facs ne font pas ça, mais c'est une impression que j'ai partagé avec plusieurs amis venant de milieux différents.
La conclusion de tout ça à mon avis, c'est qu'il faudrait arrêter de croire que la sélection va résoudre le problème. On aura toujours des gens pour passer les étapes et à mon avis, ce sera plus lié à des facteurs sociaux. A l'opposé, il faudrait peut-être se préoccuper de pourquoi on fait des études supérieurs ? Peut-être qu'il faudrait plutôt donner des choix aux étudiants. Laisser à l'étudiant la possibilité de choisir ses cours, de choisir ce qu'il a envie de faire. Ce n'est pas grave s'il se trompe, l'année prochaine il choisira d'autres cours. Qu'il ne soit pas restreint à faire 60 ECTS pile poil dans l'année dans un cursus particulier. Avoir la liberté de choisir ses cours, c'est beaucoup plus motivant.